WlC
«ii
ff>
M
'*-;.>;
*•
,^0}
''tiht
SI» .JSS.
\^>- ! V
REVUE HISPANIQUE
MAÇON, l'ROTAT lUÉKI'.S, IMPRIMEURS.
REVUE
HISPANIQUE
Recueil consacre à V étude des langues, des littêraiures et de l'histoire
des pays castillans, catalans et portugais
PUBLIÉ PAR
R. Foulché-Delbosc
PREMIÈRE ANNÉE
1894
PARIS
ALPHONSE PICARD ET FILS, ÉDITEURS
Libraires des Archives nationales et de la Société de l'Ecole des Chartes
82, Rue Bonaparte, 82
1894
Ko'
6.1
LES LANGUES LITTÉRAIRES
DE L'ESPAGNE ET DU PORTUGAL
Des trois langues littéraires qui, avec leurs dialectes et leurs
variétés, se partagent, à l'exclusion du basque, la Péninsule hispa-
nique depuis dix siècles, le castillan et le portugais sont devenus,
sous des formes spéciales, les idiomes officiels de deux nations
qui ont joué un grand rôle dans l'histoire au commencement de
l'âge moderne; la troisième, le catalan, subit le même sort que
sa sœur jumelle en France : elle a été sacrifiée à son émule, le cas-
tillan, comme celle-là le fut à la langue d'oïl; et quoique tou-
jours plus ou moins cultivée dans un but purement artistique,
elle a eu son expansion naturelle arrêtée, tandis que ses deux
rivales se répandaient au dehors, spécialement dans le Nouveau-
Monde, où elles ont toute chance de progresser et de se créer un
champ d'action de plus en plus vaste, le castillan surtout. Celui-
ci aurait de même éclipsé sans doute le portugais, si le Portugal
n'avait pas recouvré en 1640 l'indépendance politique qu'il avait
perdue en 1580 par son union avec l'Espagne.
Toutes trois issues du latin vulgaire, introduit dans la pénin-
sule occidentale de l'Europe par les légions et les colonies
romaines, et modifié au contact des différents langages qui y
étaient parlés, ces langues possèdent un fonds de vocabulaire
latin, en grande partie commun, accru par des subsides d'ori-
gines différentes, germanique, arabe et autres qui, pendant le
moyen âge, les ont enrichies également sans en altérer le type.
Revue hispanique. I
A. R. GOXÇALVES VIANNA
Plus tard, dès le XV e siècle surtout, le portugais et le castillan, par
leur épanchement indépendant, ont obtenu, chacun pour son
lexique, de nouvelles richesses empruntées aux langues des
peuples avec lesquels ils se sont trouvés en contact; et ce trésor
de nouveaux vocables, usités principalement dans les colonies du
Portugal et de l'Espagne, s'est lui aussi, dans une certaine mesure,
généralisé en grande partie dans leurs domaines européens.
Les influences littéraires et scientifiques, venues d'abord de la
Provence et de l'Italie, puis surtout, dès le XVIII e siècle, de la
France, influences toujours croissantes, mais qui, de nos jours,
ont pris un développement extraordinaire, aidées qu'elles ont été
de tout temps par les études classiques, ont rempli le vocabu-
laire de ces langues de nouveaux termes, et les ont poussées,
spécialement les deux premières, à en emprunter, plus ou moins
correctement, un grand nombre au latin et au grec. Une partie
considérable de ces vocables nouveaux sont devenus d'un usage
général, maintes fois au préjudice du génie des langues hispa-
niques. Leur grammaire même, la syntaxe surtout, mais parfois
aussi la morphologie, a été légèrement entamée, principalement
dans le langage littéraire et dans celui de la conversation des
hautes classes des villes, particulièrement des deux capitales
Madrid et Lisbonne. Cette altération et ce trouble n'ont heureu-
sement envahi que très légèrement jusqu'à ce jour le langage
populaire; il en est cependant menacé par l'agent puissant qu'est
la presse journalière dont la propagation s'est augmentée depuis
une vingtaine d'années au delà de toute prévision.
Des trois idiomes qui font le sujet de cet aperçu, le portugais
est celui qui, comme langue littéraire, a le plus souffert de ces
influences perturbatrices, et dans une proportion telle que, de nos
jours, il est peu d'écrivains qui n'aient subi l'effet de ce fade cosmo-
politisme et ne s'en fassent même une gloire, non seulement par
l'adoption inutile de mots français, mais aussi par l'emploi d'une
syntaxe et de tournures que le langage populaire méconnaît et
désavoue. On ne doit pas s'en étonner, puisque dans les hautes
LANGUES LITTERAIRES DE L ESPAGNE ET DU PORTUGAL 3
classes et les classes moyennes des principales villes portugaises
tout le monde connaît et parle plus ou moins bien le français,
la littérature française y étant plus répandue que la précieuse
littérature nationale, tant ancienne que moderne. Il faut cepen-
dant reconnaître que, depuisune dizaine d'années, surtout sur la
scène, il s'est heureusement produit une réaction salutaire contre
l'invasion outrée, sous la forme de mauvaises traductions, des
comédies et des drames français, et que le théâtre franchement
portugais y est maintenant le plus goûté. On doit avouer aussi
que les éditions des bons auteurs de ce siècle se multiplient
chaque jour, ce qui prouve que la littérature nationale est tou-
jours estimée.
Si de ces éléments du langage — lexique, morphologie, syn-
taxe — nous passons à celui dont l'action est toujours conco-
mitante et dominatrice, et qui, quoique inaperçue du plus grand
nombre, n'en est pas moins persistante et efficace, — la pho-
nologie, — nous voyons qu'elle a pris en castillan, en portugais
et en catalan des développements entièrement indépendants de
toute influence étrangère. Pour les deux premières de ces langues,
ce développement s'est produit de telle façon qu'elles sont deve-
nues de plus en plus distinctes, soit dans ce qu'elles ont perdu,
soit dans ce qu'elles ont acquis de nouveaux matériaux et de
nouvelles lois.
Je laisserai de côté pour le moment le catalan, dont l'évolu-
tion phonétique paraît être moins considérable si l'on en com-
pare les anciennes formes aux formes modernes, toutes dégui-
sées qu'elles soient par l'orthographe traditionnelle et avec
quelque peu d'évidence qu'elles se présentent à un étranger qui,
comme moi, n'ayant pas eu le loisir d'habiter le pays, ne peut,
faute de travaux sûrs dans ce domaine si important, se foire une
idée très nette de l'évolution qui a dû se produire là comme
ailleurs. Je remets donc à plus tard de dresser l'inventaire des
faits caractéristiques se rapportant à l'évolution phonétique du
catalan, et je vais jeter un coup d'œil plus attentif, quoique
A. R. GONÇALVES VIAXXA
rapide, sur la phonologie des deux idiomes officiels de la pénin-
sule.
Un fait est évident. Plus on descend dans le passé, plus le
matériel phonétique des deux langues se ressemble. Cette res-
semblance, toutefois, n'est pas si grande qu'elle puisse justifier
l'hypothèse d'une langue commune, d'une phase romane his-
pano-portugaise, dont les deux idiomes seraient issus. En effet,
la ressemblance que nous pouvons constater se retrouve surtout
dans le système des consonnes, celui des voyelles se présentant
à nous toujours distinct, aussi loin que nous puissions remonter.
L'orthographe, variable et individuelle avant l'introduction
des livres imprimés, était sous la plume des scribes du moyen
âge, on le reconnaît aujourd'hui, basée sur la représentation, plus
ou moins fidèle, des sons du langage parlé, troublée quelquefois,
il est vrai, par des velléités étymologiques dues à l'usage du latin
comme langue écrite. Vers la fin du siècle dernier, l'Académie
espagnole a très judicieusement proscrit l'étvmologie à outrance
comme régulatrice suprême de l'écriture, tandis que l'influence
de l'orthographe française et le désir de faire des savants et des
littérateurs une classe à part dans la société portugaise amenaient
la nouvelle Académie de Lisbonne à suivre la route opposée,
c'est-à-dire à perpétuer et à ériger en principe, en en tirant
toutes les conséquences extrêmes, une tradition pédantesque
de l'orthographe étvmologique qui s'était lentement propagée
dans la langue écrite, depuis l'introduction de l'imprimerie en
Portugal, et y avait exercé, aussi bien qu'en Espagne, une action
prépondérante dont l'Académie de Madrid sut se débarrasser à
temps. En effet, quoique, en Amérique, on travaille toujours à
l'amélioration de l'orthographe espagnole, et bien qu'elle soit
susceptible de quelques perfectionnements, on peut avec raison
la classer parmi celles qui sont réglées par la prononciation : à ce
point de vue elle est, parmi les langues romanes, à peine infé-
rieure à l'italienne, sur laquelle cependant elle a l'avantage d'un
tème plus parfait d'accentuation graphique. On doit seule-
LANGUES LITTÉRAIRES DE L'ESPAGNE ET DU PORTUGAL 5
ment regretter' que l'Académie espagnole n'ait pas, lors de là
réforme, cherché à mettre un peu plus d'accord l'alphabet espa-
gnol avec la valeur que certaines lettres de l'alphabet romain
avaient acquise dans les différents idiomes qui s'en servent, et
qu'elle n'ait pas eu plus d'égards pour l'histoire du développe-
ment de cet alphabet dans le castillan même. Cette circonstance
fâcheuse devient plus importante lorsqu'on prête à d'anciens
textes les traits de cette orthographe réformée, faussant ainsi
l'expression phonétique en même temps que l'écriture de ces
documents. Si l'Académie, par exemple, avait adopté le x de
préférence au ; pour la nouvelle gutturale qui s'était produite
en castillan, et le ç au lieu du ~ pour la linguale, elle ne se serait
pas mise en opposition avec l'orthographe portugaise, catalane
et française, et en même temps avec sou ancienne orthographe.
L'orthographe portugaise, de son côté, n'a fait récemment
qu'accroître ses difficultés, et l'on ne peut raisonnablement savoir
gré aux grands écrivains de la renaissance portugaise dans ce
siècle de ne s'être pas délivrés de cette incommode façon
d'écrire les mots les plus usuels du vocabulaire, lourdement
chargés de lettres inutiles et qui n'ont jamais eu aucune valeur
dans la langue prononcée. Ils n'ont même fait qu'augmenter le
mal, et quelques efforts isolés qui, courageusement, ont voulu
mettre un terme à ces orthographes déréglées et aristocratiques,
n'ont, hélas, pas eu de succès.
L'orthographe catalane aurait certainement gagné, elle aussi,
à se rapprocher un peu plus de celle de sa rivale, qu'elle n'a
imité, on peut le dire, qu'à son désavantage. C'est ainsi qu'elle
aurait dû bannir certaines particularités traditionnelles ou capri-
cieuses qui la mettent en désaccord avec l'orthographe acadé-
mique, telles que // pour / + / et / palatal, ny pour n, ch final
pour c (==k), tandis que l'explosive palatale affriquée, repré-
sentée en castillan par ch, y est figurée par tx, ig, etc., ou plutôt
n'a pas de représentation fixe. D'un autre côté, son imitation
servile d'autres traits de l'orthographe académique y nuit, parait-
A. R. GONÇALVES VIAXXA
il, à la représentation fidèle de certains accidents phonologiques,
tels que la prononciation double des explosives qui, à en croire
quelques grammairiens ', s'y est maintenue jusqu'à nos jours.
Le système de consonnes des trois langues littéraires de la
Péninsule hispanique est actuellement le suivant, en omettant
plusieurs phonèmes, qui ne se trouvent que dans quelques
dialectes :
Consonnes Sourdes Sonores Nasales
Pharyngiennes — /;
Vélaires — x
Postéro-palatales k — S S — ^
Antéro-palatales c x g j y l n
Cacuminales — se — — £ r f
Alvéolaires t s — d â ^ $ n
Labio-dentales — / — v —
Bi-labiales p — b % w m
Le système des voyelles y est :
à
— à a
— a —
è e — — ô
i — — — u
Dans ces deux tableaux je me suis servi de signes diacritiques
arbitraires, conservant, autant que possible, les lettres elles-
i. Rofarull y D. A. Blanch, Gramàtica de la lengua catalana, pp. 94-96.
Barcclona, 1867.
LANGUES LITTÉRAIRES DE L ESPAGNE ET DU PORTUGAL 7
mêmes. Voici la valeur des caractères dont la signification pour-
rait offrir quelque doute.
.y : fricative gutturale sourde, très profonde, représentée en cas-
tillan par j.
c : ch castillan ou anglais, à peu près tch français.
x : ch français, mais un peu plus palatal, le x portugais, asturien,
galicien et catalan.
g : j anglais, à peu près dj français.
/ : // castillan et catalan, Ih portugais, ill du français du Sud.
/'/ : h castillan, ny catalan, nh portugais, gn français.
ç : ~ castillan, à peu près //; anglais de thanh.
s, ~ : s et % prononcés avec le bout de la langue contre la partie
la plus bombée des gencives, presque s + ch et ~ -j-/.
r : r prononcé très faiblement du bout de la langue.
f : r prononcé du bout de la langue, mais fortement roulé.
/ : / gutturalisé, ressemblant un peu à ou français, f polonais.
Il se trouve en portugais lorsque le / forme une syllabe
avec la voyelle précédente.
n : n guttural, prononcé sur le même point que k, ng anglais,
c'est-à-dire un ;/ prononcé avec le dos de la langue contre
la limite postérieure du palais dur.
g, d,t> : g, d, b fricatifs, à peu près^ allemand de tage, th anglais
de then, iv dialectal allemand de wind; les sons péninsu-
laires, cependant, ne sont pas aussi ouverts, c'est-à-dire
se rapprochent davantage des explosives £, d, b.
à : moyen entre a et d français de patte et pâte.
a : a français de pdte\ il se trouve en portugais devant / et dans
la diphtongue au.
à : a de patte légèrement assourdi.
a : a anglais de arise, presque eu fr. très ouvert.
e : e français de le.
i : son très faible, rappelant le y polonais, la voyelle repré-
sentée par l'apostrophe dans le mot cl) val pour cheval.
è, d : à peu près e, o ouverts du français fer, sort, moins pro-
longés cependant.
A. R. GONÇALVES VIANNA
è, ô : e, o moyens.
C, ç : c, o fermés.
/ : i de l'anglais bid, entre é et i français.
ï, il : demi-voyelles du français païen, oui.
i : i français très bref.
u : ou français; g, ou français très bref.
Les autres lettres ont à peu près le même son qu'en français;
il faut néanmoins se rappeler que la prononciation des consonnes
n'est pas aussi énergique, et que la distinction de quantité dans
les voyelles est beaucoup moins sensible que dans la prononcia-
tion française, surtout celle du Nord. La seule exception est le r
initial ou double (rr), qui est toujours fortement roulé, toute
confusion entre r médial et rr étant par là impossible. Dans
toutes les langues de la péninsule, y compris les dialectes
basques, r est toujours différent de r.
De ces phonèmes le castillan possède aujourd'hui :
â, ù, i, ô, u; i, ù, représentés par a, e, i, o, u; i, u.
x; h, g, g, h; c, y, /, //; /, d, d, c, s (ou s), /, r, f, n;f; p,
b, t>, iv, m, représentés par j g; c qu, g gu, n; ch, y, //, f/ ; /, d,
~ c, s, 1 r, rr, n; j; p, b v, ha, m.
Le portugais, de son côté, en possède les suivants :
à, a, (i, è, ( i, i, i, /, ô, o, o, u, 1, ù, représentés par â, â c,
é, c, i, e, ô, ô, u ; i, e, o, u ; h, g, g, H; x, j, l, n; t, d, d, s, ^, l,
/, r, r, n; f, v, p, b, b, m, représentés par c qu, g gu, n; x ch,
jg, Ih, nh; t, d, s, %, l, r, rr, n;f, v; p, b, m.
L'orthographe portugaise étant étymologique, plusieurs de ces
phonèmes v sont représentés autrement que dans ce tableau.
En castillan, aussi bien qu'en portugais, g d b sont des variétés
de g d b, en général entre deux voyelles, qui peuvent être rem-
placées par ces explosives sans que les mots s'en trouvent déna-
turés, les individus qui parlent ces langues spontanément n'ayant
pas conscience de cette distinction, toute physiologique. Il en est
de même de la nasale n, qui ne se trouve que devant J: g (et
aussi devant .y en castillan). Parmi les voyelles, / et //, c'est-à-
LANGUES LITTÉRAIRES DE l' ESPAGNE ET DU PORTUGAL
dire les deux demi-voyelles palatale et labiale sont aussi regardés
comme i, u très faibles, assyllabiques.
Par son système de voyelles et de consonnes, le catalan se
rapproche beaucoup plus du portugais que du castillan moderne,
surtout si l'on compare son système de consonnes à relui du dia-
lecte portugais de Trds-os-Montes, que je vais mettre sous les
yeux du lecteur, parce que, plus que tout autre, il reproduit
l'ancien système commun aux trois langues.
Système transmontain Système catalan
Postéro-palatales : k g H k g H
Antéro-palatales : c — ù x / c g n x l
Apicales : t à n s s su l i r f t an s ~ 1 r f
Labio-dentales : / f
Bi-labiales : p b m p b m
Parmi ces consonnes, le catalan représente dans son ortho-
graphe usuelle h par c, cb, qu; g par g, gît ; n par u ; c par tx,
in s P ar tg; i p ar W; « p ar *y > x P ar x -
Dans le dialecte portugais de Trâs-os-Montcs, ch représente
c; s, s et %; ç, s; ^, %; toutes les autres consonnes y sont repré-
sentées comme dans le portugais littéraire.
D'un autre côté, le système vocalique du catalan ressemble au
portugais en ce qu'il distingue nettement e et o fermés de e et o
ouverts, et aussi parce qu'il admet une voyelle sourde ou neutre
£, qui y répond aux deux voyelles portugaises i et a (des mots me,
para), et qui paraît avoir un son un peu moins ouvert que Va
portugais, c'est-à-dire plus près de œ ou eu ouvert français de seul,
tantôt représenté par a, tantôt par e, atones. Va catalan tonique
paraît être, lui aussi, plutôt Yà portugais que l'a castillan, que
nous retrouvons en portugais dans quelques parlers du Minho,
aussi bien qu'en Galice. Une autre conformité entre la phoné-
tique portugaise, galicienne et asturienne et la phonétique cata-
lane, constatée par Mild y Fontanals, c'est l'obscurcissement en u
(ou français) de Yo atone, que l'on retrouve aussi en provençal
10 A. R. GONÇALVES VTANNA
moderne avant la tonique, mais qui, dans ces autres langues
embrasse la presque totalité des o atones, exception faite des dia-
lectes brésiliens du portugais, et de certains parlers de la Galice.
En catalan toutefois, cette particularité paraît ne pas être géné-
rale. Je représente par o cet o atone, identique à u très bref.
J'ai dit que les phonétiques du castillan et du portugais, diffé-
rentes dans leur phase moderne, se ressemblaient à un tel point
dans leur phase ancienne qu'on pourrait les considérer comme
identiques en ce qui concerne leur système de consonnes. En
effet, par la description de ces consonnes faite par les grammai-
riens des deux nations depuis le XVI e siècle jusqu'aux premières
années du siècle dernier, aussi bien que par les traits de la
phonétique espagnole, que nous révèlent d'abord la littérature
aljamiada et la transcription des écrivains arabes, puis les deux
curieux ouvrages de Pedro de Alcalà r , on constate en castillan
l'existence des fricatives sonores £, %, / (ou g=dj), lesquelles
ne se sont assourdies que plus tard, ainsi que celle de la fricative
x. On y constate également l'absence de la fricative gutturale
sourde .y (/ d'après l'orthographe actuelle), dont la valeur a,
plus tard, aussi remplacé à elle seule les deux fricatives pala-
tales sourde et sonore, .v, j.
On en peut dire autant de l'apicale ç (;(, ce, ri de l'orthographe
moderne), car le ç de l'ancienne orthographe y était probable-
ment identique au ç portugais, c'est-à-dire d'abord à Is, puis, par
l'absorption du /, à s (s français à peu près 2 ). D'un autre côté,
le portugais du Sud a dû, comme celui du Nord, posséder jus-
qu'au xvin c siècle les consonnes s (différente de ç) et ~ (différente
i. Vocabulista aràbigo en letra castellana, et Arte para aprender ligeramente la
hfigita aràbiga.
2. On sait que le nouveau phonème r acquis au castillan a non seulement
remplacé l'ancien Ç = S dans la nouvelle Castille, mais aussi, dans la vieille
Castille et dans une partie de l 'Aragon, le d final, égal à et ou nul ailleurs, des
mots tels que Cid, salud, tisted v étant prononcés çiç, sctlnç, iislcr. C'est là
encore l'assourdissement d'une ancienne fricative sonore, comparable à celui de
S pour £
LANGUES LITTERAIRES DE L ESPAGNE ET DU PORTUGAL I I
de %), comme c'est le cas encore aujourd'hui dans les parlers
populaires de Tras-os-Montes et d'une partie du Minho. Les
études sur ces dialectes publiées jusqu'ici, principalement dans la
Revista Lusitana, l'ont mis clairement en évidence. Il en est de
même en ce qui concerne le ch = c = l\. La seule consonne qui
faisait une distinction entre le système portugais et le système
castillan était donc le /; qui, comme on le sait, y a remplacé le
/initial roman et primitif, aussi bien que celui qui tenait lieu
des fricatives gutturales verae arabes — - r , du ^ 9 ou /, dans
les mots empruntés à cette langue, tant à l'initiale qu'à la
médiale. Ce /;, prononcé d'abord dans tout le domaine castillan,
a fini par devenir nul, exception faite de l'Andalousie, où il se
maintient sous la forme .y ou quelque chose d'approchant ',
faisant concurrence au /.
Par rapport au portugais du Sud, on pourrait ajouter un trait
caractéristique, la distinction entre b et v, qui le séparerait de
celui du Nord aussi bien que du castillan, s'il était parfaitement
avéré que, du moins pour le Sud de l'Espagne, la confusion,
actuellement générale, de ces deux consonnes s'était déjà pro-
duite, car la distinction entre b et b n'a rien à voir avec cette
confusion, que l'on constate aussi partout dans le Nord du Portu-
gal et en Galice, et qui pourrait bien être un trait de la phoné-
tique péninsulaire d'une grande ancienneté, puisqu'on le retrouve
aussi en basque.
On ne saurait néanmoins regarder comme un trait castillan le y,
c'est-à-dire la fricative médio-palatale sonore qu'il possède, et qui,
en portugais, est remplacé par î, car la prononciation du y varie
d'un dialecte à l'autre depuis l'Andalousie jusqu'à l'Aragon et la
Vieille Castille, tandis que, en Portugal, on ne retrouve cette
fricative que dans le mirandais, et peut-être aussi dans les deux
autres langues de la frontière, le riodonorês et le guadnviiilcs, dont
le domaine est borné à deux petits villages, à ce qu'il paraît.
1. Là, comme le^ en Galice, /; et; ont la valeur du /; polonais. V. plus loin.
12 A. R. GONÇALVES VIANNA
Nous avons vu que le système des vo}'elles était différent dans
les deux langues. Outre les distinctions que nous avons déjà
signalées, il y en a encore une qui rapproche d'une manière
étrange le système de vovelles du portugais de celui du français :
c'est l'existence des vovelles nasales qui, du Nord au Sud, y sont
de plus en plus faibles. En France aussi, la nasalité n'en est point
partout la même.
Les vovelles nasales portugaises, si l'on y comprenait celles qui
se retrouvent dans les dialectes du Nord, et qui probablement
faisaient partie de son svstème primitif, seraient des plus nom-
breuses : à, à, c, < , 1, ;, ô, o, il, neuf en tout.
Ces voyelles nasales, dans les dialectes du Sud, se trouvent
actuellement réduites aux suivantes : à (seulement dans les crases
de a -f- à atones), à, è, 1, à, il.
Dans la prononciation actuelle, on ne les rencontre pures que
finales ou devant des fricatives (.v, ;', s, %, f, v) ', lorsqu'elles sont
suivies d'une consonne explosive (k, g, l, d, />, />), il se produit,
entre la voyelle nasale et la consonne explosive une consonne
nasale de transition, s'accommodant à l'organe auquel appartient
cette explosive, an}, fini, àiup, par exemple. Dans l'ancienne
langue, toutefois, elles se retrouvaient aussi devant une consonne
nasale suivie de voyelle, c'est-à-dire appartenant à la syllabe sui-
vante, âna, ùfia, àma, par exemple, fait bien connu en ancien
français.
Comme finales, dans les dialectes du centre, à, 1, ù sont seules
d'un usage plus fréquent, Ô, l v étant devenues le plus souvent
des diphtongues nasales du, ci (écrites ào, eni). Cette diphtongai-
son est si commune qu'on y trouve rarement ô, jamais <\
Un autre trait aussi caractéristique du portugais est l'abondance
de diphtongues orales, et la présence de diphtongues nasales.
Nous laisserons de coté les diphtongues croissantes, qui n'y sont
pas regardées comme de vraies diphtongues et qui, en grande
partie, sont communes aux trois langues, quoique ic, ite, si régu-
liers en castillan pour r, ô haïs latins, soient étrangers au portu-
LANGUES LITTERAIRES DE L ESPAGNE ET DU PORTUGAL 13
Dans cette langue, les diphtongues décroissantes ont pour
voyelles faibles i ou û, et elles sont orales ou nasales. Dans le
dernier cas les deux cléments de la diphtongue sont des voyelles
nasales ai, âù, par exemple.
Diphtongues orales :
Subjonctive i : ai, al, èi, ci, ôl, oi', ni.
Subjonctive ù : au, èù, eu, où.
Diphtongues nasales :
Subjonctive i : ai êï, Il oi, în.
Subjonctive ù : (au) ait (eii) (ou).
Les diphtongues âù, eu, dû et ii ont disparu de la langue litté-
raire, et ne se sont conservées que dans les dialectes du Nord; la
diphtongue iïi est aussi très rare. Dans la plupart des parlers
portugais, y compris ceux de Lisbonne et de Coïmbre ci et ci ont
également disparu et y ont été remplacées par ai, ai. Il en est de
même de la diphtongue çù, qui est devenue g dans les dialectes
du centre par l'absorption de 17/. Cette diphtongue devient ou
dans les parlers de Tras-os-Montes, pour se réduire, par l'absorp-
tion de ù à g dans ceux de Beira Baixa et dans les parlers insu-
laires 1 . La diphtongue àù parait n'avoir jamais appartenu à tous
les dialectes du portugais. Dans la plupart des dialectes ou alterne
avec oi, quelle que soit d'ailleurs son origine. Prenant comme
exemple un mot assez usuel, voici l'évolution de la diphtongue :
Latin au ru m, roman * auro : Minho où
Minho, Douro et Beira-Alta où
Sud p, oi
Tras-os-Montes où
Beira-Baixa, Açores et Madère Q
De la sorte, dans le portugais littéraire, ou ne se distingue plus
de Yo fermé, si ce n'est que celui-ci devient, comme tous les 0,
1. g, c'est le ô allemand ouvert de hôlle. La diphtongue ou a, dans Tris-os-
Montes, la prononciation de Vow du mot knoiv dans l'anglais du Sud.
I_| A. R. GONÇALVES VIANNA
(u = ou français) en devenant atone, tandis que la diphtongue
garde le son de o, lors même qu'elle cesse d'appartenir à la
syllabe tonique. Il faut toutefois remarquer que, dans la pronon-
ciation populaire du Sud, cet ou atone devient à, et aussi o dans
quelques mots, tels que apoquenlar, que l'orthographe usuelle
écrit déjà sans Vu. A cette unification on peut comparer celle qui
s'est produite dans le français moderne où au et ô sont devenus
tous les deux g.
Les diphtongues èi, bl à leur tour ne se retrouvent que très
rarement, hors le cas où elles sont le résultat de la chute de /
médial, comme dans les mots painèis, socs (au singulier painel,
sol), cette chute, ainsi que celle de ;/ médial avec la nasalisation
très fréquente de la voyelle précédente étant, comme on sait,
deux traits caractéristiques particuliers au portugais.
Nous avons vu plus haut que l'un des traits les mieux caracté-
risés du portugais, du moins dans sa phase moderne, est l'assour-
dissement des voyelles atones, qui d'ailleurs paraît être très
ancien. Outre les voyelles atones g, i et g, on y remarque aussi
un i très bref, i, valeur que prend tout e sourd (/) et tout i
atone devant ou après les consonnes palatales .y, y, /, //, s'il n'est
point précédé ou suivi de r ou /, et devant tout s palatal (=.v, /'),
quelle que soit l'autre consonne avec laquelle Ye sourd se trouve
en contact; ex. : mexer, desejar, engelhar, engenhar, prononcés,
dans le Sud surtout, mixer, dj^ijar, ïji'lar, ïjiiïar; desdar, Icslar,
prononcés ciijdar, tixlar; mais gérai, ehgcr, prononcés jircil,
ilijcr. Cet i est chuchoté, et il en est de même de o et de la
diphtongue croissante /<> à la fin des mots, lorsqu'ils se trouvent
en contact avec des consonnes sourdes. L7, ou e sourd, est
supprimé à la lin des mots devant un repos, s'il est précédé
d'une consonne explosive sourde (k, I, p), laquelle devient par
là aspirée; elle le devient également lorsqu'elle est suivie de o,
/o; ex. : toco, toque, toque-o, ate, ato, ate-o } lape, tapo, tape-o, pro-
noncés tàkho, tbkh, lokl.uo, lui), àthç, àthîo, tàph, làpho, tàphîç.
Une autre loi non moins intéressante est celle qui règle la pro-
LANGUES LITTERAIRES DE L ESPAGNE ET DU PORTUGAL I 5
nonciation de 17 d'une série de syllabes où il suit toujours la
voyelle : dans une suite de ces syllabes atones, lorsque 17 n'est
pas précédé ou suivi d'une consonne palatale, il devient i dans
toutes ces syllabes, la dernière exceptée; ainsi, le mot dividir se
prononce dividir, privilégia se prononce privilèjio. Il y a cependant
des exceptions. Cet assourdissement de 17' doit être très ancien,
car il se trouve représenté par e dans des mots appartenant au
fonds primitif de la langue, veçinho, menistro, écrits aujourd'hui
vi^inho, ministro, mais toujours prononcés vifinho, ministro, toute
autre prononciation étant pédantesque et inconnue au peuple,
pour lequel elle est on ne peut plus ridicule. L'assourdissement
de l'e atone a, comme conséquence inévitable, due à son peu de
sonorité, sa chute toutes les fois qu'il se trouve entre deux con-
sonnes semblables, ou dont la différence consiste simplement dans
la présence ou l'absence de la voix ; les deux consonnes qui, par
cette chute, se trouvent en contact, se prononcent alors comme
le redoublement de la deuxième, surtout d'un mot à l'autre, par
exemple : aima de Deus, passe-se, qui sont prononcés aima ddefix ,
passi; pede fit, prononcé pèth't.
Cette assimilation, dont le résultat est l'existence de consonnes
redoublées en portugais, y doit être très ancienne, car nous voyons
que, pour éviter ce redoublement, on a eu recours dans bien des
mots à un changement de la voyelle atone, le plus souvent o ou
/ pour i : sossegar pour sessegar, et des formes populaires telles
que pipino, didal, pour pepino, dedal. Quelquefois aussi on a évité-
la suppression de 17 par la dissimilation des deux consonnes
semblables, comme dans la forme populaire Ce^ilia pour Cecilia.
On a ainsi évité la perte de la syllabe initiale, car ces mots
ne pouvant pas, d'après la phonologie de la langue, com-
mencer par une consonne redoublée sans le changement de la
voyelle atone, ils se trouveraient réduits à segar, pi no, dal,
Cilia. En effet, si la contraction ou la perte de syllabes à l'inté-
rieur ou à la fin du vocable est très fréquente en portugais, elle
y est, pour le moins, assez rare au commencement. Il est permis
l6 A. R. GONÇALVES VIANNA
d'attribuer la même origine aux formes anciennes et encore
populaires buber, somana,' pour beber, semana. On explique ordi-
nairement ces formes par l'influence de la labiale b ou m. Je crois
que le choix de la voyelle g pour e a cette origine, mais il me
semble aussi que ce changement est dû, comme dans les mots
cités plus haut, au désir d'empêcher la chute de la syllabe atone
initiale, maintenant de la sorte l'intégrité du vocable.
Une autre particularité non moins intéressante de la phono-
logie des voyelles portugaises, en tant que voyelles toniques, se
retrouve dans le fait que cette langue présente dans tous ses dia-
lectes (ceux de Tras-os-Montes exceptés), un parallélisme ou une
homophonie des voyelles, la valeur de la voyelle tonique des
paroxytons se réglant en certains cas sur la voyelle finale atone,
dans les conditions suivantes :
Voyelle finale atone sombre g, o (= //) : Voy. tonique fermée e i ç u.
Voyelle finale atone claire e (=/) : Voy. tonique ouverte ê à.
Cette homophonie, dont il serait trop long d'exposer toutes
les lois minutieuses et tous les accidents, affecte la flexion des
verbes aussi bien que la flexion des noms, et ne se trouve dans
aucune autre langue romane poussée à un aussi remarquable degré
de précision. C'est ainsi que les verbes des deux conjugaisons en
~çr et en -ir nous offrent un changement de la voyelle radicale
tonique des plus frappants :
V h I l ^ v - r ' "' ! ''' ,, '' ^Wj dêve; cgçer : cç%p, cçn@; cb%e.
( fçrir : j'irg, firçi ; jerc ; fugir : fnjo, fujç ; fôge.
Adjectifs : formçso ; formosos ; forniôsa, formbsqs.
Substantifs : çvç; àvçs, àvç } ôvçs.
Les verbes de la première conjugaison, celle en -.<//-, échappent
aux lois de rhomophonie, mais ils sont soumis à une autre règle
tout aussi curieuse : leur voyelle tonique radicale, e ou o, y est
toujours ouverte, tandis que celle du nom verbal est fermée si la
voyelle finale y est o, ouverte si elle v est a, quelle que soit
d'ailleurs la qualité de IV ou de ïo tonique du nom dont le verbe
LANGUES LITTÉRAIRES DE L ESPAGNE ET DU PORTUGAL I "J
puisse dériver; ex. : cgmeçar : g cgmeço, eu cgmêço; rodar : g roda,
g. roda, eu roda; regar : g regg, g rêga, eu règg; trgcâr, g trgcg, g
trbcg, eu tràcg.
Après avoir parcouru rapidement le système vocalique du
portugais, qui, comme on vient de le voir, s'éloigne si considé-
rablement de celui du castillan, disons quelques mots des con-
sonnes.
Le système primitif des consonnes a dû, pour les langues
issues du latin vulgaire parlé dans la Péninsule hispanique, pré-
senter une assez grande analogie avec celui que nous retrouvons
dans les dialectes transmontains, exception faite du // initial (/
palatal, /), qui s'est produit en castillan pour des groupes romans
à / subjonctif (pi, cl, fi), et en catalan pour / initial latin. Ce
système commun aux trois langues y a-t-il été altéré par le con-
tact des langues germaniques et de l'arabe ? En ce qui concerne
les premières, il se peut qu'elles aient contribué un peu à former
ce système, et peut-être pourrait-on en dire autant des langues
pré-romaines, telles que le basque et les idiomes celtiques. Pour
l'arabe, nous voyons que les langues péninsulaires n'ont adopté
aucune des particularités phonétiques qui le caractérisent, dans le
millier de mots qu'ils lui ont emprunté. On lui a, il est vrai,
attribué à tort la valeur actuelle du / castillan, qui ne date que
de trois siècles. On pourrait également y chercher l'origine de la
prononciation c donnée à l'ancien ç; cette prononciation, cepen-
dant, n'est probablement pas aussi ancienne que l'altération subie
par le x et j, car dans l'Andalousie, où l'arabe s'est fixé plus
longtemps, le ç n'existe pas, assimilé qu'il y est au s en un son
unique, qui est celui de Ys français et portugais du Sud, le
domaine de IV des dialectes du Nord et du basque commençant
au nord du Tage en Espagne et au Nord du Mondego en Portu-
gal ; à cette différence près qu'en Espagne il paraît y avoir une
région où, ainsi que dans une partie de la Galice, le s coexiste
axec le ç, la différente faite ailleurs entre ç = r et s = s s'y main-
tenant sous la formule s : ,r : : ç : ç.
Revue hispanique. X
l8 A. R. GONÇALVES VIANNA
Si maintenant on jette un regard sur les parlers du Sud de
l'Espagne, on est bien obligé de reconnaître que l'andalou est à
son tour un des dialectes les plus remarquables du castillan, et
par là du roman dans la Péninsule hispanique. On y constate
d'abord l'absence de distinction entre s et ç, confusion qui se
retrouve depuis plus de deux siècles dans le Sud du Portugal;
puis la présence des fricatives sonores % et A', représentées dans
l'orthographe commune par s et j entre deux voyelles; puis
encore la suppression du d intervocalique, qui a amené celle de
la voyelle suivante lorsque celle-ci est a, et qu'un autre a précède
le d (joa pour toda, alabâ pour aîabada, na pour nada) ; puis enfin
le changement de bù en gtl, comme dans gïieno pour bueno, et le
remplacement de / (/ palatal) par y Çpoyo pour poyo et polio du
castillan). A ces particularités vient s'ajouter l'affaiblissement de la
vélaire x (j castillan) en une sorte de /; aspiré (sourd ou sonore g),
affaiblissement qui est le résultat d'un rapprochement des organes
facteurs moindre que celui qui produit le x, phénomène que
l'on observe aussi dans quelques parlers galiciens où le g devant
a, o, u, r est aussi un x affaibli.
Un autre fait depuis longtemps indiqué comme une caracté-
ristique des parlers de l'Andalousie est la valeur de ce nouveau
phonème prêtée non seulement au h muet de la langue litté-
raire, mais aussi au s final ou suivi d'une consonne, le son /;
étant dans ce dernier cas encore plus faible. Cette dernière pro-
nonciation, enfantine, bégayée, se retrouve également dans les
basses classes madrilègnes où elle a été vraisemblablement intro-
duite par les toreros, Andalous pour la plupart, et s'est répandue
à la faveur de Yaficiôn, comme cela s'est aussi produit à Lisbonne
pour cette prononciation confuse et mâchée (masligada), en usage
parmi les fadislas repoussants, et qui rappelle en un certain sens
celle des cockneys londoniens.
Le portugais du Sud, de son côté, offre dans la prononciation
de Ys à la fin d'une syllabe une palatalisation qui frappe toute
oreille étrangère. L's final d'un mot suivi d'un repos ou d'une
LANGUES LITTERAIRES DE L ESPAGNE ET DU PORTUGAL 19
consonne sourde, même à l'intérieur d'un mot, prend le son
d'un x affaibli ; si, dans les mêmes circonstances, il est suivi
d'une consonne sonore, il devient sonore lui-même et se pro-
nonce alors comme un / également affaibli. Lorsqu'il est suivi
d'une voyelle il devient ^, tout comme en français. Ces ss pala-
talisés le sont davantage lorsque la voyelle qui les suit ou les
précède est elle-même palatale, e ou i ; il en est de même pour
x, j en contact avec ces voyelles.
Cette palatalisation semble n'être qu'une permutation de son
simplement imitative, x, j y ayant remplacé s, £ de l'ancien por-
tugais et des parlers du Nord, parce que l'effet acoustique en est
presque semblable. Us final de syllabe a échappé de la sorte à
cette assimilation au ç et au ^ qu'il a subie dans les parlers du
Sud devant une voyelle ou entre deux voyelles. Cette hypothèse
est d'autant plus vraisemblable que dans le Nord même, à Oporto
par exemple, le s et ~ ne se retrouvent qu'à la fin d'une syllabe,
le s initial, aussi bien que ss et ç, s'y prononçant comme s, et le
£ et le s entre voyelles comme ;(, tous les deux, cependant, bien
plus sifflants qu'à Lisbonne, à Coïmbre, ou dans l'Alemtejo et
l'Algarve.
J'ai fait allusion plus haut à un dialecte du castillan, l'anda-
lou. Parmi les dialectes du portugais, un surtout, parce qu'il est
parlé en Espagne, mérite encore une mention spéciale dans cet
exposé. Personne ne doute aujourd'hui que le galicien ne forme
avec l'ancien portugais une langue unique. Actuellement même,
il est très difficile de reconnaître à son langage si un individu est
né en Galice ou sur la frontière septentrionale portugaise. Les
seules différences que l'on puisse constater en ce qui concerne la
prononciation sont peut-être la valeur de x, ou plutôt d'une sorte
de /; aspiré, donnée en Galice au g devant a, o, n, r, et la présence
de la fricative sonore i du côté du Portugal. On peut aussi
ajouter l'aspiration de p, t, k devant une voyelle tonique, en
Galice. Des deux côtés on retrouve le s, le a ouvert devant une
nasale, les diphtongues bu, 01, le b pour v, etc.
Maintenant, le galicien, du moins celui de la frontière, a-t-il
les voyelles nasales, qui sont une caractéristique si remarquable
20 A. R. GOXÇALVES VIANNA
du portugais? Cette question est restée jusqu'à présent sans
réponse, malgré l'intérêt qu'y attachait feu le prince L.-L. Bona-
parte. Les voyelles devant les groupes formés par ///, n, n, suivis
d'une consonne y sont-elles nasalisées ? Un n final précédé d'une
voyelle, an par ex., est-il prononcé an, an, an, an ou bien à?
C'est là une question de fait, et pour la résoudre il faudrait se
rendre en Galice ou l'étudier sur des Galiciens de la frontière
résidant, par exemple, en Portugal. A priori, cependant, nous
pourrions supposer que le galicien a partagé avec le portugais la
nasalisation des voyelles, parce que ses diminutifs en -iho doivent
avoir la même origine que ceux en -inho du portugais, c'est-à-
dire -ino à travers -lo, -li'io, le phonème ;'/ après i ayant été le
plus souvent précédé de la nasalisation de la voyelle : vinho >
vïûo^> vlo^> vino; minha > mïïia > mïa >> mia > mïa (écrit mha
au moyen àge)>- meâ.
Il me reste encore quelques mots à dire sur la quantité des
voyelles et l'accentuation des trois langues qui font le sujet de
cette étude.
La quantité prosodique y est peu sensible. Le castillan, et
peut-être aussi le catalan, sont néanmoins différents du portugais
en ce que, pour celui-ci, la voyelle tonique est toujours un peu
plus longue que les voyelles atones, lors même qu'elle est la
finale du mot, ou qu'elle est suivie d'une consonne dans la
même syllabe, exception faite des cas où la voyelle atone est due
à une crase consciente, soit à l'intérieur du mot, soit d'un mot
à l'autre. Dans le castillan, au contraire, la voyelle tonique est
brève, tandis que la voyelle de la syllabe finale atone est allon-
gée lorsqu'elle se trouve devant un repos quelconque. L'extrême
brièveté des voyelles toniques suivies d'une consonne à la fin
d'un mot est bien connue en catalan.
L'accentuation d'intensité est la même dans les deux langues,
castillane et portugaise, hormis quelques vocables et la différence
due à ce que la syllabe forte d'un radical de verbe est toujours
la dernière en portugais, lors même qu'elle n'est formée que
d'une simple voyelle, i ou u, c ou o, ce qui bien souvent n'arrive
pas en castillan, surtout par rapport à 1'/; ainsi, tandis que le
LANGUES LITTERAIRES DE L ESPAGNE ET DU PORTUGAL 2 1
Castillan dit yo principio « je commence », le Portugais prononce
eu principio.
Cette coïncidence de l'accentuation dans les deux langues est
pour beaucoup dans l'intelligibilité mutuelle des individus des
deux pays, quel que soit d'ailleurs le dialecte qu'ils parlent et le
vocabulaire spécial qu'ils emploient. Un changement de syllabe
tonique y rend les mots plus méconnaissables que toute autre
altération qu'ils puissent subir.
De tout ce qui vient d'être énoncé rapidement nous concluons
à l'indépendance de formation des trois langues littéraires de la
Péninsule hispanique. En ce qui concerne le catalan, personne
n'a jamais prétendu qu'il ne fût une langue différente du castillan.
Par rapport au portugais, on est cependant accoutumé à le ranger
en un seul groupe avec le castillan et ses dialectes. A mon avis
on a tort de le faire. Nous venons de voir qu'il a dû être de tout
temps indépendant, car on ne saurait foire dériver ces deux
langues l'une de l'autre, ou d'un seul type antérieur autre que le
latin, les particularités du système vocalique du portugais s'y
opposant. Le traitement des consonnes latines, lui aussi, est bien
différent dans les deux langues, quoique leur matériel phoné-
tique primitif ait été à peu près identique en ce qui concerne les
consonnes.
Tout effort pour les rattacher l'un à l'autre, même au moyen
d'un dialecte, serait aussi vain ; ni le transmontain ou le galicien
parmi les dialectes portugais, ni Yestremeno ou l'andalou parmi
ceux du castillan, ne sauraient se prêter à cette hypothèse. On
peut en dire autant de l'expédient, qui paraîtrait avoir quelque
chance de succès, d'avoir recours aux co-dialectes appelés linguas
raianas « langues de la frontière », tels que l'asturien en Espagne
ou le mirandais en Portugal, qui ne sont apparemment que des
variétés d'une forme commune, indépendante elle aussi.
A. R. GONÇALVES VlANNA.
LA TRANSCRIPTION
HISPANO- HÉBRAÏQUE
On évalue à environ trois cent mille le nombre de Juifs qui, en 1492, furent
chassés d'Espagne par Ferdinand et Isabelle. Les uns allèrent en Afrique, d'au-
tres en Italie où ils s'établirent , notamment à Ferrare, à Florence, à Venise et
à Naples; d'autres passèrent en Portugal ; d'autres enfin trouvèrent en Turquie
une assez large hospitalité.
De même que, sous la domination arabe, les Juifs d'Espagne parlaient et
écrivaient l'arabe, de même, sous la domination castillane, ils parlaient et écri-
vaient le castillan. Brusquement transplantés dans des pays où ils furent sou-
mis à des lois d'exception, leur isolement maintint chez eux l'usage presque
exclusif de la langue qu'ils parlaient dans la péninsule 1 . En Turquie, au Ma-
roc 2 , en Algérie', en Tunisie*, en Tripolitaine, à Vienne, les descendants des
expulsés de 1492 parlent encore le castillan du XV e siècle, mais non dans toute
sa pureté, il faut le reconnaître, altéré qu'il a été par de multiples contacts avec
la langue ou les langues dominantes de chaque pays. En Turquie, les Juifs es-
pagnols sont en très grande majorité ; on peut en compter approximativement
cent trente mille dans la Turquie européenne d'aujourd'hui > et la Bulgarie-
Roumélie. Beaucoup d'entre eux ignorent le turc.
1. Les Juifs de Russie et de Roumanie, descendant de Juifs allemands, parlent encore
l'allemand, à côté de la langue du pays où ils résident.
2. Au Maroc les Juifs se disent eux-mêmes Guerouch Castilla, « Exilés de Castille. »
Ceux de Fez et de Meknès parlent arabe ; les autres parlent espagnol. (F.lisée Reclus, Nou-
velle Géographie universelle, t. XI, p. 698).
3. En Algérie, beaucoup parlent l'arabe et un très grand nombre le français.
4. En Tunisie, les Juifs expulsés d'Espagne et de Portugal, ainsi que tous ceux qui
ont immigré pendant ces derniers siècles, sont généralement désignés sous le nom de
Grana, — c'est-à-dire Livournais, — Gourna ou Livourne ayant été le principal marché
des Juifs ebassés de l'Ibérie (Elisée Reclus, Semelle Géographie universelle, t. XI, p. 198;
d'après II. von M.ihzau et Ernest Desjardins).
5. Les centres les plus importants sont : Salonique, 60.000; Constantinople, 50.OOO;
Andrinople, 15.000. A Salonique, il y a trente synagogues, autant que de mosquées; les
Juifs y forment à eux seuls près de la moitié de la population : ce sont de beaucoup les
plus actifs et les plus riches de tout l'Orient.
LA TRANSCRIPTION HISPANO-HEBRAÏQUE 23
Depuis plusieurs années, toute une presse judéo-espagnole a été créée en
Orient ' ; le castillan v est imprimé en caractères hébraïques 2 . Il faut citer aussi
des éditions de l'Ancien 5 et du Nouveau Testament * et un certain nombre de
brochures. C'est pour faciliter l'étude de ce rameau du castillan qu'a été com-
posé le présent travail.
La transcription hispano-hébraïque est une transcription essentiellement pho-
nétique, reproduisant non les lettres au moyen desquelles on écrit un mot,
mais les sons au moyen desquels on le prononce. Le castillan, de son côté, s'or-
thographiant à peu près phonétiquement au moyen des caractères latins, il en
est résulté une similitude presque complète des deux systèmes de graphie.
Les caractères généralement employés pour la transcription hispano-hébraï-
que sont les caractères dits rabbiniques ou rachi > ; on ne se sert des caractères
dits carrés que pour les titres, les en-tête, etc../'
Les caractères hébraïques n'étant pas assez nombreux pour rendre tous les
sons du judéo-castillan, il leur a été ajouté cinq lettres : ce sont des lettres hé-
braïques surmontées d'un petit demi-cercle nommé rafé. Ces lettres sont 2 (v),
S (<//', tch), ~\ (th anglais), i (<//), £ (/"). Le rafé se place également au dessus
du £" (ch).
1. Je connais une trentaine Je journaux judéo-espagnols, mais plusieurs n'ont eu qu'une
existence éphémère. Je publierai plus tard une notice sur ces feuilles. — Le Lu^ero de
Paciencia qui était publié à Turnu-Severin (Roumanie) et qui a paru de 1885 à 1889 était
imprimé en caractères latins. Cette tentative ne semble pas avoir eu de succès.
2. Le gouvernement ottoman défendit jadis aux Juifs l'emploi des caractères arabes.
6;o pp. in-8, 1873. rTET'ClN'CD^p
C'est, à peu de chose près, la reproduction de la célèbre Bible de Ferrare.
4- b\x yiin YnNitaxD in tpi^d itcdwi: h ïtsifDK'PDi'Q "avu b\x
.nSEircix'crrp — .-;-; nx-;:^ xS h i-n-n'^xtc : rwn
664 pp. in-8, 1S77. ^5n"13 .- ,n H nxn^^x^DW
5. Ainsi nommés de Rabbi Salomon ben Isaac, de Troyes, dit Rachi (1040-1105), un
des commentateurs les plus remarquables que le judaïsme ait produits. Ce surnom de
Rachi est une abréviation formée par la réunion des initiales du nom complet "Ql
6. Dans la présente étude j'ai préféré employer les caractères carrés. — Dans la plupart
des publications judéo-espagnoles, par suite de nécessités typographiques, quand on
emploie les caractères carrés (dans les titres, les en-tête, etc.), au lieu de les surmonter
du rafé, on les fait suivre d'une apostrophe tracée de haut en bas et de droite à gauche :
'2 — 'à — - '1 — '?— - 'S.
•20 11'3'J
*'
r.r,y.
|Wfl 22 D'^FT'O
16 «1JN
n'.j- -nrt»
i ta
OU r.-f -:•.■>-•>" Si
•M T»»» 1 '»"
1BN13^Ï5^-K
RO DR1K9
n;Kio-o rr?x DT'3 nuNip -d'ikem
■ •"•on pu
So.ctnr.D
<M ,'5 S^ T .'> WV
,1-non .1» 4«i
li-iirppfrn no ••>■-.«
..-i EL TELEGR&FO
i P*T C?-T'3t i* i!0 ^vrfi nû
\i"?ff?"V^ ^U> '
— ISO CTi*U r-.f> |ift
p*grn ,- n • CTDpJHcP "i V<Tp")
■prnpnp :>> .-r-tij i-ft pVoT»'*
pu m -TMft iP pjuftrp »*► n ,i-p
•p-Ppft .?>»'*> »si il pftî'i'Wnp'P
rnP)-n'p *r3r» i*ft rA 1 * w
■P p'pîfro .mo *i ppp wr> nrfto
. ttVmv ne* i p«*b po
•i fffij Si ihentp-rv i*— *
•çift pf>r~>y) p-îi-pPîrnfc/ft iPjiû
•p PP-*j ift"*P*B BTH PS* ^ *9*
ppu ;■» jv» ifi-P-p pt;-p .-ft > i
CpP-jP ■ . ■ Mt ' /m iï> ; PW5 -'■»
-3V3 PP"E PS *TP*T P"TJ ?"-i P" 1 »
-pp pyfti'vp p'pf» qpv 'p iPïpp*>
■K»«i pvefipï ,/jWïùI'J Pj'c»
• ppjî'b
■ifipîip p*ft np'fifcijftpôui'ï •$
•i*p:*o "'? td .P'":" P*i "P P* 3
* nrnrmp .rtCl .ntp-.i .,•**■»
-rt-pp-n T v np ft-w-prpi x,*p
•men ptoi-p t» * P'î-i-rn pt»
i pMft" 3 ppinp(i ,pftp*iT3 yy . "gfta
"imuoc |»«
«ni pttarslt pvtûsj ,*jppift
•Pj jfi 1 rmj et "pfi pftj*r*P PP p
*t»3©1 l'P p^*fc-f» '6 T^fift-jf! VC
•fi pp ÏTO "• Pi i* l'pnr"»)»^ t fp
prr-wpî-ft £vp p-.-n. is* pavi
*■; n BPTft?TD pfrn»j pftl -ijip
C■'■.■ , "I PV)3 S'A
i;'3K*» I*"»)
|TS«* ry it Vtnïftl v: M
i .— P3*rp-t ,-*i isq ynTi pwtp
<»;•;■* >'"5 ^w c*t rfva jt> s*»
iv .•v:'-- irs- > ' ■ /u pârr-xs
p-pi^t :"•;■ .ii l^'>?'*^^ , c-pî ,?i
pr>- -e ni ^ -yitc rjj ,ii |<p
.- :' ntwôrp c'/'î t pî» nt(i
si. -* rcn i^ > M9ç
O'S* 1 "-' ■'
t -ïî»* *»"• ;••*• p ,ft i6*r »
-■■« ?C3 - • t vi ip i+ sovft tva
Î-* y»x* *i p>ft p*-ïft cnp S* ii"i
l-ft , i»"3p»Tïi r: ',-h *i.p-pïV> prp
m:p-6 'i pft*i pii *^ , p^inp r^>p
-^ *1 P3"ï fOV P3* "» .MB ï* 1 '•B
•C'fti p*»yi i'î'j'pirtiiftpBU
Trj» ït> 'TVts p,*U .f\.V3ii)Tp % **B
-p-jp rjp'ft nj-vp-ft i» wd;v>
-* n ,îf> y»v» :>> .ppo -i r*?D"V
fû piftïi'jïift ">p^"p . tfD ma
. pTïîhp'VPP pft"ï"l)h6 ^3
fb^'i pf» p^ rnïn i«ft *p vï>*»P
■»•> .-«-ivj ?; ~5p pî-ift;aWf>i
■pp-9»i *T^sfr! ;.*-t^ p-r.-p-'tnp
cft-or- -i**r;f "t p.ir-,'3 r***
>«>Snra iwra ti , l '."5pntpnp5
pîi-ïMTBVMapi p^h'jp'i irD"i) v»
"))ip 3"j pftïip v*i ii:)>ni*ft
■ft?pvrp"ï iTftlfi *p ?:'t^ ij'-ji'ri
.?::i 'Tyi "p ■::••■■* ;*■•» V*»i"Sp*i
-î-3 ?;■■» .:ft;i* '-P . pftip&pfttt'J
•lïii-rft ri i rrfJSBfipô" i^ ">S^p
-ftp ÎCPP"ft •"'S iyp r.-tTp ,/ft'J
IftJ-S p pnoTO O'S i np*»! \i"P
.ttV P"i**ppB* pfi-c p'i*j:hpii
rair ï'ft-p .-r-:3-î .v »fi ;■::••"> pi**i
■P pu * pprsftçi i "*** f. 1 ^ ,t>
pï i*ft rtftis:*p :ft - îft jfntt'i "*p
,1111 l"P ïf>"îii'P ivpfr>tPT^-%
?; l* p'-:6 vp vrjvp pfrift vu
-p\i i'f» jtts'ï" ri "i r'pfrtss'ïTn'i
pivifi ;•* ,i"p'WÎ"*i •»'■ 1 **"!■:
r»rn« »*i npm.**pW> «"P
i«ui -34*^» jt> ppii-cuî^iti
p»rt OKuSu
i {Paru y* pwpif*o H3J - » p» - »
. vu: pfcli it t XJ»fm
-i pip^fw é p'ft pii rtMjifti) ,"Pç*J*
pntv» pift-o pii * C^ftsiiB ^p
■îBftp "-•* Pft n:6ç pftft pip'ri-fts
-ftiJT. i* .T^pns PTfi: i'P .W"?
r;'P PV>*»B plU'il» plX» tt *p 1P5"T
|1"ppi*^lrt) ?i tu iftipiih Tift iv»
p:-':*:i5 tp -ïio "ft v-Tii vjiip ïi
.jrh in rmrrtioyt p; pftit-rarù
p-cvft i <*:-■> i'i -h p'pjfrxi m
-■Tpft pftflfcpMya-pmpp-iM
pvvJ ti'in'B ii c'vpf. oiS ^ftij
.Tilftyps-ft V» SftwS l'-.V'V i - '
pp^l'A pnnai usiî \* *i p ^pp*'
*0 « i-i *p .-rftrvj'p r;ift 'i jft"fl
pfiiip pypftrt .lifi'i -i trrftpp'.»
. pvp*wi5 pVi pftïn pfti
•sipi pp*vp >"i *p o vsra r*>
•*Tï)*n *.l -Jfrjra *up*P "WP Vty
-P"rf) ppvo-ip p-fl •: -ni':-» i>h3
*fr)6i*ft . ppviip pr-ViprS i* pftl
pftiTPi;:'i>n>ip 15 .iS'ipHDprft **w
l'h i*t:':i *n J-ft *p pftj'tiip oft'V
V.: \-30tti '*D .Vi'j:)^) 1 nhp i-ft
-Pdpï -»j'ï '"' ~> i-p •pnfrrt pi
•ra*p *P ifwwp *p Sftçrt'i p^'ï
cspi i'ft *p "îïiih i'ft p? ^"a
-p-Pij -3ip lïih /*» iinpf>ic nf>-3>
. ;np-:A^ P^-o
•p r;r:'*P -.rSft TOTP pft'fr.fi T)
-ic'vP lay.rgT'prft i pPp «v-^
pip ;-P ^'h">p u -p Tftri*3ft-;p'ft pp
-P*P .c-r"pn:':nv: P'P *ft P'rf'ÏD
ift -p Tt*cn h -p -p:P ,n*f> i*i
, pftîv-ip rp'ii . ph*rn p'p .r-:J
i rpp*i ; prions s-^r-'-a iftiftp-i
•sftsiioa'A piïpft pu hk-p'îw ■tp'"
pyiP"?5ft*i i'«*l .v-Pr^ij-'ift Pi.p*B
.pi: ii"pf>-«3p'l Pi '0 PP*^ V*^PP
ré . prop 'isoij v* ;f)."i'j
pp*;jîo p p îftni ;,ïi«— iv> •!» P~
^>o *o 5*1 trpe "P t*-'» .0"^» i" 1
i *B3' ï-p iV.P'fi'.T Pi 'J'D fVti
pPppftB Si WPTTCj*tt*'p'i
pp il»-, o \P'c .' *** • Strapu ''5 n
■*-»3«3i><>oP -jycr-prrppp u'»
t -nftu^%j p-j p jirtuwpj çAk'.'*
-300p "sp'nv ft/iraflw'i "o»o »
Hmi *.:>* I I73i|
rf)
BK&4 fcn f2 •>Se*) , e»eD!ip
PH % Tï'3 p^C'p'D
pPi *:«3 i-3 .*•-- *p T.lwDft.l 13 *P
pfta pfti pPi+-v p-i-p *p pP-Mi'p
rrjh ift -p -rpa-ft ^ P*^Trû
CPi%-J'P PM p i?- , i*'* , Pl> l'3ÏP
V* i iipp S*f> i-ft V'i-p Cfi'h-p
•lu"»* phS l*ft /«V3-: •: .-'■S-ippi'P
-p-ft rft p%;P'*»-p p mu ,PP;ia
* &&? &■& *; p'Sft\i pvi i pis
Otur) P) p rj jftjy pAft^l PO *1
•im jft'jft v:r*rft:*v;Pp S'û •& pp
p ••■*)!'■ j-;->v p i p iip '*pi
l^'iP 13 DVfc'-tï* snrfm pp.w
••nft ^* ,pPtxp p% -p rftp^o
y.Ti \K -ci . p.nrc-; rrft ** v>j
-TcpTi P'i pi n& tv P'ft'i iCî3-j
. v'jrft'j pp« tt ,pnPip.*pP piu
Î^-P P.VJB 13 li">PpiP "V3ftT*Ei*^ pjift
ip ipi tivw r^ftT pip prp"!cw
Ift-VirPp piip'v piSi» , i-_r:)-uv>cpi
•1"P P3* PPP1T.U P "p C".Jft PPP'P
P"Vfi->ip *S5*>i'3Pc ^Pa P"p3fr pp jy
-rc iic i%»is*i Jiriftypirft VP
. -Pii'p o-p îi .pv'u'biu pia y nfq
iI'Sjt ,"Pc^piPip ica"û Uj 1 ; rP'i
*> 'P PDWVJn: pPS i tP.'ji-w *i
-Pi3'i iD:r*D ij-P'Jin pM-h (nfift
-•v-'i-p iPip :•! -wftpft »pvwi3
rthi'ipp n,vift hoc i"fta .io ïiip
X ,Pft'T\i (p-pPif^.) pPp^T> pp>
••--Pin -ip pi«p «4 -p p-ppp-fc'su
-3P^i' : iP')-h iP"*-;r;-j *P^ I -"-; vo
" ^""CP-P i'ft i*P WTuftîftTÇÇ'l i
, Pfnï p';.-:-:t p)
.-^ pvP-jP -p p«VwB --i r .. 3
-iipi -Pi rmo •»•« Wi i*-3-p
r 1 : ,1801 i*?5P ri ifl |-T;--| •:■)
pi>>a-3-p ;i»*p-j yvi«t •; pqjjTT'p
vp-« -i -•:—p:-t rwi Pt
Ifr'fl -p ffJWWfl ;-j pft--p -••;
'.•j-'^'yr: - ï! , :/^o , i* , [ ns
*n »> -mi rrpenv p p-wf r#
.^uir
' [M /
Fac-similé du journal constantinopolitain El Telegrafo (Échelle 1/3).
1 893 naowCTD n 18— S654 niOTI 8 D'5.17
on *k ••art '«jh
h
EL TIEW1P0
D1»3"B)KJ13*«
ivrîfnvp'ft i'fc 'h pfe-princ phi ">id
120 P'jjOJ vjft jifi
co » p*r*» b'p
< «rnj . n*oi3 Vn vc'-is
ITOHIOB'l'OIR
11-12 'is iftn Ti'ïuvip .'P'iftî 'h'iijinftîi
. nïpij'Tsihïpjip .cnjhbft:
GiIala.HalimoDdle D|ad»til.
KOCrOl'UDJII.RR HIN s'o 11-11
ConslanUnople
DlBJ"1W13lt
n'jhïD j»fi (00 ri) i**3h ph Pipis-îjhupsip
50 » pv*:> 6'P »
25 »P*r*!)p'713 >
.7fc*flipp*n \'t> îàift -nfts ni D«pn B'5"6i5 "i
.TBVftD) 1 P7'B V<? 'f> .'B - '*'»!)) 4 '6 îrftp 1
7 p67ib phi wjpfi p-3-)"J '1 mbv pJ'7
S pipii pii 'i ifts-DD'O i*3*ft iSift wp -7
-r> pi)"5 pii *j pisvtoij 2 'h piiRp pii'hi:
. prtfcj'Pi*» yo-bip pijn-Bi'h nçfiip . pipftï
pi 71P lîlf) 1B))"B '1 l"pf)OP'f) !))?•)) i'J'fl
. TD~*ftlH i '6 pifftp 3 '"ftUipp'ft '7 «BlhB
-ej't'i'a p*ftiB puuif) piifp piH pii »i
-'i')) "1 T»3ip i*h "i;p -,ip pi7Bih «h prt
. l'p-îlto'i
,7«VVBla p716 '7 'I» "S"^ "7 P71C1) IIP
ThftTj -7 T^ib -7 n:Dp*nvh vr»'&*i cft
ph"7:bp .p'jii'» : 7b7ib-p pi yt> v-yi *b
-•D , P3'b*7'3 ,( , if)T3C , D) U'pTSif) ,(nB7Bp)
. SB'B 'f> P"Bf)l)iï ,pi;'P
->h»'7 Pi njip ,«p p'D'ujhp 7iupn i'ft
-5ft13p:ip Pft 'J"S ,ïfï*»-5*ÎÎS)-f) 157'SW ï'7 P7
-■» pfti'7 vprnft pift V7*piip iid piBi3*vi
'-P»6i*6i3 i'B 7h-!irph 7id pft-'TBp'p-j pfnii
''7 P316 p-f) .ihB'Chp Pi '7 VTBï'Jhp lïftu
'7 'BJ'DftiiP 13 P'iDp'T» p*76T73':*p phi
-p*)J l»ip . 17'ÏJ'O 173lJ)i-7 PU P"P3h-C Pi
oîip i"7mp*6 i i ppipih *p *p) Pup'hSron
. ^fii-MTsihh pjift p-h i'h (cji-p'i) pii
-*î3hfc 7ii3pi7 i'f> . D'ra £*p -Ihp >7p*7
pii-7 -i3:hti"ih ïf.wS iiBp'pprb p*6 p'i)
-•S'7 i - h n» , p:6'5p' "7 ci"-.ftï'3hp pvp'irp
yti 3'ft 7iD pjhiivjift rp-is^p P75'7 Pi
9 '7 pf») '7 p ,, ph'D:".)ihh - ,-h ^ip içpijh '7
P 1 » tap*» i'7 5"'ph ">^0 Phpnu phTi i't)
. i7hphc i")h i-7
-71T3 *7 7rihph3))-h , "3 ph-i 'pp<h p —
-3fn h nftj'i'h 7*p n •;••) , ?}•■$ j-h pft'p
. vri n u
rr7D , 3 , B3KBOJip ]'K .*>p« l J310 'T7KD H7
P17hp-:31D P'Ih-p'C'h P*3*f>13 Pli lU'P
13"? pf)7ift phi-7 , pip7is p'ihmi pii yr>
Pi paph p'iipT-i) *7 ?t>'i i'7 rpiis rih
'7 ihisTp'h i - : - h , ij'fi P'S'MJ '7 'Ï13
on "h pirhp pn •76oipp'B '7 pipii pil
. pipftuft pih'ï pii*7 173"3'3'r8 piTJThw
i3ih u Ph'7 inp'l) i'7 7 ph:ift phi rush
-in pi;)TD3*6 pii '7i3:'h ;*bv6i» •: vfip •:
Pft D'iipT'n *7P'7. P17h3-li-3) pVhlD piju
-pip irhp lift i5if) 7 rh-ih îhi nuph p*S*6iî
;P7'B l'h ,7*0*6 '3" "' D*71T7*7 p*S yt) ldJT
i*3*ft ;:ih phçipp'h •! p'i'i>7hip pii yt) 4
•137hDP , 73 , f) ,pip"3 *7 ift31"p3'lJ ihîS'DP'ft
-:'h piup'ft . nhih":*p -•• i -hiê *p i-pft n
«•."aft'litaj "h.'ï:-rh-;ft-ii3 •,•" PP pi»7'D
piDP'h -7 puuihn 7iihp '7 i7hBp-h i-s^ft
. p'ush pi7h-p3i:h pirrpft >i -h pun-pj-h
u 12 pft7ift phih p'tvS ?t> p'i-hij '7
-3*ft p^-5 pii n pthp iSfo iu.3'3 îjth
îSift w 7 ph7ift phi psph ;4 ysvna pi»7*6
7 phi 'T.ihB'pp-h i'j'h -u-'hu) *3 ithp *j
lpO'1'3 TT : 71VP*7'7
ph:-)hp 10 '3"«ip f'iiB "BP'h
-•7P vsh "op-h *7 niriu i'7 ib'jtj i'ft
B316 ,B17ft?hB pi**:6 Plih 1Ï71BB7 71B ,P133'I
pii 71B phTi •■> vi'i) Vh '7 vphïs'inhft
•7h7'ftllh Pft •133'I)'îl"lB31p . P , 13:*'71p S - 13PB3
P7'P Pîl P PÏP'B 'p lV7*0 - 7 'BIP ,ih"7'P51*h
rh è":i"ppiT^ pp , 7hi3"j pi 7iD PBT'iip
-P'3-d ih phlhr-iph ph»ip phi oiip 7*ift
p:'-h» Pi'7 i**7**jp*: , l) ifi ,P77'J Pi'7 V'7'U
-3113) rh-Ti'isrh Pi-7 \i-'phii3P':'»ih pih "6
,•3-3 pnp3hyp phi "7 î-Tisp-j-:) i-h.^.-ftn
-pb-, OlDhp Pli -h!)71P3'h ,PB3'Bip*P3ip V ft
500 *7 Pt>-l)Wt> Pi 'P P1W))61376B*7 PU)
-*i 410,000 '7 P-*p 7»lh Pi chTi i'1)
46000 'b P7TJ pi'7 i"-.'VP'j';> 3"h IIP pt>7
Pi-7 pwup'j'jj cii '7 uift rlhp rh phTi
. rh-ri-ï-h pi*i -n rsoha
-3'h p'3i"P'3 - 7i3:ip phi '7 ii"pp»V7 Pi—
7'piTi *7 v"P*' ! orp ri ii'h Ph'Jh pftsp-7'7
-•5 'h ph"io pni ojip psBvj '7 pti'7'7 pib
76133*3 7*rh *7 vch ,7lih5 *7 piï'Î3'B pip
piisp-n *73ip pp*tph*p -p *p P73h3h7i3ip pi
.Cliip'1376
-yp3 - 6 oi îrh ib-^'cu-n rft*7*j*p3f>p ri
•73MJ 7'3*ï '".'hlP 13 Bill*)) PBB'6 -p ll"ph3
-hn phi *7 iv*pp*T7 ri îs^i'h "h lïp-p-h
. vsp'ftip ri i3*hi3 -7 ih'HiïP'fi ^b phs
'7 v'phisp'j'DTh ri-7 ph7h7B3'h ph:—
Fac-similé du journal constantinopolitain El Tiempo (Echelle 1/2).
2 6 R. FOULCHÉ-DELBOSC
Par contre, cinq caractères hébraïques représentent des sons inexistants en
judéo-castillan. Ce sont les caractères 3, "J, *J, XU, T\. On ne les emploie que
dans la graphie de mots d'origine non castillane.
VOYELLES MÉDIALES ET VOYELLES FINALES
Les voyelles placées entre deux consonnes ou à la fin d'un mot après une
consonne se transcrivent de la manière suivante ' :
X (alef) correspond à a; mais, à la fin d'un mot, a est toujours transcrit par
n (hé). Ex.: n"1NS para — rrnxSxE païavra.
La préposition à se transcrit par ,~!X. Il en est de même de ha (du verbe
baver).
i (iod) correspond à la fois à e et à i. Ex.: "IIQITS tenter — yiQ mil — "PJP3
venir — "INpH'HS predicar — CJ'DVE persigues — 'SiWHS principe.
Quand c ou i suivent immédiatement // ou n, on ne les transcrit pas, //, lie,
lli étant uniformément représentés par "nb et h, ne, ni étant uniformément re-
présentés par **;.
1 (vav) correspond à la fois à o et à u. Ex.: ÎQTlS porto — ■ mQlp comodo
— mi3 mudo — m: nudo — nTraiTO tortura.
VOYELLES INITIALES
Au commencement d'un mot, 1 et 1 sont toujours précédés d'un X. Ex.:
1DT>SJ'N enferma — C'X es — 13XDTN S'N el (fyermano 1 — "INTO^N entrar
— INTnipDW escuridad — "|\N îr — irx (V)ijo — \\ y — IN à — nialN
otro '"ÎIIDIX (h)ombre — ""x uno — 1NT331N untar.
Quand un mot commençant par l ou 1 devient le second élément d'un mot
composé, il conserve son x préfixé. Ex.: IXZPXO'H desechar — "llNSlplNDH
desocupado — "WIJlND'n desQi)onrar.
Exception : Toutes les fois qu'un mot commence par 11 (voir plus loin
voyelles jointes), on ne préfixe pas x. Ex.: "\2~\li yerno — rS" (h)ielo —
T1N11 ya-er — *" yo — VT** lulio.
Au commencement d'un mot, X correspondant à a n'est précédé d'aucune
lettre. Ex.: nQ7N aima — n"X asna.
1. A la suite de chaque lettre hébraïque et entre parenthèses j'ai indiqué son nom tel
que le prononcent les Juifs d'Orient.
2. h castillan est presque toujours muet en judéo-espagnol et n'est pas transcrit, par
[uent; il n'est aspiré que dans haragan et un nombre très restreint de mots. Dans ce-
cas il est transcrit par ]-| (bel).
LA TRANSCRIPTION HISPANO-HEBRAÏQUE 2J
CONSONNES
(L'ordre ndopté est celui de l'alphabet hébreu. )
2 (bed) se prononce b. Ex.: 71130*0 baston — TaU lever — y>2 bien —
1212 bivo— r\TÛ.boda— ip:xSl blanco.
2 (ved) se prononce v. Ex.: DTlOirD vosotros — 71"1**3 varon — TQ.'h Uvro
— "IN3''blN olivar — 11N2K avaro — in*$J nave — 7N~2"D civdad — i"tt3*ip
cavsa — n*T2H devda.
5 (guitnel) se prononce comme g dur. Il représente :
io g devant a, o, u ou une consonne. Ex.: rUlAWD sinagoga — 13H digo
— ÎTTUN agora — nMND sangre — -nblJ golor — Tû^NlMIN ungûento;
2° gu devant e, i. Ex.: mu ?uer(f)a ;
3° /; devant m> (on sait que &we initial castillan se prononce à peu près^w,
le son du g étant plus ou moins perceptible suivant les contrées). Ex.: ID'NU
gûeso — 113T>Nia gûerto — UnS"'13T»*{13 gûertelano.
73 se prononce g%. Ce groupe représente x lorsque x a le son g%. Ex.:
Tl3Dna ,| .*î existir.
j (djimel) se pronoce tantôt </y tantôt tcb :
Quand il se prononce dj il représente soit g devant e, i, soit y. Ex.: T3-N
fl»o-c/ — V7D3WT»5 gerenancio (genêt acion) — VCNISy'/Zf/o — VaSi jue\ —
Vliifudio — D113Jia/««/05 — .-pm^N injuria;
Quand il se prononce tcb il représente cb. Ex.: IJIE mucbo — 1JIN31D mu-
chacho — IJfH'H derecho — IJU noche — ÎJH dicho — IJ^S /v<7jo.
7 (Jr//c(/) se prononce d. Ex.': T1D swd — DlXT*rPp quedadvos — 7*nb**E
maldad.
1 (dhaled) se prononce à peu près comme th anglais ; cette lettre représente
le d intervocalique des participes passés en ado et ido , le d final des mots en
dad et le d d'un certain nombre de mots. Ex.: 17ND** amado — 7*nT»3 verdad
— 7N731D civdad — *7xS lado — 17N13Dlp costado — TpTTJO ladrou —
vS^I^nS ladrillo. Remarque. Dans la Bible judéo-espagnole imprimée à
Constantinople en 1873 et dans le Nouveau Testament judéo-espagnol imprimé
dans la même ville en 1877, il n'est pas fait usage du 7 ; on l'a toujours rem-
placé par un 7 .
7 (gain) se prononce comme 1 français et correspond :
1° à % espagnol. Ex.: 713 ve% — 7lS lui — TTH de^ir — 7NE pa% — 7N
(b)ai — Vitàjuez;
2° à s intervocalique Ex.: H7Xp casa — 17l73"H^S péligroso — !T ,,, D2'>'?'H3
preseticia ;
3 à s précédant certaines consonnes. Ex.: H7H desde — -|N7N~>7NTe tras-
ladar — 107^12 mismo — ~"N asna.
28 R. FOULCHÉ-DELBOSC
7 (djairî) se prononce dj et représente/ on g devant e, i. Ex.: n^PTN oreja —
"l>ttN"l*n barajar — H71N (J))oja — T^ID mujer — îflp cogi — TlTÏ'l regi-
dor — *7\\ (J))ijo — Hnj. viejo — I^DIIp consejo.
Pi (het) se prononce comme un /; fortement aspiré. Ex.: TNiNINTI haragan
inNQ wfl^o (mou) — 'U'i'îxn ftop«o (malade, de l'arabe ,.^ j-^ triste, affligé)
— "TI^N" ba^inora (maladie) — TX2"lxnx aharvar (frapper).
13 (Jed) se prononce /. Ex.: "IN12 X'2 matar — *T2:XT2 tanto — "ïaMan'lS tes-
tigo.
S (lamed) se prononce /.Ex. : Sx al — Tn la — ITDJKIH delante.
ir-j représente les // mouillés du castillan et se prononce de même. Ex. :
"OtnîO'b lîamar — 1NT1"S llorar — YPpib'>2N"!Na maravilloso — vS'lDDNp
castiïïo. Remarque : iii est une graphie uniforme pour //, lie, lli, Ici, lie et li
devant a (ia formant diphtongue). Ex.: "\2Hj lleno — 1X2 1 'H llevar — l'HNp
calle — iiSn alli — "S ley — wb lien\o — m'^N'CX Italia.
Q {mon) se prononce m. Ex.: "ix?2 mar — "H7XÏ2 madré — lJf.lD mitcho. A
la fin d'un mot, S prend la forme D.
; (noun) se prononce ». Ex.: îTTiU nada — "UIM^ ninguno — M no —
npJIJ nunca. A la fin d'un mot, : prend la forme "J. Ex.: "jXE pan — 7TY12N3
patron.
iï; représente n et se prononce de même. Ex. : niX'f-X^ maiïana —
Sx-I'C seùal — rplj'a vina — "P^IXl dafio — TP^'D senor. Remarque : 112
est une graphie uniforme pour », îie, ni, net, nie et ni devant a ( ia formant
diphtongue).
D (sameh) se prononce comme s initial français. Il correspond :
i° à c devant e, i. Ex.: npTD cerca — D^DNS faces — 1TDTT3 tercero —
S'D"lNp carcel — n^DI^C" 1 licencia — SlDXS facil — HD'D^N encinia —
*p; 7 D cinco;
2° à ç devant a, o, ». Ex.: "INdSn alçar — "IND'SniSJTN entropeçar —
HDJX^CD semejança — 1D1T3 moço — 1DK13 braço — "pDXTlp coraçon;
3° à se devant e, i. -- Ex.: 'h'Z"D'~ discipuh — H;' ,1 D' ! ~ desciende. Re-
marque : Dans un mot composé, s dernière lettre du premier composant et c
première lettre du second sont représentés par DD. Ex.: DIISj^DDII doscientos;
4° à i" au commencement ou à la fin d'un mot. Ex.: H32ND sangre — DU
nos — DNTON auras ;
5° a s précédé ou suivi d'une consonne. Ex.: 1J22H ansi — "INTSD'W espirar,
' - INïZNbpD^N esclamar — rcS*,2 boisa;
6° à ss. Ex.: "INTDJIDN assentar — nr ,N 2"^E promessa — "1XDXE passar.
£ ( pé) se prononce/'. Ex.: 'S^D^IS principe — T»S^S propio — HinS
prova. A la fin d'un mot, £ prend la forme tv Ex.: cp«p Yus(e)p.
£ (fê) se prononce/. Ex.: nU'SIIS projeta — THS1D sitfrir. A la fin
d'un mot, £ prend la forme n surmontée du rafê.
LA TRANSCRIPTION HISPANO-HEBRAÏQUE 29
p (cof) se prononce k. Il correspond :
1° à c devant a, 0, u ou une consonne. Ex,: iJIKp carne — IpND saco —
"PD'Hp crimen ;
2° à <;« devant e, i. Ex.: >p que — "IKCp quitar — ipx aqui ;
3° à k dans certains mots étrangers. Ex.: DIT 11 Fori.
Dp se prononce kç. Ce groupe correspond :
10 à ce devant e, i. Ex.: vejH^DplN Occidente;
2° à x dans les mots où x se prononce fep. Ex.: rVYTJNDp'HN Alexandria.
"I (ra//) se prononce r. Ex.: "|ND tnar — i'£~\"Z norte.
U? (chiti) se prononce comme les ch du mot français chercher. Il correspond :
10 à x de l'ancien castillan. Ex.: ï&H <&œ — "lt&H dùo — 1NUH *.w —
"1n£\N2N abaxar — irN2H rfétoo — DT&">b ^'.vo5 — IJNUn /cvaho —
lSsnii&JiN enxemplo — pni'&'nTa truxeron — "pT^'B texierou — TPItfï'O
/&w7/o — lUlp coxo — "!N3V£*"N enxugar ;
2° à 5 dans certains mots où 5 est suivi du son Z.\ Ex.: "INpUIH fawaw —
"|Np»&'3 pescar;
3° à w final des deuxièmes personnes du pluriel des verbes , quand is est
précédé d'une voyelle : Ê'NQN amais — U^CU temeis — UN'C'H dexais ;
4° à is dans le mot 'C'iC sets.
Outre les consonnes qui viennent d'être étudiées, il convient d'en citer cinq
autres qui ne sont usitées que dans des mots d'origine non castillane.
3 (caf) se prononce k. Ex.: D^ïSD Oipros. A la fin d'un mot, Z prend la
forme "i.
I "J (ain) a le même son guttural que le r, turc, son beaucoup moins rude,
C ^ .
par conséquent, que le r. arabe. Ex.: ipi\N"l2y hebraico — ■ "pyD'tt/" Simon.
S (sadï) se prononce ts. Ex..: ]V2 Sion. A la fin d'un mot , 'J prend la
forme V.
\1' (««) a ^ e même son que D (samek). Les Juifs d'Orient ne font aujourd'hui,
dans la prononciation, aucune différence entre ces deux lettres. Ex : yc w" Satan.
n (/<«•) a le même son que 12 (ted). Les juifs d'Orient ne font aujourd'hui,
dans la prononciation, aucune différence entre ces deux lettres. Ex.: ni"IT2
Martha — Cl^SlNT! Theofihs — np'JlbNDT Thessahmica — rP 1 E\S" , n\N
Ethiopia — DVn:mp Corinthios — riDin Thoma.
CONSONNES DOUBLES
On ne redouble généralement pas les consonnes. Ex. : ni^tS tier(/)a —
m'lM r ) fl -WlN ar(r)iva — "INTD cer(r)ar — nmp cor(f)er. Cependant
on trouve quelquefois le redoublement : mi»!: tierra — HITS guerra, etc..
R. FOULCHE-DELBOSC
LIGATURE
La seule ligature employée dans la transcription hispano-hébraïque est àlef-
îatned ; mais l'emploi n'en est pas obligatoire.
VOYELLES JOINTES
Groupes de deux voyelles dont aucune n'est i.
Quand deux voyelles se trouvent l'une à côté de l'autre, si la seconde n'est
pas a, un x les sépare :
,;-• ixx Ex. : TXXHI2 traer — IICD'XX'Z maestro;
ao 'xx Ex. : -ixaiXN aQîpgar — mixx a(h)ora;
au 1XX Ex. : 11XX ami — "1XT2^~2*XX aumentar — nuSxTGDlXX Aus-
tralia ;
ee ixi Ex. : "xnp crée — iTX"Hp encré — DV2\S'iSi£ peleemos;
eo ixi Ex. : "x ,; 2 veo — yiWS peor — 1X1Ï21DX açoteô;
eu ixi Ex. : IplJlxiX eiuiuco ;
oe ixl Ex. : DixlSx alocs;
ue "X" Ex. : IIPXID fuego — DWSDH despues — HDJ'NiaT'2 verguença ;
uo 1X1 Ex. : 1X1^X12 fraguô.
Quand la seconde voyelle est a, on n'emploie pas le x intermédiaire si les
deux voyelles ne terminent pas le mot ; mais on l'emploie si les deux voyelles
sont les deux dernières lettres du mot. Dans ce dernier cas, a final est, on l'a
déjà dit, transcrit par n.
Dans le corps d'un mot : A la lin d'un mot :
ea 1713*013 teatro — "WUNTD bor(f)achear —
■jxzx , ~"" 1 rodeavan;
ua DX" X aguas — ITJXlp cuamlo — 111X15X13
fraguador.
Groupes de deux voyelles dont l'une est i.
nxiC sea;
nxiax agua — nx'pcxE
Pascua.
groupes et et ie formant diphtongue sont transcrits uniformément par n
ei "■! ley - - "INJ^I reinar ;
ie lis pie — "jiip quien — iSuc cielo — ITCjiHX adientro — i:"|ii yerno —
(h)ielo — ÏÏ2')Vi (]})ierva.
Toutes les fois que i suit ou précède une des voyelles a, o, u et forme
diphtongue avec elle, il est transcrit par n.
ai lïN Ex. : »N Q))ay — HJiHX (b)aiga — il-iX aire;
wnonfinal x" Ex. : "WSQibN alimpiad — "WHii yaqer;
la final n"i Ex. : rpi va — n^DN Asia — riiiC'Sx^ màlicia;
LA TRANSCRIPTION HISPANO-HEBRAÏQUE
oi ni Ex, : iilD soy — HTeD\N estoy — W1H oigo — ïvin (h)oy —
1VD voy;
io Vi Ex. : il"! yo — "PH Dio — ViVD medio — IHDnSnS pàlacio
— T^SkD salià — pilDJiT3JiN intention — lllîijlN
envia ;
ui 111 Ex. : nm inuy — "iNT'np a«<far — VTNTnip cuidado;
iu "|ii Ex. : liiSln Iulio.
Quand les huit groupes de voyelles que l'on vient d'énumérer ne forment
pas diphtongue (chaque voyelle appartenant à une syllabe distincte), i est
transcrit par un seul i et est séparé de l'autre voyelle par un N. Il convient
toutefois de ranger à part le groupe ta.
ei îN'i Ex. : DlQWIp creimos — itODiiOlp creiste;
ie \\i Ex. : SwSjfeJ — SiN'E^N infici ;
ai inn Ex. : n~;iNNl dainda :
oi \\*1 Ex. : "PN"IN oïr — VPNlN oido — UH2D1N1N oisteis ;
io Mil Ex. : 1N17N2 va%io — iN'i^JiN envio — INIQ mio — "llN'lTSlD
super ior ;
ui \x"1 Ex. : *PN1*N3DH destruir — "piDWlS juicio.
A la fin d'un mot, ia (ne formant pas diphtongue) est transcrit par HNi.
Ex. : HN'il dia — nt02N (Ji)avia — HN'ifK (h)ti^iu. Dans le corps d'un mot, la
(ne formant pas diphtongue) est transcrit par JO. Ex. : DNH dias — 7N1ZX
(li)avian — DlQtfi3>* (h)avianios — 7Ni~i"T deçian — iSîixH diavlo — 17N12
viaje — HDZNif Jlp confiança.
Pour que l'on puisse mieux saisir l'application des règles précédentes, je
reproduis ici les premières lignes de la Genèse d'après la Bible judéo-espa-
gnole imprimée à Constantinople en 1873 ', et un article du journal El
Telcgrafo, en date du 23 janvier 1894.
DlS VH SiN lN'Hp 1H21DJ11S SiN VU En el principio criô el Dio los
niniD nS IX. mua nS \S' DiSud cielos y la tier(f)a. Y la tier(f)a
"TN*P"npCiN in ; rWTN3 1 N n;xz HTN era vana y vatfa : y escuridad
-DUN* Sh DlDNS Ciih i"121D n2N12D\X estava sovre las faces del abis-
1. Il ne sera pas sans intérêt de copier ici les premières lignes de la Bible de Ferrare :
En Priçipio crio el Dio : à los çielos, y à la tierra. Y la tierra era vana y vazia, y
escuridad, sobre faces del abysmo : y espirito del Dio se movia, sobre faces de las aguas.
Y dixo el Dio, sea luz : y fue luz. Y vido el Dio, à la luz, que buena : y aparté el Dio,
entre la luz, y entre la escuridad. Y llamô el Dio à la luz, dia ; y à la escuridad, llamô
noche : y fue tarde y fue manana, dia uno.
R. FOULCHE-DELBOSC
*r lui Sll ViZ'^'ED'X pH ix : 1C tno : y el espirito del Dio se
.DN13.N DnS H DiDNS DX; ilîllD iltfiiilD tnovia sovre las faces de las aguas.
'X'Z "X 7*'^ ïIJOD VH S\N IT&n ">X Y dixo el Dio, sealu^, y fui
7WH ip "îlb nS VT S\X 1T3 'X ."m Z«^. Y vido el Dio la lui que era
vyQVH Vi~ b\X TC1N3N \X : n;\x*2 buena : y aparté el Dio entre
S\X "ICNnS \X .IxmipDiN nS \X ~lS nS lalu\y la escurîdad. Yllamô el
-7"TlpDiN nb HX itf nx 1 " TtS H; Î1X lui D/'o a /a Z«^ dia, y d la escuri-
1N HINC nS \\13 \X : IJU lON^i; TXT dad llamô noche : y fui la tarde y
.HX"! "px riJNHJNQ nS Ai manana un dia,
lbi"CD*X ITODiNlJ Nuestro estilo
-HZ"2 r'Z *p ''WDNpJîOS DlDXATliaN Atorgamosfrancamenteque nos topa-
WVZ CxS 0X1112 lDNlîOQiN S^X "PX Dl*2 mos en elembaraço todas las ve%es
i"12lD !"lTlp njljSx "11 7H H ni2X"H2 1D ip quesetratadede^iralgunacosa sovre
-VT£ D1112D\X12 Sxlp nS H nTJNn ÎTJ la maner a de la cual nuestros perio-
-T7X "IIS 1iD"liDi"13DpiN "î^in DUlDDil distas deven exprimirsen por (h)a%er-
~S ipTiS DilTCpiS D1D il "IHJIIDJIN TiD rera entender de sus leclores porque la
if iS2i"l2SiDlD 1D1*1N3 D1J *: ■jV'CD'X'p cuestion no nos parece susceptivle de
11112 ilîllD \X "pUDlTID H31X "PIliDil recivir una solucion y sovre todo
Sx niNplbVnS piiDNiai^N nS ip miXX a(h)ora que la agitacion provocada al
.niND^Np nuS D\X n ,, 'S , X n UTTOJiN entorno de élla es lia (ya) calmada.
-DiN-lNml Sx HJiXl3,i112N 13 "PX 11112 Todo en no atrtbuendo al judeo-es-
-nSs 'D' Di:iaSx ip D^lTaTâ CxS SlnjXE /whoZ Aw virtudes que algunos se pla-
D1DKDJ1S DTTOTîlJ ,i ;"PDl"pi"l HX "T^T ^'» à reconocerle, nosotros pensamos
il i;2iDl£ D\X D13 II ip 13QH1D 1T12 ip que todo tiempo que no nos esposivlede
DNT3D111HT3 DlTCCNi: ,lS"ix:ii:X2X abandonarlo, nuestros periodistas
-'".T.'t^Z il "pDlNDTNlSDiN 7X11211 devrian esfuerçarsen de perfection
H lllNpTDN nx HJXpi&ia "PX ,lblX3 narlo, en buscando à acercarlo de
•j'X : naiTl SiN Sxlp ilS H nxi:rS nS Ai lengua de la cual èl dériva, eu
lbbV>DiDpN ,, ^x":: ,:i 1D Tin H iTQDi3 wsta d« renrf«r i« lenguaje accesivl
il IN DilTDpiS D1D H HONG nS 7\X à la masa de sus lectures y de
ClS H nuiNliTSib IiSnÎI "^ "'X"^:^21XX aumentar la valor literaria de los
."pIlTH r"""' - "x ip D"*'iX , 'l &n'w <///.' r/Aw redigen.
-iSsn r - : D11T3171J ,D1J H D\X ip iS 113 Por/o que es de nos, nosotros nosapli-
-r^rx ■";": '" Dil23N TD nx DiailNp caremos à ser antes de todo enten-
-ibsDiN VU IpiSaiS "* ,- l2- , x": il DIIH didos de nuestro publico en emple-
*x r 3NSD1N DN'IÎInSnS 113QHD *~:x ando siempre palavras espahol
-D31p H; DNDN1S DNliaDiNU nx 11JN1 dando à nuestros frasas la cons-
/""IN'îl'n "j" , *r"' , w~ truccion espanol.
LA TRANSCRIPTION HISPANO-HEBRAÏQUE 33
"IH\N12 H ï'pïD^'D'HS rh DIO^IS M No teuemos la pretension de pueder
-p'STS 71p "l'D'HpDlN HN IN'^IIN 1D2N ansi arrivar à escrivir cou perfec-
11 ,« DïTDaiOTD » H rWWH nS "J111D cio« fa laigna de « Cervantes », rfe
, « rW-â H 'Su » n 1 N* « ïlinSKp » «Calderon » y Je « LopedeVega».
-in DNG 71 D D'WDJilMW DN"TCD\Si: Nuestras intenciones sou mas mo-
-n'N H D\N TamSIlS ÎTOÛ^U .DN73DH i«to. Nuestro proposito es de em-
-J'Unn VTHDWJ INp^niE nx DIJIN^S plearnos à purificar nuestro jerigon-
y& DND H lS'l"T:N , 7 , 'Sv:NEC 1 N 7^n m ça en espanoliqmdolo de mas en
R. Foulché-Delbosc.
Revue hispanique
ÉTUDES
SUR
LA LITTÉRATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIÈCLE
JOVELLANOS 1
La plus grande partie de la vie de Jovellanos appartient au
xvin e siècle, mais il a exercé une influence si considérable sur la
génération du début du siècle suivant , il a soulevé et essayé de
résoudre tant de problèmes dont la solution devait passionner
ceux qui vinrent après lui r qu'il doit nécessairement figurer au
début d'une étude sur la civilisation moderne de l'Espagne. Alors
même que nous nous renfermerions dans les limites un peu
étroites d'une étude strictement littéraire, Jovellanos forme, avec
Meléndez, Quintana et Moratin, un groupe d'écrivains qui permet
d'étudier à différents points de vue ia transition entre les deux
époques. Je dis un groupe, et non une école, car il y a des diffé-
rences très sensibles, non seulement dans leur talent, mais encore
dans leurs principes littéraires. Cependant ils ont tous ceci de
commun, c'est qu'ils essaient, avec plus ou moins de décision
et de succès, d'introduire dans les anciennes formes littéraires
des idées modernes, et d'unir aux inspirations traditionnelles
l'esprit nouveau, dont la France avait été la principale introduc-
trice en Espagne.
i. Cet article a été rédigé d'après des notes d'un cours professé à la l'acuité
des Lettres de Toulouse.
ETUDES SUR LA LITTERATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIECLE 35
Quoique nous n'ayons rien à ajouter de nouveau à la biogra-
phie de Jovellanos 1 , nous ne saurions la passer absolument sous
silence, car il est de ceux dont on a pu dire que leur chef-d'œuvre
était leur vie elle-même. Il a réalisé, dans la mesure de ses forces,
l'idéal qu'il avait exprimé dans ses œuvres, et les événements
ont donné à son existence quelque chose de grand et de drama-
tique.
Gaspar Melchor de Jovellanos (ou Jove-Llanos) naquit le
5 janvier 1744 à Gijôn, province d'Oviédo, dans les Asturies.
Il termina, par des études de droit à l'Université d'Alcalâ, son
éducation commencée ou poursuivie à Gijôn, à Oviédo et à
Avila. Après quelques velléités d'entrer dans la carrière ecclésias-
tique, dont on le détourna sans beaucoup de peine, il fut nommé
alcalde de la Sala del crimen à l'Audience de Séville. L'unique
recommandation que fit le ministre d'Aranda au jeune magistrat,
lorsque ce dernier vint prendre congé de lui, paraît singulière,
mais elle cache plus de sens qu'elle n'en a l'air tout d'abord :
« Croyez-moi, Monsieur, lui dit-il, ne vous coupez pas vos beaux
cheveux... Faites-vous les friser sur le cou, et commencez, par
votre exemple, à bannir ces toisons (çomience â desterrar taies
%aJeas) qui n'ajoutent rien au respect ni à la dignité de la toge. »
D. Francisco Silvela 2 assure que c'est depuis lors que les magis-
trats espagnols ne portent plus perruque. Tfakalde de crimen,
Jovellanos devint bientôt oidor. Nous le voyons à cette époque
très mêlé à la société dont le célèbre Pablo de Olavide était
rame. Dans ce milieu, si favorable aux idées réformatrices et aux
innovations de toute sorte, Jovellanos s'occupe avec une égale
ardeur des choses les plus diverses, mais surtout d'économie poli-
tique et de poésie. En même temps qu'il étudie la culture de
1. Ceân Bermûdez, Mémoires de Jovellanos, 1814. — Cindido Nocedal (Obras
de J. dans la Bibl. de Aut. Esp.). — Julio Somoza, Jovellanos, 1885.
2. Franc. Silvela, Jovellanos, conferencias del Ateneo, t. II (1887), p. 37.
36 E. MÉRIMÉE
l'olivier, les filatures, les prairies artificielles, l'organisation des
hospices, il entretient des relations suivies avec les poètes de
Salamanque, compose des idylles, des drames tels que Y Honnête
criminel CEI delincuente honraào} , ou Pelayo. Lorsqu'en 1778,
nommé aïcalde de Casa y Corte à Madrid, il dut quitter Séville, ce
ne fut pas sans un déchirement de cœur qu'il se sépara de ses
amis. « Loin de toi, ô Séville, loin de vous, ô mes amis, com-
ment mon cœur pourrait-il s'ouvrir à la joie ? » Il resta, à Madrid,
ce qu'il avait été à Séville, et nous le voyons écrire, tout en fai-
sant une enquête sur un vol, cette Epistola ciel Paular, l'une de
ses meilleures inspirations poétiques. Ces années de Madrid sont
parmi les plus fécondes de sa vie : membre de la Société Écono-
mique, de l'Académie de l'Histoire, de l'Académie Espagnole,
de celle de San Fernando , et de Jurisprudence ; il n'est aucune
forme de l'activité intellectuelle qui lui reste étrangère. Il com-
pose, en 1788, l'Éloge de Charles III, rédige le Rapport sur la Loi
agraire , la Consulta sur la Juridiction temporelle du Conseil des
Ordres, dont il était membre, le Règlement du Collège impérial de
Calai rava. Jovellanos partagea, en 1789, la disgrâce de son pro-
tecteur Cabarrus. Exilé à Gijôn, sous prétexte d'un rapport à
faire sur des mines de charbon, il s'acquitte de sa mission, orga-
nise Y Institut royal Aslurien , rédige des mémoires sur Y ouverture
de la route de Léon a Oviédo ou Sur la police et l'origine des spectacles
publics en Espagne. Au début du règne de Charles IV , le Prince
de la Paix, sur les sollicitations de Cabarrus, nomma Jovellanos
ministre de la Justice, mais il ne réussit pas à faire du trop per-
spicace homme d'Etat un partisan aveugle de sa politique. Il ne
lui pardonna pas son manque d'enthousiasme, ni même, paraît-il,
son manque de complaisance pour des amours royales 1 . Exilé
de nouveau, Jovellanos fut emprisonné le 13 mars iSor, conduit
à Majorque et emprisonné successivement dans la Chartreuse de
1. Voy. sur ce point Blanco-White, Letters front Spahi, p. 346, cité par
Mcnéndez Pelayo, Heterodoxos, III, p. 294.
ETUDES SUR LA. LITTERATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIECLE 37
Valdemuza et au château de Bellver. Il n'y resta pas inactif:
c'est de là que sont datées de nombreuses poésies, son Mémoire
sur le château de Bellver, une volumineuse correspondance et son
Traité sur l'Education publique. Il n'en sortit que le 22 mai 1808,
pour rentrer en Espagne au moment où les événements les plus
dramatiques s'y déroulaient. Murât, Sébastiani, Napoléon lui-
même lui firent les avances et les offres les plus séduisantes,
estimant sans doute que le libéralisme de ses idées aussi bien que
le ressentiment des persécutions subies le désignaient comme
l'un des soutiens de la dynastie nouvelle imposée à l'Espagne.
Jovellanos n'eut pas un moment d'hésitation. « Quand bien
même, disait-il, la défense de la patrie serait aussi désespérée
qu'ils le pensent, ce serait la cause de l'honneur et de la loyauté,
et celle que doit suivre, coûte que coûte, tout bon Espagnol. »
De toutes les pages écrites par Jovellanos, — et elles sont nom-
breuses, — je n'en sais pas qui lui fasse plus d'honneur que sa
lettre du 24 avril 1809, en réponse à des offres nouvelles de
Sébastiani.
Le choix que firent de Jovellanos ses compatriotes des Asturies
pour les représenter, en septembre 1808, à la Junte suprême de
gouvernement, fut une juste récompense de la netteté de son
attitude. A la Junte centrale aussi bien qu'aux Cortes, il se signala
par la fermeté et par la modération de ses opinions aussi éloi-
gnées de l'absolutisme des uns que des exagérations révolution-
naires des autres. On sait quel sort attendait les membres de la
Junte : indignement calomniés et poursuivis, ils durent fuir et
attendre, pour se justifier, des temps meilleurs. Comme il regagnait
les Asturies par mer, Jovellanos fit naufrage à Muros de Noya,
près de la Corogne. Il y reste un an, non sans être vivement
inquiété par les émissaires du gouvernement. Ce fut pendant cette
retraite forcée qu'il écrivit son éloquent Mémoire en défense de la
Junte centrale, si précieux pour sa biographie. A peine était-il de
retour à Gijôn, en juillet 181 1, que les troupes françaises enva-
hissaient de nouveau les Asturies. Jovellanos s'efforça de réveiller
38 E. MÉRIMÉE
l'enthousiasme patriotique de ses concitoyens, et les excita à la
résistance :
i A las armas, validités Astures !
Empunadlas con nuevo vigor,
Que otra vez el tirano de Europa
El solar de Pelayo insultô.
Mais les temps de Tyrtée étaient passés : il fallait fuir de nou-
veau devant les Français victorieux. Jovellanos reprit donc préci-
pitamment la mer, mais sa barque naufragea à Vega, et ce fut là
que mourut, le 27 novembre 181 1, celui que l'on devait appeler
bientôt le Père de la Patrie.
Quelque rapide qu'il soit, le résumé de cette vie si bien remplie
suffit à montrer qu'il y eut tout à la fois en Jovellanos un homme
d'Etat, un économiste, un écrivain, et c'est en effet à ce triple
point de vue qu'il mérite d'être étudié. Le politique, l'écono-
miste paraissent nous échapper et rester en dehors de notre sujet,
mais tout se tient si bien dans cet esprit sagement équilibré, qu'il
semble que l'écrivain n'existerait plus s'il n'était inspiré, soutenu
sans cesse par son idéal politique et social. Ce serait donc le
rabaisser, le découronner, en quelque sorte, que de ne voir en
lui que l'artiste.
Mais avant de le suivre dans l'exposition de ses idées politiques
ou économiques, essayons de dire quelle fut la marque distinc
tive et caractéristique de son esprit. Que l'on considère ses idées
ou ses actes, on s'aperçoit bientôt qu'il tend toujours vers le vrai,
le juste, le pratique, et que pour lui vérité, justice, utilité ne sont
que les trois faces d'une même chose. Son but, vers lequel il
marche avec l'enthousiasme confiant de la plupart de ses contem-
porains, c'est le bonheur de l'individu, de la nation, de l'huma-
nité, trois termes qui ne s'opposent point les uns aux autres,
mais qui marquent les trois étapes d'une évolution fatale. Ht pour
réaliser un jour ce bonheur définitif, la vraie méthode, c'est
l'observation scientifique des faits moraux, historiques et sociaux.
ÉTUDES SUR LA LITTERATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIECLE 39
Car l'homme ne doit pas attendre le bonheur du hasard des évé-
nements ou d'un don gratuit de la Providence : il peut, autant
que son imperfection le lui permet, se l'assurer lui-même en se
soumettant aux prescriptions de la raison , dont la science lui
formulera les lois. Ainsi me paraît pouvoir se résumer la philo-
sophie sociale de Jovellanos, mais je dois dire que nulle part il
ne l'a formulée en termes exprès : sa doctrine, si tant est que ce
mot convienne ici , se réduit à un mélange assez incohérent de
Locke, de Hume et de Condillac 1 . Il est avant tout estadista. Au
lieu de partir de principes abstraits pour aboutir à des conclusions
qui, malgré la rigueur logique des déductions, se trouveront peut-
être en contradiction avec la réalité des faits , c'est au contraire
des faits particuliers qu'il s'élèvera jusqu'à la constatation d'une
vérité sociale ou d'une loi économique. Il est de la même famille
d'esprits que Montesquieu, bien plus que de celle de J.-J. Rous-
seau. Si son nom est moins illustre que celui de l'auteur de:
Y Esprit des Lois, c'est qu'il s'appliqua plutôt à faire passer dans
la pratique les réformes suggérées par l'observation qu'à réunir
en un majestueux ensemble les faits que son expérience ou celle
d'autrui lui fournissaient.
Mais ce qui paraît, dans l'histoire des idées en Espagne, plus
nouveau encore que la méthode, c'est l'esprit qui inspire cette
philosophie sociale de Jovellanos. Bien des moralistes avant lui,
depuis Ferndndez de Navarrete , avaient essayé de déduire de
l'observation des faits les principes de la science sociale; ce qui
est particulier, si je ne me trompe, c'est que ce patricien, non
plus par élan de générosité, ni par charité chrétienne, ni par
quelque réminiscence de philosophie stoïcienne, mais par une
conviction fondée sur les données de l'histoire et de la philo-
sophie, oriente résolument sa politique dans une direction
nouvelle : le peuple, entre les diverses classes duquel il n'y a
1 . Voy. une ingénieuse Vindicaciôn de l'orthodoxie de J. au tome III, livre VI,
ch. III, des Hcterodoxos de M. Menéndez Pelayo.
4 o
E. MERIMEE
désormais d'autres différences, selon lui, que celles justifiées
par la diversité des mérites , ou consacrées par l'intérêt histo-
riquement reconnu de la communauté. Voilà qui commence à
bien marquer l'originalité propre a Jovellanos.
Je sais bien qu'à mesure que l'on pénètre plus avant dans l'his-
toire un peu confuse de la société espagnole au xvm e siècle, cette
originalité de Jovellanos paraît moins grande. Beaucoup d'esprits,
amis du progrès ou simplement aventureux, avaient, sous la
double influence des encyclopédistes et des économistes anglais,
propagé en Espagne ces idées nouvelles, essayé même des réformes
pratiques. On retrouverait assez facilement les principales idées de
notre auteur chez Campomanes, Penaflorida, Olavide, Cabarrus
et quelques autres. Mais Jovellanos me paraît avoir apporté, dans
l'exposition de ces nouveautés, plus de mesure, plus de désinté-
ressement et plus de précision, de telle sorte que l'opinion, qui
ne juge qu'à distance et en gros, lui en fait volontiers honneur.
L'œuvre maîtresse de Jovellanos homme d'Etat, c'est le Mémo-
rial pour la Junte centrale. Il dut naissance à l'un de ces événements
qui font époque dans la vie d'un peuple. Il est à remarquer d'ail-
leurs que le hasard des événements ou quelque impulsion reçue
du dehors, plus encore que le développement régulier de sa pen-
sée personnelle, ont dicté à Jovellanos ses œuvres caractéristiques.
Après la disparition tragique de l'ancienne monarchie qui, en face
de l'envahisseur, laissait l'Espagne sans gouvernement, sans
direction, il fallait refaire l'édifice, ou du moins approprier les
éléments encore utiles de ce dernier à ce qu'on allait mettre à sa
place. Nous n'avons pas à rechercher ici comment les hommes
appelés à l'honneur redoutable de foire face à cette situation sans
précédents furent amenés à créer de toutes pièces cette Consti-
ÉTUDES SUR LA LITTÉRATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIÈCLE 41
tution de Cadix qui, en dépit de ses insuffisances, de ses contra-
dictions, de ses naïvetés, témoigne de leur honnêteté et de leur
largeur d'esprit. Jovellanos prit une part des plus actives aux tra-
vaux de la Junte centrale, et il est facile de marquer dans quel
sens s'exerça son influence, soit par les procès-verbaux des déli-
bérations, soit, plus commodément, en lisant le Mémorial, qu'il
rédigea, de juillet à septembre 1810, dans les rares moments de
tranquillité que lui laissèrent la guerre ou les persécutions de ses
ennemis.
Le gouvernement qu'il eût voulu donner à ses concitoyens ne
diffère pas beaucoup, au fond, de la monarchie constitutionnelle
et représentative, telle à peu près qu'elle existait en Angleterre,
avec séparation très nette des trois pouvoirs exécutif, législatif,
judiciaire, et garanties constitutionnelles, destinées à éviter les
conflits et à assurer l'indépendance à chacun de ces pouvoirs,
dans sa sphère d'action. Parmi ces garanties, Jovellanos comptait
un corps intermédiaire, ou Sénat, et la responsabilité ministé-
rielle. Cette conception de l'Etat moderne n'était certes pas une
nouveauté, mais jamais elle n'avait été formulée en Espagne avec
autant de netteté. On sait quel avenir lui était réservé. Il est
permis de conclure des lamentables événements qui déchirèrent
la péninsule pendant la période suivante, qu'elle heurtait encore
trop violemment les traditions et les habitudes pour qu'elle pût
passer, sans secousses, du domaine spéculatif dans la réalité. Il
semble que Jovellanos en ait eu le pressentiment. Mieux avisé
que beaucoup de ses concitoyens , — parce qu'il voyait plus
loin, — il ne prétendit point réaliser sans retard ni tempérament
tout ce que lui dictait la raison, et c'est peut-être ce qu'il y a de
plus admirable dans son action politique. Au lieu d'accuser les
différences entre l'ancien et le nouveau régime, il s'applique à
faire voir que l'ordre de choses à établir ne devait pas être un
divorce ni constituer une révolution, mais sortir naturellement
de l'antique constitution espagnole, et qu'il avait ses précédents,
sa raison d'être, et, par suite, sa légitimité, dans les entrailles, en
_|2 E. MERIMEE
quelque sorte, de la vieille loi nationale. Il pensait, à peu près
comme M. Taine, que cet organisme infiniment compliqué et
délicat qu'on nomme la constitution ou le régime politique ,
produit, par son développement normal à travers les siècles,
une certaine manière d'être qui devient la vie propre de la nation,
et que si, par suite d'excès ou d'infidélités à la loi fondamentale
de son existence, cet organisme dépérit, ce n'est pas en lui infu-
sant brutalement une sève étrangère, un sang emprunté, qu'on
lui rendra la santé, mais en éliminant, par une hygiène attentive,
les éléments morbides qui s'y sont introduits, et en te ramenant
à sa pureté originelle. Il ne faut pas détruire, répète-t-il sans
cesse, il faut guérir, améliorer, et le remède est dans l'étude de
la constitution du corps malade.
Cette manière de voir explique la répulsion, l'antipathie de
Jovellanos pour les constructions à priori , à la manière de
Rousseau, antipathie qui se manifeste, par exemple, à propos du
prétendu contrat social, ou des droits préhistoriques du citoyen,
ou même de la maxime que tous naissent libres et égaux. De là
encore, dans l'ordre des faits historiques, sa sévérité contre la
Révolution française. La façon dont il en parle parfois l'a fait juger
sévèrement par certains critiques; elle étonne en effet chez un
esprit si capable d'en comprendre l'idée généreuse, chez un
homme d'Etat qui, en somme, aboutissait sur bien des points à
des conclusions analogues. Ce sont ses excès, il est vrai, plus que
ses principes, qui excitent son indignation. (Ct. la Oda Sâjïca, à
Poncio.)
De là enfin ses efforts pour concilier le passé historique de la
nation avec les exigences de la civilisation moderne, et pour
établir, entre le droit d'autrefois et celui d'aujourd'hui, une suite
ininterrompue, gage et condition du développement pacifique de
ses destinées. Ce sage mais difficile tempérament entre la révolu-
tion et la tradition constitue la véritable originalité du rôle poli-
tique de Jovellanos : il explique aussi la diversité des jugements
qu'il a inspirés. Tous les partis, Cristinos ct carlistes, libéraux et
ETUDES SUR LA LITTERATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIECLE 43
traditionnalistes, le revendiquent également, et tous prétendent
trouver dans ses écrits de quoi justifier leurs prétentions. C'est
qu'à ne tenir compte ni des dates ni des circonstances, ses opi-
nions paraissent parfois inconsistantes, voire même contradic-
toires. Le jeune magistrat de Séville, séduit par les nouveautés
philosophiques et économiques à la mode au four de lui, ne
parlait ni ne pensait comme le prisonnier de Majorque ou le
constituant de Cadix. L'expérience, la réflexion calmèrent l'en-
thousiasme trop prompt de la jeunesse, mais elles n'enlevèrent
jamais à l'homme mûr cette passion généreuse pour la liberté,
pour la justice sociale, cette foi dans les progrès de l'humanité,
qui étaient le fond de son caractère. C'est pourquoi les prétentions
des uns et des autres, de M. Nocedal ou de M. Azcarate, ne me
semblent fondées qu'en partie : Jovellanos n'appartient exclusive-
ment ni au parti de la tradition ni au parti de la révolution,
parce que ce sage, ce modéré, a cru de bonne foi à une concilia-
tion possible entre ces deux choses peut-être inconciliables.
Tel est, dans ce qu'il a d'essentiel, le principe sur lequel repo-
sent toutes les conceptions politiques de Jovellanos. Il ne peut
être question ici d'en suivre le développement dans le détail, ni
d'énumérer les solutions qu'il a données aux nombreux problèmes
de la politique pratique. Je n'ajouterai que deux remarques sur
ce point. La première, c'est que par tournure d'esprit, peut-
être aussi par suite des habitudes contractées dans sa vie de
magistrat et de ministre, Jovellanos s'attarde peu dans le domaine
de l'abstraction : il va droit à la réalité concrète, à la difficulté de
fait, à la solution pratique. En second lieu, sa méthode à la fois
historique et critique, qui dans les faits s'efforce de saisir la loi,
constituait une nouveauté et un progrès dans la science politique
espagnole; elle rattache Jovellanos à notre siècle. Cependant,
tout en accordant leur importance aux faits historiques, tout en
fondant sur eux la légitimité des institutions nationales, il est
trop de son siècle pour aboutir à une sorte d'indifférence éclec-
tique ou de scepticisme, sans principes comme sans idéal. Soit
44 E. MERIMEE
qu'il ait subi l'influence des doctrines de Condillac et de Condor-
cet, soit que sa confiance dans l'efficacité de la science écono-
mique, alors dans toute la fraîcheur de la jeunesse en Espagne,
suffise à expliquer son enthousiasme, ses illusions, il estime que
c'est le bonheur des individus et des nations que les Constitutions
ont pour but d'assurer, et qu'en se rapprochant de plus en plus
de cet idéal, elles amèneront un jour sur la terre pacifiée le règne
de la vertu, et avec la vertu, la félicité universelle. On peut voir
l'expression naïve de cet espoir dans YEpître à Inarco (Moratin) :
« O société, ô lois, ô noms cruels, qui promettez protection au
monde trompé et ne lui donnez que guerres, effroi, oppression
et larmes! Mais il viendra, ce jour, il viendra, Inarco, pour
éclairer le monde et pour consoler les chagrins des mortels.
Alors ce nom fatal de propriété, ce nom détesté sera oublié. Mot
infâme et funeste..., etc. » Cette vision, assez inattendue, d'un
communisme qui s'ignore nous fait vaguement songer à celui de
Dupont, dans la fantaisie de Musset :
De magistrats néant, de lois, pas davantage !
ou, si ce rapprochement paraît irrévérencieux, rappelons-nous le
rêve du mineur Etienne dans Germinal , de Zola : « ....Tout le
malheur disparaissait, comme balayé par un grand coup de soleil,
et, sous un éblouissement de féerie, la justice descendait du ciel.
Une société nouvelle poussait en un jour, ainsi que dans les
songes une ville immense d'une splendeur de mirage, où chaque
citoyen vivait de sa tâche et prenait sa part des joies communes.. »
Jovellanos se fait de bonne foi l'ouvrier de ce bonheur qu'il
goûte par avance : il est persuadé qu'il y travaille efficacement
en perfectionnant, par exemple, les moyens de .production ou en
répandant l'instruction dans les masses. « Qui ne voit, s'éçrie-
t-il, que le progrès même de l'instruction conduira quelque jour,
d'abord les nations éclairées de l'Europe, et enfin celles de la terre
entière à une Confédération générale, qui aura pour objet d'as-
surer à chacune d'elles la jouissance de ses avantages naturels,
ÉTUDES SUR LA LITTERATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIECLE 45
de maintenir entre toutes une paix inviolable, de réprimer —
non par des armées ni à coups de canon , mais par l'autorité de
ses ordres, plus forte et plus redoutable — le peuple téméraire
qui oserait troubler le repos et le bonheur du genre humain ? »
Ces rêveries sentimentales paraîtront peut-être bien démodées,
et il serait facile de tourner en ridicule l'expression naïve de cet
optimisme, qui fut pourtant celui des grands esprits de l'époque.
Si toutefois nous nous replaçons en imagination dans le temps
et dans le milieu où elles furent écrites, peut-être nous laisserons-
nous toucher par cette philanthropie , dont l'expression a pu
vieillir, mais qui n'est point un simple artifice de rhétorique :
on y sent l'accent d'un sentiment sincère et d'une passion réelle
pour les intérêts de l'humanité. Songeons que c'était au bruit
du canon, dans des gîtes de hasard, au fond d'un pays envahi,
dévasté, asservi, que l'auteur écrivait ainsi. Cette vaste sympathie
pour la misère universelle, ce cosmopolitisme généreux, si étran-
ger jusque-là aux préoccupations des penseurs espagnols, ne
devait pas, ce me semble, être oublié dans une étude sur Jovel-
lanos : elle forme l'un des traits caractéristiques de cette figure.
il
Lorsque l'on réfléchit à l'idée que les politiques espagnols ,
depuis Charles Quint et Philippe II, se faisaient des devoirs
des gouvernants, il semble qu'ils se soient crus responsables
du bonheur de leurs sujets uniquement dans l'autre monde.
Leur politique, du moins, tant extérieure qu'intérieure,
paraît une application constante de cette pensée. Ce n'était point
celle de Jovellanos. Il estimait, au contraire, que le rôle du
gouvernement était d'abord d'assurer, dans la mesure du possible,
la félicité de la nation sur cette terre, de s'occuper de ses intérêts
matériels, du développement de sa richesse commerciale, indus-
46 E. MÉRIMÉE
trielle et agricole. Par ses travaux et par ses écrits, il a fait autant,
pour pousser l'Espagne dans cette voie, si nouvelle pour elle,
que les Aranda, les Olavide, les Floridablanca , les Cabarrus.
Non seulement, comme ministre ou comme simple particulier,
il continue l'œuvre de ces derniers, mais comme écrivain, par
une foule de mémoires, de rapports, de projets, il lance ces idées
dans la circulation. Ce poète, cet auteur dramatique, cet artiste
a par dessus tout le sens du réel, du pratique, du positif : c'est à
la fois sa force, et, dans un sens que j'expliquerai tout à l'heure,
son infériorité. Le « berger », le mayoral Jovino, comme l'appe-
laient ses amis de Salamanque qui nous le représentent chantant
sur ses pipeaux le long des rives du Bétis ou du Tonnes, est en
réalité ingénieur, minéralogiste, agronome, industriel, péda-
gogue. On le croit occupé à rimer des endechas ou des bouquets
à Chloris : il rumine les moyens d'améliorer la filature de la soie,
ou de développer l'industrie des mousselines ; il calcule le tracé
d'une grande voie qui, reliant la Castille aux Asturies, servira de
débouché aux produits de la première de ces provinces, lesquels
se perdent sur place.
Il fera mieux. Comme Olavide avec ses colonies agricoles
ou Penaflorida avec ses sociétés d'Amis du pays et son Ecole
patriotique de Vergara, bravement, à ses risques et périls, il
donnera l'exemple de l'initiative privée et fondera, à Gijôn,
YInstitut Asturien, sorte d'école pratique et professionnelle d'où
sortiront des ingénieurs et des officiers de marine. Le but qu'il
se propose par cette création originale, il l'a exposé souvent
lui-même : « C'est de vulgariser les connaissances utiles pour
développer les arts productifs, pour fournir des aliments nouveaux
au travail honnête, pour donner de nouveaux débouchés au
commerce et à la navigation, pour augmenter la population et
l'abondance et pour fonder sur une même base la sûreté de l'Etat
et le bonheur de ses membres. » La -devise qu'il donne au nouvel
Institut est celle qu'il avait choisie pour lui-même : Quidverum,
quitl sit utile : vérité et utilité ! Lui-même en rédigera les règle-
ÉTUDES SUR LA LITTERATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIECLE 47
ments par le menu : nous les avons, et ils mériteraient une étude
spéciale. Ses mémoires sur différents points d'économie politique
sont très nombreux : il faut laisser aux gens du métier le soin de
les apprécier. Je ne saurais dire à quelle école se rattache exacte-
ment Jovellanos, ni même s'il se rattache à aucune des sectes
françaises ou anglaises qui se disputaient alors la prépondérance.
A vrai dire, je ne vois pas qu'il ait exposé nulle part la théorie
de la science économique telle qu'il la comprenait, ni qu'il ait
tenté, comme Quesnay, Smith, Turgot ou Say, d'appuyer sui-
des principes abstraits et des déductions philosophiques cette
« science du bonheur ». Ce qui importe ici, ce me semble, c'est
moins la valeur philosophique que la portée pratique de ses
réformes. Or il est manifeste que les tentatives de Jovellanos, si
elles n'eussent pas été si malheureusement entravées par les évé-
nements, étaient de nature à modifier la situation de l'Espagne
et à lui faire prendre rang parmi les nations qui se disputent la
suprématie commerciale ou industrielle. Cette gloire en vaut une
autre. Et pour montrer avec quelque précision combien Jovella-
nos a de titres à cette gloire, pour prouver aussi que tout en se
méfiant des généralisations ambitieuses, il prétendait appuyer ses
plans de réformes sur le fondement de la vérité et de la justice,
on me permettra de prendre quelques exemples, entre beaucoup
d'autres.
J'emprunte le premier au célèbre Rapport sur la Loi agraire
(Informe sobre la Ley agraria). L'auteur se proposait d'y présenter
au roi Charles III quelques observations sur la Constitution ou
Code de l'agriculture, que ce monarque réformateur voulait
édicter. Ce Rapport, qui est peut-être le principal titre d'honneur
de l'homme d'Etat, rappelle à la fois les mémoires de Turgot (et
il serait instructif de pousser plus à fond ce rapprochement), les
cahiers généraux de notre Tiers-Etat et la Déclaration des Droits
de l'homme. C'est en réalité , sous des apparences modestes et
une forme précise, la Charte constitutionnelle d'un régime nou-
veau. L'auteur énumère dans trois chapitres les obstacles poli-
48 E. MÉRIMÉE
tiques ou légaux, les obstacles moraux, enfin les obstacles phy-
siques ou matériels que rencontre le développement de l'agri-
culture en Espagne.
Les obstacles politiques et civils que les lois ou les coutumes
lui opposent ce sont : les baldios ou terrains en friche qu'il faut
aliéner et mettre en vente par parcelles; les tierras concejiles ou
biens communaux, qui sont abandonnés, et que l'industrie privée
peut seule mettre en valeur (il faut les vendre ou les louer avec
bail emphytéotique); la abertura de las heredades ou autorisation
de pâturer dans les propriétés privées; le caprice des protections
à telle ou telle culture aux dépens des autres ; les privilèges de la
Mesta, qui doivent disparaître, à l'exception des canadas ou sen-
tiers de passage pour les mérinos; enfin les biens de main-
morte, tant du clergé séculier et régulier que des Grands et des
Mayoraçgos. Jovellanos traite ce point capital avec autant de dexté-
rité que de fermeté. Il signale l'insatiable ambition de certains
ordres mendiants, « esta portentosa multiplication de conventos. » —
« Quelles barrières pourraient résister aux entreprises de la cupi-
dité et de la religion coalisées ? Que barreras podrian bastar contra
los esfuer^os de la codicia y de la dévotion reunidos ? » Quant aux
majorats, « c'est une institution qui répugne aux principes d'une
législation sage et juste, et la première mesure réclamée par la
nation, c'est l'abolition de toutes les lois qui permettent de sub-
stituer les biens d'une famille aux aînés. » — Faudra-t-il donc
dépouiller violemment ces derniers ? Non, la propriété est sacrée,
alors même que cette propriété ne résulte que d'un contrat qui
peut être considéré comme caduc, l'une des parties ne remplissant
plus les conditions du contrat. Mais le principe est tellement
nécessaire, qu'il ne faut rien faire qui puisse l'affaiblir. Jovellanos
compte sur les dispositions législatives nouvelles et sur les privi-
légiés eux-mêmes, qui comprendront sans doute leurs véritables
intérêts. Nous sommes loin, on le voit, de Ylipilrc à Inarco.
Le commerce intérieur des grains et autres produits du sol
doit être libre. « C'est se faire illusion que d'attendre le bon
ÉTUDES SUR LA LITTERATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIECLE 49
marché d'autre chose que de l'abondance , et l'abondance que
du libre trafic des fruits de la terre. » Et ailleurs : « Il convient,
Sire, d'établir la liberté du commerce intérieur par une loi perma-
nente qui réveille l'intérêt individuel , oppose le monopole au
monopole, et mette fin à ces affaires suspectes qui se trament à
l'ombre des lois prohibitives. » La seule restriction à ce principe
de liberté s'applique au commerce extérieur des blés. Les désa-
vantages de l'échelle mobile sont exposés avec précision ; il faut
prohiber l'exportation et permettre l'importation sous conditions.
Un dernier obstacle que l'agriculture rencontre dans les lois,
— et l'un des plus graves assurément , — c'est l'inégalité de
l'impôt. Cette inégalité est un mal et une injustice. « L'égalité,
que la justice exige par dessus tout, doit se manifester de deux
manières. Il faut, en premier lieu, que tous les citoyens, sans
aucune exception, contribuent aux charges publiques, ainsi que le
proclamaient déjà les Lois Alphonsines et les Cortes de Guada-
lajara, et comme le veulent l'équité et la raison. Puisqu'il s'agit
en effet du bien général, aucune classe, aucun citoyen ne peut,
sans injustice, s'exempter de ce devoir. Il faut, en second lieu,
que tous contribuent proportionnellement à leurs ressources, car
l'on ne peut réclamer autant du pauvre que du riche. D'ailleurs
si ces bienfaits que l'Etat assure s'appliquent à toutes les classes
de la société, il est clair que ceux-là surtout pourront en jouir
qui ont plus de fortune, et que conséquemment ils doivent con-
tribuer proportionnellement à cette fortune. »
Les obstacles moraux proviennent de l'abandon dans lequel
l'Etat laisse les intérêts de l'agriculture, et de l'ignorance des
agriculteurs, auxquels l'Etat devrait assurer l'instruction élémen-
taire et l'enseignement technique. « Daigne Votre Altesse multi-
plier partout l'enseignement primaire; qu'il n'y ait point d'en-
droit, de village, de paroisse qui en soit privé; qu'il n'y ait point
de citoyen, si pauvre, si misérable soit-il, qui ne puisse recevoir
cette instruction facilement et gratuitement ! Alors même que la
Revue hispanique. 4
50 E. MERIMEE
nation ne devrait pas ce bienfait à tous ses membres, bienfait par
où se manifeste surtout sa protection et sa sollicitude, elle se le
devrait à elle-même, car c'est le moyen le plus simple d'augmenter
sa puissance et sa gloire. Eh quoi ! n'est-ce pas le témoignage le
plus honteux de notre négligence que de voir ainsi abandonnée
et négligée une branche d'instruction d'une portée si générale,
si nécessaire, si profitable, au moment même où nous multi-
plions avec tant d'ardeur les foyers d'enseignement partiel, inutile
souvent et dangereux ? »
Quant aux obstacles naturels que l'agriculture rencontre dans
les choses, Jovellanos les groupe sous les titres suivants et les
examine successivement : manque d'irrigations , manque de
communications par terre ou par eau , manque de ports. Il pro-
pose un ensemble de mesures pratiques pour remédier à ces
maux et termine en étudiant les ressources budgétaires qui
doivent faire face aux dépenses. Il recommande rétablissement —
avec comptabilité distincte — d'un budget général ou national,
d'un budget provincial et d'un budget municipal.
Tel est, dans ses lignes générales, ce célèbre Rapport, dont
l'importance saute aux yeux, et dont les conclusions dépassaient
singulièrement ce qu'on en pouvait attendre. C'était une belle
préface à la Constitution de Cadiz. Linguet s'est moqué quelque
part de ce beau zèle des réformateurs : « Si l'Espagne, dit-il,
s'imagine repeupler ses champs avec les belles phrases qu'a consi-
gnées sur le papier un agriculteur théorique, elle se trompe fort.
Si elle s'imagine que ses manufactures vont renaître parce qu'une
brave fille, dirigée par un économiste enthousiaste, au lieu de
l'être par son confesseur, file, en un an, deux ou trois livres dé-
plus que sa voisine, elle ne se trompe pas moins. Le temps que
l'on donne à la théorie est perdu pour la pratique. » N'en déplaise
à ce critique chagrin, avant de faire passer les réformes dans la
pratique, il fallait y habituer les esprits, en montrer l'utilité, la
nécessité, triompher des résistances acharnées, convaincre le
public, et cette tâche, personne n'était plus apte à la remplir que
ÉTUDES SUR LA LITTÉRATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIECLE 5 I
Jovcllanos. Le meilleur éloge de son œuvre, je le trouve dans ces
lignes de M. Nocedal : « Après tant d'années, tant d'expériences,
tant de leçons et d'excès, nous en sommes revenus à ce que pro-
posait Jovellanos : à lo que proponia Jovcllanos, hemos venido à
parar. »
L'originalité de Jovellanos ne se montre pas moins en matière
d'enseignement public. Ses écrits relatifs à l'instruction , les
plans, les règlements concernant les trois ordres d'enseignement
fourniraient ample matière à une étude qui mettrait en lumière
cette curieuse Hgure de pédagogue homme d'Etat. On peut avancer
que personne en Espagne, ni Campomanes, ni Olavide, ni Roda,
n'avait montré à un tel degré un tel souci de l'instruction publique
et que nul éducateur, jusqu'à Pablo Montesino, n'a eu sur ce sujet
des idées plus nettes et plus fécondes. C'est ce que l'on montre-
rait suffisamment en résumant, parmi tant d'autres écrits, les
quatre suivants : i° Règlement littéraire et pédagogique du Collège
impérial de Calatrava, à Salamanque; 2° Cours d'humanités et Règle-
ment pour l'Institut Asturien; 3 Principes pour la formation d'un plan
général d'Instruction publique; 4 et surtout, Mémoire sur V Educa-
tion publique, écrit pendant la captivité de l'auteur à Bellver.
Ce souci de l'instruction des classes moyennes et populaires
est l'un des indices de la formation d'une société nouvelle. A vrai
dire, presque tout était à faire en Espagne à ce point de vue :
de la base au sommet l'édifice était à restaurer, sinon à recon-
struire. En dépit de quelques tentatives de réformes, telles que
celles qui révolutionnèrent un moment Salamanque, les grandes
universités étaient immobilisées dans des programmes et des
méthodes qui dataient de plusieurs siècles. Les témoignages de
Torres Villaroel et d'Olavide, ou, si ces derniers inspirent quelque
défiance, ceux d'hommes modérés tels que Pérez Bayer, sont ins-
tructifs sur ce point. Il n'y avait, en matière d'enseignement
secondaire ou primaire, aucune suite, aucune unité de vues,
aucune coordination. Ce fut sur ces deux derniers points que
52 E. MERIMEE
Jovellanos concentra ses efforts : c'est là aussi que ses vues
paraissent le plus originales.
Il part de ce principe, qui, depuis le suffrage universel, semble
évident, à savoir que l'instruction de l'individu est une nécessité
sociale, et que conséquemment c'est le devoir de l'Etat d'assurer
cette instruction, dans la mesure qui convient aux intérêts et au
salut communs. L'Etat doit donc multiplier les écoles populaires
où Ton enseignera la lecture, l'écriture, le calcul, les éléments
de la religion. On apportera un soin particulier à l'éducation
physique en instituant des exercices de gymnastique et des exer-
cices militaires. Il faut « habilitât- los ninos para la defensa de la
patria, cuando fuesen llamados A ella ». Et comme ce devoir est le
même pour tous, tous indistinctement seront soumis à ces exer-
cices. On fondera dans ce but des écoles de tir, comme en Suisse.
L'enseignement moral et civique doit surtout être confié au père
de famille, mais il sera bon de rédiger des Manuels pour préciser
ces notions, qui restent vagues dans l'esprit populaire : « Esios
libros deberân contenir un cueso abreviado de doctrina natural, civil y
moral, acomodado à la capacidad de los ninos. » L'éducation reli-
gieuse devait, en Espagne, occuper une place importante dans
tout système d'éducation générale. Jovellanos propose d'y consa-
crer un jour par semaine, le dimanche, et naturellement de le
confier au prêtre. En même temps que les écoles de garçons ,
l'Etat multipliera les écoles de filles, distinctes et également gra-
tuites. De même il établira, au dessus de ces dernières, des collèges
où l'on recevra, moyennant finances, une instruction plus com-
plète.
On remarquera que sur la double question de l'obligation
et de la gratuité, Jovellanos, pour son propre compte, n'hésite
pas : Tune et l'autre conclusion découlent naturellement de son
principe. Dans le Rapport à la Junte constituante } il laisse à cette
dernière le soin de trancher la question, quoique ne dissimulant
point son opinion personnelle. Cabarrus, son protecteur et son
ami, dans une série de lettres à lui adressées en 1792, allait réso-
ÉTUDES SUR LA LITTERATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIECLE 53
lument jusqu'au bout et réclamait la laïcité. Jovellanos n'ose le
suivre jusque-là : il déclare, au contraire, que l'instituteur le
mieux situé et tout naturellement désigné, c'est le curé. D'ailleurs
il a conscience de la grandeur de la tâche entreprise, et l'on n'est
point surpris de trouver, au milieu de ses plans et de ses règle-
ments, des appels émus au dévouement des éducateurs du peuple :
« O mes amis du pays de Majorque, si vous désirez le bonheur
de notre patrie, si vous êtes bien convaincus que le gage le plus
sûr de ce bonheur c'est l'instruction, faites le premier pas dans
cette voie ! Réfléchissez que l'instruction élémentaire, c'est la clef
de toute instruction, et que les progrès de tous les autres ensei-
gnements dépendent delà façon dont celui-là est organisé. Songez
que c'est celui-là seul que pourra recevoir la grande masse de vos
compatriotes. Appelés par leur condition à travailler dès la jeu-
nesse, leur temps sera consacré au labeur et non à l'étude. Réflé-
chissez surtout que sans cela la majeure partie de cette foule
restera éternellement vouée à l'ignorance et à la misère, car dans
un pays où la propriété publique et commune est à peine connue,
où la propriété individuelle est accumulée dans quelques mains
et répartie en vastes domaines que leurs propriétaires exploitent
à leurs risques et périls, à quoi peut aspirer un peuple sans édu-
cation, si ce n'est à la condition servile et précaire de journalier ?
Eclairez-le donc, apprenez-lui les connaissances indispensables,
donnez-lui l'instruction dont il a besoin : nous aurons ainsi la
véritable éducation populaire. Ouvrez-lui la porte des carrières
industrielles, mettez-le sur le chemin de la vertu et du bien-être.
Instruisez-le, et pour lui avoir ainsi donné le droit d'être heureux,
vous aurez assuré votre gloire et celle de votre patrie ! »
C'est en matière d'enseignement secondaire que l'initiative de
Jovellanos paraît surtout originale et hardie. Conséquent avec ses
habitudes d'esprit et fidèle à sa méthode habituelle, il ne prétend
point cependant bouleverser le vieil édifice qui menace ruine,
mais il en veut reprendre les fondements en sous-œuvre, de telle
sorte que, lorsqu'il s'écroulera de vétusté, il se trouvera bientôt
54
E. .MERIMEE
remplacé par un édifice solide, commode, mieux adapté aux
besoins de la société nouvelle. Pour parler sans métaphore, ce
que Jovellanos recommande surtout, ce qu'il a même créé avec
ses seules ressources, c'est un type absolument nouveau de collège
secondaire, qui fait songer à notre enseignement spécial ou moderne.
On y apprendra les sciences, si dédaignées dans les vieilles uni-
versités, la langue castillane, dont l'étude scientifique n'était pas
moins négligée (a-t-on fait sur ce point beaucoup de progrès
depuis Jovellanos?), l'histoire et la géographie, le dessin (cuya
grande utilidad asi para las ciencias como para las artes général mente
esta reconocida), enfin les langues vivantes.
Notre temps n'a pas tout inventé : les mêmes questions qui
sont aujourd'hui si débattues l'étaient déjà en Espagne dans les
dernières décades du xvm c siècle, et, sur la plupart d'entre elles,
Jovellanos avait pris une attitude aussi résolue que tel ou tel de
nos contemporains. Il tient pour la substitution des langues et
des littératures modernes aux langues anciennes. Feijôo avait
déjà proposé de remplacer l'étude du grec par celle du français.
Jovellanos est plus radical, et je ne sais si, depuis, les partisans des
humanités modernes ont trouvé beaucoup d'arguments nouveaux.
« On a cru jusqu'à présent, et peut-être croit-on encore que
l'étude des langues grecque et latine et celle des préceptes de la
rhétorique et de la poétique constituaient le fonds des humanités,
mais cette croyance, qui a pu être légitime, et qui, à coup sûr,
a été très profitable, est devenue maintenant funeste à l'éducation
générale, etc.. Les langues vivantes, que l'on pouvait mépriser
dans leur enfance et dans leur période de formation, sont éman-
cipées aujourd'hui. Elles ont fait leurs preuves, elles sont éduca-
trices autant que les anciennes et suggestives comme elles... Au
lieu de copier les Grecs, faisons comme eux, qui étudiaient
surtout la nature et le cœur humain. D'ailleurs il faut se résigner
à faire un choix : on ne peut tout apprendre. »
Entre autres questions que le constituant posera à la Junte
centrale de 1808, je relève celle-ci : « Comment éviter la surcharge
ETUDES SUR LA LITTERATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIECLE 5 5
dans r éducation de la Jeunesse? » Pour lui, son sacrifice est fait.
« Parmi les connaissances qu'il faut sacrifier, la raison désigne
dès à présenties langues mortes... L'étude des langues vivantes
est plus utile et plus nécessaire : cl estudio de las lenguas vivas es
mâs provechoso y necesario. » Est-ce donc qu'il faille abandonner
absolument les premières? Non, répond Jovellanos, mais ni les
limites assez étroites où il les confine, ni les raisons d'utilité
professionnelle qu'il fait valoir en leur faveur, ne satisferaient,
j'en ai peur, les défenseurs de l'ancienne culture classique. « Cette
étude, dit-il, restera toujours nécessaire pour le théologien, le
canoniste, peut-être le juriste et le médecin : elle doit être libre
pour les autres. » Il proposera plus tard à la Junte centrale de
déterminer par règlement les carrières où les langues mortes sont
nécessaires. Dans tous les cas, il faut commencer par réformer
les études antiques elles-mêmes. Mais il est raisonnable, il est
nécessaire de donner cet enseignement en espagnol et non plus
en latin. Au surplus, si ces études ont besoin d'être fortifiées, il
y aurait danger à trop les répandre, « pour ne pas donner aux
jeunes gens appartenant à la classe industrielle la tentation d'en
sortir, ce qui serait aussi désastreux pour eux que pour l'Etat,
con tan poco provecho suyo como grau daùo del Estado. »
Entre les langues vivantes, le choix, au temps de Jovellanos,
n'était pas difficile. L'italien, le français, l'anglais, ces deux der-
nières langues surtout, s'imposaient. Il serait intéressant — si
nous pouvions nous arrêter aux détails de son plan d'études —
de discuter les raisons par lesquelles Jovellanos établit l'utilité
relative de chacune de ces langues pour ses compatriotes, raisons
tirées des services variés qu'elles pouvaient rendre comme de
leur plus ou moins de rapport avec la manière de penser natio-
nale. On ne saurait nier sur ce point la compétence de l'auteur :
il a rédigé lui-même, en même temps qu'une foule de manuels,
deux petites grammaires, française et anglaise, pour ses élèves
de l'Institut Asturien. Quant à l'enseignement de la philosophie,
il le réduit beaucoup et le découronne, en le bornant à la logique
56. E. MÉRIMÉE
(no esta lôgica escolâstica y abstracta de nuestras universidades), et à
la morale, efficace protection des principes fondamentaux de la
Société : « Si algûn dique se puede oponer â este mal (l'impiété et
l'anarchie) es la buena y sôlida instrucciôn. »
Je crains de trop m'attarder sur ce sujet, mais je ne rendrais
pas justice, ce me semble, à l'originalité de vues et à la perspica-
cité de cet éducateur, si je n'avais indiqué, au moins par quelques
détails, avec quelle netteté se posait pour lui la question de l'édu-
cation moderne. Que de points intéressants il traite en passant,
sur lesquels il présente une solution pratique, la surcharge, l'imité
des livres et des manuels, les examens de passage, les examens de
sortie, etc., etc. ! Parmi ces questions il en est une sur laquelle ses
opinions se rapprochent singulièrement de celles des meilleurs
pédagogues modernes : c'est celle de Yinîernat. Il est absolument
opposé au régime de l'internat, pour des raisons qui étaient déjà
les mêmes à son époque qu'à la nôtre. Cependant les internats,
ou les séminaires, comme il les appelle, sont nécessaires pour
certaines catégories d'étudiants dont la famille est éloignée.
Jovellanos recommande donc le développement des pensions
de famille, pupilajes, et il n'avait point besoin, sur ce point, de
demander des modèles à l'Angleterre universitaire : l'institution
était vieille de plusieurs siècles en Espagne.
Ce plan, si complet, d'enseignement public, se termine par cette
déclaration, bien digne de l'auteur : « La liberté de penser, d'écrire
et d'imprimer, prudemment réglée, doit être considérée comme
absolument nécessaire au progrès des sciences et à l'instruction
des peuples. »
III
Jovellanos fut, avant tout, un homme d'Etat et un réformateur.
Mais notre étude demeurerait incomplète, si nous passions sous
silence les mérites de l'écrivain. Au surplus, quoique son activité
ETUDES SUR LA LITTERATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIECLE 57
littéraire soit de moindre portée, il n'est pas sans intérêt
d'essayer de la définir.
Par un contraste qui n'est pas rare, — et qui paraîtra plus
frappant encore lorsqu'on étudiera Quintana, -- cet esprit, si
libre ailleurs, nous paraît timide, arriéré, en matière de théories
littéraires. N'a-t-on pas fait la même remarque à propos de
Voltaire ? En ce qui concerne Jovellanos, j'ai hâte d'ajouter
d'abord que ce respect trop scrupuleux de la tradition classique
s'attache beaucoup plus à la forme extérieure (mythologie,
phraséologie de convention, périphrases, etc.) qu'aux idées elles-
mêmes, et, en second lieu, que l'originalité d'une pensée qui essaie
de briser ces liens, se manifeste de plus en plus à mesure que
l'auteur avance dans sa carrière. La première période, celle de
la jeunesse, peut être négligée, sans préjudice pour sa gloire. Elle
comprend des poésies lyriques, des pastorales surtout, claires
mais froides et d'une fadeur aujourd'hui insupportable. C'est
chez Meléndez qu'il faudra étudier cette société de bergers poètes,
ainsi que leurs bergères. Ces bucoliques, très à la mode alors,
semblent plus puériles encore sous la plume du grave Jovino.
Mais, à l'approche de la Révolution, l'Europe semble une vaste
Arcadie où flûtes et pipeaux se mêlent au lointain roulement du
tonnerre. De temps à autre, quelques-uns de ces bergers s'inter-
rompaient inquiets, et semblaient dire, comme dans la chanson :
Voici venir l'orage,
Voici l'éclair qui luit !
Jovellanos était un de ces derniers, et le ridicule de cette poésie
inopportune ne lui échappait point. « En vain de mon cœur,
attentif aux rumeurs du forum, ému des pleurs de l'opprimé,
de la veuve et de l'innocent orphelin, je prétendrais tirer de doux
accents, ma lyre, autrefois harmonieuse, mais maintenant désac-
cordée, ne résonnerait plus sous mes doigts.
Que en vano de mi pecho, penetrado
Del forense rumor y conmovido
Al llanto del opreso, de la viuda
Y huérfano inocente, presumiera
58 E. MÉRIMÉE
Lanzar acentos dulces, ni mi lira,
Otras vcces sonora y ahora falta
De los trementes armoniosos nervios ,
Al acordado impulso respondiera. »
La tragédie de Pelage (1769) appartient encore à cette première
période. Elle est scrupuleusement construite sur le modèle clas-
sique, ou, pour parler plus exactement, sur le patron taillé par
Racine et revu par Voltaire. « Si Horace vivait aujourd'hui, disait
l'auteur, probablement nous conseillerait-il de lire Racine et
Voltaire. » Mais si la forme manque décidément d'originalité, le
choix du sujet est louable. Jovellanos, qui se moque volontiers de
LaHuerta 1 , tient, comme lui, pour le théâtre, ou, du moins, pour
les sujets nationaux. S'il blâme les classiques espagnols dans son
opuscule sur les Divertissements publics, ce n'est point précisément
qu'ils soient trop espagnols : c'est qu'ils lui paraissent trop peu
moraux 2 . « Pourquoi chercher des arguments dans l'histoire des
autres nations, quand la nôtre nous en offre tant de si heureux
et de si sublimes?
Vea... el pueblo hispano
En sus tablas los héroes indigenas. »
Sur ce point du moins, Jovellanos, parfois si dur pour les
dramatiques de l'âge d'or, était dans la vieille tradition espagnole.
Depuis Castro et Lope de Vega jusqu'à La Huerta, l'histoire natio-
nale avait alimenté le drame et inspiré bien des chefs-d'œuvre.
Il faudrait, certes, beaucoup d'indulgence pour ranger le Pclayo
parmi ces derniers. Il n'est point difficile assurément d'y signaler
quelques situations dramatiques, d'en extraire quelques beaux
vers, ceux-ci, par exemple, que les Espagnols asservis pouvaient
répéter pour leur propre compte : « Voici l'instant du suprême
1. Voy. dans ses poésies, sa satire contre ce dernier.
2. Memoria sobre los Espcctâados... primera parte, Pro/anos.
ÉTUDES SUR LA LITTERATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIECLE 59
péril : nous y touchons. Toute porte nous est fermée; plus
d'autre ressource. Il n'en est plus qu'une : combattre pour la
patrie, et acheter avec ce qui nous reste de vie la mort ou la
victoire !
Es el ûltimo instante del peligro ;
Ya nos vemos en él ; esta cerrada
La puerta â otros recursos. Uno solo
Nos queda, el de lidiar por nuestra patria,
Comprando con el resto de las vidas
La muerte ô la Victoria... »
Mais ce qui manque dans cette tragédie, c'est l'intérêt, la
passion, la vie. Les personnages sont de pures abstractions, des
types dessinés sur un modèle de convention. Munuza, c'est « le
tyran », Pelayo « le libérateur », Rogundo « l'amant », Dosinda
« la fiancée ». Ils n'ont pas plus de personnalité que le milieu
où ils se meuvent n'a de couleur locale. Et cependant Covadonga
et les montagnes des Asturies formaient un décor capable de
tenter le poète, mais ce dernier avait plus de raison que d'imagi-
nation et de fantaisie.
D'ailleurs « l'art pour l'art » était un principe incompréhen-
sible pour Jovellanos '. Le réformateur, qui avait pris pour devise :
quid utile, quid vent m, devait surtout considérer la littérature
comme un moyen d'agir sur les esprits ou sur les mœurs, et le
magistrat qui, au grand scandale de ses collègues, fut le premier
juge espagnol sans perruque, devait comprendre le vide de cette
poésie de convention. Aussi se sent-il bientôt attiré vers les Jeux
genres qui ont le plus de rapports avec la réalité et l'action, la
poésie didactique et le drame à thèse. C'est là que sont ses titres
littéraires les plus sérieux. Ses satires, qui sont au nombre d'une
dizaine, sont particulièrement intéressantes, par leur mérite
propre et par les renseignements qu'elles fournissent sur la
1. En littérature, tout au moins, car il juge plus librement des beaux-arts. V.
le fragment imprimé au vol. L de la Bibl. de A ut. Esp., p. 544.
éo E. MÉRIMÉE
société du temps. Elles me semblent d'autant meilleures que le
sujet en est plus précis et moins général. Voyez, par exemple,
dans la Deuxième Satire à Arnesto, sur la noblesse dégénérée, le
portrait du patricien ignorant, livré aux valets et vivant avec les
toreros, les manolas, les picaros de toutes sortes,
...Sus dedos y sus labios
Del humo del cigarro encallecidos,
Indice de su crianza. Nunca pasô
Del be a ba. Nunca sus viajes
Mas alla de Jetafe se extendieron...
Oye y dirâte
Quién de Romero ô Costillares saca
La muleta mejor, y quién mas limpio
Hiere en la cruz al bruto jarameno... etc.
Toute cette satire, de même que l'ode sur le lamentable état
de l'Espagne de Godoy, sont d'un beau mouvement. Dans ces
pièces la colère échauffe et aiguillonne un peu la Muse : facit
indignatio versum. Mais les inspirations ordinaires du poète sont
la Raison et la Vertu. Jl aime à moraliser à la manière d'Horace.
« Tu seras savant et heureux, si tu es vertueux, car la vérité et
la vertu sont unes; celui-là seul qui les possède est heureux;
elles peuvent assurer à votre âme la paix de la conscience, la
modération des désirs, la joie, la douceur de bien faire : le reste
n'est que vent, vanité, misère, lo demàs viento, vanidad, miseria. »
{Epitre a Bermudo = Ceân Bermûde^.) Ce qui seul donne quelque
intérêt à ces lieux communs, c'est que l'auteur, lorsqu'il les écri-
vait, était lui-même malheureux, calomnié, emprisonné. A
défaut du coup d'aile, la justesse, la noblesse des idées n'y
manquent jamais.
Ces mérites nous font pardonner, parfois même oublier, ce
que ses vers ont souvent de pénible, de sec et de prosaïque.
Jovellanos est certainement un médiocre versificateur. « Son
style, disait déjà Quintana, est plutôt une prose noble, élégante,
qu'une diction véritablement poétique. Les vers sont courts,
ÉTUDES SUR LA LITTERATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIECLE 6l
mal construits, sans grâce, sans cadence et sans harmonie. »
M. de Cueto confirme ce jugement sévère : « Comme versifica-
teur, Jovellanos n'est pas un modèle : il abuse des licences poé-
tiques; il lutte sans cesse contre l'accent, les césures, les syna-
lèphes, et il ne sort pas toujours vainqueur de cette lutte. » Si
j'osais, j'ajouterais ici, pour ma part, que le prosateur lui-môme
me semble un modèle suspect. C'est en vain que le grammairien
Salva, élevé sans doute à cette école, le cite volontiers parmi les
maîtres de la langue; son style me paraît plein de gallicismes,
de tours nouveaux, d'accords insolites, qui trahissent la fréquen-
tation assidue d'auteurs étrangers. Jovellanos est l'un des écri-
vains espagnols dont la phrase se plie le mieux à la pensée fran-
çaise, mais donne en même temps l'idée la moins favorable de
la richesse de vocabulaire et de tours de la langue castillane. Au
surplus, il ne se fait pas illusion sur le mérite de ses vers tout au
moins : il les juge au contraire à leur juste valeur, en reconnais-
sant que, s'ils sont pleins d'idées sensées et de sentiments hon-
nêtes, ils manquent un peu trop de grâce et d'aisance :
Alla van à tus manos
Mis versos, oh Paulino,
Mis versos mal limados,
Mis versos bien sentidos.
De afecto y verdad llenos
Si de primor vacios.
Ce sont encore de très nobles paroles, attendries par une émo-
tion vraie, que les variations sur V Impavidum ferient ruina, par
lesquelles Jovellanos, emprisonné depuis sept ans à Bellver, char-
mait sa captivité :
Que el alto estruendo de la horrenda ruina
Escucharâ impertérrita mi aima l .
i. A Posidonio, Bellver, 8 août 1802.
62 E. MÉRIMÉE
A force Je raison et de stoïcisme, le prisonnier de Bellver,
comme jadis celui de Saint-Marc de Léon, Quevedo, touche à la
véritable poésie. Mais, si l'on osait s'exprimer ainsi, c'est cette
même raison qui coupe les ailes du poète, ou, plutôt, qui les
empêche de pousser. Il n'a besoin de personne certes pour être
vertueux : il l'est plus qu'Horace à coup sûr. Il semble cepen-
dant que, sans ce dernier, il ne saurait exprimer ses nobles sen-
timents. Il n'a pas la splendida bilis de Juvénal, son modèle, ou
de Chénier, son contemporain. Dans son Epître à Poncio (Ponce
Vargas), il raconte son voyage de Léon à la Rioja. Ce qui le
frappe, ce qui l'inspire, ce ne sont ni les beautés naturelles, ni
les grands souvenirs historiques, ni le pittoresque des mœurs et
des costumes, ce sont les diverses manières de cultiver les terres,
les productions spéciales à chaque pays, les efforts de l'industrie.
Si dans le poète nous retrouvons trop l'économiste, il n'est
pas moins facile de reconnaître le législateur philosophe dans
l'auteur dramatique. Dans son drame célèbre, YHonnêtc criminel
CEI delincuente honrado), il prétend montrer « la cruauté des lois
qui, sans distinguer entre le provocateur et l'insulté, punissaient
indistinctement les duellistes de la peine capitale ». Ces ordon-
nances avaient été renouvelées récemment par Charles III. Pour
les besoins de sa thèse (et n'est-ce pas la grande objection contre
ce genre de pièces ?) Jovellanos imagine une intrigue très roma-
nesque, dans laquelle le beau rôle appartient naturellement au
meurtrier involontaire du provocateur. Si l'on ajoute que ce
meurtrier, Toreuato, épouse la veuve du mort, et qu'il se trouve
être le fils naturel du juge (D. Justo), forcé de l'envoyer à l'écha-
faud, on devinera que ce n'est pas le pathétique qui manque à ce
drame. Le juge D. Justo, c'est Jovellanos lui-même. Il estime
qu'une législation qui ne serait faite que pour des philosophes
serait inapplicable : summum jus, summa injuria. Elle doit, dans
une certaine mesure, tenir compte des traditions, des mœurs, du
milieu, voire des préjugés. Les tirades sur les exigences tyran-
niques de l'honneur (Actes I, 4, et IV, 6) rencontraient sans doute
ÉTUDES SUR LA LITTERATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIECLE 63
autant d'écho chez le public espagnol que celles du Cid chez les
contemporains des Montmorency et des Bouteville. Il est assez
piquant d'ailleurs de voir un magistrat plaider pour l'équité véri-
table contre la loi écrite. « Oui, je le sais, le véritable honneur
est celui qui résulte de l'exercice de la vertu et de l'accomplisse-
ment de nos devoirs. Le juste ne doit pas se soucier des préjugés
vulgaires, mais, par malheur, la solidité de cette maxime échappe
à la foule. Chez un peuple de philosophes, la loi qui punirait
sévèrement celui qui accepte une provocation serait excellente,
car à leurs yeux ce serait un crime. Mais dans un pays où l'édu-
cation, le climat, les coutumes, le caractère national, la consti-
tution elle-même inspirent à la noblesse ces sentiments fougueux
et jaloux que l'on nomme le point d'honneur, dans un pays où
le plus honoré est le moins patient, dans un pays où la sagesse
se nomme lâcheté, et la modération pusillanimité, sera-t-elle
juste cette loi que seuls pourront respecter les saints ou les
lâches? »
Peut-être l'auteur a-t-il raison, mais il devrait garder quelque
peu de cette condescendance pour les préjugés ou les goûts de la
foule lorsqu'il juge le vieux théâtre national, écrit non pour des
philosophes, mais pour des Espagnols du xvi e et du xvn e siècle.
« La réforme des mœurs, dit-il dans son Mémoire sur les divertis-
sements publics, doit commencer par le bannissement de tous les
drames, non seulement ceux qu'un goût barbare et sot met
aujourd'hui en faveur, mais ceux qui ont été justement célèbres
chez nous, et qui, considérés à la lumière des préceptes et sur-
tout de la saine raison, sont remplis de vices et de défauts que la
morale et une sage politique ne peuvent tolérer. » Ici, Jovella-
nos ne trouve plus de circonstances atténuantes, pas même dans
le charme de ce théâtre dont il déclare faire ses délices, los dra-
mas de Calderôn y Moreto que son hoy... nuestra delicia. Il n'en trou-
vera pas davantage, lorsque, dans ce même Mémoire, il parlera
des Courses de taureaux. Tout à l'heure, il s'appuyait sur les
mœurs populaires contre la sévérité d'une loi, interprète trop
64 E. MÉRIMÉE
absolue de la pure raison. Il s'appuiera maintenant sur la raison
pour proscrire le divertissement national par excellence. « Croire
que l'audace et l'habileté d'une douzaine d'hommes, élevés dès
l'enfance à ce métier, familiarisés avec ses dangers et qui y
périssent ou s'en retirent estropiés, peuvent être données à l'Eu-
rope comme une preuve de la valeur et de l'intrépidité espagnoles,
c'est une absurdité. Et soutenir que l'interdiction de tels diver-
tissements, interdiction qui peut amener d'heureux résultats, cau-
serait quelque perte réelle à la nation, au point de vue de la
morale ou d'une juste police, c'est certainement une illusion, un
préjugé, une folie '. »
Mais je reviens à YHonnéte Criminel. Cette pièce, représentée
avec un grand succès en 1784, fut l'une des premières apparitions
sur la scène espagnole du drame sentimental importé de France.
L'auteur reconnaît de bonne grâce qu'il n'a pas inventé ce genre,
mais il semble fier de l'avoir introduit dans son pays. Dans le
Cours d'humanités qu'il écrivit pour l'Institut Asturien, il cite lui-
même sans embarras le Delincuente honrado comme modèle de
cette comédie nouvelle, « qui développe dans les cœurs les utiles
sentiments d'humanité et de bienveillance. » Et il profite de
l'occasion pour exposer une fois de plus l'idée qui lui tient à
cœur, à savoir que « l'amour de la vertu et l'horreur du vice
sont la fin principale que se doit proposer tout poète drama-
tique, et même tous ceux qui cultivent un genre quelconque de
poésie ».
Pour achever par un dernier trait cette figure si complexe de
Jovellanos, il faudrait, après le politique, l'économiste, le poète,
l'auteur dramatique, étudier le critique d'art, montrer qu'il a
senti et analysé les beautés artistiques mieux que la plupart de
ses contemporains, et qu'il a, l'un des premiers, introduit dans
la littérature espagnole un sentiment assez rare jusque-là.
1 . Cf. la lettre à José Vargas Ponce Sobre fiestas de toros.
ÉTUDES SUR LA LITTÉRATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIECLE 65
MM. Fortunato de Selgas et Menéndez Pelayo ' ont très bien mis
en lumière ce côté intéressant de l'activité intellectuelle de Jovel-
lanos. La tâche était d'ailleurs rendue facile par le grand nombre
de discours ou d'écrits de notre auteur, relatifs aux Beaux-Arts.
Eloge des Beaux-Arts, 14 juillet 17S1 ; Rapport sur les monuments
de Cor doue et de Grenade, 14 mai 1786; Mémoire descriptif sur le
Château de Bellver; Mémoire sur les couvents de Santo Domingo et
de San Francisco de Palma; Description de la Lonja, de Palma;
Eloge de D. Ventura Rodrigue^, 19 janvier 1788; Réflexions et con-
jectures sur l'ébauche originale du tableau de Felâ^que^, Las Meni-
nas; Correspondance avec Fr. Manuel Bayeu, avec Antonio Ponz,
avec Cedn Bermûdez, etc., etc.
Ce qui caractérise surtout Jovellanos critique d'art, c'est l'in-
dépendance relative de ses idées, moins assujetties aux tradi-
tions strictement classiques qu'en matière littéraire. Malgré cer-
taines précautions oratoires, qu'il est parfois obligé de prendre,
surtout dans ses discours officiels, il n'est pas dupe des conven-
tions académiques ni des théories étroites qui avaient cours
parmi les admirateurs de Mengs, ni A plus forte raison des fan-
taisies extravagantes de Churriguera. Son culte sincère pour
Velâzquez, Murillo et les grands maîtres de l'Ecole nationale lui
montrait clairement la fragilité de ces théories et le formalisme
creux de ces conventions. Aussi a-t-il semé ses écrits spéciaux de
pensées où l'on sent des aspirations nouvelles, contenues encore
par la tradition et par l'idéalisme classiques. « La vérité est le
principe de toute perfection : la beauté, le goût, la grâce ne
peuvent exister en dehors d'elle. Cherchez-les dans la nature. »
Mais il se hâte d'ajouter : « Choisissez ce qu'elle vous offre de
plus parfait, les formes les plus belles..., » et il ajoute encore une
note pour atténuer l'audace du conseil : « Si la peinture idéaliste
1. Menéndez Pelayo, Iclcas esteticas, t. III, vol. II, p. 453 et sv. — Fortunato
de Selgas : Joveïïano considerado cotno crltico de Artcs, in Rcv. de Espana, 28 avril,
13 mai 1883.
Revue hispanique. S
66 E. MÉRIMÉE
cause plus d'admiration, dit-il encore, la peinture naturaliste
cause plus de plaisir; et d'ailleurs l'admiration que la première
excite est le privilège d'un groupe restreint, tandis que le plaisir
que la seconde provoque est ressenti par la grande majorité,
sinon par la totalité des hommes. » Partant de ces principes, il
rend pleine justice aux grands maîtres espagnols et parle de ces
admirables artistes avec une sympathie éloquente : « Que d'autres,
dit-il à propos de Velâzquez, célèbrent cette beauté idéale que
poursuivent vainement ceux qui prétendent corriger la vérité et
la nature; applaudissons à leurs efforts, soit ! mais, en attendant,
accordons à Velâzquez la gloire d'avoir su reproduire cette vérité
et rendre la nature. Quel peintre eut jamais un coloris plus juste,
un clair-obscur plus vigoureux, une expression plus simple, des
types plus variés, plus vrais, plus profondément étudiés? » —
« O grand Murillo, s'écrie-t-il ailleurs, j'ai vu dans tes œuvres
les miracles de l'art et du génie : j'y ai vus peints l'air, l'atmo-
sphère, les atomes, la poussière, le mouvement des eaux et jus-
qu'aux lueurs tremblantes de la lumière du matin. » Et sur
Ribera : « Qui a manié le pinceau avec plus d'énergie que Ribera?
Qui a traité avec plus de vigueur les lumières et les ombres ?
Qui a su exprimer plus vivement les misères de l'humanité,
affaiblie par la vieillesse, épuisée par les macérations, pantelante
et moribonde dans l'agonie et les tortures ? » Si je cite ces passages ',
ce n'est pas qu'en eux-mêmes ils aient rien de particulièrement
remarquable ou qu'ils expriment rien qui n'ait été depuis redit
cent fois, et même avec une intelligence plus pénétrante du génie
de ces artistes, mais, à l'époque où ils furent écrits, ils durent
paraître plus hardis, plus originaux, car alors l'enseignement offi-
ciel s'inspirait presque exclusivement de doctrines d'un idéalisme
étroit. Sous prétexte de poursuivre la beauté parfaite et absolue,
on négligeait l'étude scrupuleuse de la nature, comme si l'art
pouvait vivre d'abstractions. Aussi ce dernier s'affadissait, se
i. Déjà cites par McnOndez Pelayo, op. cit.
ÉTUDES SUR LA LITTERATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIECLE 6j
subtilisait, s'académisait : il était urgent de rappeler les artistes
de cette poursuite stérile d'un idéal sans consistance à l'imita-
tion directe de la nature et de leur montrer que l'exactitude, la
conscience dans l'étude de la réalité avait fait surtout la gloire
des maîtres espagnols. Ce fut le mérite de Jovellanos.
De même, comprendre et expliquer, avant Chateaubriand,
avant Victor Hugo, le genre de beauté spécial de l'architecture
gothique, n'était point encore devenu une idée banale. Jovellanos,
tout en émettant sur les origines, d'ailleurs si discutées, du style
ogival, des théories très aventurées, tout en multipliant les res-
trictions, parle du moins avec intelligence de « ce respect silen-
cieux et profond qui s'empare de nous dans les églises gothiques
et qui nous dispose doucement à la méditation des vérités éter-
nelles ». Sans doute, les proportions violent les règles classiques,
« mais quelle splendeur, quelle délicatesse, quelle auguste gravité
dans les célèbres églises de Bûrgos, de Tolède, de Léon et de
Séville! » Les ruines, les monuments, les pierres avaient pour lui
un langage et une âme : elles évoquaient dans son imagination
la vision des temps passés; elles lui ont inspiré quelques-unes de
ses œuvres les meilleures, telles que sa Description du Paular, qui
est peut-être son chef-d'œuvre poétique, ou ses Notices sur la
Lonja de Pal ma, et le Château de Bellver. « Qui donc peut con-
templer ces monuments, qui ont survécu aux siècles, sans se voir
assailli de toutes les idées que provoque naturellement la compa-
raison entre cet âge lointain et le nôtre ' ? » Et en efîet, dans la
belle notice sur la forteresse qui lui servit si longtemps de prison,
tout s'anime, tout prend une forme vivante ; les ruines retrouvent
leur jeunesse et se peuplent de chevaliers, de pages et de nobles
dames, comme au moyen âge : c'est le cadre qui a inspiré le
tableau. Jovellanos, chez qui l'idée pure trouvait rarement une
forme véritablement poétique, a été poète cette fois, c'est-à-dire
créateur. De là à en faire un précurseur du romantisme, il y a
i. Description de Bellver, Bibl. de Aut. Esp., tome XLVI, p. 395.
68 E. MÉRIMÉE
loin, je l'avoue; mais enfin, toute proportion gardée, l'antique
forteresse féodale a été pour lui ce que, quarante ans plus tard,
Notre-Dame de Paris devait être pour Victor Hugo.
En résumé, si Jovellanos n'est ni un très grand écrivain, ni un
poète supérieur, ni un moraliste ou un économiste dont les idées
aient laissé une trace bien profonde, il a, dans presque toutes les
voies ouvertes à l'activité de l'esprit humain, devancé ses compa-
triotes. Mais, en même temps, — et c'est le trait saillant de sa
physionomie, — tout en indiquant des routes nouvelles, où
d'autres iront plus loin que lui, il a deviné les écueils, signalé les
périls, donné quelques conseils qui auraient pu épargner bien
des erreurs et éviter bien des retours en arrière.
Quintana, très digne, il est vrai, de comprendre Jovellanos,
a résumé en une phrase cette noble et féconde existence.
« L'éloquence réclame Jovellanos pour ses beaux Eloges, l'his-
toire pour ses Discours sur les spectacles et mille recherches
curieuses et érudites sur nos antiquités, les Beaux-Arts pour sa
passion, son goût exquis, la protection qu'il leur accorda, l'éco-
nomie pour son admirable Loi Agraire, la politique pour ses
éloquents Mémoires, les sciences pour l'Institut qu'il fonda, la
philosophie pour l'esprit élevé qui anime tous ses travaux, la
vertu pour les exemples de dignité, de justice, d'intégrité, de-
patriotisme, d'humanité qu'il prodigua pendant toute sa vie avec
le zèle le plus ardent et la constance la plus généreuse. »
H. MERIMEE.
UNE POÉSIE INÉDITE
De Rodrigo COTA
La Bibliothèque Nationale de Madrid possède, sous la cote K. 97, un recueil de papiers
divers du commencement du xvi° siècle, à la page 94 duquel se trouve la très curieuse
poésie que je retranscris plus loin. Les strophes 51, 52 et 53 font allusion à des événe-
ments des années 1470, 1471 et 1472. La lecture de cette poésie est fort pénible ; les feuil-
lets sont rongés par endroits. Certains mots sont complètement inintelligibles; néan-
moins, je n'ai écrit en italique que ceux dont la lecture pouvait présenter quelque doute.
R. Foulchh-Delbosc.
Diegarias, contador mayor de los Reyes Catôlicos, casô un hijo ô sobrino
con una parienta del cardenal don Pero Gonçalez de Mendoça. Conbidô para
Segobia todos sus deudos : olvidôse 6 hi'çose olvidado de Rodrigo Cota el Viejo,
natural desta ciudad de Toledo. Sentido délia, celebrô la boda con ese epitala-
mio. Leyéndole la reyna dona Ysavel, dijo que bien parescia ladron de casa.
4-
Pergonçalez, Pergonçalez, 5.
no sabeys donde batalla
saveys do bino esta habla
de Aquel que os guarde de maies.
Entre Vos, hermano, y yo, 6.
bino aqueste topamiento
por algun buen casamiento
que quiso juntar el Dio.
Dad aca con vendiçion, 7.
casemos a vuestra hija,
queste coraçon me aguija
por ganar este jubon.
Pues luego si Vos quisierdes, 8.
revolvelda con Manuel :
tal sea el ano cual es el
en quanto mano pusierdes.
Unas acelguillas llevo ;
ya hablallo he con mi hermana
si esgradare del mançevo
yo os responderé manana.
Si esgradare, me decis,
duelo bino en don Abrahan
para el Dio siete letran
con seys mill maravedis.
Dolor he de Alvendalon
floxo xende Alvendama
solo en botas y jubon
farre aca, farre aculla.
Con el deseo quel toma
de aquel frito de sarten
badeando agua daten
en un charco se nenfoga.
70
R. FOULCHE-DELBOSC
9. Yolvamos a nuestro hecho
es un mançevo sin mal
de muy honrado cahctl
arrendador de cohecho.
10. De un agùelo Avenzuzen
y del otro Abenami^s
de la madré Sophomias
del padre todo Cohen.
1 1 . Sobrino de Avençavoca
negro nieto de Confrel
guarde el Dio callad la boca,
negro sea quien mal le quier.
12. Ah ! Judi hi del Açaque
el que va y viene a Valencia
haze cuenta con Maguaque
con Hervor y con Hemençia.
1 3 . Barravas son aparceros
y que tienda y que caudal
los mejores recepteros
que hay ahora de su ygual.
14. Juan Gonçalez nuestros deudos
estos que viviendo mueren
cuerdos son y aun no los quieren
cuanto mas locos o beudos.
15. Quando os vieredes en sala
entre los nobles barones
asentaos, que Dios os vala,
que dizen en hora mala:
quien lo hizo? los ratones.
16. Ajuar quier que le den
lo ques da a un confesohonnrado
su cedaço y su sarten
y su caldcra tanbien
para guisar jamilado.
17. Porque un malo Pormalvar
dixo que comiô tocino
y no vcays mas pesar
que él lo oliô ni viô el mezquino,
18. due comiendo una adafina
entré a su casa el odrero
ciego que no ve un dinero
le levante tal résina.
19. Hanme dicho que se trata
con la hija de Çorrillo
pues porque se desvarata
porquesverguença deçillo.
20. Una malvada vezina
a su casa a verla vino
vido un poco de ceçina
levante que era tocino.
21. Jurô al Dio non lo faria
fasta apurar esta fama
y aun por vida del Aljama
ques una grande falsia.
22. Que persona tan aguda
que no tiene de seso onça
si supies cual es Aldonça
él la tomaria desnuda.
23. Vivame cual es Aldonça
si es hermosa, yo lo se,
que pareçe en su almenen
hija de los deMendoça.
24. Bonita y de buen aseo
blanca como un alcanfor
con que gracia v con que aseo
jura ansi : viva senor.
25. Guayas de blanca y de flor
v de sus negros maçales
guayas de Clara ' Gonçalez
guayas que harâ mayor.
26. Vereys que dos javatillas ;
guardeos Dios de tal pililla!
florenquin y camarilla
fide traga tajadillas.
1. Dans le mss. on a raturé Clara et écrit au dessus Elvira.
UNE POESIE INEDITE DE RODRIGO COTA
71
27. Aldonça que vos vivays
y viva nuestro senor
l por cual razon lo Jejays
o porque ya no os casays
como lo manda el Criador?
28. Un exemplo oy contar
j parayso liaya mi madré!
que la hija sin la madré
siempre queda por casar.
29. Por el Dio quehegran dolor
como de las hijas mias
de vos y de vuestro honor
que chica, grande, y mayor
se os van en balde los dias.
30. Délias veays placer bueno
j hdgalas Dios maridadas !
que como vezino bueno
os doleys del mal ajeno
pareçe quien soys a osadas.
3 1 . No fueron taies mis hadas
que venga en miente a mi padre
que mis yguales casadas
tienen ya hijas prenadas
j asi el Dio os guarde, compadre !
32. Quitaos esas gramavas
y serbinos de altamias
que ansi me andava yo en sayas
quando era de vuestros dias.
33. Y tomad esa altamia
y llevadsela a la no via
y decid que se la envia
su tia que vien de Segovia.
34. Hu que guesmo y que guisado
nuncas mançilla en su cara
siempre los del almanjara
hazen esto jamilado.
35. Daca mas almocarrado
por vida de Juan Gonçalez
daca hinche esos briales
de la miel de las atacas.
36. Que tardanças, que paranças
en fretir siete bunuelos
moços, moças, diablos duelos
vino para harba dan cas.
37. Venga ya el armin tostado
y el toston frito en sarten
y a vos le dexo acabado
y es muy contento y pagado
que el Dio le ha quesido bien.
38. En la boda desta aljama
no se comiô peliagudo
ni pescado sin escama
con quanto el marido pudo ;
39. sino mucha berengena
y açafran con acelguilla
quien Jesu diga en la çena
que no coma alvondiguilla.
40. Casamiento que hecistes
bueno tal sea vuestra vida
veys aqui Aldonça parida
despues que la bendijistes.
41. Un fijuelo llorador
luengo como un filisteo
que en el duysca si non creo
que ha de ser arrendador.
42. Asi era su padre agudo
con unas gramayas rotas
que por atacar las botas
al alvor saliô desnudo.
43. Desganavas sobre un figo
negro arrendador de çiençia
que jamas hizo avenençia
sin gallina, queso, o trigo.
44. Por el lodo quel cubriô
que es hoy viernes quel saba
quiso sorber al abba
solo porquel guisopo.
45. Es un huerco baratero
que vende iongos y salsa
del lodo haze dineros
vende jerapliega falsa.
46. Vende mucho, vende caro,
repica bien de almirez
conoceys Anton de Faro,
I*
R. FOULCHE-DELBOSC
a ese quita la vez.
47. Saveys que hacia el mançel
al escreuir lo pagado
echava queso rallado
par aflecho en el papel, 54.
48. porque viniesen ratones
a fazer en ello estrago
en guis que los maharones
dos vezes hiziesen pago. 55.
49. Yo le vi a Manuel y a el
por el siglo quesperamos
vender vadeas entramos
a las puertas de Xocrel. 56.
50. Y despues por nuestra ley
aun no pasô un aiïo entero
yo le vi a tienda de Rey
con criraya despeçiero. 57.
5 1 . Yol vi el aiïo de setenta
trafagando y con que acucias
arrendador de minuçias
sobre si toda la renta.
52. Y aun el bien aventurado 58.
sin tenerarrimo alguno
ano de setenta y uno
arrendô carne y pescado.
53. No direis Aldonça en que ano
si dire ansi vivays vos
ano de setenta y dos
cuando feçimos los dos
al del garico el engaiïo
Miembraseos de la merienda
de alla del soto del lobo
quando travaron contienda
Manuel y el hijo del Hobo.
Quiça se me accordara
quando el hebre de Alcalâ
se travô de los cabellos ;
i que negros tiempos aquellos
Y la negra sabrosia
de la Roscadeça maya
mientra el otro en la porfia
nos comimos la alcalaya.
Ques de aquellas corunbias
de en cas de nuestras agùelas
aquellas alcominias
el placer las donosias
aquel hervir de caçuelas.
Y de aquel negro atayfor
de Pero Lopez Momen.
Bendicto nuestro senor
que vive por siempre. Amen.
LOS BESOS DE AMOR
ODAS INÉDITAS DE DON JUAN MELÉNDEZ VALDÉS
Dans le tome premier du Catdlo^o de la Biblioteca de Sàlvâ figure l'article
suivant :
316. POESIAS EROTICAS de varios autores de fines del siglo XVIII y principios del
XIX. Manuscrite en 4 .
Comprende este legajo composiciones de diferentes poetas modernos : entre ellos
descuellan D. Tomas de Iriarte, D. Juan Meléndez Valdés y D. Leandro Fernandez
Moratin. La mayor parte son inéditas y dificilmente venin la luz pùblica por ser dema-
siado obscenas.
Cette liasse de manuscrits m'appartient depuis peu. La lecture attentive de
ces poésies m'a convaincu de l'injustice du jugement de Salvd : sans doute
quelques-unes ne pourraient être que difficilement publiées, mais la plupart,
tout en étant d'un genre badin ou même léger, sont loin de mériter le
reproche d'obscénité que leur a adressé le célèbre bibliographe.
J'ai eu le plaisir de trouver, parmi les pièces qui composent ce recueil factice,
une série de 23 odes de Meléndez Valdés, formant un cahier de 42 pages
(206x146 millim). Le premier feuillet porte au recto l'inscription suivante : Los
Besos de Amor De Juan Segundo Traducidos par el D< Z> Juan Melénde^ l'aidés.
Malgré ce titre explicite, placé là comme pour dérouter le lecteur, ces odes ne
sont pas la traduction des Basia de Jean Second. Que le poète espagnol se soit
inspiré de l'œuvre latine, la chose n'est pas douteuse ; mais il n'a ni traduit
ni même imité : dans ses 23 odelettes on ne retrouve que de loin en loin
une concordance avec tel ou tel passage d'un des 19 Basia.
11 eût été très regrettable que les Besos de Amor fussent demeurés inconnus ;
je les considère en effet comme un des chefs-d'œuvre de la poésie anacréon-
tique espagnole. A l'inverse du poète silésien Gùnther qui ne sut pas être
décent dans sa traduction des Baisers de Jean Second, Meléndez Valdés s'y
révèle comme le plus chaste des chantres delà volupté.
Sans avoir de données sur l'époque de la composition de ce petit poème,
j'incline à croire que le poète espagnol l'écrivit dans ses jeunes années. Jean
Second n'avait pas vingt-cinq ans quand il mourut ; c'était peut-être l'âge de
Meléndez quand il s'inspira de son célèbre devancier. L'un et l'autre auraient
pu donner pour épigraphe à leurs poésies ce vers de Mimnerme :
T 1 '? oé ft.o;, Tt oe teo-vÔv %-.iz ypudéTjç '.Vf poo;T7]ç ;
R. Foulché-Delbosc.
74
JUAN MELENDEZ VALDES
LOS BESOS DE AMOR
mis labios,.. ay! se oprimen
pues con los que te he dado
mi sed no satisfice.
lte, agite ac pari ter sudale medullis
Omnibus inter vos ; non murmura vestra
\coluniba
Brachia non hederœ , non vincant oscula
[coucha'.
Fragm. Epithal.
Imper. Gallieni.
Al lecho, al lecho; y en arâiente fuego
los miembros se os derritan ;
no los arrullos del palomo ciego
con los vuestros compitan;
no los amantes bravos
la hiedra envidieu en sus dulces la^os ;
ni las couchas del mar innumerables
excedan vuestros besos incesables.
ODA i»
Los besos regalados
que en medio de iaslides,
dulcisimas de Venus
mil veces recibiste ;
los que à tus dulces labios
besdndome apacibles
mas dulces que las mieles
robe tambien felice ;
en numéros sonoros,
mi musa los repite,
y mi amor, Galatea,
te los consagra humilde.
Ôyelos pues, y afable
porque su ardor alivie
à darmelos de nuevo
querida te apercibe,
que ya de mil m illares
ODA 2*
Quando la vez primera
di a Nise un dulce beso,
florido amomo y casia
respiraba su aliento,
y de su dulce boca
mis labios recogieron
tan dulce miel quai nunca
la diô el collado hibleo ;
asi por apurarla
con hidrôpico anhelo,
mil, y mil, y mil veces
cada dia la beso ,
y el numéro acabado,
torno à darla de nuevo
mas besos que â su Adonis
dar pudo la aima Venus.
ODA s*
Quando mi blanda Nise
lasciva me rodea
con sus nevados brazos,
y mil veces me besa ;
quando a mi ardiente boca
su dulce labio aprieta
tan del placer rendida
que casi a hablar no acierta :
y yo por alentarla
corro con mano inquiéta
de su nevado vientre
las partes mis sécrétas ;
y ella entre dulces ayes
se mueve mas, y alterna
ternuras y suspiros
con balbucicntc lengua ;
LOS BESOS DE AMOR
75
ora Hijito me llama,
ya que cese me ruega,
ya al besarme me muerde,
y moviéndose anhela.
Entonces j ay ! si alguno
contô del mar la arena,
cuente, cuente, las glorias
en que el amor me anega.
ODA 4*
Juguemos, Nisa mia,
y quando el sol dorado,
forme el rosado dia,
é lo esconda inclinado
en las esferias olas,
hallenos siempre à solas
en retozos y en juegos.
Yo enamorado y ciego
te dire... j ay ! Palomita,
y tu con voz blandita
me diras : Pichon mio,
y quando en el exceso
de mi furor te diga
dame, Paloma, un beso,
tu a mi cuello enredados
los dos brazos, amiga,
mil y mil delicados
y otros mil bas de darme,
y vibrando de prisa
la lengùita al besarme,
me herirâs de un muerdito,
diciéndome : jay ! i no es Nisa
tu Palomita, hijito,
tu miel y tu dulzura ?
tuya soy j que ventura !
mâs mas bésame y mira
quai bullen descubiertos
mis pechos tan cargados
por ti, que ya retiran
la holanda en que guardados
estaban. i Ay ! ; do vas? dônde
tu dedo j ay ! . . . i ay !.. se esconde
lascivo! jque hacemos!...
Asi, Nisa, juguemos,
asi mientras floridos
ambos gozar podemos
de Venus la dulzura.
Ni en vano huyan perdidos
nuestros tiempos mejores,
que ya con mil dolores
la vejez se apresura
y en llegando, mi vida,
la fuerza ya perdida
ay me ! la tos obscura
vendra en desquite luego
del retozo y del juego.
ODA s*
El que con tiernos ojos
rendido una vez miras
de piedra es si no salta
con sûbita alegria ;
y si el mismo en tus labios
mil dulces besos liba ,
feliz très y mâs veces
le digo ya en tal dicha ;
empero si en tu lecho
recibirle te dignas ,
no ya feliz le llamo,
Dios es, Dios, blanda Nisa
ODA 6*
Dicen que te doy, Nisa,
mil delicados besos,
quai nuestros viejos tristes
nunca darlos supieron ;
mas yo si en tiernos lazos
cino tu blando cuello
y al besarte y besarme
76
JUAN MELEXDEZ VALDES
quasi de placer muero,
l he de indagar curioso
mi vida ? nada de esto ,
quando do esté, ô quien sea
saber apenas puedo.
La bella Nisa oyôme,
riôse, y al momento
con su nevada mano
ciiîô mi amante cuello
y un beso tan lascivo
con rostro tan risueho
me diô, quai nunca a Marte
dar pudo el aima Venus,
diciéndome: ique ternes
la grita de los viejos ?
i ay ! de tus besos dulces
yo sola juzgar debo.
ODA 7*
Pedite un dulce beso,
y tû al ddrmelo, Nisa,
los labios de mi boca
tan de ligero guitas,
que quai huye asombrado
el que en la hierba pisa
la vi'bora, asi lejos
de mi tu faz retiras.
i Ay! ... ay! ... esto no es darme
un beso, sino vivas
ansias de que me beses
mil vezes, vida mia.
ODA 8»
Mil besos te he pedido :
tû fiel à mis promesas
mil veces solamente
blanda Nisa, me besas.
Mas, ay ! ay ! porque avara
asi luego escaseas
tus besos regalados,
que me los das por cucnta?
I Si dan Ceres y Baco
sus dones à" la tierra,
las cubas y los troxes
contando, los hinchieran ?
I Si llueve el almo Jove
las gotas con que riega
los âridos sembrados,
contadas, que sirvieran?
Pues; ay ! tu siendo Diosa
muy mas que Venus bella
l â que contar los besos
y no contar mis penas?
I Si es que contarlas puedes
tus dulces besos cuenta ;
sino, jucunda Nisa,
sin numéro me besa.
ODA 9a
Quando en tus dulces labios
descanso, mi seiïora,
chupando de tu aliento
las flores olorosas,
por uno de los Dioses
que en el Olimpo moran
me tengo y mas si aun cabe
ventura mas gloriosa.
Mas luego que te apartas,
yo el que por Dios ahora
me tuve, y mas si aun hubo
mayor alguna cosa,
dcl Orco ya me siento
ay ! en las negras sombras
y mas si aun hubo suerte
màs baja y mas penosa.
ODA io»
Quando con tiernos brazos
me enlazas y rodeas,
v el cuello reclinado
el pecho y faz risuena,
tus labios a mis labios,
LOS BESOS DE AMOR
77
oh! blanda Nisa, llegas,
y atrevida me muerdes
y mordida te quexas,
y aqui, y alli, vibrando
la balbuciente lengua,
ya chupas, ya respiras,
la dulei'sima y tierna
aura de tu suave
anima que alimenta
mi vida misérable ;
quando blanda me besas
y agotando esta mia
caduca, y con la fuerza
del ardor encendida,
del ardor que alimenta
el impotente pecho,
le burlas y le templas
de un soplo; ay ! aura dulce
que mi calor recréas !
perdido exclamo entonces
que Dios de Dioses sea
Amor, y que ninguno
ser mayor que Amor pueda.
Empero si algun otro
aun le excède en alteza,
tu sola mayor ères
que el Amor, Nisa bella.
ODA n*
Ay ! déjame, luz mia,
déjà, donosa mia
y mis dulces amores,
besar esos ojuelos
que el aima y pecho mio
tanto alegran ; y déjà
que el tu pelo dorado
que al dorado cabello
de Apolo y al de Baco
se aventaja, yo bese.
Ay ingrata ! Ay esquiva !
que tan ligero premio
niegas y este descanso
à tu amante y poeta.
iQue te burlas donosa?
1<D porque asi présumas
que me veas, forzada
por pedirtelo huyes
de lo que mas deseas?
Pues ay ! he de cogerte
por fuerza, y a tu cuello
he de enredar mis manos,
y juntar a mi rostro
el tuyo, y a tus labios
los mios ; y aunque niegues
y reniegues y luches,
que fiera me amenazes,
te daré hasta mil besos :
tu morderàsme todo,
y aqui, y alli, tus unas
me heriran, pero en vano,
que sus surcos no temo,
ni tus muerdos, mas antes
quanto mas me araiïares
y fiera me mordieres,
mas regalados besos
te daré, y con mas fuerza
te estrecharé en mis brazos.
j O dulci'simas rinas!
i O muerditos suaves !
I Hacerme, Nisa, quieres
feliz ? pues niega siempre
tus besos a mis ruegos
para que yo asi pueda
robados de tu boca
gustarlos mas suaves.
ODA 12*
Despues de los dolores
de largo enojo y doloroso olvido,
torna a unirnos Cupido
en sabrosos amores
y ya, Amarilis mia,
78
[UAN MELENDEZ VALDES
danos Venus la paz que dar solia.
Ya me da que ver pueda
tus lascivos ojuelos y tu boca
que a mil besos provoca,
y gozar no me veda
tuspechos y tu seno,
dulce miel, dulce mal, dulce veneno.
Ay ! Ay ! si yo gozara
en regalado lecho, aquella rosa
tanto a Venus odiosa,
y quai olmo abrazdra
tu cuello delicado,
en un mar de deleites anegado ;
y el amor en su vaso
nos diera el quinto nectar delicioso
en el lance glorioso
do jamas anda escaso
en derramar su cebo
y es paso un gusto de otro gusto nuevo,
i por quan bien empleado
diera el antiguo enojo y el olvido !
A la Diosa de Gnido
ante el ara postrado
tu zona dedicdra,
y un par de palomitas consagrdra.
Entonces tus ojuelos
ardieran en mirdndome, alternando
tu labienzuelo blando
entre amantes anhelos,
el muerdo y la saliva
y el beso burlador que el aima priva.
O con voz amorosa
el queridito mio, aprisa, aprisa
entre lasciva risa
al andar deliciosa
por tu vientre nevado
mi mano, otro besito regalado.
Que alliamor nos moviera
mezcldndose de entr.unbos el aliento,
y si el mole ardimiento
cesdra entonces fuera
quando en mansos quejidos
en deleites queddramos dormidos.
Mas al punto excitando
mil amorosas burlas y caricias,
para nuevas delicias
nos fuéramos probando,
y entre lascivos juegos
nos inspira amor deleites nuevos.
Con esta dulce vida
recompensa Amarilis los dolores
que causan tus rigores
y olvido, y fé perdida,
y premio de ambos sea
la amiga posesion que amor desea :
que tû ya premiar sabes
mi carino, y aun tengo en la memoria
la dulci'sima gloria
de los besos suaves
con que diste algun dia
cebo d mi amor, y aliento d mi porfia.
ODA 13a
O noche deliciosa !
O afortunado lecho ! o gloria mia !
O Amarilida hermosa !
mi amor en ti confia
la dulci'sima gloria de este dia.
Pensando en mi amor ciego
los venideros ratos concertados
y aquel lascivo juego
con tus pechos ncvados,
y mil sabrosos besos d hurto d'ados,
quando en tiernos abrazos
d tu cdndido cuello asido estaba
quai la vid con mil lazos,
v tu boca sonaba
con los ardientes besos que me daba.
Qucdéme ayer dormido
i o nunca despertara d mds dolores !
LOS BESOS DE A.MOR
79
Ay ! yo soné el cumplido
premio de mis amores
gozdndote, mi bien, entre las flores.
i Quan dulces cosa via !
que brazos ! y que pechos ! que cintura !
mi vista discurria
con ardiente presura,
ansioso de gozar tanta hermosura
y al cerïir d tu cuello
mis amorosos brazos en cadena,
ora tu labio bello,
con dulces vozessuena,
y ora al quejarse mi furor refréna.
Mas yo de amor perdido,
ya tus ayes, donosa, me aplacaban,
va de tu ardor movido
las ropas te quitaba
y toda de mis besos te anegaba.
i Que de luchas trabamos,
quitada ya la luz ! y d quantos juegos
de nuevo, ay me! tornamos !
ora humilde à mis ruegos,
ora pugnando entrambos de amor
[ciegos.
Ya las tetas mostrabas
redonduelas y cdndidas quai nieve,
y ya las ocultabas
porque de nuevo pruebe
mi mano d hallarlas, y en su ardor se
[cebe.
Mas quando amor instiga
al dulce ayuntamiento apetecido
y en sabrosa fatiga
me falta ya el sentido,
de un éxtasis dulcïsimo impedido,
tû con lasciva mano
tocdndome proterva, a nueva vida
del sueno soberano
me tornas at revida.
y un besito d otro suerïo me convida.
Asi se dobla el fuego
y los halagos crecen al sonido
del alternado ruego
respondiendo d un quejido
el muerdito en el beso confundido.
Y entre el murmullo lento
el anima parece en suspirando
salirse entre el aliento,
que nos va faltando
para tantos deleites no bastando.
Engdnase el que intenta
poner término d amor y sus furores,
porque él sabe sin cuenta
mil deleites y ardores,
y mil modos de abrazos y favores.
1 Que aprovecha d lo obscuro
envolver el amor?d la luz clara.
gôzelo yo seguro
sin que me niegue avara
la divina Amaralida su cara.
Yea de sus ojuelos
el lascivo mirar y oiga el sonido
de sus blandos anhelos,
quando a compas movido
mi muslo suene, d su muslo unido.
Y la vista derrame
por su nevado vientre y por sus lados,
v tanto amor me inflame
que en lazos duplicados
mil veces nos gozenlos ayuntados,
saciândose mis ojos
en quanto el hado crudo asi lo ordena
pues los fieros cerrojos
la muerte al lado suena
del Orco do tan presto nos condena.
Por esto, gloria mia,
la verdad de mi sueno no tardemos,
y en ardiente porfia,
ahora que podemos,
los dulces gustos del amor gozemos.
8o
JUAN MELENDEZ VALDES
ODA i4 a
Diera yo, blanda Nisa,
con amoroso anhelo
a tus frescas mexillas
y a tus ojos parleras
v ;i tus purpûreos labios
cien regalados besos,
cien mil à tu garganta
y a tus nevados pechos
mil veces, mil y tantos
millares como el cielo
de estrellas, y el mar tiene
de arenas en su seno.
Pero av! que al inclinarme
a besar de amor ciego
tus amorosos labios
y brillantes ojuelos,
ni las tiernas mexillas,
ni los ojos traviesos,
ni de tu amable boca
las dulces risas veo,
que quai las negras sombras
del cielo ahuyenta luego
que el sol de Oriente nace
banando en lu/, el suelo,
tal tu amorosa gracia
templa mi llanto, y luego
del aima echa las penas,
los ayes de mi pccho,
mi bien, que dulces lides!
j quanto bcsarte quiero !
mis labios y mis ojos
reiiir ardientes veo.
ODA i$ â
Mi humilde rostro hierc
ci m ufias atrevidas,
que asi amor se alimenta
de rcgaladas rinas,
y arrancame y revuelve
la cabellera riza,
y estorba mis deseos
en tu ropa ceîïida,
que tanto son sabrosas,
j ay ! quanto resistidas,
o blanda Galatea
de Venus las delicias.
ODA i6*
No entre tan blanda risa
me beses, Galatea,
ni asida de mi cuello
mas de lasciva prendas.
Modo hay en los placeres
y aquél que mas deleita
bien presto repetido
ya el aima lo de sécha,
y asi si te pidiere
nueve besos, tû déjà
dos solamente y grita
los siete de la cuenta ;
y ni hûmedos ni luengos
procura bien que sean,
quai darlos suele al padre
la cândida doncella :
mas con lasciva planta
huye luego y ligera
guarte à mis blandos ojos
en una oculta pieza;
yo en pos lie de seguirte
porque al hallarte en ella
pueda enlazar mis manos
de tu garganta bella,
rnkindote amoroso,
quai en sus unas fieras
la flaca palomita
el gavilan se lleva.
Tû las vencidas palmas
tenderàs, Galatea,
LOS BESOS DE AMOR
81
y enredada en mi cuellp
quai del olmo la hiedra,
ya con los siete besos
Je regalado nectar
querrâs templarme; v quanto,
regalo mio, yerras?
Pues para perdonarte
me debes dar setenta,
v aun entre tiernos lazos
te he de tener sujeta
hasta que por tus gracias
me jures que deseas
por otro tal delito
llevar la misma pena.
ODA 17a
Mis ojos à los labios,
si à te besar me llego,
luego envidian, ni pueden
carecer de tu aspecto,
y si en tu dulce vista
los ojos saciar quiero,
mis labios envidiosos
me lo resisten luego,
porque el candor nevado,
de tu purpûreo pecho
los atrae y provoca
como el iman al hierro.
j Ay soberana fuerza
de hermosisimo objeto !
que obliga à que yo propio
Jisienta de mi mesmo.
ODA 18*
De besos regalados,
de amores, de caricias,
en tu mullido lecho
Iléname, Filis mia ;
v enrédate a mi cueilo
Revue hispanique.
las bocas tan unidas,
que tû mis aires bebas,
yo tu aliento reciba ;
tus dos ojuelos brillen
y al entrarse lasciva
con blando afan mi mano
por la dorada cima,
suene un murmullo blando,
y â par de la latiga
dulefsima de Venus
con débil voz suspira;
tus quejidos me alienten,
muérdame tu iengùita,
tus brazos me aprisionen,
tu anhelo me dé prisa,
v venga j ay me! la muerte,
que entre tanta delicia,!
Filis, si llegar osa
no es muerte sino vida.
ODA 19'
Paloma amorosa
basta no te quejes
que va de tus brazos,
colgado me tienes ;
ya mi dulce boca
de la tuya bebe
tu aliento mas dulce
que las dulces mieles;
mi lengua vacila
mi pecho se enciende,
i Ay que desfallezco !
Bien mio, sostenme '
sostenme, v tus brazos
màs y mas me estrechen,
y ni tu ardor pare
ni tus besos cesen ;
i Que dulce muerdito
con lascivo diente
me bas dado ! Repara
JUAN MELEXDEZ VAEDES
que el labio me hieres.
£ Que quejas son estas ?
I que es esto ? détente,
que en tantas delicias
mi anior desfallece;
l suspiras y anhelas
y à par que te mueves
tus ojuelos bullen
v tus ayes crecen?
I Que es esto, amor mio?
reposa... i que tienes ?
I me abrazas, y gimes ?
I que... Nisa... que sientes
j Av ! ique te desmayas?
No temas ; advierte
que va delicioso
mi amor te sostiene,
reposa en mis brazos
v tu ardor se temple,
mas no de mi cuello
los tuyos descuelgues,
y déjà â mis labios
que el aima alimenten
en los albos pechos
y en ellos se ceben ;
ni tû de cansada
mil besos me niegues
que activos de nuevo
mis Hamas alienten,
porque alli, bien mio,
en blandos placeres
tan dulces desmayos
gozeraos mil veces.
ODA 20»
Los lascivos besos
quL entre blandas risas
me das amorosa
y amor los envidia
repite mil veces,
dulcfsima Nisa,
pues asi se alienta
el anima mia,
y no son mas dulces
las mieles de Hiblia
que el nectar que en ellos
tus labios destilan ;
ni asi las palomas
al amor heridas
con trémulos picos
se besan amigas,
ni tantos olores
el Arabia cria
quai blandos aromas
tu pecho respira.
i Av ! trémula suena
tu dulce lengùita,
v el labio amoroso
se queja y suspira !
Cesemos, cesemos,
y alla te retira,
que el aima fallece
con tanta delicia.
ODA 21»
Con blanda boca un beso regalado
me diô la ninfa mia,
v mas dulce v preciado
me parecid queel nectar v ambrosia,
quai del tomillo y casia deliciosa
al ir Febo rayando
en verano oficîosa
la abeja liba entre susurro blando.
V con proterva planta diôligera
a correr v esconderse,
porque lasciva espéra
poder en las tinieblas guarecerse ;
emperoquan envano! que escondida
no quiere amor dejarla,
v la antorcha encendida
LOS BESOS DE AMOR
83
en su busca me alumbrahasta toparla.
Ya, ya, segunda vez te tengo asida
,; de que tiemblas en vano?
j Ay mi bien ! Ay mi vida!
ya te tengo y te asf con blanda mano.
Por tan dulce trabajo nueve besos
en pago dame, y todos
con tus labios traviesos
dàmelos, Nisa, de diversos modos.
I Di, di, no sientessime estas besando
que a los labios concurren
las aimas y buscando
la mitad que les falta, ambas discurren?
Asi, mi vida, asi, Paloma mia,
las aimas ayuntemos,
y tal que en ningun dia
tan dulci'simo lazo separemos.
Antes quando los plazos sean cum-
[plidos
de nuestra fragil vida
un solo espi'ritu, unidos
los labios, de dos bocas se despida.
ODA 22*
Para que, Galatea,
para que tus mexillas,
si no para besarlas
despues de bien lamidas?
Pero haciéndolo todo
con blanda lengùecita
que goze y no lastime
su purpura florida,
que no en vano Citeres
de sus rosas mas finas
y de sus azuzenas
te las sembrô benigna ;
asi no mas las guardes,
no mis, Paloma mia,
que labios de un amante
besando no lastiman.
ODA 23»
Dulce Paloma
del aima mia,
mas no te quejes
de amor herida,
ni el tierno labio,
que dm bar respira
nuis tristes ayes
fi 110 repita.
Ya vuelvo al lecho
do tû lasciva
con mil besitos
mi ardor atizas ;
ya de mi cuello
puedes asida
pender, que arable
ya te convida.
Llega y volvamos
d las delicias
de amor; un beso
dame benigna,
ddmelo, empieza
que me lastima,
bien mio, el aima
verte afligida ;
y no tus brazos
me cansan, Nisa,
mas por provarte
fingî que huia.
Ya vï tus ansias :
llega, mi vida,
y el ceno trueca
por juego y risa.
VA R I A
1. Notes sur Guillén de Castro.
I. Sur le séjour de C. en Italie. — On sait qu'à la suite d'événements drama-
tiques, encore mal connus, Guillén de Castro passa plusieurs années dans le
royaume de Naples. Mais les dates de ce séjour étaient restées obscures. Une
note des Amantes de Teruel de Juan Yagùe de Salas m'a permis d'établir qu'en
1616, il était depuis quelque temps déjà rentré à Valence (voy. Mocedades del
Ciel, p. xxvn). Quant à la date de son départ pour l'Italie, elle me semblait
pouvoir être placée entre 1603 et 1606. Un document, que je dois à l'obli-
geance de M. B. Croce, de Naples, me permet aujourd'hui de préciser cette
date. Ce sont les lettres patentes du gouvernement de Scigliano, octroyées à
G. de C. à la date du I er juin 1607. {Archiva di Stato di Napoli. — Officîorum
Collatérale, vol. II. 1606-1608, fol. 99 recto : Giiglielmus de Castro.)
« Expediu fuit provisio patens officii Capitaneatus terre Scigliani in personam
M ci Don Guglielmi Je Castro, pro uno anno integro et deinde in antea ad
beneplacitum cum pensione lucris gagiis et emolumentis solitis et consuetis,
qui prestidit juramentum in manus m ' et circumspecti Pétri de Valcassel {sic
p. ValcârcelT) regii Collateralis consiliarii et regiam cancellariam regentis, cum
aliis clausulis solitis et consuetis in forma regiae cancellariae. Datum Neap 1 die
p" Junii 1607.
El coude de Ven.ivente. »
C'est donc très vraisemblablement à la fin de 1606 ou dans les premiers mois
de 1607 que Castro arriva dans le Royaume de Naples. Cette ville de Scigliano,
dont on avait fait Seyano, Sejano, se trouve dans la Calabre Citéricure, non loin
de Martorano, district de Cosenza.
H. — Sur la date de la première édition des Comédies de G. d. C. — Ximeno
dans ses Escritores del Ri yno de Valencia, assure que les deux parties des Comédies
dé C. se réimprimèrent (se reimprimieron) à Valence, en 1 61 8. Salvâ, La Barrera
et d'autres ont mis en doute l'existence de cette édition, qui, pour des raisons
exposées dans l'ouvrage cité plus haut, me paraissait certaine. La chose est
hors de doute depuis que M. A. L. Stiefel a assuré avoir tenu entre les mains
un exemplaire (le seul connu) de cette édition sortie des presses de F. Mey.
VARIA 8 5
(Zeitschrift f. rom. Phil. 1891, XV Bd, 1.2. H.) Mais il y a plus. Non seule-
ment il faudrait, si l'on en croit M. Stiefel, admettre une édition de la Primera
parte de 1614, mentionnée par Ticknor, mais même reculer encore cette date.
En effet, Lope de Vega, dans sa Dama Bdba (III, 2), cite las « Comedias de
Don Guillen de Castro ». Or il existe, selon La Barrera (Catdlogo, p. 434),
dans le fonds Osuna de la Bibl. Nation, de Madrid, un manuscrit de la Dama
Boba, signé de Lope, et daté du 28 avril 161 3. Si le fait est bien exact, il en faut
conclure qu'il avait paru, avant cette date de 161 3, au moins un recueil des
Comédies de Castro, et c'est à ce recueil que C. fait allusion, lorsque, dans la
i re partie authentique (1621) et dans la 2 e partie authentique (1625), il
nous apprend que, pendant son absence (esiando yo ausenté), un libraire peu
scrupuleux avait imprimé « douze comédies » de lui. La conjecture de Stiefel,
pensant qu'il s'agit bien dans la Dama Boba d'une publication originale et non
d'un recueil factice de Sacltas, paraît donc très vraisemblable, mais il faut
remarquer d'autre part que Castro ne parle que d'une seule Parte (doce Comedias)
apocryphe.
E. Mérimée.
2. Deux lettres inédites d'Isabelle la Catholique concernant
la famille de Rodrigo Cota.
On sait combien sont rares les données que nous possédons sur Rodrigo Cota, l'auteur
du dialogue de l'Amour et du Vieillard. La Bibliothèque Nationale de Madrid possède,
sous la cote Dd 59, un recueil renfermant une série de documents des xv° et XVI e siècles,
dont la plupart concernent Tolède. Ces documents ont été recopiés au commencement du
xvm c siècle. A la page 91 et suiv. se trouvent deux lettres d'Isabelle la Catholique, l'une
du I er novembre 1462, l'autre du 27 mai 1472, qui serviront peut-être de point de départ
pour de nouvelles recherches sur Cota et sa famille.
Première lettre :
Io la Princesa de Castilla e de Léon, Reyna de Sicilia, Princesa de Aragon
embio mucho a saludar i Vos los honrados Assistente, Alcaldes, Alguacil,
Regidores, Jurados, Cavalleros, Escuderos de la muy noble Cibdad de Toledo
como aquellos q mucho precio. la creo que sabeis como el Mariscal Fernâdo
de Ribadeneyra, y Pedro de Ribadeneyra su fijo, y Christoval Bermudcz de un
mes a esta parte poco mas u menos tienen presos en la Fortaleza de Canales al
Jurado Sancho Cota, e a Rodrigo Cota su fijo a los quales prendieron por
razon que el Bachiller Alfonso de la Quadra, Alcalde en la muy noble Cibdad
de Avila, fijo del dicho Sancho Cota fizo cortar la mano por justieia a un escu-
dero del dho Mariscal Fernando, diciendo demas desto q le havia lebado ciertos
86 VARIA
castellanos : e agora nuevamente me es dicho que es libre el dho Rodrigo
Cota por resta de que del ovieron de noventa mill mfs, llevando luego prendas
por los sesenta mill mfs, por lo restante quedô preso el dho Sancho Cota, de
lo quai todo soy muy maravillada del dho Mariscal facer ni dar consenti miento,
que semejante dano, e agravio tan indebidam' se les ficiesse no se yendo
encargo alguno. Por lo q el dho Bachiller Alfonso de la Quadra su fijo fizo
por via y execucion de justicia y non haviendo llevado los dhos castellanos ni
parte dellos por cierta informacion que sobre ello yo he havido e por quanto
no en menos estima tengo qualquier agravio y dano, q por esta causa hayan
recebido, q si en mi mesma se ficiesse, por q se ha fecho, y face en ofensa mia,
y en menosprecio de mi justicia, e por que a vosotros es cosa honesta dar
sobre esto el remedio q cumple a mi servicio y a la buena deliberacion del dho
Sancho Cota, y no dar lugar ni consentir q semejante deservicio y mengua
por esta causa se me siga, mayorm te por los dhos Mariscal e su fijo, e Chris-
toval Ikrmudez ser Vecinos, y Parientes vuestros por ende afectuosam te vos
ruego si complacer e servirme deseais, como confio de vos, tengais luego
manera como el dho Sancho Cota sea libre de la dha prision, e sin rescate
alguno travajando assimismo con todas vfas fuerzas como restituyan las pren-
das y bienes que tienen por el rescate de los dhos sesenta mill mfs enteram te ,
pues q no han tenido ni tienen razon alguna para lo detener preso ni mucho
menos para llevar los mfs del dho rescate p r q si algo por este caso se hoviesse
de dar, yo lo havria de pagar e no ellos, por ser, como es, la causa mia propia,
e tocar a mi este fecho, e si assi lo ficieredes, sed ciertos vos lo regradecere en
mayor grado q podriades pensar, y conoceré de vosotros q demas de facer en
esto vro deber, teneis voluntad, y deseo, de me complacer, y servir, y me dareis
por ello cargo para mirar por el bien vro y desa ciudad, y si ansi no lo ficie-
redes, y en ello alguna escusa y dilaciô pusieredes, sed ciertos q a cargo vro,
p s el caso tanto me toca, mandaré proveer en ello, como cumple à mi servicio,
y al bien del dho Sancho Cota y sus hijos. De la Villa de Tordelaguna a pri-
mero dia de Noviembre de lxij anos. Io la Princesa. Por mandado de la
Princesa. Alonso de Avila.
I )] UXJÈME LETTRE :
La Reyna
Asistente, Alcaldes, Alguacil, Regidorcs, Cavalleros, Jurados, e Hombres
buenos de la muy noble e muy leal ciubdad de Toledo : vi la carta q con Juan
de Ribadeneyra, e Diego de Villarreal, Regidores desa muy noble Ciudad me
embiasteis, en q me embiabades a suplicar mandase embiar a esa Cibdad la
Muger, y hijos del Tesorero Fran ro Cota, e soy muy maravillada, por q el Rdo
Padre Obispo, quando de alla vino, me dixo como el noble Marq s de Villena, y el
con todos vosotros dexaba asentado en q por el bien y paciflcacion desa ciud d
VARIA 87
yo mandasse emhiar las prendas de los ochoztos m ;n m f s y q sobre esto voso-
tros me haviades de embiar vros mensageros, y con me decir el R do Obpo q
esto estaba asentado con vosotros, aunq por ser cosa fïierte, à mi plugo de lo
mandar cumplir, como por otra carta, q vos huve escrito havreis visto, y vereis
y agora me embiô a decir q se entregue la Mujcr e fijos del dho tesorero, qui-
riendo luego cumplir con las dhas prendas, e con mas, si necesario fuere,
pareciô cosa muy fuerte facer tantos asientos en este negocio, pero por que
veais quanto yo hé gana de mirar el bien y honra desa muy noble cibdad, yo
embio manana mensagero de mi Casa a Pedrarias p a q si el quiere soltar los
presos, e prendas q tiene fechas a esa noble cibdad e asegurar de non facer e
pedir lo suyo por justicia como spfe dice que quiere, yo entregaré en poder del
noble Marques en esa cibdad la dha Muger, e fijos del dho Fran co Cota, p-' q
clla y sus fijos esten en esa cibdad, donde el dho noble Marq s los pusiere fasta
q su deuda sea averiguada e pague lo q justam te se hallare que debe e donde el
dho Pedrarias assi no quisiere parecer con las prendas como quedô assentado
con los dhos R do Obispo, y noble Marques, para sacar a paz, y a salvo al
Asistente y a su Fiador : e fasta saber la respuesta del dho Pedrarias, yo mandé
à los dhos Regidores que esperassen aqui p- 1 que de lo uno, y de lo otro lleven
recaudo. De Escalona a xxvij de Mayo de lxxij.
R. Foulché-Delbosc.
BIBLIOGRAPHIE
Langue.
Dialecto colombino (Gramâtica), por D. Bernardo Garcia Yerdugo. Madrid :
Alfredo Alonso, in-8, xn-26 pp. — 1 pes.
R. Foulché-Delbosc. Abrégé de grammaire espagnole. 3 e édition. Paris : H.
Welter, 1894, pet. in-8, 162 pp. — 2 fr. 50.
R. Foulché-Delbosc. Abrégé de grammaire portugaise. Paris : Guillard,
Aillaud et G ie , 1894, pet. in-8, 270 pp. — 4 fr.
Histoire, etc..
Mi cmbajada extraordinaria à Marruecos en 1863, por D. Francisco Merry y
Colom, Conde de Benomar. Madrid : Viudade Hernando y Comp., 1894, in-8,
141 pp. et 3 grav. — 2 pes. 50.
Historia gênerai de Chile, por Diego Barros Arana. Santiago : Cervantes,
1892 à 1894. Tomo XII (1818 à 1820), in-8, 678 pp. et 2 plans. — 17 pes. 50.
Juan Cousin, verdadero descubridor de America segûn el capitàn inglés
Gambicr, R. N. Informe lei'do en la Real Academia de la Historia, por Cesàreo
Fernândez Duro. Madrid : Fortanet, 1894, in-8, 14 pp. (Non mis dans le
commerce.)
Averiguaciones de las antigûedades de Cantabria, enderezadas principalmente
à descubrir las de Vizcaya, Guipùzcoa y Alava y à honor y gloria de San
[gnacio de Loyola.... Su autor el P. Gabriel de Henao. Nueva ediciôn, corre-
gida por cl P. Miguel Yillalta. Tomo I. Tolosa : E. Lôpez, 1894, in-8, 406 pp.
— 5 pes.
Estadismo de las islas Filipinas ô mis viajes por este pais. Por cl P. Fr.
Joaquin Martmez de Zûniga. Publica esta obra por primera vez, extensamente
anotada W. E. Retana. Madrid : Minuesa de los Rios, 1894, 2 tomes in-8,
xxxvm-550 et 632 pp. — 20 pes.
La Florida : su conquista y colonizaciôn por Pedro Menéndez de Avilés,
por Eugenio Ruidi'az y Caravia. Obra premiada por la Real Academia de la
BIBLIOGRAPHIE 89
Historia. Madrid : J. A. Garcia, 1894, 2 tomes in-8, ccxLiii-414 et 803 pp.,
2 cartes, 3 portraits et 12 gravures. — 20 pes.
Los reyes catôlicos (Historia gênerai de Espana), par D. Victor Balaguer.
Tomo I. Madrid : El Progreso editorial, 1894, in-8, xxxvi-567 pp. et 11 grav.
— broché 1 5 pes. ; toile 20 pes.
Littérature.
El misticismo de San Juan de la Cruz en sus poesfas (Ensayo de cn'tica
literaria), por Martin Dominguez Berrueta. Madrid : Felipe Pinto, 1894, in-12,
v -)7 PP- — 1 pes- 25.
Discursos leidos ante la Real Academia Espanola en la recepciôn pûblica de
D. Francisco Ferndndez y Gonzalez el dia 28 de Enero de 1894. (Influencia de
las lenguas y letras orientales en la cultura de los pueblos de la Peninsula Ibé-
rica.) Contestaciôn al discurso anterior por D. Francisco A. Commelerân y
Gômez. Madrid: El Progreso editorial, 1894, in-8, 2 ff. préls. et 104 pp. (Non
mis dans le commerce.)
Examen de criticos, por Francisco A. de Icaza. Madrid: Rivadeneyra, 1894,
in-12, 141 pp. — 2 pes.
Discursos leidos ante la Real Academia Espanola en la recepciôn pûblica del
Sr. D. Santiago de Liniers el dia 2 de Febrero de 1894 (Florecimiento del
estilo epistolar en Espana), y contestaciôn al mismo, por D. Francisco Silvela.
Madrid : Fortanet, 1894, in-8, 104 pp. (Non mis dans le commerce).
Diccionario biogrârko y bibliografico de escritores y artistas catalanes del
siglo xix; apuntes y datos, por D. Antonio Elias y Molins. Cuadermo 35.
Tomo II, pp. 381 à 412. Barcelona, 1894. — 1 pes.
Literaturas malsanas : estudios de patologia literaria contemporanea, por
Pompeyo Gêner. Gerona. Madrid : F. Fé, 1894, in-12, 408 pp. — 4 pes.
En pro y en contra (criticas), por U. Gonzalez Serrano. Madrid : Suarez, s.
d. (1894), in-8, vm-360 pp. — 3 pes.
Textes.
Torquemada en la cruz, por Benito Pérez Galdôs. Madrid : Impr. « La Guir-
nalda », 1894, in-8, 288 pp. — 3 pes.
j Cômpluto ! (Alcala de Henares). Apuntes para un libro pensado y no escrito,
por Javier Soravilla. Madrid : Hijos de M. G. Hernandez, 1894, in-8, 96 pp.,
2 ff. d'index et d'errata. — 2 pes.
Valbuenismos y valbuenadas (a propôsito de Ripios ultramarinos, por
Antonio Valbuena), por Abel de Sorralto. Buenos Aires: Jacobo Penser, 1894,
in-8, 47 pp. — 1 pes.
90 BIBLIOGRAPHIE
Los Pirineos, por D. Victor Balaguer. Traducciôn en prosa castellana de la
trilogia escrita en verso catalan. 3-' ediciôn. Madrid : El Progreso editorial,
1894, in-8, 191 pp. — 3 pes.
El ingenioso hidalgo Don Quijote de la Mancha, compuesto por Miguel de
Cervantes Saavedra, y comentado por D. Diego Clemencïn. Tomo I. Madrid :
Hernando, 1894, in-12, xcv-336 pp. — 3 pes. (Biblioteca clasica, tomo 180.)
Cuentos nuevos, por Etnilia Pardo Bazan (Obras, tomo X). Madrid : Agustin
Avrial, s. d. (1894), in-12, 304 pp. — 3 pes.
La de San Quintin; comedia en très actos y en prosa, por Benito Pérez
Galdôs. Representôse en el teatro de la Comedia la noehe del 27 de Enero
de 1894. Madrid : la Guirnalda, 1894, in-12, 100 pp. — 2 pes.
Ferruse, por AurelioRibalta.'Corurïa : Ferrer, 1894, in-16, 78 pp. — 1 pes. 25.
Folerpas (poesias gallegas) por Eladio Rodnguez Gonzalez. Coruna : Casa de
Misericordia, 1894, in-12, 250 pp. — 3 pes. (Biblioteca gallega. Tomo 35.)
C. Suarez Bravo. Soledad; novela. Madrid : Murillo, 1894, in-12. — 4 pes.
Cancionero de Melilla, por un poeta del Rif. Segunda parte. Madrid : R.
Velasco, 1894, in-12, 63 pp. grav. — o pes. 50.
Obras de D. Juan Donoso Cortés, Marqués de Valdegamas. Nueva ediciôn
aumentada.... Publicada por su hermano D. Manuel, bajo la direcciôn de
D. Juan Manuel Orti y Lara, y noticia biognifîca por D. Gabino Tejado.
Madrid : Suarez, 1891-1894,4 vol. in-8, cxv-372, xm-649, xxm-959, cv-221
pp. — 50 pes.
La rencorosa ; comedia en très actos y en prosa, original de D. José Eche-
garay. Estrenadaen el teatro de la Comedia la noche del 13 de Marzo de 1894.
Madrid : José Rodn'guez, 1894, in-12, 86 pp. — 2 pes.
Obras complétas de D. Armando Palacio Valdés. Tomo I. El idilio de un
enfermo. Madrid: Suarez, 1894, in-8, xix-309 pp., portrait. — 4 pes.
Enseignement.
Practicas de ortografi'a dudosa, por D.José de Casas, Manuscrito para copia,
dictado y primer grado de lectura. Quinta ediciôn. Madrid : V* de Hernando
y Comp., 1894, in-12, xv-14 1 pp. — 1 pes.
R. Fouché-Delbosc. Exercices espagnols. 3 e édition. Paris: II. W'elter, 1894,
pet. in-8, 229 pp. — 2 fr. 50.
Périodiques.
Bolettn de la Real Academia de la Historia. Tomo XXIV.
Cuaderno i°. Enero de 1894. Madrid, 1894, in-8, pp. 1 à 96. — 1 pes. 25.
Sommaire: I. Via romain de Chinchilla à Zaragoza, por Francisco Coello. — II.
Inscripciones romanas y hebreas, por Fidel Fita. — III. Suarez cm Coimbra, por
BIBLIOGRAPHIE 91
Antonio Garcia Ribeiro de Vasconcellos. — IV. Noticias de un manuscrito aràbigo
adquirido por la Academia, por Manuel Fernândez y Gonzalez. — V. Noticias del dia
de la muerte y del lugar del enterramiento de Cristobal Colon en Valladolid, por
Cesâreo Fernândez Duro. — Adquisiciones de la Academia durante el segundo semestre
del ano 1893. — Variedades. Extractos de los diarios de los Verdesotos de Valla-
dolid. — Noticias.
Cuaderno2°. Febrero de 1894. Madrid, 1894, in-8, pp. 97 a 176. — 1 pes. 25.
Sommaire : I. Monumentos prehistôrieos de Mallorca y Menorca, por Emilio
Hùbner. — II. Las cuevas de Olihuelas, por el vizconde de Palazuelos. — III. Cifra
diplomdtica, por Antonio Rodriguez Villa. ■ — IV. Compendio de historia delà Ame-
rica central, por Cesdreo Fernândez Duro. — V. Espana y Camoens, por Antonio
Sdnchez Moguel. — VI. La reina Santa de Portugal, por Antonio Sdnchez Moguel.
— VII. El. Dr. D. Juan de Jaso, padre de San Francisco Javier. Su « Crônicadelos
reyes de Navarra », por Fidel Fita. — VIII. Juan Cousin, verdadero descubridor de
America, segûn el capitdn inglés Gambier, R. N., por Cesàreo Fernândez Duro. —
Variedades : I. Las cuevas de Olihuelas, por Juan Moraleda y Esteban. — II. Nertô-
briga betùrica, por Juan de Dios de la Rada y Delgado. — III. El primer Marques
de Lanzarote, por Fidel Fita. — ■ Noticias.
Cuaderno 3 . Marzo de 1894. Madrid, 1894, in-8, pp. 177a 256. — 1 pes. 25.
Sommaire : I. Bronces epigrdficos de Clunia y de Bilbilis, por Emilio Hùbner. —
II. Vidas de espanoles célèbres, por Quintana; Navarrete, Clemencin, por José Muso
y Valiente. — III. Diccionario biogrdfico de espanoles célèbres; Fr. José de la Canal
por José Muso y Valiente. — IV. Archivo municipal de Talavera de la Reina, por
Luis Jiménez de la Llave. — V. Viaje erudito d B.irbastro, Barcelona, Gerona y
Vich, por Pedro Sainz de Baranda. — VI. Continuaciôn de la Espana Sagrada
en 1861 : Carlos Ramôn Fort, Juan Manuel Montalbdn, por Vicente de la Fuente.
— VIL Archivos de Tarazona, Veruela, Alfaro, Tudela, Calatayud y Borja, por
Vicente de la Fuente. — VIII. El concilio nacional de Palencia en el ano 1100 y
y el de Gerona en 1101 por Fidel Fita. — IX. Una carta del Doctor Eximio, por
Antonio Sdnchez Moguel. — Variedades : I. El pergamino mds antiguo de la Biblio-
teca Nacional referente al Monasterio de San Millàn, por Julidn Paz y Espeso. — IL
Documento insigne del Archivo de San Milldn, por Fidel Fita. — Noticias.
La Nouvelle Revue. Paris, 1894, in-8. — Le n° du 15 février 1894 contient :
Léo Quesnel. L a Littérature contemporaine en Espagne, 1892-1893.
La Espana moderna. Director-propietario J. Lazare
Enero de 1894. Madrid (1894) in-8, 206 pp. — 3 pes.
Sommaire : Addn y Eva (novela), por Emilia Pardo Bazdn. — Los explosivos, por
José Echegaray. — D. José Maria Quadrado, su vida y sus eseritos, por M. Menéndez
y Pelayo. — Noticias curiosas, particularidades y anéedotas relativas al Quijote, por
José Maria Asensio. — La eonquista de Melilla, por Eduardo Ibarra. — El anar-
quismo y la defensa social, por César Siliô. — El espanol Blanco White, por W.
Gladstone. — Crônica internacional, por Emilio Castelar. — Impresiones literarias,
por F. F. Villegas. — Obras nuevas.
Febrero de 1894. Madrid (1894) in-8. 206 pp. — 3 pes.
Sommaire : Ad.iu y Eva (continuaciôn), por Emilia Pardo Bazdn. — Humor.idas,
por Ramôn de Campoamor. — Historia coutemporànea, Amores del Rey D.
Alfonso XII, par Antonio Pirala. — Los explosivos, II, por José Echegaray. — Tor-
quemada en la cruz, por el Licenciado Pero Pérez. — El jurado médico y la causa de
COMPTES RENDUS
Varela, por Rafaël Salillas. — El estandarte y cl arcôn de Oquendo, por Cesdreo
Fernandez Duro. — Crônicajnternacional, por Emilio Castelar. — Impresiones lite-
rarias, por F. F. Villegas. — Revista critica, por M. Ménendez y Pelayo. — El
espanol Blanco White (continuaciôn), por W. Gladstone. — Obras nuevas.
Marzo de 1894. Madrid (1894) in-8. 246 pp. — 3 pes.
Sommaire : Espana en la Biblia, por Fr. R. Martinez Vigil. — Cabeza y corazôn
(dolora), por Ramon de Campoamor. — La educaciôn del Rey, por Adolfo Posada. —
Lo verde, por el Dr. Thebussem. — Las cinco cartas amatorias de la monja portu-
guesa Mariana Alcofurado, por el Licenciado Pero Pérez. — Adrin y Eva (conti-
nuaciôn), por Emilia Pardo Bazàn. — Revista critica, por M. Ménendez y Pelayo. —
— Crônica internacional, por Emilio Castelar. — Impresiones literarias, por F. F.
Villegas. — El espanol Blanco White (conclusion), por W. Gladstone. — Obras
nuevas.
Collections.
Colecciôn de libros espaûoles raros o curiosos. Tonio 22. Comedia llamada
Thebayda. Madrid, 1894, in-12, vin-545 pp. — 7 pes. 50.
COMPTES RENDUS
Pequeneces... por el P. Luis Coloma de la Companfa de Jésus. Quinta
ediciôn. Bilbao, 1891, in-8, 552 pp.
Pequeneces est le titre d'un des romans qui ont fait le plus de bruit en Espagne
dans ces dix dernières années '. Il a pour auteur le Père Louis Coloma de la
Compagnie de Jésus. La première mais non la seule raison de son succès est
facile à démêler : c'est que Pequeneces est une attaque violente contre l'aristo-
cratie espagnole de race ou d'argent et contre le monde politique madrilègne,
ou, pour mieux dire, un sermon plein de menaces et savamment déguisé sous
une forme séduisante. Dans la préface qui a précédé la publication de son
ouvrage dans une revue religieuse 3 , l'auteur nous apprend, en effet, que tout
en ayant l'apparence d'un romancier il n'est qu'un missionnaire, un Jérôme
Savônarole qui sait s'accommoder aux exigences de son temps et qui, ne pou-
I. Une adaptation française de /' paru d'abord dans k Journal des Débats,
puis en volume séparé.
:. / / Mensajero del Sagrado Corazôn de Jcsits.
COMPTES RENDUS 93
vant aller prêcher sur les places publiques comme le célèbre dominicain, se sert
de la plume de Gil Blas pour faire parvenir à leur adresse de dures vérités.
Personne, constate-t-il avec amertume, ne se soucierait d'aller les entendre au
prône et il serait même difficile de les y prononcer sans porter atteinte à la
majesté du saint lieu.
On a voulu voir, dans Peqitcùeces, un roman à clef et l'on a considéré les
noms des principaux personnages comme de simples pseudonymes d'une trans-
parence voulue. Le P. Coloma s'en défend à plusieurs reprises dans des notes,
tout en laissant courageusement entendre que ces personnalités supposées ne lui
sont guère plus sympathiques que celles qu'il a littérairement créées, mais
qu'il en a pitié et qu'il ne voudrait pas se charger la conscience d'une calomnie
rendue possible par le repentir éventuel des pécheurs. La question, au reste,
importe peu et ces allégations et ces restrictions mentales n'ont que faire
lorsqu'on envisage le livre comme une simple œuvre d'art avant une portée
morale indépendante de toute individualité et de tout pays.
D'après le P. Coloma, la haute société madrilègne se composerait de trois
classes distinctes : quelques brebis galeuses d'une part, quelques agneaux sans
tache de l'autre, puis le troupeau innombrable des moutons de Panurge qui
suit volontiers les premières, esclave de la mode, faisant le mal par manie
d'imitation, mais pouvant aisément être ramené au bien par les bons exemples,
surtout lorsqu'ils viennent de haut. Chacune de ces classes est représentée et
étudiée dans Pequeneces ; d'un côté la comtesse d'Albornoz incarne les vices
élégants, la sécheresse de cœur et l'ambitieuse dépravation d'une grande dame
qui ne vit que par le monde et pour le monde; de l'autre, la marquise de
Sabadell et la marquise de Villasis sont des modèles de dévouement et d'abné-
gation ; enfin, tous les brillants fantoches qui s'agitent autour de Currita,
confidents et parfois complices de ses déportements, et qui l'abandonnent sans
vergogne quand il n'y a plus rien à espérer d'elle, complètent heureusement
ce tableau de mœurs mondaines où tout n'est que futilité, pequehe^, sauf les
futilités elles-mêmes.
A notre avis, c'est dans la peinture du vice que le P. Coloma excelle :
le caractère de Currita est dessiné de main de maître; il se soutient jusqu'au
bout avec un relief extraordinaire. On pourrait pourtant chicaner l'auteur sur
la conversion d'abord simulée puis sincère d'une telle comédienne et trouver
que, malgré tout, elle ne s'explique pas suffisamment, mais ce serait mettre en
doute la théorie de la grâce qu'un religieux a bien le droit de faire intervenir.
Le principal reproche que nous ferons au roman, c'est qu'il est un peu long et
diffus; l'attention se disperse sur un trop grand nombre de personnages; on
perd de vue, au cours de l'action, les deux enfants qui jouent un rôle si consi-
dérable dans le dénouement. D'autre part, ce dénouement peut paraître hasardé,
il fait songer aux romans feuilletons des journaux populaires et l'on hésite à
94 COMPTES RENDUS
imaginer, même chez un Espagnol, une telle précocité dans le point d'honneur
et une telle persévérance dans le ressentiment.
Quant à ce qui relève uniquement du missionnaire, c'est-à-dire l'homélie
qui se dissimule sous le roman, elle est vraiment remarquable, écrite dans un
style vigoureux, tout frémissant d'une indignation qui perce sous une ironie
que l'écrivain a grand'peine à maintenir courtoise. Son franc parler est d'autant
plus admirable que, jésuite, il s'en prend à une société dont l'éducation a été-
faite en grande partie par les jésuites. Le P. Coloma a néanmoins une très haute
idée de son ordre : tous les ecclésiastiques qui jouent un rôle dans Pequeneces
sont des jésuites et il a mis un soin jaloux à en écarter le clergé séculier dont
il semble se soucier assez peu. Aussi bien, le ton général de l'ouvrage et quelques
allusions désobligeantes aux jansénistes suffiraient presque à déceler la commu-
nauté religieuse à laquelle appartient l'auteur.
Venons-en aux détails, aux pequeneces de la critique. Le P. Coloma est un
homme très instruit et d'une lecture très étendue; connaissant les grandes
langues modernes il ne dédaigne pas de nous le faire savoir en insérant de nom-
breuses citations françaises, anglaises et italiennes. Malheureusemenl il n'a pas
toujours une notion suffisante de la signification exacte des mots étrangers;
ainsi quand il appelle « pamphlet » une histoire faite à plaisir et « garçon-
nière » une loge de théâtre occupée par des jeunes gens, il fait une erreur
d'ailleurs excusable. Et puis que vient faire l'épithète de Monsieur Alphonse
accolée au nom de Jacobo? Il est préférable parfois de ne pas appeler les choses
par leur nom. Préoccupé de donner à ses lecteurs une description minutieuse
des rues de Paris, le P. Coloma commet une autre petite erreur en faisant
passer une voiture allant de la gare de Lyon au Grand Hôtel, d'abord par les
boulevards puis par la place de la Concorde. Enfin, l'auteur de Pequeneces doit
avoir une très grande mémoire, car il lui arrive de reproduire textuellement ou
à peu près, des bribes de phrases retenues de ses lectures, telles qu'un vers de
Lamartine qu'on retrouvera aisément sous ces mots : aquella palabra mil veces
repetida sin pensar jamàs en su àlcance infinito. / Adios 1 Et ces passages empruntés
au livre de M. Edmondo de Amicis (Ricordi di Parigi).... de la gran plaça irre-
gular de la Bastïlla en que desenibocan cuatro boulevards y dieç calles » au lieu de :
li la grande piaçça irregolare délia Bastiglia nella quàle sboccano quattro boulevards e
dîeci vie, puis.... à Costa de su oro el vieio y la locura de los cuatro dngulos de la
tierra. Alli la càlle se convierte en plaça, la acera eu colle... remplaçant : Dovt
affluisce l'oro, il viçio e lajoïlia dai quattro angoli délia terra. Qui lastrada diventa
pia^a, il marciapiede diventa strada, la bottega diventa museo, etc....
Mais il faut reconnaître aussi que l'auteur de Pequeneces a retiré de ses lectures
d'autres avantage, moins discutables et que le commerce des grands prosateurs
classiques espagnols, qu'il a certainement cultivés et approfondis, lui a laissé
une pureté de langue et une variété d'expression bien rares en Espagne à la lin
du XIX e siècle. H. Pi-.seux-Richard.
COMPTES RENDUS 95
Novelas espanolas contemporaneas por B. Pérez Galdôs. — Torquemada en
la cruz. — Madrid : Administraciôn de los Episodios nationales, 1894, in-8,
288 pp.
Le dernier roman de M. Pérez Galdôs est la continuation d'une étude '
détaillée et originale sur l'avarice, non pas l'avarice telle que nous la trouvons
dépeinte dans le La\arïlle, le Gran Tacano ou le Castigo de la miseria, c'est-
à-dire comme un vice inoffensif, ne faisant de mal qu'aux avares eux-mêmes, de
pauvres diables que l'on se représente difficilement prodigues et magnifiques,
mais l'avarice active, la torture infligée aux besoigneux, roturiers ou marquis, par
le poids écrasant des gros intérêts et par l'angoisse des signatures extorquées,
l'usure en un mot ; car Torquemada est un type d'usurier et de parvenu. La reli-
gion des temps passés, la Foi, avait produit le grand inquisiteur, la religion
d'aujourd'hui, l'argent, a enfanté D. Francisco Torquemada, qui doit avoir sans
doute dans les veines un peu du sang de ceux que son aïeul spirituel faisait
rôtir sur la place publique. Pourtant cet homme impitoyable, cet usurier fana-
tique a aussi son calvaire : si ses intérêts matériels sont toujours prospères, il
va être frappé dans ses affections les plus chères par la mort de son fils unique,
enfant d'une prodigieuse intelligence, merveille de précocité, monstre de la
nature, comme Lope de Vega. Tel est le sujet de : Torquemada en la hoguerra,
le roman que l'on doit lire avant celui dont nous nous occupons. Enfin, après
avoir été sur le bûcher par la perte de ses espérances, il va être soumis au
dernier supplice, à la croix du mariage. Faut-il voir là une intention malicieuse
de l'auteur ou bien cette figure s'explique-t-elle par les circonstances particu-
lières de cette union avec une famille noble réduite à la plus noire misère?
chacun l'entendra à son gré.
L'ouvrage en lui-même n'est pas, à notre avis, l'un des plus heureux du
grand romancier espagnol; il est loin de Dona Perfectâ, de Marianela et de bien
d'autres. La préoccupation d'y introduire, après coup, une thèse sociale, pro-
voquée sans doute par des événements récents, nuit un peu à son unité et peut
paraître puérile. D'autre part, peut-être avec intention, l'écrivain laisse le
lecteur dans une sorte d'équivoque pénible. On ne sait vraiment qui l'on doit
plaindre le plus, de Torquemada ou de Cruz; on se demande si celui-là n'est
pas la victime d'une comédie habilement jouée et si celle-ci n'est pas, malgré
tout, un modèle d'abnégation et de volonté. Donoso peut être pris pour une
nature supérieure ou pour un simple casamentero de vohtntades intéressé. En
outre, certaines scènes, telle que celle où l'usurier parle, en imagination, à son
fils mort, s'écartent un peu trop de la gravité que l'on suppose chez un
romancier de mérite.
1. Voyez Fortunata y Jacinta.
96 COMPTES RENDUS
Quant à la langue, elle est toujours claire et nerveuse, mais certaines négli-
gences de style tendraient à faire croire que le livre a été écrit un peu vite. Les
gallicismes, qui sont la plaie de l'espagnol depuis bientôt deux siècles, n'v sont
pas en grand nombre, mais on jurerait que M. Pérez Galdôs a voulu se dédom-
mager sur la qualité : qu'on en juge par la phrase suivante : Habia dado Rufi-
nita en la tecla de refistolear los negocios de su padre. Castillaniser des substantifs
français et même des verbes et des tournures de phrases, est chose courante en
Espagne, mais enrichir la langue de mots empruntés au vocabulaire plus que
familier est beaucoup plus grave, surtout chez un auteur dont les Episodios
nationales ont fait, pour ainsi dire, l'Erckmann-Chatrian de l'Espagne et qui a,
moins que tout autre, le droit d'être afrancesado. Pourtant il est vrai que c'est
déjà un progrès quand on songe à une phrase de Torquemada en la hoguera, ou
un mot de la plus pure germania des faubourgs de Paris, affublée d'une dési-
nence espagnole, prouve péremptoirement qu'il n'v a plus de Pyrénées : Lo
publicoy notorio es que la viuda aquella cascô y que Bailôn apareciô al poco tiempo
nu dinero. H. Peseux-Richard.
Curiosidades de la vida americana en Paris, por Angel Cuervo. — Paris, 1893
(Chartres, imprenta de Durand), in-18, xvi-333 pp. — 3 fr. 50.
La colonie hispano-américaine est nombreuse à Paris ; elle se compose presque
exclusivement de gens riches amenés par la mode, la politique ou le plaisir, et
qui y dépensent allègrement leur argent. Si nous voulons connaître les mœurs,
les habitudes, la manière de vivre et surtout les travers de cette partie de la
haute société parisienne, le livre de M. Angel Cuervo nous donnera toutes
facilités. Écrit sous la forme de petites scènes, souvent dialoguées, la lecture en
est facile et intéressante. L'idée qui domine l'ouvrage tout entier, c'est que les
Français ignorent profondément tout ce qui se rapporte aux républiques de
l'Amérique du Sud dont les habitants sont pour eux un objet de risée et un
thème à plaisanteries d'opérette, due M. C. se rassure : si les Français ne
connaissent pas et ne sont pas à même de juger impartialement ses compatriotes,
qui vivent à des milliers de lieues de leur pays, ils ne connaissent pas davantage
d'autres peuples qui sont à leurs portes. Les Italiens et les Espagnols, par
exemple, c'est-à-dire ceux dont l'affinité, sinon de race, du moins de langue
et de civilisation, devrait leur faciliter l'étude, leur sont plus inconnus que les
Malais ou les Touaregs. Pour la grande généralité des Français, tout Espagnol
est un torero affublé d'une guitare, et tout Italien, un mangeur de macaroni
qui joue du violon ou de la harpe. Il n'y a donc pas à s'alarmer du jugement
que peuvent porter des gens si bien informés. Malheureusement pour M. ('..,
l'impression qui se dégage de la lecture des Curiosidades, c'est que les Français
pourraient bien n'avoir pas tout à fait tort dans leurs appréciations tout instinc-
tives sur l'ensemble des Latins d'Amérique : amour du clinquant, préoccupation
constante d'éclipser les autres, absence de tout idéal politique, dédain des
COMPTES RENDUS
97
qualités solides mais non brillantes, horreur des livres et fâcheuse tendance a
oublier tout de leur pays, jusqu'à sa langue, au bout de peu de mois et à
s'approprier une apparence de parisianisme, tels sont, si je ne me trompe, les
traits distinctifs des personnages mis en scène par l'auteur et tels sont aussi les
débuts les plus saillants qui distinguent les Hispano-Américains aux yeux des
Français. 11 va sans dire que réserve est toujours faite pour les exceptions;
M. C. le fait remarquer quand il juge les Français et nous savons trop qu'il est
mieux que personne à même de nous prouver que la race espagnole d'Amé-
rique n'est pas une race inférieure pour ne pas reconnaître qu'elle a produit des
hommes éminents et qui plus est, étant donné son amour de l'apparat, des
savants modestes et solides dont pourrait s'honorer toute grande nation.
M. C. écrit dans un castillan des plus casti^ps. Non seulement il est moins
enclin au gallicisme que les écrivains de son pays qui en sont infestés, mais
je ne vois guère en Espagne qu'un petit nombre d'auteurs qui puissent lui être
comparés sous ce rapport. Cela ne veut pas dire que, de temps à autre, il
n'attribue à un mot espagnol le sens du mot français correspondant, alors qu'il
aurait le choix entre trois ou quatre vocables, espagnols de forme et de sens ;
mais les expressions purement castillanes abondent dans son style. On dirait
même qu'il met une certaine recherche à les employer, surtout les expressions
familières, à la façon de Trueba et de Fernân Caballero. Cela donne beaucoup
d'originalité et de piquant tout en laissant des doutes sur la spontanéité de la
phrase et sur le laisser-aller de l'inspiration. H. Peseux-Richard.
Revista lusitana, Archivo de estudos philologicos e ethnologicos relativos a
Portugal, dirigido por J. Leite de Vasconcellos. — 30 Anno, Numéro 1,
1893-1894. Porto, 1893, in-8, 96 pp.
Summario : Contos populares portugueses — colligidos por D. Cecilia Schmidt
Branco.
Curso Je lingua portuguesa archaica — por J. Leite de Vasconcellos.
Ciganos portugueses do sec. xvi — por Pedro de Azevedo.
Dialectos trasmontanos — por J. Leite de Vasconcellos.
Algumas tradiçôes populares — por Alfredo Alves.
Miscel'anea : I. Notas açorianas, por Henri R. Lang. — IL Ceramica popular por-
tuguesa : (assobios de agua), pelo Dr. F. Ferraz de Macedo. — III. Collocaçào do
adjectivo em português, par D. Carolina Michaëlis de Vasconcellos. — IV. Tradiçôes
populares, por Pedro d' Azevedo.
Bibliographie.
La Revista Lusitana est un des très rares organes péninsulaires qui aient
entrepris une étude vraiment scientifique des faits philologiques et ethnolo-
giques intéressant le Portugal. On n'y trouve jamais ces articles inutiles qui
abondent dans d'autres revues où l'œuvre sérieuse n'est qu'une exception que
l'on semble avoir honte de publier. Dans le présent numéro, M rae Cecilia
Schmidt Branco a mis une fois de plus son grand talent d'écrivain au service
COMPTES RENDUS
d'une étude rationnelle "du folk-lore portugais. Les quatre contes populaires
qu'elles a recueillis nous sont narrés avec cette forme naïve, enfantine parfois,
à laquelle bien des folk-loristes ne savent pas s'astreindre.
Mais, parmi les travaux contenus dans le dernier fascicule de la R. L.,
il convient de mettre hors de pair, d'une part, une étude sur les Dialectes tras-
montanos; d'autre part, le Curso de lingua portuguesa archaica, professé
en 1891 par M. Leite de Vasconcellos à FAcademia de Estudos Livres de
Lisbonne, et enfin publié. Le portugais archaïque est le nom donné par M. L.
de V. à la langue qui commence à transparaître sous les formes du latin barbare
du ix e siècle et atteint le xvie où commence la période moderne. Je
regrette de ne pouvoir suivre l'auteur pas à pas dans sa savante dissertation,
mais je ne veux pourtant pas passer sous silence certain chapitre (Utilidade para
firmar o sentimento da nacionalidade) dont la lecture devrait être recomman-
dée à tous ceux qu'une trop .grande affection pour les modismes étrangers,
français principalement, amène insensiblement à ne plus écrire qu'un immuable
jargon : « Outra causa que contribue para a decadencia da nossa lingua litte-
raria é a lingua francesa, que, pelo seu uso câ, ora insensivelmente, ora de
proposito, se vae infiltrando na nossa » Et M. L. de V. cite de nombreux
exemples de gallicismes éhontés : demandant uu jour à un journaliste pourquoi
il se servait d'un langage ainsi corrompu, cet afrancesado lui répondit : « que
isto era gentil. » On ne saurait trop approuver les vrais lettrés de leur résis-
tance énergique à toute invasion de ce genre. Le gallicisme n'a que trop péné-
tré le castillan ; puisse-t-il être franchement repoussé par tous les vrais amis de
la pure langue portugaise ! R. Foulché-Delbosc.
Colecciôn de escritores castellanos. Tomo 98. Fernan Caballero. Obras com-
plétas. Fernan Caballero y la novela contempordnea por D. José Maria Asensio.
Novelas. I. La familia de Alvareda. — Madrid : Sucesores de Rivadeneyra, 1893,
petit in-8, 452 pp., portrait. 5 pes.
On ne peut qu'applaudir à la publication d'une édition des œuvres complètes
de Fernan Caballero; le tome L' r vient de paraître, souhaitons qu'on ne nous
fasse pas attendre les autres trop longtemps. L'édition est précédée d'une étude
de 240 pages, de D. José Maria Asensio, intéressante à plus d'un titre, mais
qui ne saurait être considérée comme un travail définitif sur la célèbre
romancière. Cette étude est divisée en trois parties : L Précédentes; ojeada
histôrica. — IL Estudio biogrdfico. — III. Movimiento literario ; novelistas
contempordneos. De la première partie je préfère ne rien retenir, et de la
troisième je parlerai peu ; cela me permettra de dire tout le bien que je pense
de l'étude biographique qui forme la deuxième, M. Asensio, qui eut l'honneur
d'être des amis de Fernan Caballero pendant les dernières années de sa vie, a
recueilli] avec une véritable piété tout ce qui pouvait le guider dans sa tâche :
COMPTHS RENDUS 99
on lit avec intérêt tout ce qui concerne le père de Fernân, Bôhl de Faber, qui a
laissé un nom assez estimé comme éditeur de la Floresta de rimas antiguas cas-
tdlanas et du Teatro espaiiol anterior à Lope de Vega. Toute la jeunesse de la roman-
cière passe devant nos yeux : son premier mariage en 1816 avec Planells; son
deuxième en 1822 avec le marquis de Arco Hermoso ; son troisième en 1837
avec Arron de Ayala plus jeune qu'elle de 17 ans. Tout ce qui touche à sa vie
privée est abondamment documenté; 011 ne saurait trop louer M. Asensio de la
précision dont il fait preuve. Il ne devrait pourtant pas accepter sans contrôle
— surtout quand le contrôle en est si simple — les pièces qui passent entre ses
mains. Il commet au sujet du lieu de naissance de F. C. une inexactitude
géographique aisément évitable : disons à sa décharge que le premier coupable
est un document conservé à Y Archiva de! Supremo Consejo de Guerra y Marina
de Madrid. C'est une copie de l'acte de baptême de la romancière, qui com-
mence par ces mots : Van 1796 et le 25 Décembre est née à Marges, dans le canton
de Berne, et le 1 } mars suivant par moi Curé soussigné a été baptisée dans l'église
paroissiale de Saint-Jean d'Echallens, Cécile La copie est évidemment fautive :
Morgcs se trouve dans le canton de Vaud et non dans celui de Berne; il en est
de même, du reste, d'Echallens. 11 aurait fallu relever cette légère erreur : ni
M. Asensio, ni onze ans avant lui M. de Bonneau-A venant (Deux nouvelles anda-
louses posthumes de F. C. Paris, 1882, p. 12) n'y ont songé.
Nous retrouvons Fernân installée à l'Alcazar de Séville où elle passe dix
années de tranquillité; mais vient la révolution de 1868 et il lui faut aban-
donner cette poétique retraite. C'est dans une modeste maison de la rue Juan
de Burgos (aujourd'hui rue Fernân Caballero) qu'elle vivra désormais : c'est là
qu'elle mourra le 7 avril 1877, à l'âge de 80 ans, avant eu la consolation de
voir l'œuvre d'une restauration politique et surtout religieuse qu'elle avait
appelée de tous ses vœux. Toute cette étude a une tonalité générale des plus
adoucies : c'est moins une biographie qu'un panégyrique, car nous ne voyons
le plus souvent l'héroïne qu'au milieu d'un nimbe semblable à ceux des
madones devant lesquelles elle aimait à se prosterner. Toute critique est soi-
gneusement écartée : la chose se comprend pour la personne même de Fernân
Caballero dont la vie exemplaire y prête peu, mais cela est inadmissible pour
ses œuvres sur lesquelles il y aurait autre chose à écrire qu'une suite ininter-
rompue d'éloges. Ces réserves faites, il faut savoir gré à l'auteur de nous avoir
donné des documents qui ne manqueront pas d'être utilisés un jour : il faut le
louer surtout d'avoir recueilli la correspondance de Fernân que nous serons
heureux de voir imprimer. — J'aime moins, je l'ai dit, les considérations qui
précèdent et suivent l'étude biographique ; M. Asensio, qui est un des premiers
cervantistes de notre époque, semble hanté par la grande figure de l'auteur de
Don Quichotte e t des Novelas ejemplares, et est trop tenté d'y rattacher toute
manifestation littéraire: parlant de La Gaviota, il écrit (p. 185) : « La cadena
100 CHRONIQUE
interrumpida désde la publicaciôn de las Navelas ejempîares se reanudaba : sin
eslabones in.termedios se enlazaron a través de dos siglos de distancia, los
nombres de Miguel de Cervantes Saavedra y de Fernàn Cabàllerô. » Un
phénomène du même genre se produit en ce qui touche les contemporains :
M. Asensio semble ne voir dans le mouvement littéraire de nos jours que
l'influence exclusive de Zola et cela l'amène à des rapprochements tout au
moins imprévus : « Entre Fernàn Caballero y Emilio Zola média un abismo
que no es posible medir ni cabe exagerar » (p. 164). Il faut, en effet, convenir
que ces deux noms juxtaposés jurent étrangement. R. Foulché-Delbosc.
CHRONIQUE
Le THÉÂTRE espagnol a Paris. — Dans les derniers mois de l'année 1893,
a été représentée chez une lettrée parisienne, Madame Adam, une traduction
de Folie ou Sainteté d'Echegaray, due à M. Edouard de Huertas. Cette traduc-
tion avait déjà paru en volume il v a quelques années (Paris, 1883); M. de
Huertas s'y est astreint à un mot à mot trop strict : la lecture en est pénible
et le traducteur semble ne pas manier assez aisément le français. Nous sup-
posons que sur la scène mondaine où elle a été transportée, cette œuvre a
subi de sérieuses retouches.
Une tentative plus originale a eu lieu le 16 mars 1S94, à l'Hôtel des Sociétés
savantes : la Société pour la propagation des langues étrangères en France n'a
pas hésité à laire jouer EN espagnol 1:1 Si de las Xhnis. C'est la première fois,
croyons-nous, qu'une œuvre espagnole est entendue à Paris dans la langue
même où elle a été écrite. Il n'y a que des félicitations à adresser aux organisa-
teurs d'une telle soirée : ils ont prouvé qu'en dépit du mépris avec lequel l'en-
seignement officiel traite la langue de Cervantes, il v a depuis quelques années
tout un public soucieux de l'étudier non seulement dans un but mercantile,
mais aussi en vue de s'assimiler les chefs-d'œuvre qu'elle a produits; sept
cents personnes, en effet, assistaient à cette séance. Ce chiffre prouve surabon-
damment que les récents etforts de certains hispanophiles sont loin d'avoir été
stériles.
Le Gérant, Aug. PICARD :
Arcbi vistt - Paléogi aphe.
MAÇON, l'ROTAT I KKKKS, IMI'RIMLURS.
ÉTUDE
SUR
LA GUERRA DE GRANADA
DE
DON DIEGO HURTADO DE MENDOZA
La Guerra de Granada de Don Diego Hurtado de Mendoza n'a
encore été l'objet d'aucune étude critique; ce texte qui, tant au
point de vue historique qu'au point de vue littéraire, présente
un si vif intérêt, a toujours été réimprimé d'après une édition
princeps fautive et incomplète, faite plus d'un demi-siècle après
la mort de l'auteur par un « érudit » complètement inapte à ce
genre de travail. Ce ne sont cependant pas les manuscrits qui
font défaut : j'en connais actuellement dix-huit; et quoique
l'original ne se trouve pas parmi eux, il en est qui, intelligem-
ment mis à contribution, fourniraient quelques passages inédits
en même temps que de très nombreuses variantes et rectifications
de détail.
C'est l'histoire du texte, ce sont ses éditions et ses manuscrits
qui font l'objet de la présente étude; l'édition critique viendra
ultérieurement.
I. — MENDOZA A GRENADE (1569-I575).
Un jour de l'année 1568, Don Diego Hurtado de Mendoza se
prit de querelle avec Don Diego de Leyva en plein palais royal :
Ra'ue hispanique. 1
9
102 R. FOULCHE-DELBOSC
tous deux mirent les armes à la main, mais Mendoza put arra-
cher le poignard de Leyva et le jeter au loin. Les deux gentils-
hommes furent aussitôt arrêtés et emprisonnés : l'ancien ambas-
sideur eut pour lieu de détention la forteresse de Médina del
Campo jusqu'à la fin du procès né de la querelle. On condamna
les deux adversaires à une amende et à servir le roi à la frontière
qui leur serait assignée. Grâce aux bons offices de quelques puis-
sants amis que Mendoza sut faire agir, et sur les instances de
l'archiduc de Savoie, Philippe II donna l'ordre à Mendoza de
partir pour Grenade sans passer par la cour et de se présenter
dans les quinze jours qui suivraient sa sortie de la forteresse de
Médina au marquis de Mondéjar qui lui transmettrait, s'il y avait
lieu, ses instructions. L'ordre royal 1 fut signé au Pardo le
27 janvier 1569.
Le 27 février 1569, Mendoza requit le gouverneur de Médina
de le mettre en liberté suivant l'ordre reçu de la cour 2 . Le
17 avril 1569, il se présenta devant le marquis de Mondéjar > et
se mit à sa disposition. Mais ses services ne furent pas utilisés.
Comme on le voit, Mendoza prit près de deux mois pour se
rendre à Grenade, alors que l'ordre royal ne lui accordait que
deux semaines. De ce fait et de sa non utilisation dans une armée
quelconque, il est permis de déduire que le ressentiment de
Philippe II contre l'ancien ambassadeur de Charles-Quint n'était
pas aussi fort qu'ont bien voulu le dire certains historiens.
Cet éloignement forcé de la cour nous a valu la Gitcrra de
Granada.
Mendoza passa près de six ans à Grenade ; en 1575, le roi mit
1. Il se trouve aujourd'hui à l'Archivo de l'Alhambra (Legajo 98 n° 12) et
a été publié dans : D. Diego Hurlado de Mendoza. Apuntes biogrâfico-criiicos por
Eloy Senàn y AIomo.)ctq7., 1886, in-8 (page 53).
2. Voir le procès-verbal publié à la page 54 de l'ouvrage ci-dessus indiqué.
3. Voir la page y-, du même ouvrage.
ETUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA 103
un terme à son exil et il put revenir à la cour; on sait qu'il
mourut au mois d'avril de cette même année, âgé de 72 ans.
Quand Mendoza se présente au marquis de Mondéjar, le
17 avril 1569, où en sont les opérations contre les Maures? Il
n'y a pas quatre mois que la guerre est commencée : ce n'est
en effet que le 23 décembre 1568 qu'Aben Humeya a quitté
Grenade ; mais la première partie de la guerre, celle pendant
laquelle Mondéjar a dirigé en chef les opérations, est terminée :
depuis quatre jours (13 avril 1569), le nouveau commandant en
chef, Don Juan d'Autriche, frère naturel du roi, est arrivé à
Grenade. La guerre, avec des péripéties diverses, se prolongera
jusqu'au 15 mars 1571, date de la mort d'Aben Abo : on voit
donc que, pendant près de deux ans, c'est-à-dire pendant la plus
grande partie de la durée de la guerre, Mendoza sera à Grenade,
à portée des événements. S'il n'est pas, au sens strict du mot, le
témoin oculaire des marches et contre-marches des armées espa-
gnoles à travers les Alpuxarras et les montagnes de Ronda, il est
du moins sur le théâtre de la guerre, au lieu de passage obligé
de toutes les troupes qui vont guerroyer ou qui reviennent de
guerroyer contre les rebelles. On comprend ainsi aisément qu'il
ait pu dire en parlant de la guerre de Grenade : parte de la quai
yo vi, i parte entendi de personas, que en ella pusieron las manos, i el
entendimiento.
Une de ses principales occupations pendant son séjour forcé
à Grenade fut d'écrire le récit de la rébellion des Maures : il ne
faut voir dans cette œuvre qu'un simple passe-temps de grand
seigneur lettré, qui ne pensa certainement jamais que son histoire
de la guerre de Grenade serait un jour entre les mains de tous.
C'est peut-être à cela qu'il faut attribuer les lacunes et les inéga-
lités d'une œuvre qui intéresse à plus d'un point de vue histo-
riens et littérateurs. On ne doit donc pas, disons-le dès mainte-
nant, voir dans la Guerra de Granada une œuvre ayant le fini que
son auteur lui aurait donné s'il l'avait destinée à d'autres qu'à
quelques intimes.
104 R- FOULCHE-DELBOSC
ii. — de la mort de l'auteur (l)7))
a l'édition princeps (1627).
Peu d'années après la mort de Mendoza, son œuvre était
connue et appréciée; on en faisait des copies, car il ne fallait pas
songer à la publier de sitôt : l'historien avait porté tel ou tel
jugement, dessiné tel ou tel portrait, dont la sévérité ou le mor-
dant, quoique empreints de la plus scrupuleuse exactitude,
rendait difficile la divulgation. Dire ou écrire la vérité eût été à
cette époque chose fort dangereuse, et personne ne s'y hasarda.
Cinquante-deux ans s'écoulèrent entre la mort de l'auteur et
la publication de la première édition. Pendant ce demi-siècle, des
récits de la guerre de Grenade furent publiés, les uns isolés, les
autres dans des ouvrages embrassant l'ensemble de l'histoire des
musulmans d'Espagne. De ces récits, trois seront étudiés par
nous, par suite de l'intérêt qu'ils présentent pour une histoire
du texte de Mendoza.
Le premier en date est la Historia del Rebelion y castigo de los
Moriscos del reyno de Granada de Luys del Marmol Carvajal,
imprimée en 1600 à Malaga par Juan René, aux frais de l'au-
teur ' ; mais l'œuvre était achevée depuis une vingtaine d'années,
puisque dans le privilège accordé à Barcelone le 6 juillet 1599,
il est dit qu'on lui en avait déjà donné un en 1580.
A en croire Benito Monfort 2 « Luis del Marmol copiô a
la letra algunos periodos en su segundo Libro de la rebelion
capitulo tercero ». Cette assertion est erronée : le chapitre en
question est intitulé : Como se quitô à los Moriscos que no pudiesen
servir se de esclavos negros; y se les manda à los que tenian licencias de
armas, que las llevasen à sellar anle el Capitan gênerai : il a environ
1. In-folio, 4 tï. prels. n. ch., 245 fï. ch. et 4 ff. de Tabla postl. n. ch. La
2 e édition fut publiée en 1797 à Madrid par Sancha, en 2 vol. in-4. Il en existe
une réimpression dans le tome X\i de la Biblioteca Rivadenevra.
2. Mendo/a, Guerra de Granada, édition de 1776, page m.
ETUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA 10)
120 lignes. Dans Mendoza (livre I, § 5) on ne trouve que cette
phrase : « (El Rey) quitoseles el servicio de los esclavos negros
a quienes criavan con esperanças de hijos... » Il n'y a pas un
seul mot relatif à l'obligation où se trouvaient les Morisques de
faire estampiller leurs armes.
Mais si le chapitre ni du second livre de la Historia del
Rebelion ne renferme aucune phrase de Mendoza ; d'autres, en
revanche, nous montrent en Marmol un homme qui, ayant en
sa possession un manuscrit de la Guerra de Granada, en trouva le
texte si bien écrit qu'il jugea ne pouvoir mieux témoigner son
admiration qu'en en copiant a la letra, non plus algunos periodos,
mais bien des pages entières. Personne n'a encore indiqué que le
chapitre ni du livre IX et les chapitres i, ni, iv et vu du livre X
avaient été presque exclusivement composés par Marmol à l'aide
des paragraphes 6 à 14 du livre IV de Mendoza. Les phrases ont
souvent subi de légères modifications, mais sont toujours recon-
naissables; rien de ce qui est purement descriptif, comme le long
historique de Séville, ou de ce qui n'a qu'un intérêt rétrospectif
comme le récit de la mort de don Alonso de Aguilar, n'a été
utilisé par Marmol. Il semble s'être trouvé assez embarrassé pour
décrire les opérations de la siéra de Ronda auxquelles il n'assistait
pas, n'ayant servi que dans les Alpuxarras ; possédant un manu-
scrit de l'œuvre de Mendoza qui lui fournissait les données dont
il manquait, il en copia à peu près textuellement la plus grande
partie. Quant au nom de Mendoza, on le cherche en vain : nulle
part Marmol ne l'a mentionné.
C'est en 1608, dans l'œuvre du licencié Francisco Bermudez
de Pedraza *, que figure pour la première fois le nom de Don
1. Antigvedad y Excelencias de Granada. Por el Licenciado Francisco Bcrmude^
de Pedraza, natural délia : Abogadoen los Reaies Consejos de Su Magestad. Dirigido
a la muy noble, nombrada y grau Ciudad de Granada. — Madrid, por Luis Sanche\
106 R. FOULCHÉ-DELBOSC
Diego de Mendoza comme celui de l'auteur d'un récit de la
guerre de Grenade. Ce fait n'a pas encore été mentionné. Bien
que le titre de ce volume porte 1608, il était déjà écrit depuis
six ans : l'approbation est datée du 25 juillet 1602; le privilège
du 25 août 1602.
Pedraza indique toujours en marge le nom de l'auteur sur
l'autorité duquel il s'appuie 1 , par exemple au f. 3 verso :
Mèdoça en el rebelion de Granada.
Dans le livre II nous trouvons un emprunt de quelques lignes :
Las razones porque la ciudad de Illiberia se llamô Granada. Cap. XVII
(f- 54).
La septima es de don Diego de Mendoça, cuyas Don Diego
son estas palabras. Otros dizen que Granada se di- d* Mendoça
xo por vna cueua que esta junto a la puerta de Biba- c " ' a ' ,,sl °-
taubin, morada de la Caua, hija del Conde don lu- " a ' e . "
.. . • xt 1 a Ho in prin.
lian, cuyo nombre propio era Natta, porque el de
Caua, todas las historias Arabes afirman que le fue
puesto por auer entregado su voluntad, al Rey de
Espaiîa don Rodrigo ; y en lengua Arabe Caua quie
re dezir muger libre de su cuerpo : pues deste nom-
bre Gar, que significa la cueua, y Natta que fue el
nombre propio desta dama, se dixo Garnata.
Ce passage est sensiblement conforme aux premières lignes de
la page 3 de l'édition de 1627.
Dans le livre III nous trouvons plusieurs notices sur Don
Diego : la première est assez étendue et très intéressante en ce
qu'elle nous montre la Guerra de Granada comme très appréciée
et très copiée à cette époque :
1608, petit in-4, 12 ff. de prels. 190 M", et 6 de Tablas. Le livre IV (f. 149)
a un titre spécial : Libro qvarto Del Santo Môle Ilipulilano, y sas excélencias . lin
Madrid, Por Luis Sâche%, impressor del Rey X. S. Aùo M.DC.VII. Mais la pagi-
nation est uniforme pour tout le volume.
1. Pedraza cite quelquefois Marmol, auquel il consacre (f. 150) la notice
suivante : Luis del Marmol escriuio la primera y segunda parie -Je la description (/<'
Africa, y la guerra del rebelion de Granada.
ETUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA IO7
De otros hijos desta Ciudad que han escrito varias materias. Capitulo XXV.
F. 129 : Don Diego de Mendoça cauallero del abito de Alcantara, hermano
del Marques de Mondejar, embaxador del Rey don Felipe II. en Roma, Sena,
y Venecia, donde rescatô vn sobrino del gran Turco Soliman, y se lo présenta
bien adereçado. El Turco informado de la calidad de don Diego, de su erudi-
cion, y de la aficion que ténia a libros, màdô buscar los mas curiosos que se
pudiessen hallar en toda Grecia, y dellos le hizo vn gran présente : con los
quales hizo una libreria tan famosa, que por ser digna de la persona Real, la
mandô por su testamento al Rey don Felipe II el quai la puso en su Escurial.
Escriuio vn libro de la guerra y rebelion de los Moros de Granada : el quai
aunque no esta impresso tiene tan grandiloco y élégante estilo, que todos los
letores lo trasladan : y ay tantos manuscritos que no haze falta la estampa.
F. 1 30, verso : De los hijos desta Ciudad que han florecido en la Poesia.
Capitulo XXVI.
De los que ha tenido esta ciudad, don Diego de Mendoça, hermano del
Marques de Mondejar, cauallero del abito de Alcantara, con gallardo estilo
escriuio la fabula de Narciso, y otras muchas obras que celebran los hombres
curiosos.
Enfin Mendoza est encore nommé aux ff. 136 verso et 143.
* *
En 16 18, nous trouvons l'œuvre de Mendoza presque entière-
ment imprimée dans le sixième livre de la Coronica de los Moros
de Espana de Bleda '. Elle y occupe les pages 652 à 755.
1. Coronica de los Moros de Espana, dividida en ocho libros por el Padre Presen-
tado Fray Jayme Bleda... En Valencia ano 1618. — In-folio, 1072 pages, outre
des pages non chiffrées au commencement et à la fin. L'ouvrage est dédié au
duc de Lerme.
Le sixième livre de Bleda n'est, à quelques lignes près, que le texte de la
Guerra de Granada. En le comparant au texte de l'édition princeps de Mendoza,
on remarque, à côté de certains passages entièrement identiques, une grande
quantité de variantes, de suppressions et d'additions, non seulement au com-
mencement et à la fin des divisions faites par Bleda, mais même dans le corps
du récit. Les trois passages, qui manquent dans toutes les éditions antérieures
à celle de 1776 et qui furent retrouvées en 1769 par Iriarte, manquent dans
Bleda, comme dans la plupart des manuscrits de Mendoza. Ces trois passages
I08 R. FOULCHÊ-DELBOSC
Bleda nous apprend lui-même au début de son livre VI
(p. 652) qu'il s'est servi du texte de Mendoza 1 :
Libro sexto. De la rebelion, guerras y castigo de los Moriscos del Reyno de
Granada.
Daze razon, de quien se aprouecha el Autor para escriuir este libro Sexto.
Cap. 1.
Para escriuir la guerra q el Rey catholico de Esparïa don Felipe Secundo,
hijo del nunca vêcido Emperador Carlos tuuo en el Reyno de Granada contra
los rebeldes nueuamente conuertidos, me he ualido de una relacion que délia
dexo don Diego Hurtado de Mendoça
Tambien vi lo que curiosamente escriuio, desta guerra, y muy por estento
Luys del Marmol Carvajal
Si en este libro se hallare el estilo, y lenguaje mejor, atribuyase a su legitimo
Autor, que es en la mayor parte el dicho don Diego de Mendoça
Y en este libro (le sixième) errara tambien si priuara al lector de la elegancia,
y estilo remontado de don Diego de Mendoça (p. 654, col. 2).
L'utilisation de la plus grande partie du texte de Mendoza par
Bleda est restée ignorée de presque tous les bibliographes, à
l'exception de Tamayo de Vargas qui le premier, en 1627,
signale le fait dans des notes demeurées manuscrites, et de
Nicolas Antonio qui semble s'en être rendu compte. Nommons
ne sont remplacés par rien : le récit continue sans interruption. Bleda a seule-
ment intercalé entre les mots « para remedialla del todo » et « Saliô el duque de
Granada » qui se trouvent au commencement du livre IV de Mendoza, un assez
long passage allant (dans sa Coronica) de la page 734, col. 2, ligne 2, à la
page 735, col. 2, ligne 13, et dans lequel il parle, entre autres événements,
de la mort de Luis Quixada.
Le manuscrit dont se servit Bleda se terminait à n'en pas douter là où se
terminent tous les manuscrits de la 2 e famille, à en variai figuras y semejan^as.
C'est par ces mêmes mots que se terminent dans la Coronica de los Moros
(p. 751, col. 2) les emprunts faits à Mendoza. Aussitôt après, Bleda a recours
à Marmol et le suit jusqu'à la ligne 10 de la première colonne de la page 753.
1. Bleda est très consciencieux et ne cherche pas à dissimuler ses emprunts :
...Todas estas reglas guardaron los Autores, de quiè me aproueche en los
libros passados, y fuera hazerles agrauio a ellos, y a quien leyera en esta obra
sus trabajos, si yo los disfraçara, y boluiera de arriba abaxo, como es costùbre.
(p. 654, col. 2).
ETUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA IO9
aussi Monfort qui, aux pages ni et iv de l'édition de Valence
1776, après avoir parlé de soi-disants emprunts de Marmol,
ajoute : « Lo mismo confiesa de si el Padre Presentado Fr. Jaime
Bleda en su Chronologia (sic) de los Moros de Espana libro sexto,
capitulo primero. » Il est vraiment bien étrange que personne
ne se soit avisé de comparer le livre VI de Bleda et le texte de
Mendoza. Comment les historiens du règne de Philippe II qui,
traitant de la révolte des Maures, citent constamment Mendoza et
Bleda, n'ont-ils pas vu que les deux textes n'en font qu'un ?
Prescott seul, dans son Histoire du règne de Philippe II, l'in-
dique vaguement, mais sans y attacher d'importance : parlant de
la publication de l'édit du 23 juin 1569, édit qui n'était que le
prélude de l'expulsion des Maures de Grenade, il dit que « Bleda
(Cronica de Espana (sic), p. 705) n'a fait, dans cette partie de son
ouvrage, que reproduire le récit de Mendoza, avec tant d'inatten-
tion, qu'il se trompe d'un mois sur la date de cet événement ».
(Traduction française, tome IV, p. 244.)
III. — UNE ÉDITION SUPPOSÉE (l6lo).
La Guerra de Granada fut publiée pour la première fois à
Lisbonne en 1627, par les soins de Luis Tribaldos de Toledo.
Avant d'étudier cette édition, il convient de rectifier une
erreur commise par Nicolas Antonio dans sa Bibliothcca Hispana
et répétée, d'une part par presque tous les bibliographes espa-
gnols et étrangers, d'autre part par certains éditeurs de Mendoza.
A en croire Nicolas Antonio, l'édition princeps aurait été publiée
en 16 10 par les soins de ce même Tribaldos, et l'édition de 1627
ne serait qu'une réimpression. Voici^du reste, ce qu'on lit dans
la Bibliotheca, à l'article Didacus de Mendoza (i re édition, tome I,
p. 224, col 1) ' :
1. Ce passage est intégralement reproduit dans la 2 e édition {Bibliotheca
Hispana Nova, tome I, p. 291.)
110 R. FOULCHE-DELBOSC
Guerra deGranada bêcha por el Rey de Espaiïa D. Felipe II. contra los Moriscos
de aquel reino sus rebeldes ; Sallustii Iugurthio, Catilinariôque, aut veterum cui-
cumque alii comparandum. Certè hase Historia in schedis M.SS. diù cursitavit
per omnium manus, scriniaque aliorum, Iacobi praecipuè Bleda; Historia Mau-
riscorum scriptoris, ditavit. Demura in lucem prodiit Ludovici Tribaldi regii
Chronographi operâ,^Matriti 1610, in-4. deinde Olissipone apud Craesbek 1627.
Ex quatuor libris finem tertii, quem mutilum deprehenderat, elegantissimè
supplevit D. Ioannes Silva Portalegrensis Cornes, verè purpuram authoris
purpura; attexens.
Mettons tout d'abord en lumière que Nicolas Antonio indique
clairement — et il est le seul après Tamayo de Vargas, dont
l'œuvre est restée manuscrite — les emprunts faits par Bleda;
mais cela nous le montre en contradiction avec lui-même. Il
nous dit en effet que l'édition de Tribaldos parut après l'œuvre
de Bleda : démuni in lucem prodiit c'est-à-dire le volume de
Bleda était déjà connu quand fut publiée l'édition princeps de
Mendoza. Or, comment Tribaldos aurait-il pu publier une édition
de Mendoza en 16 10, alors que la Coronica de Bleda n'a paru
qu'en 1618? Il y a là, de la part de Nicolas Antonio, un oubli
manifeste de la date d'apparition de la Coronica ; mais il y a sur-
tout chez tous ceux qui, jusqu'ici, ont lu la notice de la Biblio-
theca Hispana, un singulier manque d'esprit critique, puisque
aucun d'eux n'a eu l'idée de comparer ces deux dates.
Quoi qu'il en soit, cette preuve ne saurait nous suffire : on
peut, en effet, admettre que Nicolas Antonio a simplement
commis l'erreur chronologique que nous venons de relever et
que l'édition de 16 10 existe réellement. Il ne faut pas oublier que
dans sa Bibliotheca, à l'article Ioannes de Silva (le comte de
Portalegre), il s'exprime ainsi (i re édition, tome I, p. 597,
col. 2) I :
Supplevit etiam Historiam RebeUionis Granatensis ab clarissimo viro
D. Didaco de Mendoza coriscriptam aliquot successuum relatione, quse in illius
1. Ce passage est intégralement reproduit dans la 2 e édition.
ETUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA III
aurei libclli M.SS. exemplaribus deerant, purpuram herclè purpuras attexens :
quo cum supplemento editus fuit Ludovici Tribaldi regii Indiarum Chrono-
graphi cura Matriti 1610, deindéque Vlissipone 1627. in-4.
Cette seconde note 1 venant corroborer celle que renferme
l'article consacré par Antonio à Mendoza, indique donc, chez son
auteur, une croyance absolue à l'édition de 16 10. Aussi devons-
nous rassembler le plus de preuves possible pour démontrer que
cette édition, que personne n'a vue, n'a jamais existé. On peut
établir en premier lieu que, de 16 10, date de l'édition supposée,
à 1627, date de la véritable édition princeps, on ne trouve chez
aucun de ceux qui ont eu à s'occuper, soit de Mendoza, soit de
la rébellion des Maures, la moindre trace d'une telle édition ; en
second lieu, que jusqu'à l'année 1672, date de la publication de
la première édition de la Bibliotheca Hispana, personne ne s'était
avisé qu'il existât une édition de la Guerra de Granada antérieure
à celle de 1627; ce n'est que postérieurement à 1672 que l'on
signale l'édition introuvable en se fiant à l'autorité. de Nicolas
Antonio.
En 1618, Bleda, nous l'avons vu, copie d'un bout à l'autre
l'œuvre de Mendoza : si une édition de la Guerra de Granada
avait paru seulement huit ans auparavant, comment Bleda ne le
mentionnerait-il pas, alors surtout qu'il le fait pour Marmol
auquel il recourt à chaque instant ?
Mais rien de tel. Bleda, parlant de Marmol, laisse clairement
voir qu'il suppose son œuvre connue et entre les mains de tous :
Tambien vi lo que curiosamente escriuio desta guerra, y muy por estenso
Luys del Marmol Caruajal Escriue Marmol muchas cosas particulares, y
en su libro parecen bien, por ser este su asumpto y suegeto (sic) principal : alli
las podra ver el lector (p. 652, col. 2).
1 . A l'article Ludovicus Tribaldos de Toledo, Nicolas Antonio ne parle pas
de la Guerra de Granada,
112 R. FOULCHE-DELBOSC
Donc, Bleda est bien explicite : il dit en propres termes que les
faits particuliers il ne les mentionnera pas dans son œuvre à lui
qui est une histoire d'ensemble, mais qu'on les trouvera dans le
livre de Marmol. Comme il n'y a aucune équivoque possible à
ce sujet, il est inutile d'insister; mais on va voir en quels termes
bien différents il parle de Mendoza. Tout d'abord, et alors qu'il
n'indique que par treize lignes l'existence de l'œuvre de Marmol,
la jugeant suffisamment connue, il consacre à Mendoza un total
de 84 lignes ' : non seulement il parle longuement de la famille
de Mendoza, mais encore il vante, autant qu'il le peut, et la véra-
cité et le style de Don Diego : je n'en cite ici que les passages
les plus essentiels :
En compania del Marques (de Mondéjar) se hallo don Diego en parte destas
guerras, y lo demas entèdio de personas que las siguieron, y gouernaron el
exercito ; su relacion es tenida por verdadera (p. 652, col. 2).
Si en este libro se hallare el estilo, y lenguaje mejor, atribuyase a su legitimo
Autor, que es en la mayor parte el dicho don Diego de Mendoça (p. 653,
col. 1).
Y en este libro errara tambien, si priuara al lector de la elegancia, y estilo
remontado de Don Diego de Mendoça, que como tan sabio en la disciplina
militar, tan prudente, y experimentado en gouiernos tan docto, y auentajado
casi en todas las sciencias, con la grandeza de su ingenio, supo referir la verdad,
y lo que passo en esta rebelion, y guerras de Granada, con tanta gentileza, y
facundia verdaderamente Retorica, limpia de terminillos v frasis escusadas, y
con la interpretacion, y ethimologia de los terminos proprios de la milicia, y
vocablos de aquella arte, que si lo lèvera Ciccron, juzgara, que es vu Demos-
thenes, o Quintiliano de la nacion, y lengua Castellana, o vn Tucidides, el
quai, como el con su parecer califica, se auentajô en el artificio Retorico a todos
los famosos historiadores, que alli se nombran : porque supo dezir tantas, y tan
grandes cosas en pocas palabras, que las sentencias fueron en numéro yguales
a las dicciones, y hablo con tanta propriedad, y subtilissima breuedad, que no
sabia el hazer juyzio, si el lenguage daua lustre a las cosas, o si las sentencias
le dauan a las palabras, adornandolas. Todo lo quai propriamente quadraa don
Diego de Mendoça, como se vera claramente en lo que de su papel se trasladara
en este libro (p. 654, col. 2 et p. 655, col. 1).
1 . P. 652, cols. 1 et 2 ; p. 65 3, col 1 ; p. 654, col. 2 et p. 653, col. 1 .
ÉTUDE SUR LA GUERRA DE GRAKADA I 1 3
Bleda ne pouvait mieux montrer qu'il recourait à un texte que
tout le monde ne pouvait pas se procurer, à un document que
très peu de gens connaissaient, à un manuscrit en un mot. Tout
ce qu'il dit de Mendoza était inutile si la Guerra de Granada
avait été éditée en 1610.
*
* *
L'œuvre de Mendoza est connue de l'auteur d'une histoire
ecclésiastique de Grenade qui fut vraisemblablement achevée
dans les premiers mois de 1 6 1 1 . Cette histoire, presque ignorée,
est restée inédite, et il serait à désirer que l'on en entreprît enfin
la publication. Le manuscrit appartient à la bibliothèque du cou-
vent du Sacro Monte de Grenade, où je l'ai examiné avec grand
intérêt :
Hisîoria ecclesiastica de Granada, por cl Ll io Ivstino Antoline\
de Burgos Provisor de Sevilla, Arcediano de Granada y Abbad del
Sacro Monte ' .
Le titre est gravé, ce qui semble indiquer que l'auteur se dispo-
sait à faire imprimer son œuvre; ce qui peut appuyer cette-
hypothèse, c'est que le volume contient deux témoignages de
lecture, l'un, daté du 2 juillet 161 1, du docteur Luis de Bavia,
commissionné par l'archevêque, l'autre, daté du 5 juillet 161 1,
de l'archevêque de Grenade Pedro Gonçalez de Mendoza.
Antolinez de Burgos dit qu'il cite Mendoza d'après un manu-
scrit \ il cite également Marmol. Si la Guerra de Granada avait été
publiée en 16 ro, il se serait évidemment référé au texte imprimé.
L'auteur anonyme d'un poème sur Grenade 2 , demeuré
1 . Ce manuscrit, in-quarto, a 298 ff. ; il est divisé en deux parties. La
troisième partie de l'ouvrage, qui traitait des fameux plombs de Grenade, en a
été détachée, ainsi que l'indique une note du dernier feuillet.
2. Granada à description bistorial del insigne reinoy ciudad ilustrisima de Gra-
nada, bellisima entre todas las ciudades (Gallardo, Ensayo de una biblioteca
espanola, tome I, n° 773.)
114 R - FOULCHE-DELBOSC
manuscrit, composé por los anos de i6ij et enrichi d'additions
en prose jusqu'en 1621, donne, à la suite de son œuvre poétique,
une série de notices sur les Grenadins illustres à un titre quel-
conque. Gallardo, qui nous a donné de ce manuscrit une minu-
tieuse description, et qui a pris soin de transcrire une très grande
partie desdites notices, ne s'est pas aperçu qu'elles étaient presque
littéralement copiées sur celles que Francisco Bermudez de
Pedraza avait publiées en 1608 dans ses Antiguedad y Excelencias
de Granada. Personne, du reste, n'a encore signalé le fait. Même
division de chapitres, même ordre adopté dans les biographies;
la similitude est poussée aussi loin que possible. Quelques rares
additions, toutefois, ont été faites au texte de Pedraza par l'ano-
nyme de 1621. C'est ainsi qu'on le voit citer celui auquel il
emprunte, sans le dire, presque toutes ses notices :
El L. Francisco Bermudez de Pedraza, escribiô un tratado de las Grandezas
de su patria, y Reliquias del Monte Santo.
En ce qui concerne Mendoza, il reproduit presque littéralement
le texte de Pedraza; la fin seule offre pour nous quelque intérêt :
Escribiô D. Diego el Rebelion de Granada, y aunque no tuvo lugar de
emprimirlo andan tantos traslatos que no hace falta la imprenta. Es de muy
gustoso estilo.
Comme on le voit, c'est, à peu de chose près, la même rédac-
tion que celle de 1608; mais l'anonyme ayant mis ses notices au
Courant des publications récentes, il est bien certain que si une
édition de Mendoza eût paru en r6io, il l'aurait indiquée au
lieu de recopier simplement Pedraza.
* *
Tamayo de Vargas 1 , dans sa Junta de libros , la mayor que
Espana ha visto bas la el ano 1622 2 (ou 1624 d'après Antonio),
1. Mort en 1 64 1 , à 54 ans.
2. Bien que la bibliographie de Tamayo de Vargas s'arrête à l'année 1622, il
dut la revoiret la retoucher, ainsi que l'indique la mention de l'édition de 1627.
ETUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA
"5
qui se trouve encore à l'état de manuscrit à la Bibliothèque Natio-
nale de Madrid (Ff. 23), consacre à Mendoza (p. 136) une notice
dont voici les premières lignes :
D. Diego de Mendoza embaxador de Venecia del Consejo de guerra, de los
mas entendidos i cortesanos de su tiempo i mas élégante en prosa i verso, en
latin i espanol, sus
Obras en verso
recopiladas por Iuan Diaz Hidalgo del habito de S. Iuan Capellan i Musico
de su Mag J . Madrid por Iuan de la Cuesta 1610 4°. otras.
Obras M. S.
4° mas anadidas, i mejor correctas en prosa
Rebelion de Granada
Ms. 40 que casi despues trasladô Fr. Iaime Bleda Dominico en la historia de
los Moros; este arïo 1627 la sacô a luz el L d ° Luis Tribaldos de Toledo chro-
nista de las Indias, en Lisboa por Crasbeck
4°
Ainsi la note de Tamayo de Vargas prouve deux choses :
d'abord qu'il n'avait pas connaissance de l'édition de 16 10,
ensuite, qu'il connaissait — et il est le premier à l'avoir écrit —
la présence du texte entier de la Guerra de Granada dans la Coro-
nica de Bleda parue en 16 18. Ce dernier fait nous montre en
Vargas un homme bien documenté, et je pense que celui qui, à
cette époque, savait trouver Mendoza dans l'œuvre de Bleda,
n'aurait pas ignoré que ce texte avait déjà été imprimé isolément.
*
* *
Enfin, un ouvrage dans lequel nous trouvons encore de nou-
velles preuves — concluantes, pourrions-nous dire — de la non
existence d'une édition de 1610, c'est l'édition de 1627 elle-
même.
Luis Tribaldos de Toledo, dans son avertissement al Lector
(verso du 9 e feuillet et feuillet 10 de l'édition de 1627), explique
tout au long pour quels motifs la Guerra de Granada n'a pas
trouvé plus tôt d'éditeur; la sévérité avec laquelle sont jugés
certains auteurs de cette guerre en rendait la publication sinon
I 1 6 R. FOULCHÈ-DELBOSC
impossible, du moins dangereuse au lendemain même des
événements qu'elle relatait; mais le temps a fait son œuvre :
aucun de ceux nommés par Mendoza n'est plus vivant. « Quanto
a lo segûdo oi q son ya passados cerca de sessenta afios, i no ai
vivo ninguno de los que aqui se nombran, cessa ya el peligro de
la escritura » (feuillet 10 recto, lignes 26 et 27). Près de
soixante ans, dit Tribaldos, se sont écoulés depuis la guerre : le
calcul est facile à faire. La guerre de Grenade (abstraction faite,
bien entendu, des événements qui la déterminèrent) tient tout
entière entre le 23 décembre 1568, date où Don Fernando de
Valor (Aben Humeya) quitta Grenade pour les Alpuxarras, et le
15 mars 1 57 1, date de la mort d'Aben Abo. L'édition de Tri-
baldos a paru en 1627 ; son avertissement al Lector était peut-être
écrit en 1626; entre la révolte des Maures et la publication du
texte de Mendoza, il y a donc soixante ans ou près de soixante
ans.
Si une édition avait paru 17 ans auparavant — en 1610 — et
par les soins de ce même Tribaldos, il est certain qu'il aurait
pris soin de le rappeler en publiant celle de 1627 x ; mais il n'en
parle pas et fait même plus : il dit en propres termes que la
Guerra de Granaàa n'a pas été publiée avant lui : « Solamente
dire, que causas huvo para no publicarse antes : las que me
movieron a hazerlo agora » (al Lector, verso du feuillet 9,
lignes 9 et 10). Comme si cela n'était pas suffisant, il va jusqu'à
prévoir la possibilité d'une seconde édition : « Deseava yo ornar
las margencs co lugares de autores classicos bien imitados por el
1. Cela ressort jusqu'à l'évidence de ce passage de al Lector : « Muerto dô
Diego, viviendo aun personas que el nombraua, durava el impedimento q en
vida; demâs de q los eruditos a quiè semejantes cuidados tocâ, quierê nias
ganar fama con escritos proprios, que aprovechar a la republica con dar luz a
los agenos. » (Feuillet 10 recto, lignes 21 et suiv.) L'homme qui pensait ainsi
n'aurait pas manqué de rappeler au lecteur que, 17 ans plus tôt, il avait eu le
dévouement de publier l'œuvre d'autrui.
ÉTUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA il y
nuestro, i no me fuera mui difficil juntarlos : mas guardandolo
para la postre, me sobrevino esta enfermedad tan larga i pesada,
que me impossibilité : i porque se me daa mucha priessa los
guardo para segùda edicion (si a caso la huviere) que espero sera
mui gratos a los doctos. » {Al Lector, verso du feuillet 10, 1. 18
et suiv.) On ne peut dire plus clairement que l'édition présente
est la première 1 .
La deuxième édition de la Guerra de Granada, ce fut Mateo de
la Bastida qui la publia en 1674, - l Madrid. Quoique la Bibliotheca
Hispana de Nicolas Antonio ait paru depuis deux ans (1672), il
ignore sans doute la note du célèbre bibliographe relative à une
édition parue en 1610; en effet, dans sa dédicace à Don Pedro
Coloma, il appelle sa réimpression segundo buelo : « Y porque,
para hallar, en este segundo buelo, benigno el ayre juizioso de
las censuras, debe solicitar patrocinios 2 . » Ainsi donc, pour
Mateo de la Bastida, la question est bien simple : il est le
deuxième éditeur d'un texte que Tribaldos a déjà publié une fois.
La quatrième édition (Valence 1766) présente de nombreuses
erreurs : elle est précédée d'une dédicace al Exc mo . Senor D" Joachin
Monserrat, Ciurana, Cruillas, Crespl de Valdaura, Alfonso, Cala-
tayud, Sans de la Llosa; Marques de Cruillas, etc signée
1. De plus, indices qui ne sont pas à dédaigner, d'une part, les licenças en
portugais, datées de Lisbonne, 1, 3, 4, 12 septembre et 22 décembre 1626,
indiquent clairement qu'il s'agit d'une première édition ; d'autre part, la dédi-
cace à don Vincente Noguera est datée du 4 décembre 1626, et fait allusion à
des faits qui se sont passés en 1620. Il faudrait donc admettre que cette dédi-
cace est spéciale à l'édition de 1627, mais la chose est contre toute vraisem-
blance : Tribaldos publie l'édition de 1627 aux frais de Noguera ; comment en
aurait-il publié une autre dix-sept ans auparavant ?
2. Le fait a déjà été signalé par Mr. William I. Knapp à la page xxm du
prologue de son édition des Obras poèticas de D. Diego Hurtado de Mendo^a.
Madrid iSjj.
Revue hispanique. 8
Il8 R. FOULCHÉ-DELBOSC
par l'éditeur Salvador Fauli et d'une aprobacion signée par
Gregorio Maya ns. — Fauli connaît Nicolas Antonio qu'il cite en
note, et considère son édition comme la troisième : « Tercera
vez renace de sus propias cenizas para eternizar sus lucimientos
Don Diego Hurtado de Mendoza » et plus loin : « Fue tan
feliz la Obra, que en brève tiempo logrô en dos ediciones infi-
nitas alabanzas. » Quelles sont les deux éditions dont parle
Fauli ? Peut-être les deux éditions citées par Nicolas Antonio :
celle de 1610 qui n'existe pas, et celle de 1627 qui existe. Il est
possible que Fauli n'ait pas eu connaissance de celle de 1674 dont
ne parle naturellement pas la Bibliotbcca Hispana parue en 1672.
L'expression en brève tiempo s'applique à l'intervalle 16 10-1627,
mais s'appliquerait moins aisément à l'intervalle 1 627-1 674.
Quant à la troisième édition, qui parut à Valence vers 1730, il
semblerait étrange que Fauli ne Fait pas connue.
L' aprobacion de Mayans est datée de Valence, 13 juin 1730. Il
est probable que cette aprobacion fut placée en tête de l'édition
publiée à Valence vers 1730 par Vicente Cabrera et que Fauli la
réimprima simplement en tête de la sienne. On lit : « Treinta i
cinco anos despues de la muerte del Autor, esto es, en el
aiio mil seiscientos i diez, quando ya no vivian los pri-
meras Gefes de la Guerra de Granada, i quedavan poquisimos
de los que intervinieron en ella, publicô esta Historia el Licen-
ciado Luis Tribaldos de Toledo, Chronista mayor de Don Felipe
quarto, nombre mui docto i erudito » Mayans laisse supposer
qu'il commet un sérieux anachronisme : en 1610, Tribaldos ne
pouvait être grand chroniqueur de Philippe IV, par la raison bien
simple que le roi d'Espagne était alors Philippe III; Philippe IV
ne régna qu'à partir de 1621, et c'est au plus tôt cette année-là
que Tribaldos put devenir son Chronista mayor. Mayans, du reste,
dans cette aprobacion, ne se pique pas plus de précision que
d'exactitude : quoiqu'il ne le dise pas, il est vraisemblable qu'il
parle de l'édition de 16 10 d'après Nicolas Antonio; d'autre part,
il laisse supposer qu'entre 1627, date de l'édition de Tribaldos et
ÉTUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA II 9
1730, date de son aprobacion, il y eut plusieurs éditions, alors
qu'il n'y en eut qu'une seule, la seconde, celle de Madrid 1674.
« Recibiôse esta Historia, asi en Espana, como fuera de ella, con
gran aplauso. Tanto, que en brève tiempo se huvieron de repar-
tir algunas impresiones para satisfacer al deseo de los letores de
buen gusto. »
Cette 4 e édition (Valence 1766) n'est vraisemblablement
qu'une reproduction à peu près fidèle de la troisième (Valence,
vers 1730), dont je n'ai pu trouver d'exemplaire.
Dans la 5 e édition (Valence 1776), l'imprimeur Benito Monfort
dit : « se conserva manuscrita hasta que la publicô Luis
Tribaldos de Toledo en Madrid ano de 16 10, en quarto
Reimprimiôse despues la Obra de Don Diego en Lisboa en 1627.
En Valencia se han hecho dos impresiones. » Comme on le
voit, Monfort ne signale pas, lui non plus, l'édition de Madrid
1674.
Ce n'est qu'en 1830 que Salvd, en publiant la sixième édition,
s'avise de relever une erreur qui dure depuis plus d'un siècle et
demi. Voici ce qu'il dit avec beaucoup de raison dans une note
de son Advertencia del Editor :
Ignoro con que fundamento pudo decir Nicolas Antonio que la primera
edicion hecha por Tribaldos saliô en Madrid el ano de 1610. En la de Lisboa
impresa por Giraldo de la Vina en 1627, que tengo d la vista, se halla la dedi-
catoria del licenciado Tribaldos a don Vicente Noguera, fecha en 4 de diciembre
de 1626, en la cual asegura publicar la obra estimulado por este caballero. Y en
el prôlogo espresa, que son ya pasados cerca de 60 anos desde el 1570 en
que se terminé laguerra; lo cual no séria exacto, si se refiriese al 1610, y
no al 1627, en que indudablemente debe fijarse la primera edicion.
Malgré cette note de Salvd, l'erreur de Nicolas Antonio a été
encore reproduite par quelques éditeurs plus récents de la Guerra
de Granada et par la plupart de ceux qui ont eu à s'occuper de
Mendoza, Ticknor entre autres.
Voilà sans doute une bien longue discussion sur une édition
supposée ; mais l'autorité qui s'attache au nom de Nicolas
Antonio en est la seule cause : en commettant une erreur que
120 R. FOULCHE-DELBOSC
l'on repète depuis plus de deux siècles, le célèbre bibliographe
nous a obligé à énumérer toutes les preuves qui s'opposent à son
allégation ' .
IV. — l'édition princeps (1627)
En 1627, le licencié Luis Tribaldos de Toledo 2 , bibliothécaire
du duc d'Olivares et grand chroniqueur du roi pour les Indes,
publia à Lisbonne la première édition de la Guerra de Granada
1. Signalons une dernière erreur : celle-ci se trouve dans la Noticia de los
poetas castellanos, placée en tête du tome IV du Pamasso espanol paru à Madrid,
chez Antonio de Sancha en 1776 (la même année que paraissait à Valence
l'édition de Monfort) ; il y est dit (p. xix) que la Guerra de Granada a été
« impresa y publicada en Madrid ano de 1610 y en Lisboa ano de 161 7 por la
diligencia y trabajo del Cronista Luis Tribaldos de Toledo. » Cette édition de
Lisbonne 1617 n'existe pas plus que celle de Madrid 1610 : Sedano aura vrai-
semblablement voulu parler de celle de Lisbonne 1627.
2. Luis Tribaldos de Toledo serait né, suivant Nicolas Antonio, au village
de Tebar, dans la province de Cuenca : « Ludovicus Tribaldos de Toledo
Tevarensis (oppidum est Tevar Conchensis territorii sacri) non autem in Sancti
Clementis oppido natus, quod relatum fuit Auberto Mirajo » C'est préci-
sément le contraire qui est vrai : Tribaldos est né à San Clémente de la Man-
cha, ainsi qu'il le dit lui-même dans le prologue de son Historia gênerai de la;
continuadas Guerras y dificil Conquista del Grau reino y provincias de Chile, ouvrage
qu'il composa en 1630 et dont Gallardo nous donne la description (Ensayo de
una biblioteca espanola, tome III, n° 4092). Cette ceuvre est « escripta por Luis
Tribaldos de Toledo, cronista mayor de Indias, natural de la villa de San
Clémente de la Mancha, y vecino de la insigne Corte de Madrid. » Dans le
prologue il parle d'un nommé Lope Aguado « a quien, dit-il, conoci en mis
menores aiïos en la villa de San Clémente, donde yo nascf » Il ne saurait
donc y avoir aucun doute à cet égard.
Quant à l'année de sa naissance, je n'ai d'autres données que les suivantes,
qui, si elles ne nous indiquent pas une date précise, nous montrent cependant
ETUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA 121
(pet. in-4 , 12 ff. prels non chiffrés et 127 ff. chiffrés. Voir le
fac-similé ci-contre) '.
Les feuillets préliminaires contiennent :
f. I. Titre 2 .
f. II. Licenças, et au verso les armes de Noguera au dessous
desquelles sont huit vers latins,
f. III. A Don Viccnte Nogvera, Referendario de ambas Signa-
turas
f. IX verso. Luis Tribaldos de Toledo, al Lector.
f. XI. Brève nia noria de la vida i mverte de Don Diego de Mendoça
escrita por don Balta^ar de Çuhiga
f. XII. Introdvccion de don Ivan de Silva Coude de Portalegre
Governador i Cap i tan gênerai del Reino de Portugal
Dans son introduction, Portalegre dit :
qu'au moment où il publia la Guerra de Granada, Tribaldos était d'un âge
avance. Dans une plaquette, aujourd'hui fort rare, où sont décrites les fêtes qui
eurent lieu a Madrid en 1622 pour la canonisation de saint Isidore, saint Ignace
de Loyola, saint François Xavier, sainte Thérèse et saint Philippe Néri (Relacion
de las fiestas que se han hecho en esta cor te, à la canonisation de cinco Santos : copiada
de itiiti earta que escribio Manuel Pouce eu 28 de Junio 622), on lit que le crouista
tnayor était au nombre des concurrents d'un tournoi littéraire : « El doctisimo
maestro Luys Trivaldos de Toledo, cuya erudicion y doctrina, adquirida en
cinquenta atîos de perpetuos estudios en todas letras, le han merecido opinion
del mas digno sugeto de nuestros tiempos, y epilogo verdadero de la gloria de
los antiguos. Quien no venera su nombre, niega las honras debidas i la
virtud. » (In fine.) En prenant au pied de la lettre les cinquante années d'étude,
il faudrait voir dans Tribaldos un homme qui aurait été septuagénaire en 1627,
date de l'édition princeps de Mendoza. Rien d'étonnant à ce qu'à cet âge il ait
eu à subir les atteintes d'une maladie larga i pesada dont il parle dans son avis
au Lecteur. Je crois donc que l'on peut accepter pour la naissance de Tribaldos
la date de 1558 donnée par Nicolas Antonio. 11 mourut en 1634.
1. Sur Vicente Noguera, aux frais de qui l'édition était faite, voir Zeitschrift
fi'tr romanische Philologie, tome III, Halle, 1879; article de M. A. Morel-Fatio.
— La dédicace de Tribaldos est datée du 4 décembre 1626.
2. Certains exemplaires ont, après le titre : Licencia para meterle eu Castilla,
datée d'août 1628, et Tassa cou licencia para venderle, datée de septembre 1628.
GVERRA
DE GRANADA
HECHAPOR ELREÏ DE ES.
pana don Philippe I I. nueftro fenor contra
los Morifcos de aqnel reino,(bs rebeldes.
Hiïloria efcrtta en quatro libros.
Por don Diego de Mendoça,del confejo del Empera»
dor don Carlos V. fu Embaxador en Roma,
i Venecia; fu Governador i Capitan Ge-
neral en Tofcana.
Publicadapor cllicenù&do LuisTribaldos del ' oledû i
Chr unifia mayor del Rey nueUro feaor por Us
Indiasjefidente en Ucorte de Madrid,
i por ci dedicada,
Adcn VicenteNoguers,Rcferencariodearrbas ${->
gnaturas de fu Sanctidad, del Confejo de iasdos
Mageftadcs CefarearCutholica, g^ntilhom-
bredela Camiradel Archiduque de
Auifria Leopoldo.
Contodds Us licencias neccjjàrias
EN L I S B O A.
Por Git al io de la Vma. Con privilégia» An o i : ir.
Fac-similé du titre de l'éditionjie 1627.
ÉTUDE SUR LA GUERRA DE GRAXADA 123
« Tuvo todavia una gran desgracia esta historia, que por ser escrita en estvlo
tan diverse» del ordinario se corrompieron miserablemente las copias, que délia
se sacaron, y fueron muchas Resultarô assi mismo tàtos yerros en la
ortographia, i en la punctuacion, que passô el dafïo adelante a trocar quitar, i
anadir palabras, sacando de su sitio las conjunciones, i ligaduras de la oracion.
Costô trabajo emendar de dos o très copias esta Finalmente, entre esta
copia i qualquiera de los originales de donde se sacô, ai menos différencia, de
la que ellas entre si tenian. »
Dans son prologue, Tribaldos prend soin de nous dire com-
ment il publia son édition :
En esta ediciô lo que principalmente procuré, fuê pûtualidad ; sin dar lugar
a ninguna conjetura, ni emendar alguno por juizio proprio : cotejè varios
manuscriptos, hallandolos entre si mui diferentes ; hasta que me abracè con el
ultimo i sin dubda alguna el mâs original, que es uno del Duque de Aueiro en
forma de 4. trasladado de mano del Comendador Iuan Baptista Labana, i
corregido de la del Conde de Portalegre : con el quai conoci qui en balde
havia cansadome con otros. Este texto es el que sigo sin alterarle en nada, i es
el genuino i proprio de quiè en su introduciô habla aquel gran Conde.
Nous devons donc essayer de reconstituer ce que l'on pourrait
appeler l'état civil du manuscrit que Portalegre avait corrigé et
qu'il avait fait précéder d'une introduction.
Tout d'abord, il convient de remarquer que Tribaldos se con-
tredit lui-même : dans son prologue, il prétend n'avoir eu entre
les mains qu'un seul manuscrit ayant l'introduction et l'addition
de Portalegre. Or, au feuillet ioo, à la fin du livre III, il fait
précéder le Dîscurso del conde de Portalegre d'une notice de treize
lignes dans laquelle il nous dit : « En pocos exemplares se halla
esta addicion, » d'après sa propre déclaration, on voit que
cette addition se trouvait dans quelques-uns des manuscrits qu'il
avait tout d'abord abandonnés.
Quoi qu'il en soit, le manuscrit du duc d'Aveiro devait se
composer en premier lieu de l'introduction de Portalegre com-
mençant par ces mots : Mostrô don Diego de Mendoça ; puis du
texte de la Giterra de Granada tel qu'il nous est connu par l'édi-
tion de 1627 ; ce texte devait, sur le manuscrit même, com-
prendre une division en livres et en paragraphes identique à celle
124 R. FOULCHE-DELBOSC
qu'adopta Tribaldos. Autrement dit, la division en livres et en
paragraphes, telle que nous la connaissons aujourd'hui, est peut-
être due, soit à Labana, soit à Portalegre, mais n'est sûrement
pas due à Tribaldos. On verra plus bas sur quoi je me base pour
affirmer le fait.
Le manuscrit du duc d'Aveiro contenait enfin, entre le livre III
et le livre IV, le Discurso del coude de Portalegre commençant par
ces mots : Hemos llegado a unpeligroso passo et destiné à sup-
pléer aux lacunes du texte de Mendoza.
Ce manuscrit ainsi reconstitué, avant de parvenir à Tribaldos,
ou peut-être même avant d'appartenir au duc d'Aveiro, avait
servi de modèle à quelques-unes des nombreuses copies que, en
l'absence d'un texte imprimé, recherchaient les lettrés d'alors.
L'existence des manuscrits A et E nous en fournit la preuve; ces
manuscrits ont l'introduction, l'addition de Portalegre, et enfin
la même division en livres et en paragraphes. Il convient toutefois
d'ajouter qu'ils ne possèdent pas les paragraphes 16 à 19 du
livre IV ; mais ce fait, commun du reste à tous les manuscrits de
la Guerra de Granada, n'infirme en rien notre thèse, ainsi que
nous le démontrons plus loin. Le manuscrit A porte en tête la
mention Setuval ano 161S ij Julij et à la fin la mention finis
Anno 1619. 2S Januarij. Le manuscrit E porte en tête la mention
Setubalano de 161 S 13 dejunio et à la fin, la mentionfinis anno 161 y.
L'existence de cette double date nous permet de constater qu'en
16 18 le texte de Mendoza était déjà tel qu'il devait être publié
neuf ans plus tard par Tribaldos, prêt, pour ainsi dire, à être
imprimé, grâce aux notes de Portalegre.
A quelle époque Portalegre composa-t-il son introduction et
son addition ? Il nous est assez difficile de le dire, mais on peut
supposer que l'une comme l'autre ont été écrites en 1593. C'est,
en effet, au mois d'avril de cette année-là que Portalegre adresse
à Don Hernando de Guzman une lettre « sobre algunos libros y
curiosidades que le havia enbiado », lettre où l'on peut lire ce
qui suit :
ETUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA 125
« No juzgo tan profundamente los defectos de la Istoria de D n Diego de
Mendoza, si bien los conozco y los comfesara, si los tubiera por historia, mas
pareçeme vna relazion escripta en papeles viejos para formar historia de ellos,
que el nunca hiçiera, y asi le cauen bien los loores que Vm. le da porque lo
malo es lo que muchos no pudieron enmendar y lo bueno tienen lo tan pocos
que ne conozco yo ninguno. La quiebra que ay en el suceso de Galera y
muerte de Luis Quixada deven faltar adrede por no lo querer publicar el que
tiene el primer orijinal, si ya no se le antoxo a D n Diego ymitar la desgraçia
de Tito Liuio, de cuyas obras falta tanto o la que Iovio finxe con los papeles que
le Robaron. Sera menester pedir prestado esto al jurado de Cordova o a un
soldado que sera mejor, no para continuarlo con el texto, sino para referirlo
secamente a parte. »
Ce passage nous montre Portalegre occupé à reconstituer le
récit des événements de Galera et de la mort de Luis Quixada ;
on pourrait même voir, dans les dernières lignes, comme l'an-
nonce à peine dissimulée d'une publication prochaine.
Nous ne pouvons actuellement remonter plus haut dans l'his-
toire de ce manuscrit.
En cherchant à se rendre compte de la manière dont a été faite
l'édition de 1627, on s'aperçoit que le licencié Luis Tribaldos de
Toledo, grand chroniqueur du roi pour les Indes, a publié son
texte de Mendoza sans grands soins et sans même se donner la
peine de lire attentivement ce qui avait été publié jusqu'alors sur
la révolte des Maures. En 1627, les ouvrages relatifs à la guerre
de Grenade étaient peu nombreux ; deux surtout auraient dû être
consultés par un éditeur de Mendoza : celui de Marmol, paru en
1600, et celui de Bleda paru en 16 18.
Si invraisemblable que puisse paraître le fait, Tribaldos ignorait
Bleda. Il n'avait jamais lu l'énorme compilation éditée à Valence
huit ans seulement avant le moment où il écrivait sa dédicace.
Sans quoi, comment aurait-il pu s'empêcher de retrouver tout le
texte que lui-même allait publier et dont Bleda prenait grand
soin de rejeter le mérite sur Mendoza ? Quant à Marmol, Tribal-
126 R. FOULCHÈ-DELBOSC
dos le connaissait, puisqu'il le cite quatre fois ' en marge du texte
de la Guerra de Granada, comme pour en corroborer la véracité;
mais c'est à peine s'il l'a feuilleté : s'il l'avait lu avec un tant soit
peu d'attention, il se serait aperçu que Marmol, sans la moindre
délicatesse, avait donné, comme de son cru, un long fragment de
Mendoza.
Tout en sachant gré à Tribaldos d'avoir le premier publié une
édition détachée de la Guerra de Granada sous le nom de son
auteur, on ne peut s'empêcher de reconnaître en lui un pauvre
érudit, totalement dépourvu de connaissances bibliographiques
et d'esprit critique. La malchance vint s'y ajouter : en 1628, un
an après la publication du texte de Mendoza, Tribaldos put
prendre connaissance d'un manuscrit qui appartenait au duc de
Bejar. Ce manuscrit n'avait pas les lacunes du manuscrit du duc
d'Aveiro, lacunes qui avaient nécessité l'addition de Portalegre.
C'est évidemment de ce manuscrit-là que Tribaldos se serait
servi s'il l'avait connu un peu plus tôt. Comme il ne fallait pas
penser à une deuxième édition si peu de temps après la première,
Tribaldos se borna à recopier les passages retrouvés et à les
intercaler dans un exemplaire imprimé. Cet exemplaire ainsi
complété demeura à la bibliothèque privée de Philippe IV et
passa de là à la Bibliothèque royale où Juan de Iriarte le retrouva
en 1769. Je l'ai vainement cherché à Madrid.
V. — LES ÉDITIONS POSTÉRIEURES
Deuxième édition :
Guerra de Granada, Hecha por el Rey de Espaiïa Don Felipe II. nuestro
senor, contra los Moriscos de aquel Reyno, sus rebeldes. Ilistoria escrita en
quatro Libros. Por Don Diego Hurtado de Mendoza, de! Consejo de! Empera-
1. On trouve le nom de Marmol dans les marges des feuillets 11 verso,
verso, 85 verso et 126 recto.
ÉTUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA I2J
dor Don Carlos V. su Embaxador en Roma, y Venecia ; su Gouernador, y
Capitan General en Toscana. Publicada por el Licenciado Lvis Tribaldos de
Toledo, Chronista mayor del Rey nuestro seiior por las Indîas, résidente en la
Corte de Madrid. Dirigida a Don Pedro Coloma, En Madrid, En la
Imprenta Real. Ano de 1674. A costa de Mateo de la Bastida — In-40,
6 ff. préls. et 147 ff.
Les feuillets préliminaires contiennent :
f. 1 : Titre.
f. 2 et f. 3 recto : A Don Pedro Coloma... (Dédicace de Mateo
de la Bastida.)
f. 3 verso : Licenças de l'édition de 1627.
ff. 4, 5 et f. 6 recto : Lvis Tribaldos de Toledo, al Lcctor.
f. 6 verso : Licencia del Consejo et Suma de la Tassa de la pré-
sente édition.
Les feuillets chiffrés contiennent :
Brève memoria de la vida, y muer te de Don Diego de Mendo^a,
escrita por Don Balta^ar de Zuhiga... (f. 1).
Introdvccion de Don Ivan de Silva, Coude de Portalegre... (f. 2).
De la Guerra de Granada, de Don Diego de Mcndo^a (ff. 3-147).
Troisième édition. C'est la seule édition de la Guerra de
Granada dont je n'ai pu trouver d'exemplaire. Elle fut fa i te à
Valence (in-8) vers 1730 (date non indiquée sur le titre) par
Vicente Cabrera.
* *
Quatrième édition :
Guerra de Granada hecha por el Rey de Espana Don Felipe II. nuestro
senor, contra los Moriscos de aquel Reyno, sus rebeldes. Historia escrita en
quatro libros. Por Don Diego de Mendoza, del Consejo del Emperador D.
Carlos V. su Embaxador en Roma, y Venecia; su Governador, y Capitan
General en Toscana. Con las licencias necessarias. En Valencia : por Salvador
Faul;, Mercader de Libros, junto al Colegio del Vénérable Senor Patriarca,
donde se hallarà : Ano 1766. 16 ff. préls. non ch., 1 f. blanc et 296 pp.
128 R. FOULCHH-DELBOSC
Contient :
Titre.
Al Exe" 10 Sehor D" Joachin Monserrat, Ciurana, Cruillas, Crcspi
de Faldaura, Alfonso, Calatayud, Sans de la Llosa : marques de
Cruillas 8 ff. de dédicace par Salvador Fauli.
Aprobacion de D. Gregorio May ans, i Ciscàr (2 tî.) datée
de Valence, 13 juin 1730.
Luis Tribaldos de Tolcdo, al Lector (3 ff.)
Brève Menwria de la vida, y muerte de D. Diego de Mendoiu
escrita por D. Baltasar de Zuniga (1 f.)
Introduction de D. Juan de Silva, Coude de Portalegre (1 f.)
De la Guerra de Granada (pp. 1-296).
En 1769, Juan de Iriarte publiait à Madrid le tome I de :
Regia Bibliothecœ Matritensis codices greeci M.SS. Il annonçait avoir
trouvé les passages qui manquaient dans les éditions de Mendoza,
dans un exemplaire de l'édition de 1627 qui avait appartenu à la
bibliothèque privée de Philippe IV, et qui devrait se trouver
maintenant à la Bibliothèque Nationale de Madrid. Ces passages,
Tribaldos les avait copiés lui-même et insérés dans cet exem-
plaire en 1628 (un an après la publication de son édition), en
les transcrivant d'un manuscrit qui appartenait au duc de Bejar.
On lit, en effet, dans le volume d'Iriarte (p. 573, col. 2) :
Fragmentum ex Didaci de Mendoza Historiâ de Bello Granatensi,
quam idem Tribaldus typis edendam primus curavit, ipsius manu descriptum,
insertumque foliis 99 et 100. Exemplairs excusi è Régis Philippi IV olim
Bibliothecâ, quod inter Regii Matritensis Musei Codices M.SS. ob insignis
Fragmenti nonduni editi accessionem honorificè repositum. In hujus autem
fine legitur idiographa Tribaldi Subscriptio :
Sacola L. T. de T. Coronista de su Magestad ano de 1628.
On lit plus loin (page 576, col. 2) :
Alterum Belli Granatensis à Didacode Mendoza elucubrati Fragmentum
supra memoratum, quod eo consilio libentus hîc integrum à nobis describitur
ETUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA 129
ut cùm in nullâ omnino ejus historiœ editione reperiatur, in usus suos Litte-
ratus quisque transcribat. Quod ita se habet :
Suivent les passages retrouvés qui occupent les pages 576 à
579. Ce sont les suivants :
Livre III, f. 100, fin : en que havia muchas provincias [Y de
alli a Guescar — y porterie cerco] f. 103. Livre IV. Lvego que don
Iuan
Livre IV, f. 104, 1. 9 : i de Cahar. [Mientras el duque —
con mucho regoyjo] Hallavase Abenabb
Livre IV, f. 105 verso, IL 10 et n : i de alli sin estorvo a
Valor [donde se alojaron. Saliô don Juan de Ba%a — en muchas oca-
siones.] Abenabb visto que el Duque
* *
Cinquième édition :
Guerra de Granada, que hizo el Rei D. Felipe II. contra los moriseos de
aquel Reino, sus rebeldes. Escriviôla D. Diego Hurtado de Mendoza, del
Consejo del Hmperador Carlos V. su Embajador en Roma i Venecia ; su
Governador i Capitan General en Toscana. Nueva impresion compléta de lo
que faltava en las anteriores, i escriviô el Autor ; i anadida con su vida, i lo
que se avia suplido por el Conde de Portalegre. Con licencia del Real Consejo.
En Valencia : en la Oficina de Benito Monfort, ano 1776, pet. in-4 , lvi-
335 pp. Portrait de Mendoza, gravé par Brandi.
Contient :
El impresor (III-IV).
Vida de don Diego Hurtado de Mendoza ( V-L VI,) .
De la Guerra de Granada (1-329).
Addicion del Conde de Portalegre (330-335).
A en croire Salva, ce serait à Mayans que reviendrait l'hon-
neur d'avoir publié cette édition. 11 serait l'auteur de la vie de
Mendoza qu'elle contient, la plus complète des biographies
parues jusqu'à ce jour. D'après Ticknor au contraire, l'auteur
de cette vie de Mendoza serait don Inigo (il faut rectifier et lire
Ignacio) Lopez de Ayala, professeur de poésie à Madrid. Ni le
nom de Mayans, ni celui d' Ayala ne figurent à un endroit quel-
I3O R. FOULCHE-DELBOSC
conque de l'édition de 1776. — Ainsi que l'indique le titre, cette
édition contient les passages qui manquaient dans les éditions
antérieures 1 et que Iriarte avait publiés sept ans auparavant.
Pourtant, ces passages ne furent pas copiés exactement sur Iriarte :
Salva les rétablit en 1830.
Le prologue de Tribaldos ne figure pas dans cette édition.
Les lignes suivantes (El Impresor, pp. ni et iv) sont intéres-
santes à citer :
« Todo el tiempo que pasô desde que fue escrita hasta su impresion, fue
buscada, copiada, i tenida en mucho aprecio por los eruditos, como se vè en
el uso que de ella hicieron ; pues Luis del Marmol copiô a la letra algunos
periodos en su segundo Libro de la rebelion, capitulo tercero. Lo mismo con-
fiesa de si el Padre Presentado Fr. Jaime Bleda en su chronologia de los Moros
de Espaiia libro sexto, capitulo primero. ».
Ces lignes démontrent, en effet, que Monfort, tout en citant
(quelques lignes avant), d'après Nicolas Antonio, l'édition invi-
sible de 16 10, et en commettant une autre erreur au sujet de
Marmol, n'ignorait pas que Bleda s'était servi de Mendoza.
Sixième édition :
Ciuerra de Granada bêcha por el Rey D. Felipe II. contra los moriscos de
aquel reino, sus rebeldes. Historia escrita por D. Diego Hurtado de Mendoza.
Nueva edicion corregida. Valencia. Libreria de Malien y Berard. 1830, in-8,
xvi-408 pp.
Au verso du titre : Impresû en Valencia, por Don Benito Monfort,
1830.
1. On sait que dans l'édition de 1627, Tribaldos avait remplacé ce qui man-
quait par l'addition de Portalegre. A la page 3 30 de l'édition de 1776, L'éditeur
dit : « En la edicion que ha servido de original de esta, se halla suplido por
D. Juan de Silva, Conde de Portalegre. » et il réimprime le passage de Porta-
legre (pp. 330-335)-
ETUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA 1 3 I
Contient :
Portrait de Mendoza.
Advcrtencia del editor (pp. iii-x).
Luis Tribaldos de Toledo al lector (pp. xi-xyi).
Vida de Don Diego Hurtado de Mendoza (pp. 1-54).
De la Guerra de Granada (pp. 55-398.)
Diseur so del c onde de Portalegre (pp. 399-407).
Variantes entre la edicion de Monfort de 1776 y la de Tribaldos
de 162J (20 mots ou locutions modifiés). Erratas de la présente
edicion (p. 408, n. ch.)
Cette édition fut faite par les soins et aux frais de Vicente
Salva qui, dans une Advcrtencia del Editor, après un court histo-
rique des éditions antérieures, dit :
« Preferi la ûltima edicion de 1776 como el testo mas seguro y com-
plète), si bien noté que no se habia guardado la exactitud debida al copiar los
pasages publicados por Iriarte ; pues he tenido que verificar diez correcciones,
algunas harto importantes, para restituirlos a su verdadera y genuina lectura. »
Il dut remplacer en plus d'un endroit des mots, modernisés
parles éditeurs récents, par des mots vraiment anciens; il dut
aussi modifier la ponctuation défectueuse des éditions antérieures
qui rendaient le texte souvent inintelligible.
*
Septième édition :
Guerra de Granada contra los Moriscos, por D. Diego Hurtado de Mendoza.
Paris, Baudry, 1840, in-8, xxm-124 pp. (Tesoro de historiadores espanoles.)
C'est une réimpression de l'édition de Salvâ(i83o). Le volume
comprend aussi les œuvres historiques de Melo et de Moncada.
Des tirages postérieurs en ont été faits, notamment en 1844 et
en 1861.
*
* *
Huitième édition :
Guerra de Granada hecha por el Rey D. Felipe II contra los moriscos de
aquel reino, sus rebeldes. Historia escrita por D. Diego Hurtado de Mendoza.
152 R. FOULCHE-DELBOSC
Seguida de La Vida del Lazarillo de Tormes, sus fortunas y adversidades. por
el mismo autor. — Barcelona. Imprenta de Juan Oliveres 1842, in-8°, xxvm-
237 pp. Portrait de Mendoza. (Tesoro de autores ilustres, tome IV.)
Neuvième édition :
Biblioteca de autores espanoles, desde la formacion del lenguage hasta
nuestros dias. Tomo 21. Historiadores de sucesos particulares. Coleccion diri-
gida é ilustrada por Don Cayetano Rosell. Tomo primero. Madrid. Imprenta
y estereotipîa de M. Rivadeneyra 1852, in-8, xxxvm-543 pp.
Contient de la p. 65 à la p. 122 : Gnerra de Granada por
Don Diego de Mendoza.
L'édition de Rosell est faite sans le moindre soin. Nous le
voyons d'abord déclarer dans la note 1 de la page vin : La édi-
tion principe es de Madrid, hecha por Luis Tri bai dos de Toledo, 16 10,
4 , puis, quand il parle (note de la page 66) de cinq manuscrits
existant à la Bibliothèque Nationale de Madrid, ajouter qu'il les
a cotejados cou la primera édition. C'est se moquer aimablement du
lecteur. Quant à ces cinq manuscrits, ils présentent, dit Rosell,
quelques variantes, mais sont très inférieurs à la première édition.
— Un seul, poursuit-il, mériterait d'être consulté, le G. 106
(notre manuscrit J). C'est un manuscrit du xvi e siècle : les
nombreuses corrections et annotations marginales font supposer
à Rosell qu'on l'a comparé à beaucoup d'autres. Il en donne
quelques variantes dans son édition.
* *
Dixième édition :
Biblioteca de escritores granadinos, desde la civilizacion arabe hasta nuestros
dias. Monumento elevado à las glorias de las letras patrias por la iniciativa y
bajo la proteccion del Excmo. Sr. 1). José Gutierrez de la Vega, ex-gobernador
de Granada, y gobernadorde Madrid. — ' Obras de D. Diego Hurtadode Men-
doza, coleccionadas por D Nicolas del Paso y Delgado. — Tomo primero. —
Granada. Imprenta de El Porvenir, 1864, in-8, xcn-333 pp.
ÉTUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA 133
Ce volume est le seul qui ait paru de la Biblioteca de escritores
granadinos. Le texte de la Guerra de Granada (pp. i à 137) est
précédé d'une courte notice bibliographique (pp. lxvii à lxxix)
indiquant comme édition princeps celle de 16 co, du prologue
de Tribaldos, de l'introduction et de l'addition de Portalegre.
L'éditeur n'a fait, du reste, que reproduire textuellement
l'édition de Rosell, mais n'a apporté aucun soin à la correction
de son volume : il me suffira de signaler (p. lxviii, av.-dern.
ligne, une erreur que la moindre attention eût évitée : Marchinveli
au lieu du Macchiaueli de l'introduction de Portalegre. Le reste
est à l'avenant.
* *
Onzième édition :
Biblioteca clâsica. Tomo XLI. — Obras en prosa de D. Diego Hurtado de
Mendoza. Madrid, Luis Navarro, editor 188 1 in-8, vm-439 PP- — ' *- Tn ù ra g e
postérieur en a été fait en 1888 (Madrid, Viuda de Hernando y (>)•
Contient :
D. Diego Hurtado de Mendoza (pp. v-vm). Notes biographiques
rédigées d'après Sedano et Rosell.
De la Guerra de Granada (pp. 1-187).
La vida de La^arillo de Tonnes, Diàlogo entre Car ont e y el anima
de Pedro Luis Famesio et : Car ta de D. Diego de Mendoza al Capitan
Sala^ar.
Cette édition a été fixité d'après celle de Rosell.
VI. — ÉTUDE DU TEXTE.
Telle est l'histoire du texte de la Guerra de Granada. Maintenant
une question se pose. Convient-il d'accepter ce texte tel qu'il
nous est connu par l'édition princeps simplement augmentée
des trois passages retrouvés par Iriarte en 1769 ? Je ne le crois
pas.
Rtine hispanique. 9
134 R - FOULCHE-DELBOSC
Mendoza, on l'a déjà dit, écrivait pour lui seul, ou tout au
plus pour un petit cercle d'intimes. On ne doit donc pas consi-
dérer la Guerra de Granada comme une oeuvre arrivée au point
de perfection qu'elle eût atteint si son auteur avait supposé
qu'elle serait publiée un jour. Bien que spécieux, le raisonne-
ment de May ans dans Vaprobacion datée de 1730 ne manque pas
d'une certaine justesse :
Una de sus Obras mas insignes es la siguiente Historia, digna de la mayor
alabanza, por aver sido la primera que se escriviô en Espaiïol segun las rigu-
rosas levés, que prescribieron los Criticos. I como la principal sea decir la
verdad, Don Diego que sabia, que escrivirla el Historiador, es obligacion de su
empleo, i publicarla, proximo peligro ; como generoso quiso profesarla, i como
prudente recatarla. Escriviô pues con libertad : i cuerdamente se abstuvo de
dar à luz su Historia. Quizà por este respeto no le diô la ultima mano
Jusque-là, Mayans est dans le vrai. Mais il fait fausse route
quand il poursuit :
Quizà por este respeto no le diô la ultima mano, i dejô un vacio, que con
élégante pluma huvo de suplir despues con un brevissimo sumario el discretis-
simo Conde de Portalegre Don Juan de Silva.
Cette lacune dont parle Mayans n'était pas intentionnelle :
Tribaldos, nous l'avons vu, l'avait comblée lui-même en 1628,
en se servant d'un manuscrit du duc de Bejar, plus complet que
celui du duc d'Aveiro. Depuis 1776, du reste, toutes les éditions
contiennent les passages retrouvés par Juan de Iriarte en 1769.
Nous voici donc en présence du texte tel que l'aurait publié
Tribaldos si, au lieu de connaître le manuscrit du duc de Bejar
en 1628, il l'avait connu deux ans plus tôt, en 1626, au moment
où il mettait la dernière main à son édition de 1627.
C'est ce texte ainsi complété qu'on s'est, jusqu'à présent,
habitué à considérer comme un ensemble, sinon entièrement
poli et limé, du moins exempt de lacunes importantes. Exami-
nons donc deux questions :
i° Connaissons-nous intégralement le texte de Mendoza?
2° Tout ce que nous connaissons est-il de Mendoza ?
ÉTUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA 135
Depuis que trois passages ont été retrouvés par Juan de Iriarte
et intercalés à la place qu'ils doivent occuper régulièrement, on
peut considérer la Guerra de Granada comme un récit ininter-
rompu et auquel, au point de vue historique, rien d'essentiel ne
manque, depuis la première ligne du premier livre jusqu'au
feuillet ni de l'édition de 1627. Ce récit se termine par la prise
de Castil de Ferro, qui eut lieu le 2 mai 1570, et les opérations
de don Antonio de Luna dans les environs de Vêlez Malaga
(premiers jours de mai). Les derniers mots après lesquels il con-
vient de faire de sérieuses réserves sont : con ellos mantenia i asse-
gurava mar i tierra (livre IV, § 5 in fine). Dans les éditions et les
manuscrits, ces mots sont immédiatement suivis d'une phrase
avec laquelle ils n'ont aucune connexion : Tornù cl Rci a Cordova
par Iaen i por Vbeda i Baeça, remit ticndo la conclusion de las cor les
para Madrid donde II ego.
Disons tout d'abord que la phrase ainsi énoncée est inintelli-
gible : le roi qui était à Séville ne pouvait revenir à Cordoue par
Jaen, Ubeda et Baeza, villes situées toutes trois à plus de cent
kilomètres à l'est de Cordoue. La correction est facile, le bon
sens l'indique et plusieurs manuscrits la confirment : il faut lire
Tornù el Rey de Cordova...; on comprend ainsi que revenant de
Cordoue à Madrid, le roi puisse passer par Jaen, par Baeza et par
Ubeda.
Mais, même ainsi rétablies, ces deux lignes ne sont assurément
pas à leur place : il n'a pas été question du roi depuis assez
longtemps : à la fin du § 3 (dern. ligne f. 109), il se trouvait
encore à Cordoue, et il est prématuré de nous annoncer son
retour à Madrid, retour qui n'eut lieu que le 20 juin ', alors que,
quelques lignes plus bas, il s'agit d'opérations militaires s'effec-
tuant le 20 mai, alors, surtout, que nous voyons don Antonio
de Luna aller à Séville auprès du même Philippe (§ 7), et qu'un
1. Philippe II était parti de Madrid le 13 janvier 1570, il arriva à Cordoue
au commencement de février et à Séville le lundi I er mai. Il était de retour à
Madrid le 20 juin.
136 R. FOULCHÉ-DELBOSC
peu plus loin (fin du § 8), on peut lire : Estava como tengo dicho a
la sa^ô el Rei dô Philippe en Sévi lia, snpplicado por la ciudad, que
viniesse a recebir en ella servie io.
Nous nous trouvons très vraisemblablement en présence du
commencement d'un paragraphe inachevé ou perdu, et qu'il
conviendrait, dans tous les cas, de reporter ailleurs.
A partir de ce point, Mendoza ne pouvait que difficilement
continuer son récit en se laissant guider par l'ordre chronolo-
gique seul. L'action, en effet, va devenir double.
La décision du roi, d'expulser du royaume de Grenade tous
les Maures, rebelles ou non, venait d'être le signal d'une formi-
dable insurrection de ceux de Ronda qui, jusque-là, étaient restes
à peu près soumis. La répression commença en mai 1570 et dura
jusqu'en novembre. Il ne fallut rien moins que les efforts
d'Antonio de Lima, d'Arévalo de Zuazo et, plus tard, du duc
d'Arcos, pour venir à bout des insurgés. Cette guerre de Ronda,
quoique engendrée par la guerre de Grenade, en est, en quelque
sorte, distincte, et par l'éloignement du théâtre des opérations et
par le manque de connexion des armées qui opéraient.
Il n'est pas inutile de faire remarquer ici que, d'une part, tous
les manuscrits de la Guerra de Granada qui forment la i re famille,
s'arrêtent là, et que, d'autre part, parmi ceux de la 2 e et de la 3 e
famille, les uns portent la mention Aqui acaban muchos originales,
les autres ont, pour tout ce qui suit, un titre spécial : La jornada y
sucesso de la guerra de Honda. Il v a là, dans l'œuvre de Mendoza,
une coupure bien marquée, autrement rationnelle que la division
en livres et en paragraphes qui a prévalu jusqu'à présent.
Pendant que les Lspagnols guerroyaient dans la sierra de
Ronda, les A puxarras continuaient à être le théâtre d'une guerre
de plus en plus féroce, mais dont on pouvait facilement prévoir
la tin prochaine. Le fait le plus saillant et qui permit un instant
ÉTUDE SUR LA GUERRA DE GRAXADA 137
de croire que tous les insurgés allaient déposer les armes, est la
série de négociations engagées à partir du 13 mai entre les Espa-
gnols et El Habaqui agissant sur l'ordre d'Aben Abo. On put,
en effet, se croire bien près de la fin de la guerre, mais Aben Abo
s'étant ravisé, il fallut continuer la campagne; en septembre et
octobre, Requesens fit une très courte campagne dans les Alpu-
xarras; après des atrocités sans nombre, le pays fut à peu près
dépeuplé : il ne restait à Aben Abo que quatre ou cinq cents
partisans. Le 30 novembre, Don Juan d'Autriche quitte Grenade.
Enfin, le 15 mars 1571, Aben Abo, trahi par les siens, est mis à
mort.
Comme on le voit, à partir de mai 1570, il faut faire un récit
des opérations de la sierra de Ronda, puis se reporter aux Alpu-
xarras et raconter les négociations, la très courte campagne de
Requesens et la mort d'Aben Abo. C'est ce plan qui, en divi-
sant l'attention, permet une clarté plus grande, que Gines Perez
de Hita a adopté 1 . Il consacre aux opérations de la sierra de
1. Segunda parte de las guerras civiles de Granada y de los crueles bandos entre
los convertidos moi os y vecinos cristianos cou cl levantamiento de todo el reino y
ùltima rebeîion sucedida en el ano de mil quinientos sesenia y ocho. Y asimistno se
pone su total raina y destierro de los moros por toda Castilla : cou el fin de las gra-
nadinas guerras par el rey nuestro seilor Don Felipe II de este nombre por Gines
Pen'i de Hita. Alcalâ de Hetiares, en casa de Juan Gracian 1604, in-8. — Aucun
bibliographe n'a vu cette édition, mais son existence paraît certaine. (Voir le
Romancero General de Duran, t. II, p. 688, col. 2.) En tous cas, il existe une
édition de Barcelona, Esterait Liberos 161 y, in-8, souvent décrite.
Gines Perez de Hita semble avoir servi comme simple soldat sous les ordres
du marquis de los Vêlez pendant la guerre de Grenade. Nous n'avons pas à
nous occuper ici de la première partie de ses Guerras civiles de Granada ; la
seconde nous intéresse seule : on y trouve de nombreux détails dignes d'intérêt.
Bien que publiée en 1604, cette seconde partie était terminée en 1597, ainsi
que l'indique une note placée avant le romance final :
Sacôlas en limpio y acabôlas Gines Pere\ de Hita, vecino de Murcia, en jj de
Noviembre de 1597.
Hita cite souvent La Austriada, poème de Juan Rufo Gutierrez, jurado de
138 R. FOULCHÉ-DELBOSC
Ronda une partie du chapitre xxm 1 et revient ensuite aux évé-
nements des Alpuxarras pour ne les plus quitter. Marmol a suivi
un plan beaucoup moins simple : dans les livres IX et X de son
Historia del Rebelion, il va constamment de Ronda aux Alpuxarras
et des Alpuxarras à Ronda, ne conservant l'ordre chronologique
qu'aux dépens de la clarté.
Mendoza s'étend, plus qu'on n'était en droit de l'attendre de
lui, généralement si sobre de détails, sur les opérations enga-
gées dans les montagnes de Ronda. Son récit comprend les para-
graphes 6 à 15 du livre IV, soit 716 lignes de l'édition de 1627 :
Marmol, je l'ai déjà dit, en a copié à peu près textuellement la
Cordoue, qui avait paru pour la première fois en 1584 (Madrid, in-8) La 2 e
édition est de Tolède 1585; la 3 e de Alealâ 1586. Cette œuvre est loin de
mériter les éloges que lui prodiguèrent Gôngora, Lupercio de Argensola et
surtout Cervantes, mais elle offre un très grand intérêt pour la présente étude,
car les dix-huit premiers chants, consacrés à la guerre de Grenade, ne sont
autre chose, à quelques modifications près, que l'œuvre de Mendoza mise en
vers.
Je n'hésite pas à affirmer que Hita avait connaissance de l'histoire de Men-
doza. Dans le récit de la marche du duc d'Arcos à sa sortie de Casares, il y a,
entre les deux textes, une coïncidence bien singulière :
Entrando por esta sierra, se renovô en la
memoria de los cristianos la venganza que
debian tomar por sus pasados, encontrando
blanqueavan calaveras de por ella grau cantidad de calaveras de
hombres i buessos de cave I los amontonados, hombres muertos, y de despojos de ca ba Iles del
desparzidos, segun como i donde havian tiempo en que don Alonso de Aguilar tué
parado ; pedaços île armas, frenos, despojos alli muerto, y el de Viena desbarat.uk) ;
de jaezes : (Mendoza, IV, 9.) tambien habia niuclios troxps de ennuis y
cuchillas de lanzas ; (Hita, XXIII.)
Il y a surtout une ressemblance frappante entre les premières lignes des
deux textes d'un discours de Don Juan d'Autriche. (Voir plus loin.")
1. De l'or es le tiempo muchos moros à Mientras pasaban estai cosasen las cer-
canias de Ronda, soit 170 lignes environ.
ETUDE SUR LA GUERRA DE GRAX.1D.1
*39
plus grande partie 1 . Pourtant, si long que nous paraisse actuel-
lement ce passage de Mendoza, il ne nous est qu'incomplètement
connu. Le manuscrit A m'a permis d'en combler les lacunes : je
rétablirai pour l'instant quatre passages omis dans les éditions.
i° Edition de 1627, f. 114 verso, ligne 5 :
letra s. Demâs del concurso
Le manuscrit A donne (f. 102, 1. 7) :
letra s. Otra opinion por conjecturas es, q uvo como aora los ay ribera
de Guadalquibir muchos pueblos à una i otra parte, i entre ellos uno q llama-
ron Oset, libre i abitacion de Romanos, como Seuilla, pero mas nuevo, i a
différencia de Oset, la llamaron los Griegos Ispalis que quiere dezir la antigua.
Algunos rastros q confirman esta opinion quedan aora en Sevilla. Pudo ser que
viniesse Rey en Espana llamado Hispalo pero en Autores aprovados no se halla,
que lo q dizen de los palos, i otras cosas tienese por fabuloso, como la verdad
lo son, i tambien inciertas las mas origenes de naciones, i ciudades, i castas,
procurando cada unoennoblecer su principio. Demas del concurso
2° Edition de 1627, f. 115 verso, 11. 21 et 22 :
... .con ciertas condiciones. Esto affirmaron en nombre de todos
Le manuscrit A donne (f. 103) :
Que todos los moriscos levantados an de ser obligados a se venir a reduzir a
la obediencia i servicio de S. Mag d de aqui al dia de S. F^ que es a 10 dias del
de Agosto del présente ano de 1 570 i dentro deste termino an de rendir i entre-
gar todas las armas que tienen sin faltar ni incubrir ningunas a la persona o
personas que el Duque mandare, entretanto que el Rey manda a quien se an
de entregar.
Que passado el dicho termino i no entreganao las armas i no vi m'endosse a
reduzir se entienda sin otra declaracion que quedan declarados por rebeldes i
enemigos para que se les haga el castigo que S. MagJ tiene mandado.
1 . « En la relaciôn de los sucesos de esta guerra de Ronda se detuvo don
Diego de Mendoza mas de lo que era de esperar de la brevedad con que tratô
los de la gênerai de Granada. Puede verse su libro IV y tambien el IX v X de
Marmol. » (Modesto Lamente, Hisloria gênerai de Espana. Parte tercera, capit.
XII ) — Remarque fort juste, assurément ; mais, pas plus que tous les histo-
riens, Lamente n'a su voir que Marmol avait copié Mendoza.
I40 R. FOULCHE-DELBOSC
Que en nombre del Rey se les dara licencia para que vivan en sus tierras i
casas como de antes vivian, i que se les volveran todos sus bienes libremente i
sus hijos i mugeres que les an tomado despues de la rebelion.
Que con ellos se cumplira i guardara lo que S. Mag d concediere a los Moris-
cos de las Alpuxarras acerca del pagar la farda.
Que se guardara con ellos la pramatica de S. Mag J que habla en razon de las
cercanias de los delictos q se cometen en tierra de los moriscos, sin que los
juezes ordinarios ni de comission les hagan agravio en razon dello, i que averi-
guandose quien cometiô el delicto no seran molestados.
Que en todo el mes de Agosto primero venidero se dara pasaje seguro para
que los Turcos i Alaraves que estan entre ellos passen a Berberia, i no a los
demas christianos nuevos baptizados.
Que se les bolveran a los de Tstan todas sus mugeres i hijos que estan cap-
tivos dando por ellos el precio que ovieren costado a las personas que los
tuvieren.
Esto firmaron en nombre de todos el Arsabahi i el Ataifor
3 Edition de 1627, f. 116 verso, 11. 25 et 26 :
como las que recibiô. Lloraronle amigos i enemigos
Le manuscrit A donne (f. 104 in fine) :
como las q recibio, donde mataron los capitanes rendidos, donde tomaron
los estandartes, donde los despedaçaron y escarnecieron, como lloraron a D.
Al° amigos y enemigos. Mas en aquel punto renovaron los soldados
4 Edition de 1627, f. 118, 11. 5 et 6 :
las espaldas a la mar ; dexando en Ronda a Lope Zapata
Le manuscrit A donne (f. 105) :
las espaldas a la mar. Embiaron a buscar soccorro, i solicitaron a Abdalla
Abenabo, q cntonces mantenia las sobrasde los moros en el Alpuxarra, i partio
Mahamet Abenabo su hermano con 300 arcabuzcros, mas D. Juan embio (un
mot en blanc) quien le rompio i prendio. El Duq dexando en Ronda a Lope
Çapata
Ces passages suffisent à montrer de quelle utilité sera le manu-
scrit A lors de la publication de l'édition critique de la Gucrra de
Granada.
ETUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA 141
* *
Mais là n'est pas le blanc le plus important de l'œuvre de
Mendoza : le texte imprimé ne nous donne pas le moindre récit,
ni des efforts tentés par le Maure Hernando El Habaqui pour
arriver à la conclusion de la paix, ni de ses entrevues avec Don
Juan d'Autriche, entrevues sur lesquelles Marmol s'étend avec
tant de complaisance.
A la suite du Bando en favor de los que se reduxesen 1 qui fut
rendu public vers le milieu d'avril 1570, El Habaqui n'avait épar-
gné ancune démarche pour amener ses coreligionnaires à se
soumettre.
Nous le voyons, à la fin du chapitre xxn du livre VIII de Mar-
mol, demander à Don Juan la liberté de deux Mauresques
captives :
« No mucho despues de esto el Habaqui suplicô d Don Juan de Austria por
la libertad de aquellas mugeres, que eran sus parientas, y pagô doscientos
ducados por el rescate de ellas, y las puso en libertad. »
Le chapitre xxvm du livre VIII nous montre El Habaqui s'oc-
cupant activement de résoudre les difficultés auxquelles donne lieu
l'interprétation du bando :
« Aben Aboo, y los que con él estaban, entendian diferentemente el
bando, y habia escrito el Habaqui sobre ello d Don Hernando de Barradas,
entendiendo que se suspendia la guerra con todos mientras se trataba de la
reducion ; y aun parecia que no aseguraba d los caudillos. Tambien habia escrito
Hernando el Habaqui, que los de la Alpuxarra, entendiendo que se trataba de
sacar los Moriscos de las ciudades de Guadix y Baza, que no se habian rebe-
lado, estaban escandalizados : »
« Estos mesmos dias se tornô d ver Don Hernando de Barradas con el
Habaqui en el castanar de Lanteyra, y le dixo como ténia en buenos terminos
el negocio de la reducion; »
Au même chapitre, Marmol nomme les Espagnols qui, sur
l'ordre de Don Juan, devront se rencontrer avec El Habaqui pour
traiter de la soumission :
1. Voir Marmol, livre VIII, chap. xxi.
I42 K. FOULCHE-DELBOSC
« Y porque se habian de juntar con el Habaqui, y con los caudillos Moros,
que viniesen a tratar de la reducion, algunos caballeros de nuestra parte, manda
venir a Don Juan Enriquez de Baza, don Alonso Habiz Venegas de Almeria, y
Don Hernando de Barradas de Guadix, y les diô orden y eomision para que
juntamente con Don Alonso de Granada Venegas entendiesen en ello :... »
Le 30 avril, Don Juan lève le camp et se dirige vers Los
Padûles de Andarax, lieu qu'il jugeait commode, soit pour traiter
de la paix, soit pour continuer la campagne. Le 6 mai, un Maure
vient à Padûles porter une lettre d'El Habaqui à Don Alonso de
Granada Venegas : El Habaqui propose de venir avec les princi-
paux chefs des révoltés au Fondôn de Andarax et de s'y trouver
avec les plénipotentiaires espagnols ; il offre même des otages
pour garantir la sécurité de ces derniers (chap. xxvm).
Au chapitre xxx, le duc de Sesa, après son expédition de Castil
de Ferro, est de retour à Adra ; de là, il passe à Daîias et y reçoit
la soumission de nombreux Maures :
« Y vinieron muchos Moros de todas las taas de la Alpuxarra a rendirse
conforme al bando ; y los que no podian ir luego, daban sus poderes al Haba-
qui, corao autor de aquella paz. »
Mais c'est au livre IX que nous sont donnés les détails les
plus étendus : les Maures, poussés par El Habaqui, se sou-
mettent en grand nombre, et, le 13 mai, se rencontrent au
Fondôn de Andarax, d'une part, El Habaqui, Hernando el Galip,
frère d'Aben Abo, quatre autres Maures et douze chels barba-
resques; d'autre part, les plénipotentiaires espagnols. Sur l'obser-
vation des Espagnols qu'ils n'avaient de pouvoirs, ni d'Aben
Abo, ni d'aucun des chefs, les musulmans se retirèrent, emme-
nant avec eux Juan de Soto qui était à la fois secrétaire de Don
Juan d'Autriche et secrétaire de son conseil, et qui devait rédi-
ger sous leur dictée les conditions de la soumission. El Habaqui
promit de revenir au même endroit huit jours plus tard. (Livre X,
chap. 1.)
Le vendredi 19 mai, il est exact au rendez-vous : les chefs
maures et barbaresques, qui l'accompagnaient la semaine précé-
ETUDE SUR LA GUERRA DE GRAXADA I43
dente, sont là, eux aussi, moins toutefois, le frère d'Aben Abo,
Hernando El Galip, qui, ayant vu de quels égards les Espagnols
entouraient El Habaqui, a soupçonné quelque trahison. Don Juan
Enriquez et Juan de Soto conviennent alors avec El Habaqui de
l'attitude que celui-ci devra prendre en présence de Don Juan
d'Autriche, des grâces qu'il implorera pour Aben Abo, pour ses
amis et pour lui-même: et lorsque tout est arrêté, El Habaqui se
met en route pour Los Padûles où se trouve Don Juan, emme-
nant avec lui Alonso de Velasco et trois cents soldats maures.
Son entrée au camp fut quelque peu théâtrale, si le récit de
Marmol (livre X, chap. n) est vrai, et rien ne prouve qu'il ne le
soit pas.
« Entré en nuestro campo acompafiado de los caballeros comisarios, y sus
trescientos escopeteros Moros puestos en orden a cinco por hilera : a los quales
tomaron en medio quatro companias de infanteria que los estaban aguardando.
Luego entregô la bandera de Aben Aboo por mandado de Don Juan de Austria
a Juan de Soto, y él la cogiô en el hasta ; y pasando por medio de los esqua-
drones de la gente de â pie y de a caballo, que estaban puestos en sus orde-
nanzas tocando sus instrumentes de guerra, hicieron una hermosa salva de
arcahuceria, que durô un quarto de hora. Estaba Don Juan de Austria en su
tienda acompafiado de todos los caballeros y capitanes del exercito, y llcgando
el Habaqui cerca, se apeô del caballo, v fue à echarse a sus pies, diciendo :
« Misericordia, serïor, misericordia nos concéda vuestra Alteza en nombre de
su Magestad, y perdon de nuestras culpas, que conocemos haber sido graves » ;
y quitandose una damasquina que llevaba ceiîida, se la diô en la mano, y le
dixo : « Estas armas y bandera rindo a su Magestad en nombre de Aben Aboo
y de todos los alzados, cuyos poderes tengo » : y Juan de Soto arrojô a sus
pies la bandera de Aben Aboo. Don Juan de Austria estuvo à todo esto con
tanta serenidad, que representaba bien la magestad del cargo que ténia, y man-
dandole que se levantase, le tornô a dar la damasquina, y le dixo que la guar-
dase para servir con ella a su Magestad, y despues le hizo mucha merced y
favor. Los trescientos Moros se volvieron i Andarax, y el Habaqui quedô en el
campo. Llevôle à corner a su tienda Don Francisco de Cordoba, y sobre comida
se trataron algunas cosas concernientes al bien de los negocios, que quedaron
apuntadas. Otro dia le Ilevô à corner el Obispo de Guadix, que no holgô poco
de verle con demostracion de arrepentimiento, y contento de haber hecho
aquel servicio à Dios y a su Magestad. »
Le 22 mai, El Habaqui quitte le camp espagnol pour aller
144 R - FOULCHE-DELBOSC
rendre compte de son ambassade à Aben Abo et aux autres chefs
maures; le même jour, Don Juan d'Autriche quittait Los
Padûles et allait s'établir à Codbaa de Andarax. (Marmol, livre X,
chap. n).
Il est à présumer que la confiance qu'Aben Abo pouvait avoir
eue jadis en El Habaqui était alors complètement tombée; son
frère El Galip lui avait déjà rendu compte de la déférence, suspecte
avec raison à ses yeux, avec laquelle l'avaient traité, le 13 mai, les
envoyés espagnols. D'autre part, le seul témoin de l'entrevue du
19 mai, Alonso de Velasco, avait quitté le camp espagnol en
même temps que les trois cents soldats maures d'escorte, et
n'avait sans doute pas manqué d'établir un parallèle fâcheux entre
l'accueil aimable fait à El Habaqui et la réception tout au moins
froide qui lui avait été réservée à lui-même : il avait été témoin
de la scène pompeuse de la soumission ; il avait vu l'étendard
d'Aben Abo jeté aux pieds de Don Juan. Toute cette mise en
scène constituait, il faut l'avouer, une énorme maladresse de la
part des Espagnols : la suite le prouva bien. Alonso de Velasco
ne dut pas se faire faute de montrer à Aben Abo le peu de con-
fiance que l'on devrait avoir désormais dans un homme aussi
bien vu des Espagnols que l'était El Habaqui.
Quels que fussent les sentiments dont était alors animé Aben
Abo, il n'en laissa rien paraître. Par ses ordres, El Habaqui
retourna le jeudi 25 mai au camp espagnol, à Andarax : il y
régla avec Don Juan le désarmement des Maures. Des commis-
saires furent nommés. Don Alonso de Granada Venegas était
celui auquel était échu le désarmement des Alpuxarras ; il dut,
sur l'ordre de Don Juan, se rendre à Mecina de Bombaron où se
trouvait Aben Abo, et rassurer ce dernier. Il partit de Codbaa de
Andarax le dimanche 28 mai, et, le lendemain, trouvait à Cadiar
Aben Abo et El Habaqui venus à sa rencontre; sur la demande
d'Aben Abo, le désarmement fut différé : par contre, sur la
demande d' Alonso de Granada Venegas, Aben Abo fit abattre
les enseignes que l'on portait devant lui. Mais, peu après, rede-
ETUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA 145
venu méfiant, il dissuadait les Maures de faire leur soumission,
leur laissant entendre que les conditions stipulées par El Habaqui
ne leur étaient pas assez avantageuses.
Les n et 12 juin eut lieu l'embarquement des Turcs. El Haba-
qui s'empressa d'en porter la nouvelle à Don Juan d'Autriche.
Connaissant aussi le revirement d'Aben Abo, il demanda à
Don Juan cinq cents arquebusiers pour s'emparer du chef des
révoltés. Don Juan, ne voulant pas aventurer ses soldats, se
contenta de lui donner 800 ducats d'or pour lever une troupe de
quatre cents Maures.
El Habaqui quitta Don Juan et se rendit à Legem (ou Yexen ?)
village de la taha de Jubiles. Là, il demanda aux Maures pour-
quoi ils ne se rendaient pas : ceux-ci lui répondirent qu'ils atten-
daient l'ordre d'Aben Abo. El Habaqui répliqua que si Aben Abo
ne se soumettait pas comme les autres, il le traînerait à la queue
de son cheval. Le propos fut répété le soir même à Aben Abo :
il envoya cent cinquante Turcs et deux compagnies de Maures
avec ordre de s'emparer d'El Habaqui. Celui-ci était alors à
Bérchul; sa maison fut cernée pendant la nuit, mais il put néan-
moins s'échapper; le lendemain matin, son turban blanc et son
caftan pourpre le firent remarquer des gens qui le poursuivaient.
Pris, il fut conduit à Cuxurio où était Aben Abo (jeudi 15 juin);
celui-ci lui reprocha de l'avoir trahi, et le lendemain (vendredi
16 juin), l'ayant fait étrangler en secret, il ordonna de jeter son
cadavre dans un fumier où il demeura plus de 30 jours. Aben
Abo tint sa mort secrète et put ainsi faire traîner en longueur les
négociations avec Don Juan.
Les événements que nous venons de résumer occupent, nous
l'avons dit, une très grande place dans Marmol : les neuf premiers
chapitres du livre IX leur sont, en effet, à peu près exclusive-
ment consacrés. Or, dans Mendoza, on ne trouve que deux allu-
sions très vagues à des préliminaires de négociations :
i los que embiô (Abenabô) hâzia Granada captivaron peleando con
muchas heridas a don Diego Osorio, que venia con despachos del Rey para
I46 R. FOULCHÉ-DELBOSC
don Iuan i el Duque ; en que se trataba la resoluciô de la guerra, i concierto
que se havia platicado cô los Moros i Turcos por mano del Habaqui :
(f. 108 verso).
Recogiôse el Duque con su catnpo en Adra esperando en que pararia la
plàtica q se trahia cô el Habaqui (f. 110 verso).
La soumission de El Habaqui est pourtant un de ces tableaux
que Mendoza devait mettre en lumière. Marmol, dont le style
est beaucoup moins factice, ne peut lui-même s'empêcher de
souligner tout ce que cette soumission eut de pompeux. On
s'expliquerait donc mal que Mendoza, d'une part, eût complète-
ment laissé dans l'ombre les pourparlers qui faillirent aboutir et
amener ainsi la soumission définitive des Alpuxarras, d'autre part,
n'eût pas saisi avec empressement l'occasion qui s'offrait à lui de
placer, dans la bouche de El Habaqui et dans celle de Don Juan
d'Autriche un de ces discours dont il est coutumier.
J'avais toujours été frappé de cette lacune, et je supposais
qu'un fragment, assez important quanta la longueur, très impor-
tant quant à l'intérêt, était perdu. Je ne me trompais pas : ce
fragment, j'ai été assez heureux pour le retrouver, en 189 1, dans
le manuscrit P. Le voici.
Au livre IV de l'édition de 1627, le paragraphe 14 (marqué 13
par erreur '), se termine ainsi : ...con esto, el se tornô a Ronda,
i aquella guerra quedô acabada la tierra libre de los enemigos;
parte muertos i parte esparzidos o idos a Berberia.
Le manuscrit P (page 202) a ce qui suit :
con esto, el se tornô a Ronda, i aquella guerra quedô acabada la tierra libre
de los enemigos.
Viendo Abenavo ya sus cosas tan derribadas y el tan sin fuerças y desheehos
todos sus disignios y esperanças temeroso y arrepentido y no hallandose v.i
seguro entre los suyos (condicion propia de Tirano) tratô con el Abaqui (a
quien ténia por amigo familiar) de su remedio diziendole como entendia que
havia entre su gente quien tratava de vendcrle sin respecto de su auctoridad y
1. Par contre, le paragraphe 13 est à tort marque 14.
ÉTUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA I47
justicia y que este dafio y el verse con tan pocas fuerças para resistir a sus
enemigos le movia desear paz por salvar la vida. El Abaqui le puso delante los
sucesos pasados y el mal estado en que les havia traydo la Fortuna, la poca
esperanza de socorro y de poder permanezer La potencia de los contrarios y la
poca resistencia que les quedava para no venir a sus manos y que asi le pareçia
el mas seguro camino para asegurar las vidas y todo lo demas que tratase de
paces y de convenencia y mejor estuviese a su persona. Esto le pareçio bien a
Abenavo y dandole comision para ello le rogo que lo tratase y asentase de su
parte con Don Juan de Austria como el fiava de su entendimiento lo sabia hazer
con esta resoluçion partio el Havaqui a otro dia para el campo de Don Juan
de quien fue bien reçevido y el moro explico de su embaxada diziendo Abdalla
Abenavo sucesor de Aven Humeya y cabeça de la gente rebelada me embia a ti
gran principe a declararte su yntento y es que considerando con atençion los
danos de la guerra halla que podrîa estenderse ynfinito sin otro premio mas
que la sangrienta vengança que de ambas partes se procura pues que vençiendo
Espana 110 acreçienta sus hazanas ni si Abenabo sustenta su yntencion, no
espéra verse en tranquilidad que es el fin de la guerra assi que pues no promete
ninguna recompensa pide a tu Alteza le mandes concéder treguas en que se
confirmen por mi miedo (medio) las condiciones que tu mandares y lo que
fuere remedio de estos danos — yo soy el Havaqui de quien por ventura habras
oydo dezir vezino de Guadix de pobres padres mas a me puesto Abenavo en
tanta altura que si el fuera su hermano no dudo que yo fuera otro Ruygomez
de Silva ' demas de lo quai sabras Principe que yo traygo en el coraçon la ley
de Christo de quien soy regido por que si pareçe que hasta agora he seguido la
secta maldicta a sido procurando el negocio que oy trato todo lo quai mirando
y el deseo gênerai de toda aquella gente deves senor sernos amparo y defFensor
donde no la cruz es mi tropheo y el uno y trino Dios por el quai vale mas ser
1. Ruy Gomez de Silva, duc de Pastrana, prince d'Éboli, était le favori de
Philippe II. Il avait épousé en 1553 Ana Mendoza de la Cerda, fille unique du
comte de Mélito, âgée de 13 ans. (C'est la fameuse princesse d'Éboli qui,
veuve, fut la m iitresse d'Antonio Perez, dont son mari avait été le protecteur
et qu'il avait fait nommer secrétaire de Philippe IL' On connaît une lettre de
Mendoza à Ruy Gomez de Silva qui lui avait demandé des nouvelles de la
guerre de Grenade ; c'est un simple billet, d'un laconisme remarquable :
« La de V. Ex. del 27 de passado recivi a las dos de este, y cumpliendo con
lo que me manda en darle aviso de el estado de la guerra, para que V. Ex. lo
dé a S. M. digo que el Sr. D. Juan oye, y el Duque bulle, y Luis Quixada
rine, y el Présidente propone, y el Arçobispo bendice, y Munatones guarduna,
y el marques de Mondéjar, mi sobrino, esta alla ; que no haze falta acâ. »
I48 R. FOULCHÉ-DELBOSC
tu esclavo que de Abenavo lugartiniente. » Don Juan que atentisimo le escu-
chava le respondio ' « Mucho huelgo Havaqui de conoceros aunque antes de
agora lo havia hecho por vuestra fama y antes de responder a vuestra demanda
quiero agradeceros la fee que publicais por vuestra bondad es justo queprimero
se note y agradezca y assi os prometo de seros de aqui adelante fiel amigo en
quanto se os offreçiese como vuestra constancia lo mereçe y en quanto
a las treguas y pazes las contradigo por no ser cosa décente pedirlas los
delinquentes a su Rey porque mas justo séria pedir perdon y proponer
la emienda y darse a mi sin contradiçion alguna y esto sirva de respuesta
por vuestra cabeça y para todos en gênerai porque es bien que entiendan
que esta en su mano con esta diligençia moderar el rigor de la justiçia que
por sus culpas merecen. » Con esto bolvio el Havaqui a su Rey a quien
declarando el pensamiento de Don Juan amonesto en lo que vien lestava.
Mas Abenavo confuso con mil varios pensamientos no dandole credicto se
quedo perplexo. Pero Havaqui con ardid y mafia procuro reducir a los
demas moros y haviendolos provocado y insistido con Abenavo y hallandole
yndeterminable bolvio a Don Juan que le esperava y le informo del firme
intento que hallo en su gente para reduçirse y bolverse a Dios, de solo Abe-
navo dize que siente al contrario y que se esta neutral y aun obstinado por lo
quai dixo que el se profen'a a dalle muerte y que a ello pondria su vida como
catholico christiano y con esta resoluçion partio el mismo dia a effectuarlo pero
saliole al rebes porque mientras el trato esto con Don Juan, junto Abenavo
los suyos y dandoles a entender que Havaqui los vendfa por cierto ynterese,
los movio a indignarse con el y fue a tiempo que el llego y luego le prendieron
y haziendole cargos de traydor y que pretendia matar a su Rey y dandole ter-
mino muy brève para el descargo le quitaron la vida repitiendo en el ultimo
aliento la voz del credo. Fue muy sentida del campo christiano su muerte
aunque no fue ella parte para que la gente convertida dexase la reduçion comen-
çada antes por el rezelo desta culpa venian a priesa a desculparse vinieron a
montones con sus harmas pidiendo clemençia paz y remision y por evitar
ynconvenientes venideros como se yvan reduçiendo los yvan trasplantando en
Castilla. Abenavo desesperado y ostinado sin quererse reduçir y no hallando ya
lugar ni compania con quien estar seguro se metio y procuro esconder por
1. Cette réponse de Don Juan à El Habaqui doit être mise en parallèle avec
le commencement de celle que l'on trouve dans Hita (ch. xxv) : « Mucho me
huelgo, Habaqui, capitan valeroso, de conoceros personalmente, pues de fama
ya ténia de vos larga noticia y tambien de vuestras cosas ; «Je considère
comme certain que le manuscrit de Mcndo/a que possédait Hita contenait le
passage que seul donne aujourd'hui le manuscrit P.
ETUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA 149
algunos pocos soldados en algunas cuebas por aquella montana lo quai le duro
poco tiempo porque al fin fue muerto por un moro companero suyo y entre-
gado a los Christianos porque se acavo la Guerra quedando la tierra muy llana
y pacifica de enemigos parte muertos parte esparçidos en Castilla e ydos a
Berveria.
He querido tratar
Tel est ce fragment qui vient combler la lacune la plus sen-
sible et la plus inexplicable du texte de Mendoza tel que nous le
connaissions jusqu'ici. Je crois que l'on y reconnaîtra sans peine
le style des autres parties de l'œuvre et que ces lignes feront
bonne figure à côté de celles entre lesquelles elles s'intercaleront
désormais.
Je puis, au surplus, fournir une autre preuve, et des plus mar-
quantes, de leur authenticité. Juan Rufo Gutierrez, on l'a dit, a
composé les dix-huit premiers chants de son poème La Aus-
triada en ayant recours à un procédé des plus simples : il s'est
contenté de mettre en vers la plus grande partie du texte de
Mendoza. Il se servit, bien entendu, d'un manuscrit, puisque La
Austriada fut publiée en 1584, quarante-trois ans avant l'édition
de Tribaldos. Or le manuscrit dont usa Juan Rufo contenait le
fragment que j'ai retrouvé dans le manuscrit P, et c'est ce frag-
ment qui, lourdement allongé par endroits, compose la plus
grande partie du dix-huitième chant : il suffit de faire quelques
suppressions pour retrouver les phrases et jusqu'aux mots même
de Mendoza :
y recebido bien del varon fuerte,
su mensaje refiere desta suerte :
« Abdalla, sucesor de don Fernando,
cabeza de la gente rebelada,
a ti.caudillo delcristiano bando,
me envia â reportar una embajada ;
y es que, con atencion considerando
los darïos desta guerra porfiada,
halle que se podria su conflito
prorogar y extender en infinito,
Revue hispanique. 'O
150 R. FOULCHE-DELBOSC
sin otro premio mas que la sangrienta
venganza de ambas partes ofendidas,
pues que venciendo Esparïa, no acrecienta
las hazanas que has hecho esclarecidas,
ni si Abenabo su intencion sustenta,
espéra verse en tierras conocidas,
las cuales en tranquila paz posea ;
fin que de las batallas se desea.
Asi que, no promete recompensa
esta contienda igual à parte alguna,
con el crecido afan y dura ofensa
que causa el varïar de su fortuna ;
por tanto, pide à tu bondad inmensa
le mande concéder tregua oportuna,
para que se confirme por mi medio
lo que mandares y el coraun remedio.
Yo soy el Habaqui, que por ventura
mi nombre habrà llegado a tus oidos,
de pobres padres, no de fa ma escura,
vecinos de Guadix y alli nacidos ;
mas hame puesto Abdalla en tanta altura,
y héchome favores tan crecidos,
que si él tu hermano poderoso fuera,
yo Rui Gomez de Silva ser pudiera.
Todo lo cual mirado y su deseo,
y el gênerai de toda aquella gente,
debes, alto senor, sin mas rodeo
sernos amparo y defensor clémente ;
y donde no, la cruz es mi trofco
y el uno y trino Dios omnipotente,
por el cual mas me vale ser tu esclavo
que no lugarteniente de Abenabo. »
El de Austria, que atentisimo escuchaba
« Holgado lie, Habaqui, de conoceros,
como ya por la fama os conocia ;
ÉTUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA 1 5 I
y asi, primero pienso agradeceros
la fe que profesais sagrada y pia,
que resolverme para responderos
à vuestra principal mensajeria ;
Y asi, à ley de quien soy, os juro y digo
que, en cuanto desde hoy mas se os ofrecie.'e,
tendréis en mi seguro un buen amigo,
como vuestra constancia lo requière ;
mas las treguas y paces contradigo
a vos y à otro cualquier que las pidiere,
por no ser esos términos décentes
entre rev y vasallos delincuentes.
Pedir perdon y proponer la enmienda,
darse a merced sin condicion alguna,
y entienda cada cual que esta en su mano
moderar el rigor de la justicia
Con estos y otros altos documentos
El Habaqui volviô al campo agareno,
donde con admirables argumentos
à Abdalla amonestô lo justo y bueno ;
mas él, perplejo en vanos pensamientos,
ni de crédito dalle estaba ajeno,
Mas el ardid, la mafia y la prudencia
del cauto y senalado mensajero
redujo presto a la mejor sentencia
todo el comun morisco casi entero ;
El Habaqui, en sus tràtos verdaderos
habiendo algunos dias insistido,
i su alteza volviô que le esperaba
para la conclusion que se trazaba.
152 R. FOULCHE-DELBOSC
Despues de recebido cortesmente,
el morisco informé muy por extenso
del firme intento que hallô en su gente
para volverse a Dios piadoso, inmenso;
de solo Abdalla dice que mal siente,
y que se esta neutral, turbio y suspenso,
porque la obstinacion de su pecado
debe el sentido habelle reprobado.
Por lo cual dijo que él se proferia
à dalle muerte por su propria mano,
y que en ello su vida arriscaria,
como bueno y catôlico cristiano ;
y asi, partiô resuelto el mismo dia
à verse con el âspero tirano
y efetuar aquel herôieo hecho
Abenabo le manda hacer cargo
en término abreviado y tiempo estrecho ;
la vida, en fin, y pasos le acortaron,
y él acabô como fiel cristiano,
repitiendo en el ûltimo tormento
la voz del Credo con devoto aliento.
Fué del campo catôlico planida
del Habaqui la muerte no pensada ;
no por esto la gente convertida
dejô la reducion ya comenzada ;
antes, por el recelo desta culpa,
venian mas apriesa à dar disculpa.
Vinieron con sus armas à montones,
clemcncia, remision y paz pidiendo,
y por mas evitar las ocasiones
de los tiempos, que siempre van volviendo,
quedaron trasplantados a millares
lejos de los man'timos lugares.
ETUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA 153
Preguntarâme alguno por ventura
que fin al bravo Abdalla diô la suerte :
el, con pocos metido en la espesura,
en unas cuevas se hacia fuerte,
donde al fin de su extrema desventura
un alcaide morisco le diô muerte,
y el aima descendiô â pagar sus maies
en las eternas Hamas infernales.
Il serait difficile de pousser plus loin la précision dans la
transposition en vers d'un texte en prose.
La seconde question est plus délicate à résoudre : tout ce qu'a
publié Tribaldos a-t-il été écrit par Mendoza ? Au premier
abord, il peut sembler étrange de voir émettre une semblable
supposition : jusqu'à présent, personne ne s'en est avisé, et je
dois, avant tout, déclarer que je suis loin d'avoir une conviction
bien établie sur ce point. Je me bornerai à exposer quels
indices m'ont amené à douter et à pencher vers la négative.
Ce qui est bien fait pour étonner quiconque consulte les 18
manuscrits, aujourd'hui connus, de la Giierra de Granada, c'est
qu'aucun d'eux ne contient les cinq derniers paragraphes du
livre IV I , ceux qui figurent dans l'édition princeps sous les
numéros 16, 17, 18, 19 et 19 (le 19 est répété deux fois; il fau-
drait substituer 20 au dernier).
Le paragraphe 16 (JEsiava don Iuan en Granada ), nous
décrit la courte compagne du grand commandeur dans les Alpu-
xarras ; le texte ne portant pas, à partir de cet endroit, l'indication
d'une seule date, il est utile de les rétablir. Le grand comman-
1 . Ces paragraphes ne figuraient pas non plus dans le manuscrit de la Guerra
de Granada dont se servit Bleda, puisque celui-ci ayant à parler de la mort
d'Aben Abo, copia, à peu de chose près, le récit de Marmol.
154 R - FOULCHE-DELBOSC
deur, arrivé à Grenade le 10 août 1570, en repartit le 2 sep-
tembre; sa campagne dura deux mois. Il était de retour à
Grenade le 5 novembre. Cette expédition nous est décrite avec
beaucoup plus de détails par Marmol, qui en faisait partie, dans
les chapitres 11 et v du livre X de la Rebelion. Hita n'en parle
même pas.
Le paragraphe 17 (Luego que llegb a Granada ) nous informe
du départ de Don Juan d'Autriche, mais nous y relevons une
erreur bien singulière : « i hecho esto, don Iuan con el Duque i
el comendador mayor se partie» a Madrid ; i de alli a la armada de
la liga » Don Juan d'Autriche avait quitté Guadix le
10 novembre pour arriver le lendemain 1 1 à Grenade ; le duc de
Sesa y arriva le même jour (Marmol, X, vu). Don Juan passa dix-
neuf jours à Grenade : il la quitta définitivement le 30 novembre
pour retourner à Madrid. Marmol est ici bien précis : parlant de
Don Juan, il dit : « quedô en su lugar el Comendador mayor de
Castilla : y a treinta dias del mes de Noviembre partiô de la
ciudad de Granada para la corte de Su Magestad. » (Liv. X,
chap. vu.) Quant au grand commandeur, ce n'est qu'au mois de
février de l'année suivante qu'il devait quitter Grenade : « y por
Febrero de aquel aiîo (1571) se fue a la corte, donde llegô tam-
bien el Duque de Sesa, habiendo estado algunos dias en su
estado. » (X, vu in fine.) Il est au moins bizarre qu'habitant
Grenade, Mendoza nous signale comme s'étant effectué en même
temps, le départ de Don Juan, du duc de Sesa et du grand com-
mandeur, alors que ce dernier ne partit que près de trois mois
après le frère du roi.
Les trois derniers paragraphes (Entre ellos truxeron un Moro
à la fin du volume), sont consacrés au récit de la mort d'Aben
Abo. Ce récit est, à peu de chose près, conforme à celui, plus
détaillé, que nous en fait Marmol (X, vm).
De ce qu'aucun manuscrit ne contient les cinq derniers para-
graphes de l'édition de 1627, il faut donc conclure que, seul, le
manuscrit de Portalegre, dont se servit Tribaldos, possédait ce
ETUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA I 5 5
passage. L'explication de ce fait est peut-être plus simple qu'on
ne serait tenté de le croire : je ne serais nullement surpris que
ces cinq paragraphes ne fussent pas l'œuvre de Mendoza. J'incli-
nerais même à y voir la main de Portalegre.
Les deux ou trois manuscrits que Portalegre avait eus primi-
tivement entre les mains, s'ils différaient par le détail et s'ils
abondaient en fautes, dues vraisemblablement à des copistes, se
ressemblaient par les mêmes lacunes. On sait que, surpris de n'y
trouver, ni le récit du siège de Galera, ni celui de la mort de
Luis Quixada, Portalegre avait pris le parti d'y suppléer par une
addition qui tint lieu des trois passages retrouvés en 1628 par
Tribaldos dans un manuscrit du duc de Bejar et publiés par
Iriarte en 1769. Ces lacunes, nous l'avons dit, ne sont pas les
seules; nous avons signalé l'absence d'un récit des négociations
d'El Habaqui avec les Espagnols, passage retrouvé et publié plus
haut.
Si, comme je serais tenté de le croire, les manuscrits de Por-
talegre s'arrêtaient, eux aussi, à en varias figuras y se>nejan~as,
Portalegre dut être frappé du silence de Mendoza à l'égard de la
mort d'Aben Abo. De même que, pour avoir un récit du siège
de Galera et de la mort de Luis Quixada, il avait eu l'idée de
s'adresser à un soldat ayant fait la campagne, de même il dut
s'adresser, pour connaître avec quelques détails la fin d'Aben
Abo, à un témoin, sinon oculaire, du moins placé sur le théâtre
de ces événements ' : une fois documenté, il aurait rédigé son
récit en imitant le style de Mendoza. Le manuscrit ainsi complété
serait parvenu entre les mains de Tribaldos qui, peu clairvoyant,
n'aurait vu, ni où finissait le texte de Mendoza, ni où commen-
çait la nouvelle addition de Portalegre. Si l'on examine attenti-
1 . Si la fin de la Guerra de Granada n'est pas de Mendoza, elle a dû être
écrite (par Portalegre ou tout autre) sur les indications données par quelqu'un
qui se trouvait à Grenade à la fin de 1570 et au commencement de 1571 ; cer-
tains détails topographiques assez précis semblent l'indiquer.
I56 R. FOULCHÉ-DELBOSC
vement les paragraphes en question, on n'en trouvera pas la
valeur littéraire inférieure à celle de l'ensemble de la Guerra de
Granada. Le pastiche, si toutefois c'en est un, est habilement
fait, mais il n'y a à cela rien d'étonnant. La première addition qui
est, sans conteste, de Portalegre, nous a déjà montré qu'il savait,
à l'occasion, souder adroitement deux fragments de Mendoza.
On peut même, je le reconnais, approuver les éloges que lui
décerne Nicolas Antonio, qui le déclare vert purpuram auctoris
purpura atlexcns 1 , on purpuram hercle purpura attexens 2 .
Au surplus, savoir si la fin de la Guerra de Granada est due ou
non à Portalegre, est d'un intérêt secondaire; ce qu'il importe-
rait d'établir, c'est si elle est ou si elle n'est pas de Mendoza.
Les motifs qui me semblent pouvoir être invoqués à l'appui
d'une réponse négative sont les suivants :
i° Aucun des manuscrits que nous connaissons actuellement
ne donne cette fin de la Guerra.
2° Le paragraphe 17 contient un anachronisme inadmissible
chez quelqu'un qui, comme Mendoza, écrivait au moment même
des événements, ou seulement peu de mois après, et était, par
ses relations officielles, admirablement placé pour connaître l'ins-
tant exact du départ de personnages aussi importants que l'étaient
Don Juan d'Autriche, le duc de Sesa et le grand commandeur.
3 Le manuscrit P, que je tiens pour un des meilleurs, sinon
comme le meilleur de ceux que nous connaissons, nous donne
un récit de la mort d'Aben Abo qui ferait double emploi avec
celui contenu dans le passage contesté. Il est peu vraisemblable
que Mendoza ait raconté deux fois cet événement.
Le récit du manuscrit P est, il est vrai, autrement concis que
celui du texte imprimé, mais cette concision même semble
devoir lui faire accorder la préférence. Mendoza, ordinairement
très précis, ne serait pas entré dans le détail de la basse trahison
1. Article Didacus de Mendoza.
2. Article loannes de Silva.
ÉTUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA 157
qui devait aboutir à la mort du dernier chef des révoltés ', alors
surtout que la guerre était virtuellement finie depuis plus de cinq
mois. Aben Abo ne tenait plus la campagne, en effet; avec ses
derniers fidèles, il en était réduit à se dérober constamment aux
colonnes volantes lancées à sa poursuite : sa capture n'était plus
qu'une question de jours, et la trahison vint encore accélérer sa
mort.
Sans doute, à l'heure actuelle, après plus de trois siècles écou-
lés, tout esprit impartial éprouve une certaine admiration pour
cet infortuné musulman, qui avait donné, en plus d'une occasion,
mainte preuve d'un merveilleux courage. En février 1569, il s'était,
sans proférer une seule plainte, laissé infliger la plus épouvan-
table des tortures 2 pour protéger la fuite d'Aben Humeya et d'El
Zaguer. Proclamé roi, il sut mettre à profit les fautes de l'en-
1 . Je m'étonne pourtant de ne pas voir figurer, dans le récit du manuscrit P,
le nom du principal assassin : fue muerto por un moro companero suyo, dit le
manuscrit. Or, Mendoza n'ignorait pas que ce Maure s'appelait El Xeniz, il
nous le dit lui-même par avance, au paragraphe 7 du livre I : el Xeni\,
que despues vendiô i mata al Abeuabô su senor (f. 1 1 verso).
2. El capitan (Gaspar Maldonado) los mandô prender a todos, y preguntan-
doles, si sabian de Aben Umeya, ô del Zaguer, dixevon que no los habian
visto, y que los que alli estaban se habian reducido con la salvaguardia que
Aben Aboo ténia. Y como no pudiesen sacar de ellos otra cosa, conociendo que
no le decian verdad, hizo poner a tormento a Aben Aboo, mandandolo colgar
de los testiculos en la rama de un moral, que estaba a las espaldas de su casa ;
y teniendole colgado, que solamente se sompesaba con los calcahales de los
pies, viendo que negaba, llegô a él un ayrado soldado, y como por desden le
diô una coz, que le hizo dar un vayven en vago, y caer de golpe en el suelo,
quedando los testiculos y las vinzas colgadas de la rama del moral. No debiô
de ser tan pequeho el dolor, que dexâra de hacer perder el sentido a qualquier
hombre nacido en otra parte ; mas este barbaro, hijo de aspereza y frialdad
indomable, y menospreciador de la muerte, mostrando gran descuido en el
semblante, solamente abriô la boca para decir : « Por Dios que el Zaguer vive,
y yo muero », sin querer jamas declarar otra cosa. (Marmol, liv. V, ch. xxxiv)»
— C'est l'homme capable d'endurer un tel martyre que les Espagnols espéraient
amener à faire sa soumission !
I S 8 R. FOULCHÉ-DELBOSC
nemi, le harceler sans cesse, lui disputer pied à pied les ravins
de son éphémère royaume, le leurrer par des négociations en vue
du désarmement et de la soumission. Il luttait encore alors que
tout espoir de vaincre était irrémédiablement perdu, alors que
les Alpuxarras n'étaient plus qu'un désert. Il semble avoir tenu la
promesse qu'il faisait le I er août 1570 en présence de Hernan
Valle de Palacios envoyé par Don Juan d'Autriche pour s'infor-
mer du sort d'El Habaqui :
« Que Dios y el mundo sabian que no habia procurado ser Rey, y que los
Turcos y Moros le habian elegido y querido que lo fuese : que no habia impe-
dido ni iria a la mano a ninguno de los que se quisiesen reducir ; mas que
entendiese Don Juan de Austria, que habia de ser él el postrero. Que quando
no quedase otro sino él en la Alpuxarra con sola la camisa que ténia vestida,
estimaba mas vivir y morir Moro, que todas quantas mercedes el Rey Felipe le
podia hacer ; y que fuese cierto, que en ningun tiempo, ni por ninguna manera,
se pondria en su poder. Y quando la necesidad lo apretase, se meteria en una
cueva que ténia proveida de agua y bastimentos para seis anos : durante los
quales no le faltaria una barca en que pasarse a Berberia ». »
Mais pour un contemporain de la guerre, pour un Espagnol
surtout, même pour un Espagnol comme Mendoza, les derniers
jours de ce roitelet sont dénués de toute grandeur, comme ils
sont dénués de toute importance.
Pedraza, dans son Historia ecîesiastica de Granada 2 raconte assez
longuement la guerre, mais ne parle même pas de la mort d'Aben
Abo. Van der Hammen, dans son livre sur Don Juan d'Autriche,
1. Marmol, liv. IX, chap. xm.
2. Historia ecîesiastica de Granada por Don Francisco Vermnde\ tic Pedraza.
Granada 1638 ,in-fol. ;àla fin : /:'// Granada. En la hnprcnta Real. Ano de 1639.
Pedraza écourte singulièrement le récit de la fm de la guerre : Le chapitre
104 (marqué par erreur c.vi.) est intitulé Fin de la Guerra y redneion de los
Moriscos rébeldes. Il décrit les négociations qui amenèrent l'entrevue de Don
|u.m et de El Habaqui, et cette entrevue elle-même, mais semble la considérer
Somme mettant tin à toute opération. Il n'est pas dit un mot de la mort d'Aben
Abo. Le ebapitre 105 parle aussitôt d'un voyage de l'archevêque de Grenade,
don Pedro Guerrero, aux Alpuxarras, en août 1575.
ETUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA 159
publié à Madrid en 1627, la même année que l'édition princeps
de Mendoza, la raconte très brièvement '. Il en est de même du
Murcien Gines Perez de Hita, dont la relation, nous l'avons dit,
fut publiée en 1604.
Le récit de Hita nous présente toutefois deux particularités
assez intéressantes. Aben Abo, selon lui (chap. xxv), aurait été
pris vivant, et c'est pendant qu'on le conduisait à Grenade qu'il
se serait intentionnellement laissé tomber dans un précipice :
1. Hallandose tan apretado Abenaboo, resoluio esconderse en vna cueua que
auia junto al rio de Mecina, camino de Iator, con su muger, dos hijas, y
muchas personas. Supolo D. Ivan, y embiô a combatirla a Francisco de
Molina, cô buen numéro de arcabuceros. Resistieronse al principio bien los
rebeldes ; y viendo auia dificultad en el ganarla, los dieron humo, con que se
entregaron. Prendiolos a todos, sino fue a Abenaboo, que se saluo por vn agu-
jero, aùque para pocos dias. Estaua ofendido dèl Gonçalo el Seniz, vno de los
que auià ido a Argel a solicitar el socorro, hôbre determinado y dispuesto para
qualquiera maldad. Este con el ayuda de otros viendole solo, dando color a su
vengança, con la quexa de que reusaua los conciertos, le matô, y se fue con
la cabeça a Granada al Présidente ; y el Rei le dio cien mil marauedis de por
vida, y perdonô. Fuese a viuir a Valladolid, pero despues de algunos anos
murio descuartizado por salteador en Guadalajara por orden del Licenciado
Lieuana, Comissario contra salteadores (Don Juan de Austria, Libro II,
f. 123 verso, ligne 9). — C'est vers le 15 septembre 1570 que se place l'épisode
de la grotte de Berchul La femme et les deux filles d'Aben Abo y moururent.
Le pocos dias est insuffisant, puisque six mois se passèrent avant la mort d'Aben
Abo (15 mars 157 1).
Dans son Don Felipe el Prudente publié à Madrid en 1625, Van der Hammen
raconte le fait en quatre lignes : « con la muerte de Abenaboo cessô todo.
Matole el Seniz, auièdose librado en Mecina de los Christianos salièdo por vn
agujero, y leuole a Granada al Présidente. » (f. 42).
Dans les deux ouvrages de Van der Hammen (Don Felipe el Prudente et Don
Juan de Austria) écrits tous deux avant la publication de l'édition de Tribaldos
(les approbations de Don Juan de Austria sont datées de 1625), on trouve des
passages entiers de la Guerra de Granada de Mendoza. Van der Hammen n'in-
dique jamais ses références, mais il a eu sûrement entre les mains soit un
manuscrit de Mendoza, soit tout simplement la Coronica de Bleda dans
laquelle figure, comme on sait, la plus grande partie de la Guerra de Granada.
Le fait, au surplus, est ici sans grande importance.
l60 R. FOULCHÈ-DELBOSC
Finalmente, todo el reino se redujo y rindiô las armas ; solamente quedaba
Avenabô con unos quinientos monfis, pues no le seguia otra gente ; y asi
salian de Granada à buscarle para prenderle ô matarle ; y con efecto, toda su
gente fue muerta y destrozada, y al fin él tambien hallado y preso ; y llevân-
dole à Granada montado en una mula, de proposito se dejô caer de unas perlas
abajo, y vino a dar en una rambla muy honda hecho pedazos. Alli le cortaron
la cabeza y la llevaron â Granada, do esta en una jaula de hierro en la puerta
del Rastro, con un letrero encima que hoy parece, y dice desta suerte :
Aquesta cabeza es
del grande perro Avenabo,
que con su muerte diô cabo
i la guerra é interés.
Un fait sur lequel sont d'accord Marmol, Hita et l'auteur de la
fin de la Guerra de Granada, c'est que la tête d'Aben Abo fut pla-
cée au-dessus de la porte du Rastro :
« y la cabeça fue puesta en una jaula de hierro sobre el arco de la puerta del
rastro, que sale al camino de las Alpuxarras, donde hoy esta. » (Marmol.)
« la cabeça pusieron encima de la puerta de la ciudad, la que dizen puerta
del rastro, colgada de una escarpia a la parte de dentro, i encima una jaula de
palo i un retulo en ella que dezia :
Esta es la cabeça del traidor de abenabo, nadie la qvite so pena de
mverte. » (Guerra de Granada.)
Mais il y a divergence sur la question de l'inscription ; Mar-
mol, on l'a vu, n'en mentionne aucune : il est, d'ordinaire, si
précis, et s'arrête si complaisamment au moindre détail, que son
silence a lieu d'étonner. Y avait-il ou n'y avait-il pas d'inscrip-
tion ? La chose, en soi, importerait peu et ne mériterait pas que
l'on s'y arrêtât longtemps, si l'on n'espérait en tirer quelque éclair-
cissement pour l'étude de la fin de la Guerra de Granada. Ce qui
semblerait indiquer que l'inscription existait, c'est qu'elle ne nous
est pas connue par ce seul récit, mais aussi par l'ouvrage de Hita.
Sans doute, celle qu'il donne est fantaisiste l : mais n'y faut-il
i. Hita transforme même, pour les besoins du vers, le mot oxyton Aben
Abo en un paroxyton Abat Abo.
ÉTUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA l6l
pas voir un rifacimento de quelque letrero véritable? La première
moitié est, au surplus, à peu près la même dans les deux textes.
*
* *
Nous n'avons, actuellement, aucune autre donnée qui puisse
nous permettre de nous prononcer, avec quelque sécurité, sur
l'authenticité ou la non authenticité de la fin de la Guerra de
Granada : on est toujours en droit de supposer que la découverte
de nouveaux manuscrits viendrait apporter quelques éclaircisse-
ments, mais je doute que l'on en trouve jamais un seul qui con-
tienne les passages discutés. Il faudrait donc s'en tenir, comme
je l'ai fait dans cette étude, à un texte rétabli d'après le manuscrit
P, et considérer comme apocryphe la fin donnée par Tribaldos.
APPENDICE
LES MANUSCRITS
Nous connaissons aujourd'hui dix-huit manuscrits de la Guena de Granada.
Deux se trouvent à Paris, un à l'Escorial, un à Séville, dix à Madrid, un à
Salamanque, un à Murcie ; enfin deux m'appartiennent.
On peut les diviser en trois familles.
La première famille comprend cinq manuscrits (G, K, N, R, S). Chacun d'eux
est, sauf de nombreuses variantes à divers endroits, conforme à l'édition de
1627, mais ne va pas au-delà de la phrase : « Tornô el rey i Côrdoba por Jaen
y por Ubeda y Baeza, remitiendo la conclusion de las cortes para Madrid donde
llego. » Aucun de ces manuscrits ne parle donc des opérations militaires de la
Sierra de Ronda, récit qui occupe environ 600 lignes dans les autres manuscrits,
ni de la mort d'Aben Abo. Il est à remarquer que certains manuscrits des deux
autres familles (mss. J, T) portent à cet endroit l'indication : « Aqui acaban
IÔ2 R. FOULCHÉ-DELBOSC
muchos originales. » Ces deux manuscrits ont peut-être été, du reste, copiés sur
un même original. Il n'est pas inutile de faire remarquer cette première divi-
sion ; le récit de la guerre de Ronda peut être, en effet, considéré comme une
œuvre presque distincte de la Gnerra de Granada ; c'est ainsi que les manuscrits
B et F portent à cet endroit un titre spécial : « La jornada y suçesso de la guerra
de Ronda. »
La deuxième famille comprend onze manuscrits (A, B, C, D, E, F, H, J, L,
M, T). Chacun d'eux est, sauf de nombreuses variantes à divers endroits, con-
forme à l'édition de 1627, mais ne va pas au-delà de la phrase : « como se
ven en el alto las nubes formadas en varias figuras y semejanzas. » Aucun de
ces manuscrits ne parle donc de la mort d'Aben Abo, récit qui, dans l'édition
de 1627 et les éditions postérieures, occupe près de 300 lignes. Le manuscrit A
possède, comme je l'ai dit, quelques passages inédits dans le livre IV. Les manu-
scrits A, D, E, L semblent provenir d'une même source; tous les quatre, en
effet, ont le livre IV marqué III par erreur.
La troisième famille ne comprend que deux manuscrits, les manuscrits O et
P. Ce sont les seuls qui possèdent les trois passages retrouvés par Yriarte au
siècle dernier, passages qui avaient été remplacés dans les éditions par un dis-
cours du comte de Portalegre. Ils ne s'étendent pas plus loin que les manuscrits
de la deuxième famille, mais j'ai découvert dans le manuscrit P le fragment
publié plus haut ; c'est le récit des négociations d'El Habaqui avec les Espagnols.
LISTE DES DIX-HUIT MANUSCRITS
A. Paris, Bibl. nat., mss. esp n° 180 — 273/195 millim. — 110 feuillets —
1618-1619 — 2 e famille.
Au f. 1 : Setuval Ano 16 18, ij Julij ; au f. 108 verso, finis, Anno 16 19,
28 Januarij. Même division en livres et en paragraphes que dans l'édition de
1627 : le livre IV est marqué III par erreur. Contient l'introduction et l'addi-
tion de Portalegre.
*
* *
B. Paris, Bibl. nat., mss. esp. n° 181 — 298/208 millim. — 104 feuillets —
xvii 1 -' siècle — 2 e famille.
A un titre inexact : Comentarios delaguerra de Granada échos por don Diego de
Zuniga. Au f. 92, titre spécial : La jornada y suceso de la guerra de Ronda.
C. Escorial. Catal. Haencl, col. 961 — 284/180 millim. — 162 feuillets à
encadrement rou^e. Ecriture très nette. Fin xvn e siècle. — 2^ famille.
ÉTUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA 163
Titre : Historia de la Guerra de Granada que escriviô Don Diego Hurtado de
Mendoça. Les premiers feuillets seuls sont divisés en paragraphes.
*
* *
D. Séville. Ancienne Bibliothèque de San Acacio. Catal. Haenel, col. 982.
Cote actuelle, 332-32 — 148/203 millim. — 23ofeuillets — 1621 — 2 e famille.
Deux notes, ajoutées au xvm e siècle, indiquent, d'une part, les éditions de
Tribaldos et de Mayans, d'autre part, la publication de la Biblioleca Griega
Matritense d'Iriarte. La fin de la Guerra a été copiée au xvm e siècle sur une
édition. Le livre IV est marqué III par erreur.
*
* *
E. Madrid, Bibl. nac, V. 229, couverture parchemin — 300/206 millim. —
123 feuillets — 1 618-16 19 — 2 e famille.
Au f. 1 : Sehibal ano de 1618 — 13 dejunio; au f. 123 verso : finis anno
i6iç. Contient l'introduction et l'addition de Portalegre. Même division en
livres et en paragraphes que dans l'édition de 1627. Le livre IV est marqué III
par erreur.
* *
F. Madrid, Bibl. nac. G. 95, reliure veau — 300/220 millim. — 168 feuillets.
— xvn e siècle. — 2 e famille.
Sur le premier feuillet de garde : Este livro se intitula Flor de Verdades Catho-
licas ; escrilnole Iuan Arias quien di%e averlo allado en todo lo que rejiere eu este livra.
Plus bas, d'une écriture plus moderne : Es la guerra de los moriscos de Granada
por Mendoça. Le nom du copiste Juan Arias reparaît au bas des feuillets 1 et 12,
au feuillet 60 verso et à la dernière feuille collée à la reliure. Le feuillet 148
est suivi de 3 pages blanches ; sur la 3 e , titre spécial : La jornada y suçesso Je la
guerra de rronda. Même division en paragraphes que dans l'édition de 1627,
mais la division en livres n'existe pas. Des noms propres sont fréquemment
laissés en blanc.
*
* *
G. Madrid, Bibl. nac, G. 99 — 288/208 millim. — 155 feuillets —
xvn e siècle — i re famille.
(Le G. 99 contient deux manuscrits de la Guerra de Granada, les manuscrits
G et H de la présente liste.)
Titre (sur le feuillet de garde) : Discursos de don diego de mendoça ambajor Jel
5 r rey don felipe 2 : en Roma eu la guerra del lebantamiento de los moriscos dél
reyno de granada. — Au f. 1 : De la Guerra de Granada. Autor D n Diego de
Mendoça Embajador de Phelipe 2° eu Routa, tiene ij; folios.
164 R. FOULCHÉ-DELBOSC
H. Madrid, Bibl. nac, G. 99 — 288/208 millim. — 119 feuillets —
xvii e siècle — 2 e famille.
Titre : De la guerra de granada.
*
* *
J. Madrid, Bibl. nac, G. 106 — 320/220 millim. — 102 feuillets —
XVII e siècle — 2 e famille.
Au f. 90, après la phrase .....para Madrid donde llegà, qui est la dernière
des manuscrits de la i« famille, on lit la mention : Âqui acaban muchos origi-
nales.
* *
K. Madrid, Bibl. nac, T. 216 — 278/205 millim. — 92 feuillets —
XVII e siècle — i re famille.
Titre : De la Guerra de Granada. Sans nom d'auteur.
* *
L. Madrid, Bibl. nac, V. 8 — 300/215 millim. — 127 feuillets à double
encadrement — xvn e siècle — 2 e famille.
Titre : Historia da Rebilliào de granada de Dom Diego de Mendoça. — Au
f. 2 : Historia de Rebillaô de Granada ; au-dessous une signature à peu près
illisible : D n Fran° Puis : Prologo de Don diego de mendoça a la ystoria
de la guerra de granada que uvo por el levantamiento que los moriscos de aquel Reyno
ycieron ai'w de mil y quinientos y cinquenta (sic) y nueve anos. — Au f. 3 : Ysto-
ria de la guerra de granada de don diego de mendoça. — Même division en livres
et en paragraphes que dans l'édition de 1627. Le livre IV est marqué III par
erreur.
*
M. Madrid, Bibl. nac, G. 128, reliure veau — 285/200 millim. — 131
feuillets — xvn e siècle — 2 e famille.
Sur un feuillet de garde : Faltan en este Ms. los folios 19, 20, 21, 32 y 96. La
même note indique des interversions de feuillets. Titre : De la guerra de gra-
nada. Sans nom d'auteur. Les deux derniers feuillets contiennent une table
alphabétique des principaux noms, lieux et faits de l'ouvrage.
*
* *
N. Madrid, Bibl. nac, G. 208 — 210/150 millim. — 137 feuillets —
xvii 1 -- siècle. — i re famille.
(Le G 208 contient deux manuscrits de la Guerra de Granada. les manuscrits
N et O de la présente liste. Il contient, en outre, entre les deux manuscrits de
Mendoza : Invencion DelSacro Monte de Granada. Con las vidas de los Sanctos que
m il fueron marliriçados. l'or Juan Herreros Je Almansa y otras cosas que veras a
la niella. 50 feuillets.)
ÉTUDE SUR LA GUERRA DE GRANADA 165
Titre : Historia de la Guerra y Reveliou de Granada. La guerra de granada eu
tiempo de Ph s 2° tiene 13 y folios.
*
* *
O. Madrid, Bibl. nac, G. 208 — 210/150 millim. — 151 feuillets —
xvn e siècle — 3 e famille.
Titre : {Prologo De) La Historia de la Guerra y levantamiento De los Moriscos
del Reyno de Granada.
*
* *
P. Salamanque, Bibl. de la Universidad. Est. 3, Caj. 4, Nûm. 16 —
210/155 millim. — 205 feuillets — xvn e siècle — ■ 3 e famille.
Titre : Historia de la guerra y levantamiento de los Moriscos del Reyno de Gra-
nada por don Diego de Mendoça enibaxador por su M d en Roma.
R. Murcie, Bibl. provinciale. — 296/209 millim. — 101 feuillets — fin
xvn e siècle — i re famille.
Titre : La Guerra de Granada por Don Diego de Mendoça.
S. M'appartient — 251/189 millim. — 159 feuillets — xvn e siècle — i re
famille, mais contient en outre une trentaine de lignes semblables à l'édition
de 1627.
Titre : De la Guerra de Granada (Prologo') Por don diego de Mendoça.
T. M'appartient. — 298/210 millim. — 67 feuillets — xvn e siècle — 2«
famille.
Titre : (Prologo) De don diego de mendoça. En la historia de granada.
Les dix-huit manuscrits présentent à peu près à chaque page des diffé-
rences, dont quelques-unes assez notables, avec le texte de l'édition de 1627.
R. Foulché-Delbosc.
Revue hispanique.
POESIAS INÉDITAS
DE
DON JUAN MELÉNDEZ VALDÉS
Les poésies inédites de Meléndez Valdés que l'on trouvera ci-après proviennent de
deux sources. L'epitre à Jovellanos se trouvait parmi les papiers de Cadalso ', le reste
faisait partie du recueil 516 de la Bibliothèque de Salvà-.
R. Foulché-Delbosc.
1. Ces papiers contenaient également les poésies de Moratin que j'ai publiées en 1892.
(Poesias inéditasdeD. Nicolas Fernândez de Moratin publicadas por R. Foulché-Delbosc.
Madrid : Murillo 1802, pet. in-8.)
2. C'est dans ce même recueil que se trouvait le manuscrit de Los Besos d* Amor que
j'ai publiés dans la Revue Hispanique (mars 1894, pp. 73 et suiv.).
P0ES1AS INÉDITAS I 67
AL SEXOR DON GASPAR DE JOYE-LLANOS,
OIDOR EN SEVILLA '.
SOBRE MI AMOR.
SILVA POÉTICA EN VERSO BLANCO ENDECASILABO
Quamquam animus meminisse horret, lucttique refugit,
Incipiam. ..
Virg. jEneîd. II. ver. 12.
Tiempo fué, gran Jovino, que amarrado
llevé del amor crudo la cadena,
la pesada cadena a cuyos golpes
el anima mezquina tiembla agora :
teniendo por eterna bienandanza
la gloria celestial, el rostro bello,
el mirar amoroso, y riso afable,
la delicada vôz, y blanda queja
de aquella pura luz j ay ! ay ! que temo,
10 y aun tiembla el corazon al acordarme
inundada la faz de un largo lloro.
i Ah malogrado tiempo, y quien pudiera
tomar atras tu rueda voladora !
j oh ninez ! oh cuidados de los hombres !
j oh ciega voluntad ! No fuera dado
en la tierna nihez a el aima débil
el augusto consejo, y clara lumbre
que goza en vano la vejez cansada :
y el nombre a imagen de su Dios formado
20 al vicio, y al error en el principio
mancipado sera por su lîaqueza.
Yo en la primera edad inocentillo,
quando apenas, seiïor, el lento curso
1. Cette longue épître à Jovellanos est peut-être de 1779 : c'est du moins ce que l'on
peut inférer du trait final victus cum mettre Cupido que l'on retrouve dans une lettre de
Mclcndez à Jovellanos, datée de Salamanque 27 avril 1779 et publiée en 1871 par
D. Leopoldo Augusto de Cueto (Foetus liricos del siglo XVIII, tomo II, p. 84, dans la
Biblioteca de Rivadeneyra) :
...No me juzgue V. S. por ella (una bella niiia) ya preso ; desde el ensueno de las
Sagas desperté enteramente, y puedo decir Victus cum matre Cupido.
l68 JUAN' MELÉNDEZ VALDES
quince vezes contara al sol dorado
del Aries à los Peces, ni rompiera
la delicada barba el blando bozo,
ya de virtud sécréta conmovido,
que sembrô Diva en mi inocente seno
maldije del amor, del fuego impuro
30 del lazo inévitable, do enredado
un mozo malhadado vi abrasarse.
j Ay si el fatal exemplo me salvara,
y en el ageno dano docto fuera !
Fué mi sencilla diversion entonces
en dulce sombra por el bosque ameno
cantar desocupado algunas veces,
seguir las artes de la casta Diosa,
la casa freqùentando, 6 mas humilde
disponer â las aves blanda liga,
40 sus nidos inquirir, y tantos fuegos
do la aima paz y la inocencia asisten
à una con el candor en santo lazo.
Tiempo voluble, y quai la sombra vana
ô alegre en sueiîo que la mente burla,
ni luego déjà de su bien seiïales.
Porque subito, ay Dios ! senti encenderse
mi blando corazon con una llama
de regalado fuego, que en los huesos
difundiô su veneno tan ligera,
50 quai suele discurrir por el otono
ardiente exalacion en noche obscura.
Difundiérala amor, que descendiendo
con jiro arrebatado dende el cielo
por el aire vacio, à do volando
somete cielo y tierra en mandar crudo,
de la dorada Venus sostenido,
indignado de mi, lanzô una flécha
de inestinguible ardor, que en las entranas
subito levantô tan grandes fuegos,
60 y huyô volando con maligna risa
d contar i su madré cl fatal hecho.
Yo di al punto en temblar despavorido
con la torpe vision la sangre helada,
ignorando el misterio, y hacia el cielo
POESIAS 1NEDITAS
169
las palmas levantando en taies voces,
medroso y triste prorumpi llorando.
« Acorre, acorre, o Dios, y el fuego apaga
« que el misérable corazon dévora,
o y el funesto tropel, y el alboroto
70 « levantado apacigua, si merece
« favor el inocente perssguido,
« y mis himnos sonantes te cantaron :
« dame amparo, senor, y poderoso confunde,
« confunde el enemigo. » En este punto
santa virtud del cielo descendida
con agua saludable templô el fuego,
y liaciéndome mas fuerte « A la batalla,
« intrépido, me dijo, te apercibe,
« y oponte valeroso al gran contrario.
80 « j Ay de ti misérable ! si cayeres,
« que càrceles te quedan, y que lloros,
« que miseras lamentos, y cadenas,
« y que mezquinos ayes ! » Cesô y fué c e
volando al cielo con serenas alas,
y dejando tras si de clara lumbre
un rastro celestial, y perfumado
de etéreo odor de liquida ambrosia.
Yo la miraba con atentos ojos
y volviendo en el ânimo estas cosas,
90 sintiendo ya mi corazon tranquilo
y una nueva virtud que me esforzaba
contra el amor, y su maligno fuego :
pero ; oh ciega natura ! y misérable
inclinacion del hombre. à las virtudes
rebelde marmol, y â los vicios cera !
Desde esta fatal hora que del cuento
de los anos borrarse fuera digna,
en negro olvido envuelta, mas ufano
trataba va de amor, ni jamas pude
100 atizar en el pecho el odio antiguo
malgrado mis esfuerzos, ni à su canto
de mdgico poder, y létal furia
la oreja misérable ya negaba ;
mas antes sosegado y con faz leda
en platicas de amor me complacia
1-0 JUAN MELENDEZ VALDES
y la queja, el suspiro, y largo lloro,
el ruego humilde, y el penar contino,
y a vezes la alta gloria, y bien sin qùento
del anima infeliz, que en lamentable
110 misera esclavitud adormescida,
à un recîproco amor vive ayuntada
envidiaba j mezquino ! y ya quisiera
gozar yo en torno tan falaces bienes.
? Quantas veces tambien el blando fuego
excitaba leyendo ? y que no pudo
el ardiente Tibulo, y el divino
Propercio con sus numéros sonoros ?
ô el que llorô del pajaro la muerte
delicias de su Lesbia, que mudable
120 por otros le dejara tan liviana?
ni que pccho feroz no ablandarian
el deheado Ovidio, y tierno Laso,
grande nombre del Tajo, do aun resuenan
el cantar misérable del Salicio,
y los suspiros, y el amor de Albanio ?
j Ay numéros divinos ! quai mi seno
llenasteis de letifera ponzoiïa !
v j ay ! ay de mf infeliz ! quien recel ara
de tal dulzura tan amargo acibar,
130 ni peste tan fatal! en este punto
ya sujeto al amor sin yo sentirlo,
llevaba la cadena, y las doradas
esposas en las manos, y esta fuera
de mi ciego dolor la causa prima :
porque hallado en el mal, y alétargado
del veneno mprtal en largo olvido
comencé de go/.arme relajada
la antigua propension al noble estudio.
Ninguno de repente malo fuera
140 y ;i par de la virtud tiene sus grados
el vicio, y el error, ni pasar pudo
subito a la maldad el inocente,
que un mal otro mal llama. Conducido
yo a la gran corte del Monarcha hispano,
do las Magas habitan, que trasforman
(quai escribe la fabula de Circe)
POESIAS INEDITAS IJl
con mâgico poder en aparîencias
de animales los nombres misérables,
v en formas tristes de sangrientas fieras,
1 50 malgrado mi querer, y los esfuerzos
de la virtud antigua de dar hube
cl postrimero paso en mi ruina :
alli acabé de hacerme a la dorada
carcel, y avezarme al error ciego,
porque alli plugo a Venus que morase
todo el Reyno de amor, y la hermosura
j oh fuerza del exemplo ! a quai no arrastra
la freqùencia del mal, ni huyô prudente
del vicio en la costumbre autorizado !
160 Cabe un ameno valle de odorosa
yerba y flores pintado à do conduce
un camino apacible, con la inmensa
mudiedumbre de gentes y de pueblos,
que van y vienen en tropel confuso,
quai suelen en verano las abejas
en largo enxambre acometer las flores,
hubo un antiguo bosque venerado
con larga religion, y santo miedo
de la enganada gente, las encinas
170 la copa alzada al cielo no permiten
ver del dorado Febo la luz clara.
Parece que los Dioses habitaron
alli quando los hombres aun no fueran
salidos de la tierra, tan antigua
veneracion le ocupa. Conducido
yo de mano invisible bien adentro
fuime alejando en él por una senda,
que â mil lados revuelta en error ciego
envuelve la salida, y de otra parte
180 sereno arroyo de sonante curso
la corta y cierra con su vuelta el bosque.
Aqui beben las gentes largo olvido
de la virtud, y el bien, y en torpe sueno
duermen de ciego amor aletargadas;
la orilla es venenosa, y el deleite,
el infâme deleite el mas horrible
de los humanos maies esparcido
I72 JUAN MELENDEZ VALDES
alli con larga mano, luego causa
la blanda ociosidad, y la pereza.
190 Tal es del Dios alado el ciego imperio,
tal el sagrado bosque, que conduce
a su dorado Alcàzar, j quantas cosas
viera yo alli, senor ! oh si contarlas
dignamente pudiese ! Blanda Musa,
dame tu voz, y tu divino fuego,
mayores cosas canto, mayor orden
empiezo desde agora, a ti se deba
el levantado verso, y voz sonora.
Vulcano, segun cuentan, el sumptuoso
200 Palacio fabricara quando quiso
al thâlamo llegar de la aima Venus :
los entallados jaspes, las columnas
de piedras preciosisimas demuestran
el divino poder, y las paredes
de esmeralda y chrisôlito altamente
reverberan al sol en lumbre clara,
venciendo â la materia, y ricos doues
el arte y docta mano, ni jardines
taies hubo en Thesalia, ô tan florido
210 fué el valle de Dodona, ni las selvas
de los Elyseos Campos que los Dioses
plantaron de propôsito, y colmaron
de primavera eterna y manso viento.
Aqui agrada esperar i la aima Venus
del cristalino Olimpo descendida
la triunfal pompa del amor su hijo,
quando hace ostentacion el gran Tirano
del crudo imperio en que los hombres manda
él en carro de fuego, y por seis potros
220 de la raza apolînea conducido,
quai en la clara Roma un tiempo fueron
los victoriosos Cônsules llevando
tras si un numéro inmenso de varones
y los vencidos Reyes en cadena ;
tambien Uevaba en torno larga tropa
de mczquinos mortales, que en ley cruda
su mandar obeJecen misérables.
Alli vieras los Reyes victoriosos
POESIAS 1NÉDITAS 173
acâ un tiempo en la tierra ser vencidos,
230 y los claros varones, que inundaron
el orbe de su fama ir como siervos
al cuello la cadena, y bajo el rostro.
Hercules, y Perseo en pos de Achiles
con el grande Agamenon por caudillos
van del numéro inmenso, sin que faite
de divinos ingenios luenga copia.
A todos vence amor, ninguno pudo
de sus pesadas redes sacudirse.
En blando fuego por su dulce Laura
240 ardiendo va el Petrarcha, y el divino
Orpheo por Erudice aun osando
tornarla con sus cantos del Averno,
luego en pos de Propercio y mi Catulo,
el amador de Nemesis, y Délia
y el tnfeliz Ovidio acompanaban
en faz llorosa el apolïneo coro ;
jcomo el numéro inmenso contar puede
mi voz de los que siguen, quai si pinta
primavera la tierra de mil flores ?
2 >o ; ni la alta Magestad con que los nuestros
el culto Herrera, y el ardiente Laso,
y el claro Figueroa, y tantos otros,
tras el divino Lope en talar ropa
a par cenidos de laurel los siguen?
Amor desde su carro à todos manda
y enciende mas y mas en voraz fuego
porque el pesado yugo no sacudan
con que su cuello y libertad humilia
i quai linaje de mal, ay, amor crudo
260 à tus esclavos mfseros no causan !
Quando hacia mi tornando al verme aun libre
y casi exempto de su ardor el pecho,
indignado en el rostro tornô â hablarme
con taies voces de furor henchidas,
que temblô al empezar la esquadra toda.
« ; Y aun mîsero, prétendes resistirte
« del poder del amor ! y aun en tu pecho
« el dardo agudo que lancé no pudo
« prender su cruda llama ! escapar quieres
174 J UAX MELEXDEZ VALDES
270 « del duro cautiverio, y la cadena !
« no soy, no soy yo amor quien en mil formas
« de Olimpo hace bajar los altos Dioses?
« ô algun mortal con resistencia inûtil
« de mi yugo librarse jamas puede?
« Presto, infeliz, seras de entre mis siervos,
« y sentiras mis penas, y quai arde
« tu empedernido pecho j que castigos,
« duros castigos de mi fuerte mano
« te quedan que llevar ! no me enternecen
280 « tus làgrimas futuras, no tus ruegos
« ni el crudo lamentar ; por luengos dias
« arde y padece misero ». Y cesanJo,
torna a seguir con la dorada pompa
por mil regiones, que contar no puedo,
al Reyno antiguo de su dulce madré.
Hermosîsima Virgen en pos de ella
en este punto de otra parte asoma,
de las gracias seguida, y de la turba
de lascivos amores pequenuelos.
290 1 bastaré yo a pintarla? ô ser humano
puede alabar su angélica belleza ?
Enlazado el cabello ô libre al viento,
oscuro déjà al Sol en luengos hilos,
los ojos de paloma, y con tal gracia
que el m.îs exempto corazon humillan,
un partido rubi la dulce boca
de do la blanda persuasion discurre
con la esplendente tûnica que muestra
el mds que humano ser del alto dueno.
300 Tal en los cinthios valles va Diana
seguida de mil ninfas descollando
quai palma sobre todas en belleza,
y del ebûrneo lado el carcax pende,
el dorado carcax a cuyos tiros
rinde su ligereza el alto ciervo.
Yo que a tanta beldad hasta aquel punto
jamas mi débil vista alzado hubiera,
absorto de su gracia, y del decoro
del rostro, y del augusto senorio,
310 hincada la rodilla por très veces
POESIAS INEDITAS I75
probe d adorarla, y lajuzgué por Diosa.
Quando un ardor secreto se fué entrando
de subito por medio de mis huesos
que todo me mudara, y en silencio
discurriendo la llama, el aima Venus
con la beldad brillante, v blandas gracias
que entre los Dioses en Olimpo ostenta,
asî tomô la voz con dulce risa
capaz de seducir al almo Jove :
320 « El Revno del amor, y el feliz lazo
« de la vinud, y angélica hermosura
« goza, joven dichoso, y para siempre
« en mis delicias anegado vive :
« que una llama os abrase, y mis placeres
c< juntos bebais en una misma copa,
« y en ôsculos iguales vuestros labios
t« las amorosas tôrtolas imiten,
« y que Cupido del Olimpo baje
« con blanda risa, y ademan travieso
330 « d reposar en medio de vosotros.
« j O très veces feliz al que los Dioses
« tal suerte concedieron, y el que puede
« en mi gremio gozar de un dulce sueno !
Enganosa dijera, y de la mano
à entrambos nos uniô con blanda fuerza,
y al cielo torna respirando amores.
j Quien a Venus jamas resistir pudo,
o de su dulce voz no fué vencido !
que hiciera yo infeliz ! La sangre helada,
340 quedé como en la noche el caminantc,
que viô el agudo rayo desatado
de negra nube deshacer el roble,
pasmado de temor j que acerbas penas
la vision deliciosa me costara !
quien fuera a bien contarlas poderoso !
Aun el ânimo agora se horroriza
con la cruda memoria, v los temores,
y las cansadas ldgrimas que un tiempo
del anigido corazon lanzaba.
3)0 Errores, suenos, y dolor de muerte,
miedo, vergùenza, y suspirar contino,
I76 JUAN MELÉNDEZ VALDES
confusa ceguedad, y largos ayes
de agudos celos, y esperanza vana,
vergonzoso sufrir, y en mil marieras
pesada servidumbre, taies fueron
de mi amor loco los acerbos irutos.
j Av misérable amor ! aletargado
con sus blandos halagos ya no euro
del bien, y ciego abandonando todo
360 cesa el ardiente estudio, y de las letras
el augusto exercicio desdenado
yace hollado por tierra, ni i los dones
doy de Minerva reverente oido,
del ciego error premiado, que en mis venas
siembra ya libre su mortal veneno.
Mojados de las lâgrimas mis ojos
solo amor respiraban, sus delicias
solo cantaban mis dolientes voces,
y el misérable pecho asi inflamado
370 quai si tuviera su deidad présente,
con mil latidos atizaba el fuego
del blando corazon. j Ay ! en mi rostro
la flaca amarillez, y la tristeza,
y el dolor, y el silencio, iban pintados.
Asi en miseras ansias yo acababa
con indigna flaqueza, â todas partes
volviéndome veloz, quai alto ciervo
que hinche los montes de bramidos tristes
del diestro cazador atravesado
380 y en vano intenta con veloz corrida
del lado sacudir la flécha aguda :
ô volviendo la noche, y en las alas
de su callada sombra el blando sueno,
yo solo, y desvelado i quantos votos
(el frio lecho en lâgrimas banado)
desperdiciaba en vano ! en que temores
el ânimo alligido se anegaba !
que agudo cavilar ! j Ay infelice
el que el amor airado lia bien herido !
390 pues mortales congojas son sus suerïos.
Que de veces tambien llamaba en vano
la muerte, y quai la rosa desfallece
POESIAS INÉD1TAS 177
perdiendo con el sol su lozania,
yo me iba consumiendo, sin que hallase
otro consuelo à mi dolor agudo
que la callada soledad, en ella
los infelices casos revolviendo
de mi cuitado error. Acaso un dia,
del bosque enmaranado sin pensarlo
400 entrémetan adentro, que â una cueva
de algun selvaje Dios morada inculta,
(tanto el rûstico adorno, y la hermosura
del florido terreno tanta fuera)
llegué, y de fatigado el flaco cuerpo
recliné en tierra â la callada sombra,
que en très lôbregas noches jamas pude
al placido descanso dar entrada.
Algun Dios lo dispuso que el gobierno
tiene alla de las cosas de los nombres,
410 y mandandome un suerïo sobrehumano
la regalada paz tornô a mi pecho.
Yo durmiera tranquilo los ardores
del insano dolor casi estinguidos,
quando en medio las sombras j quien pudiera
contarlo agora todo dignamente !
Minerva del Olimpo descendida
con beldad simple, y ademan modesto
armada de su égida impénétrable,
v en la derecha la brillante lanza
420 se présenté a mis ojos : yo en las senas
conociéndola al punto, un santo miedo
me ocupô todo el pecho, y erizados
los cabellos de horror temblando apenas,
pude en tierra postrado humildemente
adorândola hablarla en esta forma :
« O santa Diosa, poderosa estirpe
« de Jupiter divino, j en que peligros
« estoy agora puesto ! ô donde puedo
« tornarme sino à vos ! la aguda llama
430 « ya por el pecho libremenre corre :
« libradme j ay ! ay ! libradme y poderosa
« templad el fiero mal. » Entonces ella
asî torno sus voces celestiales,
I78 JUAN MELÉNDEZ VALDES
blando aroma en los labios respirando :
« Al que una vez la acata y las razones
« divinas oye de su santa boca,
« jamas Minerva abandonado déjà :
« huye esta fatal tierra, y parte luego
« a la ciudad antigua, do mi numen
440 « tiene su culto y aras, y el fragante
« odor siempre es quemado, que cortada
« te tiene allî mi mano la Victoria :
« y oye en la orilla del undoso Betis
« con cïtara dorada, y docto labio
« reclinado cantar al gran Jovino,
« honor augusto de la toga hispana,
« el ensueno de amor, y los encantos
« que las Magas hicieran a tu nombre,
« i que fiero sonilegio ! y quai scria
450 « con él martirizado el blando pecho
« sin su sagrado ruego ! él lo deshizo
« tu faz librando de la eterna infamia :
« asi escûchalo agora y quai si fuesen
« sus preceptos de Apolo, los venera,
« porque pueda acabar tu mal agudo.
Luego el varon clarisimo descubre
en quien Themis guardara sus secretos,
y en todo semejante al cano Orfeo,
pues quando ornado de sus largas ropas
460 diestro la lira de marfil tania,
las aguas se pararon, y en las cumbres
de los âsperos montes se movieron
los ârboles erguidos, y a escucharle
las indômitas fieras se humillaron.
Yo embelesado con la voz divina
quasi hablar no pudiendo, quai si alguno
viô entre sueiîos su muerte, que despierto
d respirar no acierta de alborozo,
« O amigo, Padre, dije, va recibo
470 « con voluntad humilde los consejos
« que os dicta el almo Apolo, ya mi pecho
« los sigue arrepentido, y pues los Dioses
« tocados de mis Liyrimas humildes
« gozar en vos me dieron... ; ay no puede
POESIAS INEDITAS 179
« seguir mi flaca voz ni â decir basta
« la regalada llama, y blando fuego
« de la santa amistad : ella nos una
« con vi'nculo inmortal que eterno dure,
« roto el del ciego amor » La Diosa entonces
480 mi faz viendo bullir en lumbre clara
y ya en santo deseo arder mi pecho
de seguir sus avisos celestiales,
con su diestra tocô mi débil vista
tornândola clarisima, y al punto
en mi acuerdo volvi del dulce sueno.
Huyôse la vision quedando el aire
de angélicos aromas perfumado,
y el cielo fulgidfsimo, y mi pecho
ya del acerbo mal del todo libre,
490 merced a vos, seiïor, arrepentido
de haber seguido a Amor, y sus errores
.l'ictus ciim maire Cupido.
i8o
JUAN MELENDEZ VALDES
A qualquiera Fulana
ROMANCE
Senora mia, supuesto
que yo quiero divertirme,
usted no debe extranar
que sin mis ni mas me pinte.
Va usted d ver mi retrato,
pues no es cosa incompatible,
el que usted no me le pida
con el que yo se le envie.
Mi cara es muy pasadera,
mas Naturaleza libre
avara anduvo en las cejas
y prôdiga en las narices.
Ojos de color de cielo
y como suele decirse,
no veo très sobre un asiio,
pero asnos solos d miles.
Ni soy alto ni soy baxo,
soy asi como quien dice,
entre mercë v salaria ;
(lo rubio que no se olvide).
Algo cargado de espaldas,
no cosa que escandalize,
mira bien por donde andas
es un consejo sublime.
Mi deseo se ha cumplido,
mi figura va la dixe,
yo por lo que soy me vendo,
quien no me quiera que avise.
d Venus amorosa
seguida de las gracias !
Como sus bellos ojos
el corazon encantan,
y al mirarlos se queda
mi atencion elevada !
I Pero que es lo que digo?
I Que es lo que me arrebata ?
Por una muger viva
doy mild Venus pintadas.
A un quadro de Venus
ANACREONTICA
Con que gracia y viveza
viendo estoy retratada
Carta de F... a Vecinta
que havian puesto monja.
Victima del error, de la violencia,
que con un yugo bdrbaro oprimida,
Uoras en tu retiro silencioso,
de un placer ignorado las delicias :
oye la voz de un nombre que te ama;
ah... puedan resonar las quexas mias
en esa tu prision, donde gimiendo
acabards tus infelices dias.
El poder abusô de tu inocencia,
tu padre te arrastrô con mano impia
hasta el pie del altar de aquel Dios justo
que castiga el delito y la injusticia.
Tu padre débil y preocupado
crevô tal vez asegurar tu dicha,
quéciegos son los miseras mortales...!
ellos mismos sus maies se fabrican.
Piensan que el Ser Supremo nos prohibe
hasta el menor placer, y de él se privas :
nada pueden con Dios los sacrificios,
la virtud sola d su morada guia.
En el claustro horroroso las pasiones
adquieren una fuerza mds activa,
y tanto mds terrible quanto d veces
un reposo falaz las tranquiliza.
POESIAS INEDITAS
181
Asi como en el mar quando las aguas
alguaa gran borrasca pronostican,
esta la superficie en dulce calma
mientras el fondo rdpido se agita.
; Que en fin va no hay reraedio ! que es
[précise
abandonar à la infeliz Vecinta... !
I ... Sabes, Vecinta, lo que renunciaste ?
la obligacion nids dulce, institûida
por aquel mismo Dios â quien adoras...
En tristeza indolente sumergida,
tu corazon en movimiento siempre,
sin disfrutar jamas de sus delicias,
sentira del Amor las amarguras....
El Ser Supremo no es como le pintas ;
en él terne un tirano tu respeto,
en él un padre mi carino mira.
Ven â mis brazos... rompe tus cadenas,
la fiel Naturaleza es nuestra guia,
y si este amor tan justo, tan sagrado,
una debilidad te le imaginas,
Dios te bizo débil, él sera indulgente;
él ve mi corazon.
A Dios, Vecinta.
Confesion de Flora
l Que bas diebo, Flora hermosa ?
pues que capriebo es ese ?
Conque quieres, mi bien, que te confiese?
por cierto, extraiîa cosa !
<; De confesor acaso tengo cara ?
I tengo aquella modestia tan prudente
que con astucia rara,
grave y humildemente
ha logrado en el suelo,
con zelo infatigable
ser juez inapelable
Revue hispanique.
de culpas cometidas contra el cielo?
No, amable Flora mia : sin embargo
yo tambien me hago cargo
(si lia de decirse todo)
de que a ellos me parezeo en algun modo.
Quando un fraile, a sus pies, modesta-
[mente,
ve que alguna bonita pénitente,
los ojitos baxando,
los felices pecados va contando
en que se ha entretenido
el padre reverendo,
la narracion oyendo,
la escucha un si es no es enternecido,
y su corazon triste y aterido
el ardiente deseo va encendiendo,
tanto que al cabo cometer quisiera
quanto su casta boca vitupéra.
Y te confieso, Flora, ingenuamente,
que lo mismito a mi me sucediera,
i pesar de esagracia
de divina eficacia,
que al justo anima poderosamente.
Ello te bas empenado,
y el convencerte ahora es excusado :
l que no baré \ - o, mi bien, por agradarte?
Vamos... ya puedes, Flora, arrodillarte.
Empecemos : alguna vez, hermana,
vanidad ha tenido ?
Sera muy regular : habrd sabido
que tiene una carita soberana ;
se lo habran dicho... se lo habrd crei'do...
la crïada, la amiga, y el cortejo...
se habrd visto al espejo...
Ello, que todos mientan no es posible.
Eh ! milagro no ha sido que lo créas :
vaya, que no es pecado tan horrible :
la humildad se inventô para las feas.
Prosigamos : diga, hija, escodiciosa?
se pone colorada ? muy bien hecho ;
l82
JUAN MELENDEZ YALDES
porque esculpa gravîsima. . . horrorosa,
v vicio que d ninguno trae provecho.
No ve, nina avarienta
que del bien que pudierahabernos hecho
ha de pedirla Amor estrecha cuenta.
Con todo, no se aflixa :
todo pecado, hija,
el arrepentimiento le repara.
Déxese, en adelante, de rigores :
no haga à todos favores,
pero no es decir esto que sea avara.
Es glotona ? — Cupido
va me dice al oi'do,
que quando hizo esa boca tan hermosa,
en corner no pensaba,
y â otro gusto mayor la destinaba.
Si alguna vez furiosa,
en côlera, hija mia, se ha encendido,
habrd sin duda sido
porque en aquel instante
algun rendido amante
andaria atrevido.
Hija, razon no tuvo ; considère
que amor quiere de veras quando quiere :
créame, no se enfade : que ya veo
que el ardiente deseo
que inspira su hermosura, no se aviene
con el respeto que su honor merece.
Vaya, sobre la envidia, me parece
nada que decir tiene :
todos en adorarla, hija, se emplean...
I De quien lia de poder estar zelosa ?
De eso se acusardn quantas la veau :
no hablemos mas : pasemos à otra cosa.
Otro pecado no tan horroroso
hav tambien... y me temo
que la gusta en extremo.
Pecadillo agradable y silencioso
que las ninas, a solas, en la cama
cometen d menudo... no se espante
y los ojos levante,
que pere^a se llama
este dulce pecado
que la daba cuidado.
Hija, de este no trate de enmendarse :
y si Amor entre suenos
la pintare sus gustos halagùenos,
verificarlos luego al despertarse.
Ya al fin vamos llegando : seis pecados
tiene ya confesados :
pero falta el mejor... el escogido...
Mas si en él ha cai'do,
no solamente su razon abono,
sino que por haberle cometido,
los demas, hija mia, la perdono.
SONETO
Del tierno Amor los lazos poderosos
mi libre corazon no han sugetado ;
de la inconstancia pldcida guïado,
evito sus encantos enganosos.
Pocos han sido por amar dichosos,
y no alivia el Amor al desdichado,
antes siente torraento duplicado,
al ver sentir sus maies rigorosos.
Pero no pende, no, del valor mio,
mi grata libertad apetecible ;
(que esnecio quien vencer al Amor piensa).
Veo mi corazon... y desconfio,
huyode un enemigo irrésistible,
y mi mismo temor es mi delensa.
POESIAS INÉDITAS
Ii
MADRIGAL
Dexa, Fenisa hermosa,
que goze de mi vida libremente,
sin que turbe mi paz dulce y dichosa
el Amor inclemente.
Fenisa, en vano quieres
pintarme sus placeres ;
en él todo me asusta :
amado, la inconstancia temeria,
y olvidado... ay Fenisa !... moriria.
A Dorila
Ayer mi Dorila hermosa
al Amor durmiendo viô,
y la aljava le escondiô
entre la yerba arenosa :
y yo exclamé con temor,
al ver que le despertaba :
no tiene fléchas, ni aljava,
mas mira que es el Amor.
ANACREÔNTICA
Un beso te di, Filis,
pero tu con despego
por ello te enojaste,
diciéndome con ceno :
yo nada quiero tuyo.
Bien, Filis, pero al menos
cûmpleme tu palabra
y viaélveme mi beso.
A P.
Sonaba esta manana.
ay Dios... fué
[sueiîo !
que gozoso veia
a la pastora mia :
yo la abrazé impaciente,
su pudor resistia debilmente,
y en el feliz momento en que miraba
que su rostro mi triunfo me anunciaba,
despierto, y veo absorto y confundido
que mi felicidad un sueno ha sido.
^Adonde te lias ido
encanto halagùeno... ?
en alas del sueno
huyô mi placer !
Ay... ! j que desvalido
sera quien amando,
tan solo sonando
feliz puede ser... !
A Susana
Susana, di, que es esto ?
I como élevas tan presto
tu vanidad extrema y mal guiada
y que (lo peor de todo) es infundada ?
Mira que la hermosura
no eternamente dura.
Un sabio dice : « La muger hermosa
viene à ser quai la rosa :
la coge el jardinero
siempre que se le antoja,
la paga algun ricote majadero,
y un lacayo \apisa y la deshoja.
Sea pues tu marido el jardinero...
(no quiero disputar si fué el primero
que te cogiô, Susana ;
la verdad es dificil se descubra,
y aun quando tuera fâcil fuera vana,
y es mejor que el silencio nos la encubra).
Hoy vemos los ricotes,
que te pagan... No grites ni alborotes,
diciendo que mi envidia maldiciente
con equivocos quiere licenciosa
en tu honor limpio hincar el negro diente :
quiero decir que pagardn la rosa.
Despues que de los ricos pase el fuego,
nosotros los menores
con doues inferiores
i8 4
JUAN MELENDEZ VALDES
tambien alternaremos en cl juego.
Quando por tu belleza supla cl Artc,
los lacayos vendrân a marchitarte ;
y asi, Susana hermosa,
tendras el paradero de la rosa.
El maullido de las gâtas
CUENTO
Hace algun tiempo (quando no sabia
en que el ruido raaldito consistia
que arma por los texados y desvanes
la gatuna familia tan urana),
pareciame cosa muy extraùa
que las esquivas gâtas no quisieran
permitir que la cosa las meticran
sin arano y bufido :
mas ahora que todo lo lie sabido,
digo que hacen muy bien : y por si acaso
alguno lo ignonire, escuche el caso.
Sucediô que una gâta cierto dia....
(hemos de suponer que todavia
ninguna al fornicarla maùllaba)
por un desvan andaba
buscando algun gatillo comedido
con quien folgar un rato :
a cuyo tiempo un gato
hambriento y desvalido
(en causa deshonesta no pensando)
que corner iba por alli buscando. —
La gâta al verle, con rubor fingido,
poquito â poco se le lue acercando,
y con dulce maullido
le preguntô porque tan cabizbajo
estaba, v tan doliehte.
Tengo hambre (respondiôla cortcsmcntc)
y ella basta aqui me traxo :
pero perdon os pido, gâta hermosa,
de haber hasta aqui entrado :
ved si mandais, seiïora, alguna cosa,
que me vuelvo al texado.
La gatilla admirada
de ver gato tan noble v bien hablado,
le dixo remilgada :
Apenas la criada de esta casa
(que es de un rico canônigo, y escasa
nunca anda la comida)
acabe de guisar un grande plato
(digno en fin de tal gato)
de sardinas v sopa bien hervido,
comeréis — entretanto aqui esperemos,
y al sol (si gustais de ello) nos sentemos.
Sentâronse; y el gato agradecido,
deseoso esperando
el plato prometido,
y fuerzas de flaqueza en fin sacando,
la requiriô de amores, no creyendo
que tuviera gatilla tan modesta
tanta gana de fiesta.
Pero ella, alzando poco â poco el rabo,
dixo que no... que si... que hay mil
[acasos...
en fin quanto se dice en taies casos.
Ello es, que tuvo al cabo
el gatazo infeliz, sin saber como.
que montarse en el lomo
de la gâta paciente,
que lo sufria silenciosamente.
A este tiempo un raton pasô corriendo
no creyendo encontrar aquella gente,
lo quai el gato viendo,
de gâta y de sardinas olvidado
echa â correr tras el desventurado,
le coge, hfncale el diente,
y de un salto se pone en el texado.
La gâta avergonzada,
à las demas refiere el caso todo,
y todas juntas inventaron modo
de no verse en la afrente va citada :
y fué dar mil maùllos y bufidos,
quando tienen los rabanos metidos,
v asi, al oirlaSj nunca los ratones
viencn à interrumpir sus diversiones.
POESIAS INEDITAS
i8s
Traduccion de Mr. Parny
El dia siguiente
ODA
Ya Lisis adorada,
aquel placer divino lias disfrutado ;
aquel dulce pecado,
que temerosa Lisi apetecias,
y aun quando lo gozabas le temias,
di'rneLisi... <jque tiene de terrible...?
que ha dexado en tu aima ?
una agradable turbacion ligera,
una memoria dulce y lisongera,
un fuego que la inflama y que la admin
un pesar delicioso y un deseo.
En tu rostro ya veo
que brilla n los colores de la rosa ;
la dulce languidez, tierna, amorosa
que al deleite précède
y tambien le sucede,
ya en tus ojos ocupa
el lugar que usurpaba
cl pudor desdeiîoso.
Tu seno delicioso
va no con tanta timidez se imprime
en la gasa ligera
que te puso la mano
de una madré sedera,
y que menos prudente y mas benigna
abrd correr la mano de Cupido.
Tu espi'ritu embebido
en una suspension quieta, agradable,
te hace olvidar aquel humor risueno,
aquel genio con todos halagûeno
que me desesperaba.
Tu aima enternecida en este dia
ya se abandona deliciosamente
al tierno sentimiento
1 e una dulce y feliz melancolia.
Dexemos â los n'gidos censores,
que traten de delito abominable
este consolador de nuestros maies,
este puro placer, cuyo principio
puso un Dios favorable
en todos los humanos corazoncs.
No créas su impostura ;
de su zelo la bârbara porfia
ultraja, Lisi, à la Naturaleza...
— No es tan dulce el delito, Lisi mia.
Imitacion de La Fontaine
FABULA
Estaba la Locura cierto dia
con el Amor jugando
(hemos de suponer que todavia
el Amor no era ciego),
y résulté del juego
que se fueron los dos ibrmalizando.
FI Amor, como nino mal criado,
a quexarse à su madré iba corriendo,
mas la Locura viendo
el lance mal parado,
sin reparar en nada,
le diô tal golpe al infeliz Cupido
que le dexô aturdido
y la vista perdiô. Venus airada
se alborotô de modo
que el alto Olimpo todo
estaba consternado.
El caso averiguado,
los Dioses se juntaron,
y despues que despacio lo miraron
(y vieron que la cosa estaba hecha,
y el mal era sin cura) ;
dexaron à la madré satisfecha
por un medio justi'simo y sencillo,
y fué de condenar a la Locura
a servir al Amor de lazarillo.
i86
JUAN MELENDEZ VALDES
Imitacion dcl frances.
El muchacho y la muneca
FABULA
A cierto senorito
le llevan à una feria
donde ve mil juguetes
que su atencion elevan ;
ya le gusta un soldado,
ya quiere un purchinela,,
y ya no quiere nada...
Ve al fin una muneca,
la compra, y muy contento,
vuelve à casa con ella,
la desnuda, la vistc,
la acaricia, la besa,
y por toda la casa
alegre la pasea.
Al acostarse llora,
duerme, y con ella sueiïa,
y la dulce esperanza
mitiga su tristeza.
Dichoso parecia...
mas, cielos !...,; quien dixera
que al fin se hizo costumbre
la. posesion mas tierna?
La costumbre y el tedio
unidos siempre llegan ;
en fin mi senorito
lovida à su muneca.
De todos los amantes
que necias son las quexas !
Ay hombres,... sois muchachos,
mugeres,... sois munecas.
Traduccion de la carta de Abelardo a Heloïsa,
escrita en frances por Mr. Colardeau. -
NOTA
Mr. Pope escriviô en ingles la Caria de Heloïsa ci Abelardo, y Mr. Colardeau la trnduxo al france
aûadiendo una respuesta original.
He visto en un M. S. (atribuido â Santibanez) la traduccion (aunque algo alterada) de la Caria de
Heloïsa à Abelardo ; pero la respuesta que en dicho M. S. se supone île Abelardo, û es de pura invencion
de Santibanez, 6 la sacô de otra parte que ignoro : lo cierto es que la respuesta fie Abelardo segun
Colardeau es la présente. V.
Abelardo esta ocupado en lecturas sagradas quando recive la Caria de Heloïsa,
Abramos... de Heloïsa... ! Ah cielos jus-
[tos!
oh dia el mas dichoso que he tenido,
esta carta, estas letras que, estoy viendo,
encienden otra vez mi fuego tibio.
Depositarios lugubres y obscuros,
idos lexos de mi, sagrados libros,
en donde nuestra le se pierde en medio
de confusos misterios escondidos.
Todas vuestras verdades tan austeras,
que adoramos temblando sometidos,
A disipar no bastan de un amante
las desgracias acerbas y el martirio.
La duda en vuestro seno me rodea :
de la felicidad solo el camino
obscuros me mostrais, pero Heloïsa
me présenta el placer mas exquisito.
Es engano... ! que veo... ? Ay infelice... !
I ...duda entre el cielo v un amante fino?
El cielo colma mi furor zeloso,
POESIAS INEDITAS
I8 7
me priva de mi esposa y de mi mismo.
I ...De tu amor te avergûenzas, Heloïsa?
f ...los recuerdos tu amor aun no ha extin-
[guido ?
Tu Dios... (oye mis voces, fiel amante,)
ese terrible Dios,... su amor divino,
no deben ocupar enteramente
un corazon sensible, y que? 1 ...ofendido
se juzgara de este deseo inûtil
el Autor del placer, ese Dios mismo ?
Consûltate, légitima es su llama,
no hay virtud si el amor es un delito.
Un momento contempla al universo ;
por amor animado y dirigido,
es el mundo feliz ; aquella dulce
conmocion deliciosa que sentimos,
la ardiente embrïaguez que nos ocupa
quando estrechamos con ardor activo
de nuestra amada el seno... es un tributo
que el hombre débil paga al Ser divino.
La preocupacion no te domine,
cesa de someterteâ los caprichos.
si, no dudes, tu Dios sea Abelardo,
y mi amada Heloïsa sera el mio.
Esposa fiel de un infeliz amante,
yo te amo y mi amor es mi martirio.
En lo interior del aima yo me abraso,
a pesar de mi Dios y â pesar mio.
En un cuerpo ya helado yo conservo
un corazon de fuego ardiente y vivo,
y yo rëuno en mi... (dolor terrible... !)
por un contraste pocas veces visto,
de la vida y la nada, de la nieve
y del fuego los limites distintos.
<; No soy aquel mortal cuya aima activa,
de mi amante en los ojos encendidos,
sin césar se abrasaba en otro tiempo ;
y lleno de un amor constante y fino,
que aumentaba el deseo con su soplo,
del amor supo con ardor benigno,
probarte los excesos agradables
por un exceso de ese placer mismo ?
En vano limitando su venganza
me hace gozar el cielo de... (yo expiro !)
de un resto de existencia misérable...
Favor inûtil ! Si, favor impio !
existo en esta vida... (ay infelice)
solo para saber que ya no existo.
Oh muerte ! n.e lias herido, pero débil,
de una vez destruirme no has podido... ;
en mi yace mi ser aniquilado,
y lo que de mortal, en mi destino
me ha quedado, avergùenza y horroriza
a la Naturaleza... Yo deliro... !
I Deberé confesar tu misma ofensa?
te adoro... quieres mas? Si, lo repito,
te adoro... pero no tengo esperanza...
de un amante furioso los delirios,
Heloïsa, perdona.. , mis deseos
hacen brillar mis ojso encendidos :
este triste recurso me ha dexado
el acero cruel que no ha podido
de la Naturaleza, en mi desgracia,
secar el manantial de amer lascivo.
Solo ocupado en tu divina imagen
aun al pie del Altar, con mil suspiros,
un amor inmortal jura Abelardo.
En un combate barbaro y continuo
paso mis dias... — dias que detesto ! —
Vîctima de la muerte, en el sombrio
espacio de estas lugubres paredes,
en secreto devoro mi martirio ;
como en el centro obscuro de la tierra,
dos fuegos poderosos, oprimidos,
hacen sonar con truenos horrorosos
el seno de sus côneavos abismos,
y en vapores estériles se exalan,
al lin por su ardor mismo consumidos.
Aun yo te dire mas, quiero que veas
de mi debilidad el colmo iniquo ;
me avergùenzo... oprimido con mis
[mal es,
i88
JUAN MELENDEZ VALDÉS
me complazco en régir este recinto
en donde la infeliz Naturaleza
■A mis ojos se ofrece en sacrificio.
De mis jôvenes victimas el yugo
hago mas duro, injusto las oprimo,
y vo castigo en estos inocentes
el recuerdo interior de mis dtlitos ;
me vengo de este modo (en mi desgracia)
de un bien que deseoso lesenvidio ....
del que va por mi mal gozar no puedo.
Quando contemplo con secreto y miro
grabada con dolor sobre sus frentes
y en sus lânguidos ojos abatidos
la triste austeridad palida y débil,
me creo mas felîz y mâs tranquilo ;
v de estos infelices rodeados,
que no es tanta mi pena me imagino.
— Esta borrible pintura te estremece
v tu sensible corazon ha herido...
Si para ti, Heloïsa, yo viviese,
(al cielo mismo pongo por testigo)
mi voto, el juramento quebrantara
que me une à mi Dios... yo te lo afirmo.
Que digo ? nada tiene el universo
que ocupe mi deseo ; à nada aspiro :
,; ...compite con un beso de tus labios
acaso quanto abraza en su recinto ?
Qj-iando vi que mis dias se eclipsaban,
del sepulcro à las puertas, fué mi asilo
tu Dios... — iy que debia hacer enton-
[ces?
Tu ternura, tus ojos, s:', ellos mismos,
con ldgrimas parece que culpaban
;i mi debilidad... — era preciso
para unirme a mi Dios abandonarte ..
culto debi(') desde el principio
ocupar à un amante que arrancaban
de tus brazos, pero, ah... que gran vacio
de.xa este culto en un corazon débil
à quien hace el amor scr tan iniquo !
Va A la Naturaleza la contemplo
como un desierto horrible, donde miro
que à su pesar el dia, de sus rayos
à un infeliz prodiga el claro brillo.
Mi vista opaca extiende tristemente
aun sobre los objetos mas lucidos
el vélo que la oprime v la obscurece.
En el descanso pldcido y tranquilo,
siempre veo tu imagen que me sigue ;
todo el dia le paso en mis suspiros,
en amor por la noche yo me abraso,
V quando ansioso creo en mi delirio
abrazar à mi dueno, enagenado,
desaparezeo de mis ojos mismos.
Esta noche, mi bien. . . (vana esperanza ! )
un sueiïo seductor... av ! mis sentidos
a su vigor primero habia vuelto — ■
yo dormia en tu seno, dueno mio,
mi aima se exalaba enagenada
sobre tus bellos labios encendidos...
dulce îlusion... ! — mas ay! que va en
[las alas
del fugaz sueno mi placer ha huido !
Me contemplé à mi mismo, y al instante
détesté tus hermosos atractivos :
han sido mi placer, si, mas ahora
causan el llanto de los ojos mios.
Quai estado es el mio! ;...y porque
[ahora
contândote mis maies infinitos,
renovar quiero el môvil de los tuyos?
Acuérdate mâs bien, si, dueno mio,
de aquel feliz momento de mi gloria,
en el que, à tu pesar, Amor benigno
me cediô la Victoria. Va al Ocaso
estaba el astro de la luz vecino,
un apacible zéfiro movia
lasyerbasde los prados va sombrios :
te conduxe con mano vacilante
à un canapé de murta entretexido
uché con un gozo inexplicable
de tu virtud dudosa los suspiros.
POESIAS INEDITAS
l8 9
El fuego de mis ojos te pintaba
mi deseo... los tuyos luego miro...
la senal del placer en ellos veo...
vueloâ tus brazos... ay !... y de improviso
del amor venturoso nuestras aimas
agotaron la llama y los delirios.
^...Te acuerdas, Heloïsa... (ay infelice !)
de placer tantas veces repetido ?
Abelardo triunfaba enagenado
de un corazon amante y combatido ;
tu voz en vano interrumpida y débil,
afear pretendia mi delito ;
d mi vïctima hermosa entre mis brazos
estrechaba ardoroso mi carino.
En vano el trueno hubiera resonado,
nada escuchar podian mis o:dos,
y era feliz entonces, Heloïsa,
aun mas por tu placer que por el mio.
Si contigo estuviera, tierna amante,
pudiera una mirada... algun suspiro,
reanimar mi ser tan apagado ;
en tus ojos veria un nuevo brillo,
pues la Naturaleza sometida,
obedece de amor al poderio.
A lo menos contenta te veria,
con un sueno ligero y fugitivo,
prestarte à los inutiles esfuerzos
de un engaùo penoso y no seguido
Por mas que el Ser Eterno se me opon-
fea,
ya rompo el lazo que con él me lia unido :
yo volaré hacia ti ; tû sola puedes
sacar mi corazon de tal abismo ;
justo es mi amor, legîtimo le creo
si llegas à admitir el amor mio.
Ya nada puede haberque me contenga,
nada hay que temple mi deseo active :
Heloïsa me espéra, entre sus brazos
moriré... moriré con regocijo.
Ya estoy de arrastrar tanto fatigado,
la cadena forzosa en que abora vivo,
de religion tan triste corao austera.
Con mis pasados yerros oprimido,
y baxo el yugo humilde y agobiado,
paso mi triste vida entre martirios ;
no hay en la esclavitud accion alguna
que de virtud merezea el nombre digno.
En vano ante mi vista se présenta
de lo futuro algun recuerdo tibio ;
en tus ojos encuentro yo mi gloria,
nada me importa mas — à nada aspiro.
Yo volveré, si, i ver esos lugares
edificados por el zelo mio,
asilos de la ti'mida inocencia
à quienes tu'piedad les da cultivo ;
esos lugares solitarios, donde
ufana la virtud con su suplicio,
a si misrha se impone tristemente
del vicio los tormentos y el castigo.
Yo darte puedo en todos tus afanes
algun pequeno y momentâneo aliviô ;
yo puedo dirigir de tus hermanas
el tïmido rebano desvalido,
de sus cândidas aimas temerosas
alexar con ternura los peligros,
v de su obligacion triste y severa,
compasivo allanarlas el camino.
En esa mansion triste, mansion donde
el arrepentimiento encuentra abrigo,
verân ante sus ojos, aunque en vano,
del deleite brillar los rayos vivos ..
Mas que digo... infeliz ! — Esta palabra
aumenta mi furor y mi martirio. —
l ...puedo realizar yo por ventura
una imagen tan dulce ? Que delirio !
I A ese lugar iré donde a mi vista,
hermosos é inocentes atractivos
presentarân inutiles combates
a mi corazon débil y abatido ?
De sus habitadoras la belleza
insultaria siempre con gemidos
mi timida flaqueza vergonzosa ;
190
JUAN MELENDEZ VALDES
yo volveria à ver de mi caritîo
al objeto estimable, y sin gozarle
siempre arderia en un deseo activo?
Todo, todo huiria con presteza
de un mortal de desgracias combatido,
a quien dévora un inmortal deseo
y oprime de su ser el poderio.
Y tu misma, Heloïsa, si, tû misma,
buvendo de mi barbaro destino,
detestarias el amor funesto
que expiraria entre los brazos mios.
I Vemos acaso baxo la alta encina
que abrasô el presto rayo enfurecido,
descansar a la tîmida pastora ?
^ ô vemos en los prados muy floridos
con diligencia activa y laboriosa
un enxambre de abejas dividido
sobre la adormidera moribunda
ô sobre el lirio cârdeno y marchito ?
Perdamos esta inûtil esperanza :
volvamos â la nada... ella es mi asilo :
adios... mitiga tu pesar acerbo ;
del placer goza, déxame el martirio.
Abelardo fué siempre (si, Heloïsa)
el amante mas tierno y el mas fino ;
pero quando un amante ya no existe
...hay quien adore su sepulcro frio?
De un infeliz extingue la memoria ;
solo te pido tu ûltimo suspiro.
Les deux poésies suivantes proviennent des papiers de Cadalso à qui elles sont
dédiées ; bien qu'elles figurent déjà dans les œuvres de Meléndez. (Edition Rivade-
neyra, p. 187, col. 2, et p. 194, col. 1), je crois intéressant de les reproduire à cause
des nombreuses variantes fournies par mes manuscrits. Tout ce qui n'est pas stricte-
ment conforme au texte des éditions est imprimé en caractères italiques. ■ — La pre-
mière de ces poésies est précédée d'un titre qui nous indique l'âge auquel la composa
Meléndez.
CANCION DE UN POE TA JOI'EX
[DON JUAN MELÉNDEZ VALDÈS, DE i 9 ANOS DE EDAD)
EN ALABANZA DE SU AMIGO DALMIRO.
Caro Dalmiro, quando a Filis suena
tu armoniosa lira,
el rio, por oirte, el curso enfrena
y el mar templa su ira.
Sacan las ninfas la dorada (Vente
coronada de flores :
suelta Neptuno el hûmido tridente
y escucha tus amores '.
Los encontrados vientos se adormecen
sopla zéfiro blando ;
v los marchitos prados reflorecen
quando tû estas cantando.
Desde el Olimpo baja Citerea,
tanto tu ix\ le agrada :
v cou el dulce canto se recréa
de su Marie blvidada.
1. Cette strophe lut remplacée par une autre dans les éditions de Meléndez postérieures aux
premières. (Voir le texte donné dans le tome LXIII de la Biblioteca de Autores espanoles de Riv.i-
deneyra, p. 187, col. 2.)
POESIAS INEDITAS
191
Tus consonancias signai arrullando
sus nevadas palomas :
sus Cupidos contino estân tirando
sobre ti mil aromas.
Las vagorosas y parleras aves
viendo à la cipria dea
modulan en cromdticos suaves
(7 cantoque recréait.
Cou trînadosy tonos no aprendidos
le dan la bienvenida ;
y oyendo de tu lira los sonidos,
queda su voz vencida.
Tù, en tanto reclinado estas cantando
sas loores divinos,
y el favor de la Venus implorando
en mil sâficos himnos.
Todo, al oirte, calla : tu voz suena
con acento amoroso ;
y el aima embebecida se enagena
en éxtasi glorioso.
Pues, no ceses, poeta soberano,
tu son dulce y subido,
don que Febo te diô con larga mano,
y que tù bas merecido.
ALLA VA SEA LO QUE FUERE
AL BUEN DALMIRO.
De pompa, magestad y gloria llena,
baja, sonora Clio,
y infunde herôiro aliento al pecho m'o
con alto soplo y abundante vena
para cantar osado
el verso de Dalmiro arrebatado.
Arrebatado sobre el alto cielo
y los dioses que atentos
a lo sublime estàn de sus acentos
envidiaudo esta gloria al bajo suelo
que tiene en tal poeta
de su delicia imitation perfecta.
Y las sagradas mesas olvidando,
do Jove presidia,
desamparan el nectar y ambrosia,
y bajan todos de tropel volando ;
y Jove, al verse solo,
tambien desciende desde el alto polo,
a escucbar embebidos los loores
que del Moratin canta,
Moratin el que à todos se adelanta ;
y tal vez algun dios de los menores
quai bacante furiosa
la ci'tara acompana sonorosa.
Mas<; que furor sagrado acd en mi pecho
me entré sin ser sentido ?
parêceme que un fuego me ha encendido;
el orbe inmenso me parece estrecho,
v mi voz, mas robusta,
al numéro del verso no se ajusta.
Quai suele el sacerdote arrebatado
del alto dios de Delo
mirar con ojo ardiente tierra y cielo,
v el pecho y el cabello levantado,
con las voces espanta,
el tn'pode oprimiendo con la planta,
asi yo tiemblo, v el furor que siento
me inspira que le cante,
no vestido de acero_y de diamante,
con la cruz del apostol que ardimiento
da al cora^on hispano,
y ajrentoso terror al africano ;
192
JUAN MELÉNDEZ VALDES
no en el caballo que del dueno siente
el poderoso mando,
tascando espumas y relinchos dando ;
y el pie sacude y gôzase impaciente
quando al son de las trompas,
rige su esquadra netre marciales pompas.
Mas hiriendo la citant sonante
con el marfil agudo,
que fieras y hombres amansarlas pudo
ô bien cou pecho y cora^on constante
à su Filis cantando
y cl caso acerbo Je su fin llorando.
Cenida de laurel la docta f rente
que Febo agradecido
por sus sagrados dedos ha tejido,
}• al aima Citerea que clémente
iujicve por su mano
mirto oloroso al lauro soberano,
con los dioses menores que le cercan,
y él cantando entre todos
con alto aliento y con sublimes modos :
alguuos de temor no se le acercan,
mas olros diligentes
corren aunque cou pasos reverentes.
I Quai poêla ô quai hombre en este mundo
ha merecido tanto ?
£qual pudo de los dioses ser encanto,
y no de los del Tartaro profundo,
sino de las mansiones
do suben pocos fnclitos varones,
do la pa\ setupiterna sin nicJida,
do cl couliuuo i,
• ia celeslial calma el Jesco,
do del ciclo la mùsica subida
calma los celcstiales,
pasma los dichosisimos mortalcs.
Orfeo y Anfion tan celebrados,
que al dulce son movian
hombres, fieras y montes do querian,
y el otro que los mares allerados
paraba con su acento,
y la vida salvô por su instrumento ;
la citara de Pi'ndaro divino,
y la trompa de Homero,
y el grau Virgilio que cantô guerrero
las armas y el varon que a Italia vino
oigan todos pasmados
los versos de Dalmiro levautados.
Las saluas moradoras de Pireue
no como solas canteu,
ni sus sagradas voecs nuis levauten,
ni su instrumenta armouico resueue ;
110 cante el dios de Delo,
pues hay ya quien le igualc aca eu el stielo.
Y tu, salve, poeta soberano,
y de iniuortal corona .
adôrnese tu frentey tu persona ;
la patria te la ponga por su mano,
y tù, reconocido,
con tus versos la libres del olvido.
Salve, Delio espanol y venturoso,
de mil grandes -enroues
los hechos y las iuclitas acciones
canta ton alto verso numeroso,
y tu fama <'// el suelo
se eslicnda dignamente y toque al cielo.
POESIAS INEDITAS 193
Dans le recueil 316 de la bibliothèque de Salvâ se trouvait un manuscrit du
sonnet En unas bodas (He aqui el lecho nupcial...) ; le vers 5 commence ainsi
dans ce manuscrit : Yo tambien como ta... au lieu du Tambien yo, como là... des
éditions.
Dans le recueil 316 de la bibliothèque de Salvâ se trouvait un manuscrit du
romance El nâufrago déjà connu (romance XXXIX de l'édition Rivadeneyra) ;
il est précédé d'une épigraphe et accompagné de notes qui ne figurent pas dans
les éditions. Le texte lui-même différant peu du texte imprimé, je me suis
borné à indiquer les variantes en caractères italiques.
Alegorîa.
Nupcr sollicitum qua mihi tadium,
Nunc desiderium attaque non levis.
HORAT. carm. !!!>. I.
Antes tedto solicito me fuiste;
Ya deseo v gravisimo cuidado.
ROMANCE
El nâufrago.
vers 5 1 No eran ya, dime, sobrados
tantos agravios y ardides,
vers 19 en caliçinosa noche
vers 24 llegô un instante a reirme '
1. Cuando fui catedrâtico.
vers 29 me arrastraste al mar ondoso ».
2. Mi ida â la corte.
vers 31 de los enconados vientos >
3. Jovellanos y Godoy.
vers 32 entre Scilas y Caribdis.
vers 40 vivf tranquilo y felice +.
4. Mi jubilacion y destierro à Zamora, como amigo de Jovellanos, y à ins-
tancias del favorito.
vers 41, 42, 43 et 44 n'existent pas dans le manuscrit.
vers 56 y yo en medio el mar me vides.
5. La revolucion.
194 J UAX MELENDEZ VALDES
vers 68 donde naufragos se abriguen 6
6. La prision del rey, y el desorden y abandono en que se vio la nacion.
vers 72 subito/ o dolor ! hendirse
vers 74 entre las vadosas sirtes
vers 76 en los abismos sumirse '
7. Nuestras pérdidas y derrotas.
vers 80 el ponto en sangre se tifie.
vers 89, 90, 91 et 92 n'existent pas dans le manuscrit.
vers 96 hacer una tregua quise 8 .
8. Mi retirada a Francia.
vers 99 la desgracia es ominosa,
vers 123 y otros tan dichosos dias,
cual son estos infelices '->.
9. Mi patria en sus tiempos de tranquilidad.
vers 127 que un tiempo indagar ansidba,
vers 129, 130, 131, 132, 133, 134, 135 et 136 n'existent pas dans le manuscrit.
vers 154 tanto ya Uega i afligirme,
vers 177 Necesidad imperiosa ,0
10. El huir de la persecucion y los punales.
vers 180 de cruJo dogal me sirve.
vers 192 no mas su virtud mancilles.
vers 206 cual otro patiente Ulises,
vers 209 j Cuando mis estrechos lares,
vers 212 tornardn a recibir;»! 1 ,
vers 216 contra mi bondad conspiren !
vers 221, 222, 223 et 224 n'existent pas dans le manuscrit.
vers 236 tlejaré fiel de servirte.
vers 237, 238, 239, 240, 241, 242, 243 et 244 n'existent pas dans le manuscrit.
vers 245 Asi un nàufrago, en desgracias
vers 247 hablaba à su amada patria,
vers 249 De subito mil recuerdos
POESIAS INEDITAS
195
Cadalso avait dressé une liste de quelques-unes des poésies qu'il possédait ; celles de
Meléndez étaient au nombre de dix-neuf, sur lesquelles une seulement (Caro Dalmiro...)
a été retrouvée par moi dans ces intéressants papiers : les dix-huit autres ont disparu.
Comme on le verra par la liste que je transcris ci-dessous, huit poésies nous sont connues
par les éditions, et onze inédites sont actuellement perdues. — La poésie De pompa, mages-
tac!..., retrouvée et republiée plus haut, ne figure pas dans la liste.
Edition Rivadeneyra :
Elegia C rompa ya el silencio p. 162, col. 2
Oda Ahy como el Palomito p. 167, col. 1
Oda Caro Dalmiro ' . p. 187, col. 2
Oda Desciende del Olimpo p. 190, col. 1
Soneto O si el mal que en rai siento Inéd.
Soneto Quedense de tu templo Inéd.
Soneto Quedate a Dios pendiente Inéd.
Oda pindarica Don grande 2 p. 231, col. 2
Idilio Dame sagrado Apolo Inéd.
Idilio Que te pide el Poeta p. 101, col. 3
Oda Iba a cantar de Marte Inéd.
Oda Vuela, pues, pajarillo Inéd.
Oda Decidme, zagalejas Inéd.
Oda Texeme, mi Belisa Inéd.
Oda Como, Cupido, como Inéd.
Oda Pensaba, quando niiïo P- 95» c °l- J
Oda tr. gr. Si es forzoso Inéd.
Oda burlesca Al prado fué por flores p. 100, col. 1
Letrilla Venid, Pajarillos Inéd.
1. Voir plus haut, page 190.
2. On savait que cette ode avait été lue le 14 juillet 1787 à une séance de l'Académie
de San Fernando, mais on ignorait l'époque de sa composition : celle-ci est antérieure à
1782 puisque Cadalso en possédait une copie.
VA R I A
3. Un sonnet retrouvé de Cervantes.
Le nombre de publications de tout genre sur Cervantes est depuis quelques
années si grand, en Espagne et à l'étranger, que je ne saurais affirmer que le
présent sonnet n'ait déjà été « retrouvé » par un autre chercheur; mais comme
il ne figure dans aucun des documents cervantistes que j'ai été à même de
consulter, je crois intéressant de le reproduire.
Il est extrait d'un livre médical imprimé à Madrid en 1588 et aujourd'hui
fort rare :
Tratado nuevamente impresso, de todas las enfermedades de los Rinones,
Vexiga, y Carnosidades de la verga, y Vrina, dividido en très libros. Com-
puesto por Francisco Diaz Dotor en Medicina, y maestro en Filosofia, por la
insigne universidad de Alcala de Henares, y Cirujano del Rey nuestro Senor.
— Dirigido al dotor Vallès, Protomedico del Rey nuestro Sehor, y Medico de
su Camara, etc.. Con privilegio. Impresso en Madrid por Francisco Sanchcz.
Atîo 1588. — in-8. 408 feuillets.
C'est au feuillet 407 que se trouve le sonnet suivant :
Al dotor Francisco Diaz
de Miguel de Cervantes.
SOXETO
Tu que con nuevo, y sin igual decoro,
Tantos remedios para un mal ordenas,
Bien puedes esperar destas arenas,
Del sacro Tajo, las que son de oro.
Y el lauro que se deve al que un tesoro,
Halla de ciencia con tan ricas venas
De raro advertimiento, y salud llenas,
Contcnto v risa del eniermo lloro.
Que por tu industria, unadeshecha piedra,
Mil marmoles, mil bronzes a tu fama,
Dara sin imbidiosas competencias.
Darate cl Cielo palma, el suelo yedra,
Pues que el uno y cl otro, ya te llama,
Espiritu de Apolo en ambas ciéncias.
I . li. Graser.
VARIA I97
4. Le testament d'un Juif d'Alba de Tormes en 1410.
Dans les documents justificatifs du tome II de la Historia social, politica y religiosa de
les judios de Es pa n n y Portugal de don José Amador do los Rios (Madrid, 1876) figure
(pp. 615 à 617) le testament d'un Juif d'Alba de Tormes provenant de l'Archiva munici-
pal de cette ville. J'ai trouvé à la Bibliothèque Nationale de Madrid (K. 97, ff. 87 et 88)
un texte de ce même testament qui présente avec celui publié par Amador de los Rios
des différences, sinon importantes, du moins intéressantes sous plus d'un rapport.
TÊSTAMENTO DE DON JUDA, JUDIO
Doliente y en el postrimero punto de su postrimeria, jazia el honrradu don
Juda en su cama echadu, y cabs el faziendo gran duelu dona Sol su muger,
fija de Mosen Tusillu que el dio guarde de mal, y junto a su alfolla Dona
Jamilica, nina de siete anos, andados de su infancia y Sadoc y Benjamin sus
fijos, nombres robustos y de gran diligencia, los ojos del honrradu viejo pues-
tos en ellos dixo. —
Fago mi testamento e lecho valga como cosa fecha, ygual en el mundo
para el siglo que nos a de tener. La muerte non la niego pues tan çierta es,
mi consejo en mis postrimeros dias tomareis tomadu, que non tengais ni aya
entre vos riiïas ni mal dichu, y que vos honrredes y tengades y mantengades
tan buena hermandad y parentesco, non postizo ca mis fijos sodés, sino digalo
la vra madré que lo sabe, a la quai se le de toda creedura como buena q ella
es, tal sea mi fin.
Yo doy gracias al alto senor Adonay q fizo todo el mundo, nos mantiene,
q non me fizo bruto e me a tenido fasta agora en sus mandaderias, ca bueno
y noble es el varon q en su postrimeria y senectud muere para vivir; y asi lo
quiera el dio ca mi esperança siempre fue en el su amor, y pues tierra soy e a
la tierra buelvo, mando que non sea lloradu, nin nadie se quebrante por mi,
ni vos dona Sol fagades malandança, yo vos tengo por tal, que aunque vos
diera el llibelo del repudio non le quisierades, y asi me lo dixistes vos : maguer
me diesedes el libello non le tomare, ca el vro çapato es firme porfia del mi
coraçon ; e yo vos dixe : ansi lo quiero y lo quiera el Dio, ca marido y muger
somos, quarenta y très anos ' fizo agora poca a q nos gozamos y hazemos en
uno, y muero en el tiempo que agrado a todos.
Mi cuerpo sea puesto en mortaja y aviso me entierren en el campo doradu
do yazen nros padres y pasadus quel Dio buen siglo de, en tierra tiesta non
tocada non tanida; no me pongan en pie ni echadu, sera fecha en la foya una
silleta firme donde me asienten, mis ojos y cara puestos fazia el oriente decli-
1. Le texte d'Avila donne très veynte anos.
Revue hispanique
I98 VARIA
nante al sol y su salida : sientase mi muerte por las dos Aljamas de Segovia y
Alua ca bien quisto fui de toda mi parentela y asi lo espero ser en el siglo
venidero, digan todos : guayas, guayas, que murio el que bien fazta.
Llevaran el tafeli Rabi santo y Mosen Tusillu y su fijo Davidico y a ratos le
ayudara Samuel, ca mis parientes son. Darles han sendas aljubas en senal que
non se a olvidado el parentesco y cantaran el talmud (sic) en remembrança
del arca del testimonio de los fijos de Isrrael por que non se ponga dudança
que fueron sacados de la captividad terrible.
Faran todo bien en la sinoga (sic) y non diran dichos fermosos sino tristu
de tristeza a manera de los que dixeron las fijas del pueblo, ca yo sabio soy
en la ley e muero en ella como bueno.
Hago mejoria a Dona Jamilica las manteneduras hasta otros siete aiîos sobre
los que ha, y quien la tocare o dixere mal, por si lo vea. Tendranla sus her-
manos en toda honrra por que se vean honrradus fasta que se le de marido de
nra generacion, el quai seiîalara el mayor pariente, quier sea hermano, quier
sea primo; y de mas de su herencia yguala con mis fijos llevara de dote como
lo mandan los establecedores de las leyes cinquenta mill maravedis de la
moneda del s r rey don ferrandu el nuestru 1 , quel Dio mantenga y mas las
alfajas apodado por los apodadores.
Y si el Dio non la diere fijos no es mi intencion quitallo a Sadoc, ca buenu
y honrradu me lue, el quai se aventaje en ello porque yo lo quieru y el lo
mereçe mereçidu, que en Toledu le fizieron en una piema con un cuchillu de
carniçeru y non se querello de Buenu ; y quien paso mal e derramo sangre,
que le fagan bien que muriera y non murio, quel Dio le guardo para aver
bien.
Mis casas en las yo vivo con las joyas yo la di, lleve mi mujer y mas su
dote que nadie la fable en ello y pues es suyo ello la valga.
Ayan todos mis biencs Sadoc y Benjamin y Dona Jamila, asegurados de
personas de quien los han de tomar sin rehierta ni engaiîo que no es bien ni
el Dio lo quiere. —
Nos Juçu, Açobi, y Levi, todos très fazederus desta escritura le diximos :
el Dio vos lleve por buen camino, Don Juda, y vos de por ello buena postri-
meria, ca aveis hechu como buenu y sin codiçia que aca lo dexais; y el dixo :
si dexo porque el mundo faga como mundo. Y el bolvio la cara fazia la pared
1. Le texte d'Avil.i donne : cinquenta mil maravedis de la moneda de nuestro rey, don
Juan... ("est en effet Jean II qui régnait en Castille en 1410; le texte de Madrid a été
modifié par le copiste qui a substitué arbitrairement au nom de Jean II le nom du roi
qui régnait quand fut faite la copie, Ferdinand V le Catholique, selon toute vraisem-
blance.
VARIA
199
con grande ansia e non lloro ca esforçadu era, el Dio le aya en su guarda, q
muerto es, en la era de la creacion del mundo de quatro mill y ciento y diez,
despues del diluvio gênerai en el segundo dia de la semana a seis dias del mes
de Adar en la villa de Alua, siendo testigos dello Azor de Galgala y Rabi
Mosen y Zaifaçor Alfayates vezinos del testador y firmamoslo Juçu, Açobi,
Levi.
Les dernières lignes semblent avoir été remaniées dans le texte de Madrid : il convient
de reproduire ici le texte d'Avila :
ca muerto es en el ano de mil quatroçientos é diez anos, en la villa de
Alba de Tormes. — Testigos : Joide, Galga, Lain-Navi, Moséh Casa, Soçal,
Faya, vecinos del testador : é firmdmosla con nuestra senal. — Juçé. — Acebi.
— Levi. »
Les noms des témoins diffèrent dans les deux textes, mais il est facile de voir qu'il
s'agit simplement d'une erreur de copiste. Quant à la date, il est à peine besoin de faire
remarquer que le quatro mil! y ciento y àle\ donné par la copie de Madrid ne doit être
considéré que comme une naïve interversion du mil quatroçientos è clic; du texte d'Alba ;
le 6 Adar 4110 de l'ère juive nous ramènerait en effet au milieu du quatrième siècle de
l'ère chrétienne, c'est-à-dire à une date antérieure de plus de dix siècles à la véritable.
R. Foulché-Delbosc.
BIBLIOGRAPHIE
Langue.
Estudios de fonétika kastelana por Fernando Araujo. Edizion ispano-ameri-
cana en ortografîa reformada. Toledo : impr. de Menor hermanos, 1894, in-8,
156-vii pp. — 4 pes.
Diccionario valenciano castellano de D. José Escrig y Marti'nez, y un ensayo
de ortografia lemosina valenciana, por una sociedad de literatos, bajo la direc-
ciôn de D. Constantino Llombart. Cuaderno 29. Pp. 1121 à 1160. Valencia,
1894, in-4 à 3 col. — 1 pes.
Discursos lei'dos ante la Real Academia Espanola, en la recepciôn pûblica
del Sr. D. Francisco Garcia Ayuso, el dîa 6 de Mayo de 1894, y contestaciôn
del Sr. D. Francisco Fernândez y Gonzalez. (Estudio comparativo sobre el
origen y formaciôn de las lenguas neosanskritas y neolatinas). — Madrid :
Sucesores de Rivadeneyra, 1894, in-4, 88 pp.
Grammaire catalane, suivie d'un petit traité de versification catalane ; par
Albert Saisset. Perpignan : imprimerie Latrobe, 1894, in-16, 93 pp.
Borrones gramaticales, por Miguel Luis Amundtegui. Santiago de Chile :
Impr. Cervantes, 1894, in-8, 312 pp.
Fragmentos etymologicos, colligidos por Carolina Michaëlis de Vasconcellos.
Porto : Typographia de A. F. Vasconcellos, 1894, in-8, 62 pp.
Histoire, etc..
L'Espagne du quatrième centenaire de la découverte du Nouveau-Monde.
Exposition historique de Madrid 1892-1893, par Emile de Molènes... — Paris :
Ancienne maison Quantin, 1894, in-8, 344 pp.
Discursos lei'dos ante Sus Magestades y Altezas Realcs el dia i° de Abril de
1894, en la solemne inauguraciôn del nuevo edificio de la Real Academia
Espanola, por los Excmos. Sres. Conde de Cheste y D. Alejandro Pidal y
Mon. Madrid : Hijos de J. A. Garcia, 1891, in-8, 47 pp. (Non mis dans le
commerce.)
BIBLIOGRAPHIE 201
La francmasonen'a espaiîola. Ensayo histôrico-critico de la orden de los
francmasones en Espaùa, desde su origen hasta nuestros di'as por el Ilmo. Sr.
D. Nicolas Di'az y Pérez. Madrid : Ricardo Fe, 1894, in-8, 637 pp. ; tableau
synoptique et portrait de l'auteur, cart. — 15 pes.
Documentos presentados à las Cortes en la legislatura de 1894, por el
Ministerio de Estado. (Negociaciones diplouuiticas sobre los sucesos de Melilla.)
Madrid : El Progreso editorial, 1894, in-4, xv-140 pp.
La intimidad ibero-americana ; dhcurso pronunciado por D. Rafaël M. de
Labra, el 6 de Noviembre de 1892. Madrid : V a de Hernando y Conip., 1894,
in-8, 41 pp.
La conquista de Tetudn, por D. José Nûnez de Prado. Madrid : Tip. de los
Hijos de M. G. Herndndez, 1894, in-8, 34 pp.
Viaje de la nao Santa Maria en el siglo xix, por Francisco Vidal y Careta.
Habana : Papelen'a francesa, 1894, in-8, 94 pp. — 3 pes. 50.
Discursos leidos ante la Real Academia de Bellas Artes de San Fernando, en
la recepciôn pûblica del Senor D. José Esteban Lozano, el di'a 29 de Abril de
1894, y contestation del Senor D. Cesdreo Ferndndez Duro (On'genes de la
medalla conmemorativa). Madrid : M. Tello, 1894, in-4, 37 PP-
Discursos leidos ante la Real Academia de la Historia en la recepciôn pûblica
del Excmo. Sr. D. Joaqui'n Maldonado Macanaz, el di'a 3 de Mayo de 1894, y
contestaciôn de D. Antonio Sdnchez Moguel. (Voto y renuncia del Rey
D. Felipe V.) Madrid : Imp. de Los Huérfanos, 1894, in-4, 122 pp.
Historia gênerai de las Islas Canarias, por Agusti'n Millares, de la Real Aca-
demia de la Historia. Tomos III, IV. Las Palmas : J. Miranda, 1894, in-8,
320 pp., 272 pp. — Chaque vol. 3 pes. 50.
El regionalismo en Galicia (estudio critico), por Leopoldo Pedreira. Madrid :
Est. tip. de « La Linterna », 1894, in-16, 312 pp. — 3 pes.
Discursos leidos ante la Real Academia de la Historia, en la recepciôn pûblica
del Excmo Sr. D. Juan Catalina Garcia, en 27 de Mayo de 1894. Contestaciôn
por el Excmo. Sr. D. Juan de Dios de la Rada y Delgado. (La Alcarria en los
dos primeros siglos de su reconquista.) Madrid : « El Progreso Editorial, » 1894,
in-4, i)4 PP-
Averiguaciones de las antigûedades de Cantabria, enderezadas principalmente
d descubrir las de Vizcaya, Guipûzcoa y Alava... y d honor y gloria de San
Ignacio de Loyola... Su autor el P. Gabriel de Henao. Nueva ediciôn, corre-
gida por el P. Miguel Villalta Tomo IL Tolosa : E. Lôpez, 1894, in-8, xlvii-
349 PP- — 5 pes.
Historia de la junta de defensa de Galicia, por Modesto Castilla. — La
Coruna : Ferrer, 1894, in-8, 535 pp. — 3 pes. 50.
Présente y porvenir de Ceuta y Gibraltar ; estudio y descripciôn eompa-
rada de ambas plazas, consideradas bajo sus diferentes aspectos, por Horacio
202 BIBLIOGRAPHIE
Bentabol y Ureta. Madrid : Imprenta de la Revista de Navegaciôn y Comer-
cio, 1894, in-8, 36 pp. — 1 pes.
Bosquejo histôrico de la ciudad de Écija, formado desde sus primitivos tiem-
pos hasta la época contemporanea, por el presbi'tero D. Manuel Varela y Esco-
bar. Sevilla : Tip. de Di'az y Carballo, 1894, in- 16, 168 pp. — 2 pes.
Guipûzcoa pintoresca ; San Sébastian y sus cercani'as, por Angel Pirala.
Madrid : Murillo, 1894, in-16, 79 pp. et carte. — 1 pes. 50.
La campana de Melilla, por Ramôn G. Rodrigo Nocedal. Madrid : Imp. de
Felipe Gonzalez Rojas, 1894, in-8, xi-215 pp. — 2 pes.
Remembranzas burgalesas, por Anselmo Salvd. Burgos : Hijos de Santiago
Rodriguez Alonso, 1894, in-8, 167 pp. — 2 pes.
Las conferencias americanistas ; discurso-resumen de don Antonio Sànchez
Moguel, leido el 19 de Junio de 1892 en el Ateneo de Madrid. Madrid : Suce-
sores de Rivadeneyra, 1894, in-8, 21 pp. — 1 pes.
Utilidad de las monografias para el cabal conocimiento de la Historia de
Espaiîa. Discursos leidos ante la Real Academia de la Historia en la recepciôn
pûblica del Excmo. Sr. D. Lui's Vidart, el dîa 10 de Junio de 1894, y contes-
taciôn del Excmo. Sr. D. Cesâreo Femdndez Duro. Madrid, 1894, in-8,
62 pp.
Reparaciones histôricas ; estudios peninsulares, por Sdnchez Moguel. Pri-
mera série. Madrid : Impr. de los Huérfanos, 1894, in-16, xvi-303 pp. —
4 pes.
Estudios cn'ticos acerca de la dominaciôn espanola en America, por el
P. Ricardo Cappa. Tomo XI. Parte tercera : Industria naval. Madrid : MuriTlo,
1894, in-16, 242 pp. — 3 pes.
Opéra minora. Christophe Colomb et les Académiciens espagnols. Notes
pour servir à l'histoire de la science en Espagne au xix e siècle. Par l'auteur de
la Bibliotheca Americana Vetustissima. Paris : H. Welter, 1894, in-8, 153 pp.
— 6 fr.
La ciencia del siglo xix, definida por Mr. Henry Harrisse y admirada por
Cesareo Fernândez Duro. Madrid : Tip. de los hijos de M. G. Herndndez,
1894, in-8, 17 pp. (Non mis dans le commerce.)
La raza de color de Cuba, por D. Rafaël M. de Labra. Madrid. Est.
Tip. de Fortanet, 1891, in-8, 36 pp. (Non mis dans le commerce.)
Melilla. Historia de la campana de Âfrica en 1893 à 94. Por Adolfo Llanos y
Alcaraz. Madrid : Murillo, 1894, in-8, 365 pp. et 2 ff. d'index. 2 grav. —
3 pes. 50.
Supersticiones de los indios filipinos. Un libro de aniten'as; publïcalo W. E.
Retana. Madrid : Impr. de la Viuda de M. Minuesa de los Rios, 1891, in-16,
xi.vi-105 pp. — 2 pes. jo.
Port-Mahon. La France à Minorque- sous Louis XV (1751-1763), d'après les
BIBLIOGRAPHIE 203
documents inédits des Archives de France et des Baléares; par E. Guillon.
Paris : Ernest Leroux, 1894, in-8, 121 pp. et carte. — 3 fr. 50. (Extrait du
tome V des Nouvelles Archives des missions scientifiques et littéraires.)
Scritti e autografi di Cristoforo Colombo con prefazione e trascrizione
diplomatica di Cesare de Lellis. Tome 1(1892), cxxx-312 pp ; tome II (1894),
ccxvii-570 pp.; tome III (1892), xxii-clix pp. ; Supplément (1894), vm-xi, pp.
et planches. — ■ 130 fr.
Balmaceda, su gobiernoy larevoluciôn de 1891 ; por Ju'io Banados-Espinosa.
Paris : Garnier hermanos, 1894, 2 vol. in-8, xxxvi-723 pp. et portrait, et
791 pp.
La Guerra del Rif ; por E. B. Paris : Charles Lavauzelle, 1894, in-8, 83 pp.
— 1 fr. 75. (Extrait de la Revue militaire universelle.)
Chypre et Lépante. Saint Pie V et don Juan d'Autriche, par P. A. Farochon.
Paris : Firmin-Didot et C ie , s. d. (1894), in-4, 320 pp. et 74 grav.
Histoire de la vie et des voyages de l'amiral Christophe Colomb, d'après des
documents de l'époque et notamment suivant l'Histoire véridique de l'amiral,
écrite par son fils, don Fernando Colon; par A. Fournier. Paris : Firmin-
Didot et O, 1894, in-8, xii-739 pp.
Quatrième centenaire de la découverte de l'Amérique. Comité du Puy-de-
Dôme, chargé d'assurer la participation du département aux congrès et expo-
sitions de Huelva et de Madrid. Rapport à M. le Marquis de Croizier, délégué
général du centenaire pour la France, sur les travaux du comité en 1892-93 ;
parle docteur Pierre Hospital, président du comité du Puy-de-Dôme. Clermont-
Ferrand : imprimerie Mont-Louis, 1894, in-8, 16 pp.
Commémoration du cinquième centenaire de l'infant dom Henri de Portugal,
dit le Navigateur (1394- 1460), au nom de la Société de topographie de France,
le 19 avril 1894, par M. Ludovic Drapeyron. Paris : Delagrave, 1894, in-8,
20 pp. (Extrait de la Revue de géographie.)
Beaux-Arts.
Ermita de Santa Cristina en Lena (Oviedo). Reserïa de las obras hechas
para su restauraciôn, por D. Juan Bautista Làzaro. Madrid : Fé, 1894, in-4,
33 pp., 4 pi. cart. — 10 pes.
Paseo arti'stico por el campo de Calatrava. Estudio de las très principales
residencias de la orden, ô sea Calatrava la vieja, Calatrava la nueva y Almagro,
por D. Rafaël Rami'rez de Arellano. Ciudad Real : Impr. del Hospicio provin-
cial, 1894, in-8, 63 pp. (Tirage de 200 exemplaires, non mis dans le com-
merce.)
Une châsse de la Cathédrale d'Astorga. Communication faite au ix e congrès
russe d'archéologie, tenu à Vilna(i893), parle baron de Baye. — Paris : Nilsson,
1894, in-4, 8 pp. 3 pi.
204 BIBLIOGRAPHIE
Hispanice Schola musica sacra ; opéra varia (ssecul. xv, xvi, xvn et xvm),
diligenter excerpta, accurate revisa, seculo concinnata a Philippo Pedrell.
Vol. I. Christophorus Morales. Barcelona. Juan Bautista Pujol y Comp., 1894,
in-fol., xxxi-55 pp. — 8 pes. 50.
Voyages, etc..
Por levante (notas de viaje), por Alfonso Pérez Nieva. Tomo I. Valencia,
Tarragona, Barcelona. Tomo IL Barcelona (continuation), Zaragoza. —
Valencia : Juan Guix, in-12. 162 et 156 pp. (Biblioteca selecta, tomos 68 y
69.) — Chaque tome, o, 50 cent.
Andalusien. Eine Winterreise durch Sùdspanien und ein Ausflug nach
Tanger. Von Ernst von Hesse-Wartegg. Leipzig : Cari Reiszner, 1894, in-8,
Yiii-443 pp.
Léon de Rosny. Taureaux et mantilles. Souvenirs d'un voyage en Espagne
et en Portugal. Paris : G. Charpentier et E. Fasquelle, 1894, in-12, vn-372 pp.
— 3 fr. 50.
Recuerdos. Notas intimas de Francia y Espana, por Eusehio Blasco. Madrid :
Fé, 1894, in- 16, 243 pp. et portrait. — 3 pes.
Pierre Loti. Au couvent de Loyola (dans : La Revue de Paris du I er février
1894), Paris, 1894, in-8. — 2 fr. 50.
Ricordi di Spagna e dell' America spagnuola, di Paolo Mantegazza. Milano :
Fratelli Trêves, in-16. — 2 fr. 50.
La Navarre. Huit jours à bord d'un grand paquebot-poste transatlantique ;
La Corogne, Lisbonne, Gibraltar, par Eugène Lucciardi. Avec notice technique,
suivie d'une préface, par Maurice Charpentier. Illustration de Jean d'Udine.
Saint-Nazaire : Letourneur, 1894, in-8, 74 pp. — 3 fr.
Le caractère espagnol, conférence faite à la section d'Auvergne du Club
Alpin, le 2 décembre 1893, par G. Desdevises du Dezert. Clermont-Ferrand :
imprimerie Mont-Louis, 1894, in-8, 22 pp.
De Paris à Huelva. Les fêtes du 4 e centenaire de la découverte de l'Amérique
en Espagne. Notes d'un voyageur, par M. Gaston Routier. Lille : imprimerie
Danel, 1894, in-8, 72 pp. (Extrait du Bulletin de la Société de géographie de
Lille.)
Manuel de tauromachie ou Guide de l'amateur de courses de taureaux, par
J. Sanchez Lozano. Traduit de l'espagnol par Aurélien de Courson. Paris :
Sauvaître, 1894, in-12. 281 pp.
Littérature.
Un sabio espanol dcl siglo xvm. Fr. Miguel de San José, gênerai de los
Trinitarios descalzos. Indicaciones bio-bibliogrdficas, por D. Juan P. Criado y
BIBLIOGRAPHIE 20)
Dominguez. Madrid : Sucesores de Rivadeneyra, 1894, in-8, 37 pp. (Tirage de
50 exemplaires, non mis dans le commerce.)
Cervantes en la Exposiciôn histôrico-europea, por D. Manuel de Foronda.
Con una carta-prôlogo del Excmo. Sr. D. Luis Vidart, y dos apéndices conte-
niendo el articulo del « Doctor Pôstumo » y el fotograbado de cuatro de las
paginas del libro parroquial de Santa Maria de Alcazar de San Juan. Madrid :
Ruïz, 1894, in-16, 95 pp. — 2 pes. 50.
Homenaje a Miguel de Cervantes Saavedra, soldado Je la infanteria espa-
nola. (Revista téenica de infanteria y caballeria, tome VII, num. 8, pp. 337 à
384.) Madrid : E^t. tip. de Juliân Palacios, 1894, in-8. — 1 pes.
Discursos lei'dos ante la Real Academia Espanola, en la recepciôn pûblica
del Excmo. Sr. D. Manuel del Palacio, el dû 13 de Abril de 1894, y contes-
taciôn del Excmo. Sr. D. Vicente Barrantes. (Sobre la poesfa.) Madrid : Suce-
sores de Rivadeneyra, 1894, in-4, 58 pp.
Bastero provenzalista catalan. Estudio cn'tico bibliografico por D. Joaqui'n
Rubio y Ors. Barcelona : Est. tip. de Jaime Jepûs, 1894, in-4, I0 ° PP-
Discursos leidos ante la Real Academia Espanola, en la recepciôn pûblica del
Excmo. Sr. D. José Echegaray el dia 20 de Mayo de 1894, y conteslaciôn del
Excmo. Sr. D. Emilio Castelar. (De la legalidad comûn en materias literarias.)
Madrid : Hijos de J. A. Garcia, 1894, in-4, I0 ° PP- — - pes.
Précis des littératures étrangères, anciennes et modernes , par- Eugène
Bouchet. Paris : J. Hetzel et C ie , 1894, in-8, v-430 pp. — 7 fr. 50.
Textes.
Antologia de poetas hispano-americanos, publicada por la Real Academia
Espanola, con un prôlogo de D. Marcelino Menéndez y Pelayo. Tomo III.
Colombia, Ecuador, Perû y Bolivia. Madrid : Sucesores de Rivadeneyra,
1894, in-8, ccxcix-492 pp. — 10 pes.
Anoranzas, por Victor Balaguer. Burgos, historias, recuerdos, leyendas, glo-
rias y ruinas. — Orillas del Neva, impresiones y apuntes de viaje. — La
romeria de mi aima, traducciôn de un poema catalan. Madrid : El Progreso
editorial, 1894, in-8, xin-223 pp. cart. (Non mis dans le commerce.)
La mujer y el arte. Conferencia que diô en el Circulo de Bellas Artes en la
velada del 17 de Febrero de 1894, el Excmo. Sr. D. Victor Balaguer. Madrid :
E. Jaramillo, impresor, 1894,111-8, 23 pp.
La hoja perdida del poema del Cid, por Eduardo de la Barra. Rosario de
Santa-Fé : Tip. lit. J. Ferrazini y Comp., 1894, in-8, 11 pp.
El Doctor Wolski. Paginas de Polonia y Rusia, por Sofia Casanova. Madrid :
Impr. del Suc. de J. Cruzado a cargo de Felipe Marqués, 1894, in-16, 321 pp.
— 3 pes. 50.
206 BIBLIOGRAPHIE
El origen del pensamiento. Novela, por Armando Palacio Valdés. Madrid :
Hijos de M. G. Hemàndez, 1894, in-8, 477 pp. — 4 pes.
El mundo festivo, por Luis Taboada ; dibujos de Pons, fotograbados de Paez.
Madrid : Sucesores de Rivadeneyra, 1894, in-16, 272 pp.
Los barrios bajos ; colecciôn de composiciones en verso por José Lôpez Silva,
con un prôlogo de Ricardo de la Vega. Madrid : Hijos de M. G. Hernàndez,
1894, in-8, 4 ff. prels et 240 pp. — 3 pes.
El gran pecado ; novela espanola, por M. Marti'nez Barrionuevo. Madrid:
Fortanet, 1894, in-16, 301 pp. — 3 pes.
Addn y Eva (ciclo). Dona Milagros, por Emilia Pardo Bazdn. (Obras com-
plétas, tome XL) Madrid : Agustfn Avrial (1894), in-8, 301 pp. — 3 pes. 50.
Cajôn de sastre, por Antonio Pena y Goiïi. Madrid : V-> de J. Ducazcal,
1894, in-16, 307 pp. — 3 pes.
El ingenioso hidalgo Don Quijote de la Manche, compuesto por Miguel de
Cervantes Saavedra y comentado por D. Diego Clemencin. Tomos II, III, IV,
V.Madrid : Viuda de Hernando, 1894, in-12. — Chaque volume 3 pes. (Biblio-
teca cldsica, tomos 181, 182, 183, 184.)
Filosofi'a antigua poética, del Dr. Alonso Lôpez Pinciano, médico cesdreo
(de la Emperatriz Dona Maria de Austria), ahora nuevamente publicada con
una introducciôn y notas, por D. Pedro Munoz Pena. Valladolid : Hijos de
Rodriguez, 1894, in-8, xxxiv-516 pp. — 8 pes.
Torquemada en el purgatorio, por B. Pérez Galdôs, Madrid, 1894, in-16,
337 PP- — 3 pe s -
Teatro cldsico moderno. Tomo I. obras dramdticas de D. Manuel Breton
de los Herreros, D. Juan Eugenio Hartzenbusch, D. Antonio Garcia Gutiér,
rez v D. Tomds Rodriguez Rubi. Madrid : Sucesores de Cuesta, 1894, in-8-
432 pp., portrait. — 3 pes.
El ingenioso hidalgo Don Quijote de la Mancha, por Miguel de Cervantes
Saavedra. Barcelona : Luis Tasso, s. d. (1894), 49 s pp. à 2 col. — 1 pes.
Los besos de amor, odas inéditas de D. Juan Meléndez Valdés, publicadas
por R. Foulché-Delbosc. Madrid : Murillo, 1894, in-8, 15 pp. à 2 col. — 2 pes.
Chispas, por Manuel del Palacio. Madrid : Murillo, 1894,111-8, 274 pp. illustr.
— 4 pes.
Obras complétas de Dona Concepcion Arenal. Tomo I. El visitador del
pobre. Madrid : V. Sudrez, 1894, in-16, 251 pp. ; 2 pes. — Tomo IL La bene-
ficencia, la filantropi'a y la caridad. Madrid : V. Sudrez, 1894, in-16, 244 pp.;
2 pes. — Tomo III. Cartas d los delincuentes. Madrid : V. Sudrez, 1894,
in-16, 443 pp. 3 pes. 50.
Dos rivales, por D. JoséSelgas. Novelas. Tomo VI. Madrid : Murillo, 189 |,
in-8, 420 pp. (Obras, tomo XIII). — 4 pes.
José Maria de Heredia. La Nonne Alferez. Paris : Alphonse Lemerre, 1894,
in-32, illustré. — 2 fr.
BIBLIOGRAPHIE 207
Le « Don Quichotte »; par Cervantes. Traduction Filleau de Saint-Martin"
Notice, analyse et extraits par Emile Caries. Paris : Delagrave, 1894, in- 18,
175 pp. (Petite bibliothèque des grands écrivains).
Vie et Œuvres spirituelles de l'admirable docteur mystique, le bienheureux
Père saint Jean de la Croix. Traduction nouvelle, faite sur l'édition de Séville
de 1702, publiée par les soins des Carmélites de Paris. Préface par le T. R. P.
Chocarne. 3 e édition. Tome I er . Paris: Oudin et C ie , 1894, in-18, xxxii-520
pp. et 3 grav.
Branthôme. Rodomontades et gentilles rencontres espagnoles. Tome IX de s
Œuvres complètes de Pierre de Bourdeilles, abbé et seigneur de Branthôme.
Publiées pour la première fois selon le plan de l'auteur, augmentées de nom-
breuses variantes et de fragments inédits. Paris : E. Pion, Nourrit et C le , 1894,
in- 16, cart. — 6 fr.
Enseignement.
Correspondencia mercantil hispano-francesa, con un manual de conversa
ciôn comercial en los mismos idiomas, para uso de los comerciantes y de los
que estudian la lengua francesa, por A. Casasus. Barcelona : Tip. de Luis
Tasso, 1894, in-8, 471 pp. — 6 pes.
Cours élémentaire de langue espagnole suivi d'un précis historique de litté-
rature espagnole à l'usage des classes, par J. M. B. Mareca... 2? édition entière-
ment refondue. Toulouse : Edouard Privât, 1894, in-16, 182 pp.
Revista dos lyceus. IV an. 1° semestre. Junho de 1894, n° 1. Porto : Typ.
de José da Silva Mendonça, 1894, in-8, 48 pp.
Périodiques.
Boletin de la Real Academia de la Historia. Tomo XXIY.
Cuaderno 4°. Abril de 1894. Madrid, 1894, in-8, pp. 257 à 352.— 1 pes. 25.
Sommaire : Anuario de la Real Academia de la Historia a principios de 1894.
Informes. I. Materiales para la historia de Espaiïa en el archivo secreto de la Santa
Sede, por Pedro de Madrazo. — II. Concilios nacionales de Carriôn en 1103 y de
Léon en 1107, por Fidel Fita. — Varied.ides : Investigaciones arqueolôgico-rornanas
de la provincia de Almeria, por Enrique Lôpez Rull, Trinidad Cuartara, Miguel
Ruiz de Villanueva. — Noticias.
Cuaderno 5°. Mayo de 1894. Madrid, 1894, in-8, pp. 353 à 448. — 1 pes. 25.
Sommaire : Informes. I. Investigaciones histôricas referentesâ Guipûzcoa, porCamilo
de Echegaray, por José Gômez de Arteche. — II. Libros procedentes de Marruecos,
por Francisco Codera. — III. Estaciôn prehistôrica de Badajoz, por Luis Villanueva.
— IV. Xuevo estudio geogràfico, Aureliano Fernandez Guerra, Francisco Coello,
Fidel Fita. — V. Las costas de Espana en la época romana, por Antonio Bldzquez.
— VI. El sepulcro del doctor Eximio, por Antonio SAnchez Moguel. — Variedades :
208 BIBLIOGRAPHIE
I. Carta autôgrafa del beato P. Fr. Diego José de Cadiz, por Luis Jiménez de la
Llave. — II. Lapida monumental del beato Diego de Gidiz en Cartagena, por Fidel
Fita. — Noticias.
Cuademo 6°. Juniode 1894. Madrid, 1894, in-8, pp. 449 à 560. — 1 pes. 25.
Sommaire : I. Concilios nacionales de Salamanca en 11 54 y de Valladolid en
115 5, por Fidel Fita. — IL Cartas inéditas del Beato Padre Maestro Juan de Avila, por
Luis Jiménez de la Llave. — III. El primer Coude de Ficallo, por Antonio Sânchez
Moguel. — IV. Noticias pôstumas de don José de Vargas Ponce y de D. Martin
Ferndndez de Navarrete, por Cesdreo Fernàndez Duro. — Bulas inéditas de
Urbano IL Ilustraciones al concilio nacional de Palencia (j-8 Diciembre noo), por
Fidel Fita. — Noticias. — ■ Indice del tomo XXIV.
La Espana moderna. Director-propietario J. Ldzaro. Abril de 1894. Madrid,
s. d. (1894) in-8, 206 pp. — ■ 3 pes.
Sommaire : Espana en la Biblia, por Fr. R. Martinez Vigil. — Cabeza y cora-
zôn (dolora), por Ramôn de Campoamor. — La educaciôn del Rey, por Adolfo
Posada. — Lo verde, por el Dr. Thebussem. — Las cinco cartas amatorias de la
monja portuguesa Mariana Alcofurado, por el Licenciado Pero Pérez. — Adân v
Eva, novela (continuacion), por Emilia Pardo Bazin. — Revista critica, por
M. Menéndez y Pelayo. — Crônica internacional, por Emilio Castelar. — Impre-
siones literarias, por F. F. Villegas. El Espanol Blanco White (conclusion) por
W. Gladstone. — Obras nuevas.
Mayo de 1894. Madrid, s. d. (1891), in-8, 206 pp. — 3 pes.
Sommaire : Colecciôn de papiros y otras antigùedades de Egipto, pertenecientes
al archiduque Raniero, por Juan Valera. — Juan del Encina y los origenes del
teatro espanol (obras dramâticas de Encina), por Emilio Cotarelo. — Cômo han iJo
civilizàndose los japoneses (episodio del galeôn San Felipe), por Cesdreo Fernande/
Duro. — A propôsito de la causa de Varela, por Pedro Dorado Montero. — Adan v
Eva, novela (conclusion), por Emilia Pardo Bazàn. — Revista critica, por M. Menén-
dez y Pelayo. — Crônica internacional, por Emilio Castelar. — Crônica cientifica,
por Luis de Hovos Sainz. — Impresiones literarias, por F. F. Villegas. — Obras
nue vas.
Junio de 1894. Madrid, s. d. (1894), in-8, 203 pp. — 3 pes.
Sommaire : El hechicero, por Juan Valera. — La psicologia de la juventud en la
novela moderna, por Rafaël Altamira. — Villergas y su tiempo, por \'. Barrantes.
— La degeneraciôn y el proceso Willié, por Rafaël Salillas. — Crônica cientifica,
por Luis de Hovos Sainz. — Revista europea, por Emilio Castelar. — Revista cri-
tica, por M. Menéndez y Pelayo. — Luis Vives (continuacion), por A. Lange. — ■
Obras nuevas.
Julio de 1894. Madrid, s. d. (1894), in-8, 205 pp. — 3 pes.
Sommaire : Las obras de Villergas, por V. Barrantes. — De pedagogia, por Enrique
(iil y Robles. — Vida pùblica de I). Enrique de Villena, por Emilio Cotarelo. — La
Celestina, por Lorenzo Gonzalez Agejas. — ■ Revista critica, por M. Menéndez y
Pelayo. — Crônica cientifica, por Luis de Hovos Sainz. — Crônica internacional,
por Emilio Castelar. — Luis Vives (continuacion), por A. Lange. — Obras nuevas.
BIBLIOGRAPHIE 209
Collections.
Mémorial histôrico espanol : coleccion de documentos, opûsculos y antigùe-
dades que publica la Real Academia de la Historia.
Tomo XXVII. Madrid, 1894, in-8, 464 pp. — 3 pes. 50. — Sommaire :
Estado de Portugal en el ano de 1800. Tomo II, que trata de las provincias de
Extremadura y de la Beira, y contiene el censo de sus comarcas, por D. José
Comide.
Tomo XXX. Madrid, 1894, in-8, 268 pp. — 3 pes. 50. — Sommaire :
Historia de Carlos IV, por D. Andrés Muriel. Tomo II.
Tomo XXXI. Madrid, 1894, in-8, 239 pp. — 3 pes. 50. — Sommaire :
Historia de Carlos IV, por D. Andrés Muriel. Tomo III.
Tomo XXXII. Madrid, 1894, in-8, 203 pp. — 3 pes. 50. — Sommaire :
Historia de Carlos IV, por D. Andrés Muriel. Tomo IV.
Nueva coleccion de documentos inéditos para la Historia de Espana y de sus
Indias. Publicanla D. Francisco de Zabalburû y D. José Sancho Rayon.
Tomo V. Madrid : Impr. de los Hijos de M. G. Hernàndez, 1894, in-8,
378 pp. et 4 ff. d'index n. ch. — 12 pes.
Sommaire : Continuacion de la correspondencia de D. Luis de Requesens y
D. Juan de Zûniga con Felipe II y cou el Cardenal de Granvela, D. Diego de
Zùùiga, el Conde de Monteagudo, etc.. etc., de 16 de Agosto i 7 de Octuhre de
1574-
Coleccion de documentos inéditos del Archivo gênerai del reinode Valencia,
publicada por Joaquin Casdn y Alegre. Tomo I. Valencia : Manuel Alufre,
1894, in-8, xxiv-219 pp. — 10 pes.
Sommaire : Pactos, tratados y avenencias que mediaron entre los reyes de Aragon,
Navarra y el bastardo Enrique de Trastamara, con motivo de la invasion del reino de
Castilla.
Coleccion de documentos inéditos para la historia de Espana, por el Marqués
de la Fuensanta del Valle. Tomo CIX. Madrid : Murillo, 1894, in-8, xn-
499 pp. — 12 pes.
Sommaire : Ensayo de un catàlogo biografico-bibliogràfico de los escritores que han
sido individuos de las cuatro ôrdenes militares de Espana, por Frey D. Carlos Ramirez
de Arellano y Gutiérrez de Salamanca, del hdbito de Calatrava.
Bibliographie.
Tipografïa hispalense ; anales bibliogrdficos de la ciudad de Sevilla, desde el
establecimiento de la imprenta hasta fines del siglo xvin, por D. Francisco
Escudero y Perosso. Obra premiada en concurso pûblico por la Biblioteca
Nacional en 1864, é impresa i expensas del Estado. (Con la biograffa del autor,
por D. A. Maria Fabié.) Madrid : Sucesores de Rivadeneyra, 1894, in-4, xix-
657 pp. à 2 col.
210 COMPTES RENDUS
Apuntes para un catâlogo de periôdicos madrilenos, desde el ano 1661 la
1870, por D. Eugenio Hartzenbusch. Obra premiada por la Biblioteca Nacio-
nal en el concurso pûblico de 1873, é impresa à expensas del Estado. Madrid :
Sucesores de Rivadeneyra, 1894, in-4, xn-424 pp. à 2 col. — 7 pes.
Biblioteca colombina. Catâlogo de sus libros hnpresos, publicado por primera
vez... bajo la inmediata direcciôn de su bibliotecario el Ilmo. Sr. Dr. D. Ser-
vando Arboli y Faraudo... con notas bibliogrâficas del Dr. D. Simon de la
Rosay Lôpez. Tomo III. Sevilla : Tip. de Di'az y Carballo, 1894, in-8, vm-
338 pp. — 10 pes.
Nota bibliogranca sobre un libro impreso en Macao en 1590, por José
Toribio Médina. Sevilla : Impr. de E. Rasco, 1894, in-8, 1 s pp. — 3 pes.
Catalogue de la Bibliothèque de M. Ricardo Heredia, comte de Benehavis.
Quatrième partie. Paris : Ém. Paul, L. Huard et Guillemin, 1894, in-8, vn-
524 pp.
COMPTES RENDUS
Colecciôn de escritores castellanos. Tomos 97, 100 y 102. Historia critica de la poesia
castellana en el siglo xvm por D. Leopoldo Augusto de Cueto, marqués de Valmar.
Tercera ediciôn, corregida y aumentada. Madrid : Sucesores de Rivadeneyra, 1893, 3 vol.
petit in-8.
C'est en 1869, en tête du tome premier de la collection des poètes lyriques
du xvm e siècle publiée dans la Biblioteca de au tores espanoles de Rivadeneyra,
que parut pour la première fois l'œuvre de Don L. A. de Cueto, sous le titre
modeste de Bosquejo bistôrico-critico; nous préférons lui voir celui d' Historia
critica auquel lui donnent droit et son étendue et le soin avec lequel elle a été
composée. L'auteur ne s'est pas borné, comme l'ont fait, hélas, la plupart des
préfaciers d'éditions compactes, à faire précéder les œuvres des poètes de la
période à laquelle il s'attachait d'un prologue de quelques lignes : il a, d'une
part, dégagé la synthèse de cette époque de transition que fut le xvm>-' siècle,
et, d'autre part, tracé, presque toujours sous d'heureux traits, la physionomie
de chaque écrivain. M. de V. a, en effet, adopté pour son travail un plan
excellent et que l'on ne saurait trop recommander : sachant combien le plus
souvent une histoire d'ensemble laisse dans l'ombre la plupart des personna-
lités d'une époque au profit de quelques noms éclatants, il a très judicieusement
réservé toutes les notes monographiques dont il disposait pour en former, en
COMPTES RENDUS 2 I I
tête des œuvres de chaque auteur, autant de biographies abondamment docu-
mentées. Enfin il n'est pas inutile de rappeler que, dans les trois volumes de
la Bïbîioteca de au tores espanoîes, M. de V. avait réservé une très large place
à l'inédit, mieux inspiré en cela que les autres éditeurs de cette même collec-
tion qui ont presque tous cru devoir faire un choix dans les œuvres des auteurs
qu'ils republiaient. Cet inédit a contribué dans une large mesure à permettre
au collecteur de fixer d'une manière définitive bien des points jusqu'alors
obscurs de l'histoire littéraire du siècle dernier : qu'il me suffise de citer les
lettres inédites de Meléndez Valdés à Jovellanos, écrites de 1776 à 1779.
VHistoria crilica reste et restera vraisemblablement longtemps encore la
seule œuvre de mérite que l'on puisse lire sur le xvin e siècle : ce siècle qui,
selon les propres expressions de son historien, fut un siècle sans idées propres,
sans doctrines définitives, sans énergie morale, sans enthousiasme et sans
poésie, a néanmoins laissé un héritage vaste et varié ; héritage qui a permis au
marquis de V. de nous en tracer un tableau assez attrayant pour nous montrer
que son jugement est peut-être entaché de quelque exagération : à défaut de
doctrines définitives (quel siècle peut se vanter d'en avoir vu naître?), d'idées
propres ou d'énergie morale, il n'est pas excessif de croire que, bien qu'infé-
rieur de beaucoup au siècle d'or, le xvm e n'a manqué, dans certains genres
et à certains points de vue, ni d'enthousiasme ni même de poésie.
R. Foulché-Delbosc.
Estadismos de las Islas Filipinas, ô mis Viajes por este pais, por el Padre Fr. Joaquin
Martinez de Zuniga, Agustino calzado. — • Publica esta obra por primera vez, extensa-
mente anotada W. E. Retana. Madrid : \V. E. Retana, Diciembre de M.DÇCC.XCIII,
2 vols. in-8. — 20 pes.
Tel est le titre in extenso d'un ouvrage précieux que vient de publier
W. E. Retana, et pour lequel il n'a épargné ni son temps, ni ses soins, ni ses
dépenses, ne reculant devant aucun sacrifice pour perfectionner son œuvre et
s'y dévouant tout entier. C'est ainsi qu'il fut amené à visiter Valladolid,
Burgos, Avila, Ocaiîa, etc., tous les lieux en un mot où il y avait un document
utile ou intéressant a consulter. C'est à Paris qu'il a fait fondre des caractères
spéciaux d'imprimerie et fabriquer le beau et solide papier de ses deux volumes
sur les Philippines.
L'ouvrage du P. Joaquin Martinez de Zuniga est remarquable à tous égards;
mais avec le grand nombre d'additions, annotations et appendices dont l'a
enrichi W. E. Retana, il constitue une véritable encyclopédie philippinaise, un
monument unique pour l'étude du grand archipel magellanique. Le texte de
Zuniga remplit 670 pages d'impression serrée, il a été augmenté par M. Retana
de 664 autres pages, dont 38 pour le prologue et 626 pour neuf Appendices qu 1
sont autant de Mémoires spéciaux dignes de fixer l'attention du monde savant
212 COMPTES RENDUS
par l'exactitude des renseignements de toutes sortes qu'ils fournissent sur
l'histoire, la géographie, la biographie, la topographie, l'ethnographie, la géo-
logie, l'histoire naturelle, la statistique, l'agriculture, l'industrie et le commerce
des îles Philippines. De cette mine abondante nous nous contenterons de signa-
ler ici quelques filons et plus particulièrement les appendices suivants :
i° Les origines de la fondation de l'imprimerie aux Philippines, avec le cata-
logue complet des livres imprimés et des imprimeurs, depuis 1610 jusqu'à la
fin de l'année 1893 ;
2 La transcription en fac-similé de frontispices d'ouvrages rarissimes, absolu-
ment inconnus aux Philippines ;
3° Un catalogue bibliographique contenant, outre les descriptions de plus de
quatre cents ouvrages, des notes critiques et des extraits des passages les plus
importants ;
4° L'appendice coté C, où se rencontrent neuf cents notes géographiques,
rangées par ordre alphabétique ;
5 Les appendices D et E, où sont classés méthodiquement une multitude de
notes relatives à l'histoire naturelle.
Enfin cette ample collection de renseignements curieux et instructifs se ter-
mine par de nombreuses notices biographiques qu'il serait très difficile de
trouver ailleurs. Nous ne résistons pas à l'envie de mentionner ici celle relative
à un jeune héros, le type du chevalier espagnol au xvi e siècle, don Juan de
Salcedo, le petit-fils du célèbre conquistador des Philippines, don Miguel Lopez
de Legazpi.
On sait que Legazpi, parti du port de Natividad, en la Nouvelle-Espagne, le
21 novembre 1564, vint mouiller le 27 avril 1563 dans la rade de Mandave, île
de Cébou, non loin de l'îlot de Mactan où Magellan était tombé sous les coups
des naturels, le 27 avril 1521. Legazpi demeura six ans dans Cébou et ne quitta
cette île que le 15 avril 1 57 1 pour aller conquérir Manille. Le 20 août 1367
arrivait à Cébou, avec deux cents hommes partis de Mexico, don Juan de
Salcedo, fils de Pedro de Salcedo et de Theresa de Legazpi. L'année suivante,
le roi de Cébou et son fils âgé de vingt-cinq ans recevaient l'un et l'autre le
baptême ; Legazpi était le parrain du père et Salcedo le parrain du fils. Don
Juan de Salcedo n'avait que dix-sept ans lorsqu'il débarqua dans l'île de Cébou,
mais il se lit remarquer aussitôt entre tous ses compagnons d'armes par sa
bravoure chevaleresque, son activité infatigable et son caractère noble et entre-
prenant. Envoyé par son aïeul à la conquête de Manille sous les ordres du
mestre de camp Martin de Goyti, il pénétra dans l'intérieur du pays en remon-
tant le Pasig et mit en fuite les naturels qui l'assaillirent ; c'est là qu'il reçut sa
première blessure et fut atteint d'une flèche au genou. Nul plus que Salcedo ne
contribua à la conquête de la grande île de Luçon, dont il fut le premier à
découvrir et à soumettre les diverses provinces. Manille conquise ainsi que les
COMPTES RENDUS 21
pueblos d'alentour, le jeune capitaine voulut reconnaître les provinces du nord ;
il arma à son compte une expédition et Legazpi lui donna quarante-cinq soldats
espagnols. Avec sa petite troupe il sortit de Manille le 20 mai 1572; il ne
devait plus revoir son aïeul qui mourut dans cette ville le 20 août de cette
même année, à l'âge de soixante-dix ans l . Au troisième jour de navigation, il
arriva à la pointe de Bolinao ; là il fit rencontre d'un navire chinois qui emme-
nait en esclavage des Tagales et leur chef, s'empara des captifs et les rendit à
la liberté. Les Tagales qui n'étaient pas accoutumés à de tels actes de magna-
nimité, en furent si vivement touchés que spontanément ils se reconnurent
vassaux du roi d'Espagne. Continuant, sa route vers le nord, Salcedo fut le
premier descubridor et conquistador des provinces de Zambales, de Ilocos où il
fonda la ville de Vigan , de Cayagan, puis de celles de Tayabas et de Came-
rines au sud. Avec une poignée d'hommes il avait conquis la Laguna; il en fut
de même pour la province de Camarines, fameuse par ses mines qu'il alla visi-
ter, et il y fonda, sur la rivière de Bicol, une ville qu'il appela Santiago de
Libôn. Il vainquit les naturels de l'île de Mindoro et les soumit à l'obéissance
au roi d'Espagne. Il était mestre de camp et gouverneur de la province de Ilocos,
en résidence au port de Vigan, lorsque voyant passer une flotte de soixante-
deux sampans chinois et supposant avec raison qu'ils allaient attaquer Manille,
il rassembla à la hâte tous ses Espagnols et s'embarqua pour défendre la capi-
tale ; c'était la flotte du fameux corsaire chinois Li-Ma-Hong, la terreur des
côtes des Philippines, qui attaqua Manille en 1 574.
Le désir de revoir ses sœurs qui étaient restées à Mexico fit que Don Juan
de Salcedo demanda un congé pour retourner au pays natal, mais avant de
s'embarquer pour la Nouvelle-Espagne, il se mit en route pour les mines de
Ilocos, dans le dessein d'y recueillir quelques échantillons de minerai et de les
faire examiner à Mexico. Après deux jours de marche, malade de la fièvre, il
but de l'eau d'un arroyo et mourut quelques heures après, le 11 mars 1576, à
l'âge de vingt-sept ans, laissant la réputation d'un des plus nobles représen-
tants de cette chevalerie espagnole qui, à cette époque, brillait du plus vif éclat
et passait pour la première de l'Europe. Aristide Marre.
Les Jésuites et la pédagogie au xvi" siècle. Juan Bonifacio, par le P. J. Delbrel, de la
Compagnie de Jésus. Paris : Alphonse Picard et fils, 1894, in-8, xi-89 pp.
Le P. Delbrel nous dépeint la vie d'un pédagogue du xvi e siècle, le jésuite
Juan Bonifacio : presque célèbre en son temps, l'auteur de Cbristiani pneri
institutio, de De Sapiente Fruciuoso et de YHistoria Virginalis était tombé dans
1. Ce n'est que dans ces derniers temps que l'Espagne, tardivement reconnaissante, a
élevé une statue à Lopez de Legazpi.
214 COMPTES RENDUS
un oubli dont il faut savoir gré au P. D. de l'avoir tiré. Bien qu'on y sente un
peu trop, par endroits, un plaidoyer pro domo, l'étude est bien faite, attrayante
même : le tableau de la vie scolaire au xvi e siècle est plein de détails curieux
que l'on désirerait peut-être un peu plus spéciaux a l'Espagne. La bibliographie
des œuvres de Bonifacio n'est malheureusement pas aussi précise et aussi com-
plète qu'il eût été à désirer. F. H. Graser.
Rafaël Altamira — Juan Ochoa — Tomâs Carretero. Novelas. (Fatalidad. Su aniado
discipulo. Sagrado sacerdocio.) Madrid : Ricardo Fé, 1894, in-16, vi-284 pp. — 5 pes.
Fatal idad, de D. Rafaël Altamira, occupe près de la moitié du volume ; l'œuvre
eût gagné à être plus étendue. On regrette à plus d'un endroit ce manque de
développement qui rend la psychologie de Guillermo Moreno quelque peu
obscure. Le début surtout prépare insuffisamment le lecteur : on se demande
pourquoi, disposant de tant d'éléments de bonheur, le héros n'arrive qu'à
une noire mélancolie. Quant au caractère de Teresa, il est trop laissé dans
l'ombre. Le dénouement est peu plausible ; on n'en attend qu'un seul : le sui-
cide de Guillermo. Mais l'espoir en un lendemain meilleur est bien peu dans
la nature de l'homme que l'on nous dépeint. — Les qualités de style sont
supérieures aux qualités d'observation : elles nous donnent le droit de penser
que, l'expérience aidant, M. Altamira pourra occuper un rang des plus hono-
rables parmi les nouveaux romanciers.
Su aniado discipulo est une très simple historiette : contée sans prétention,
elle se distingue par beaucoup d'originalité et plus d'un détail heureux. Il n'y
qu'à en louer M. Juan Ochoa. — Quant à Sagrado saccrdocio, le mieux est de
n'en rien dire et d'attendre, pour juger l'auteur, qu'il nous donne une œuvre
un peu plus sérieuse. F. H. Graser.
Sofia Casanova. El doctor Wolski. Paginas de Polonia y Rusia. — Madrid : imp. dcl
suc. de J. Cruzado à cargo de Felipe Marqués, 1894, in-16, 320 pp. — 3 pes. 50.
C'est un type assez étrange que celui de ce médecin polonais dont la vie
entière doit être consacrée à la régénération de l'humanité : détraqué plutôt que
philanthrope, il fait le malheur d'une fiancée qui l'adore sans réussir en fin de
compte à faire son propre bonheur. Mara, belle et instruite, élevée par le doc-
teur Wolski pour être un jour sa femme, est assez lâchement délaissée par lui
quand il découvre en elle les germes de la phtisie. Wolski ne voit du reste dans
une femme que la mère de ses futurs enfants ; écrit-il une lettre d'amour, la
plus grande partie en sera consacrée à des considérations sur l'hygiène... Ne
nous étonnons pas de le trouver peu d'années plus tard marié à une jeune
fille qui s'en est éprise (cet hygiéniste est, paraît-il, irrésistible) et mettant en
pratique les fameux préceptes qui lui sont chers. Mais un premier enfant meurt
et c'est tout juste si sa femme, condamnée désormais à la stérilité, survit à une
douloureuse opération. En même temps un hôpital-modèle — la plus grande
COMPTES RENDUS 215
pensée du docteur — s'abîme dans un incendie. Et puis c'est tout, car il n'y a
pas de dénouement à ce roman bizarre, et le lecteur est libre d'en tirer la morale
qu'il voudra ou de n'en pas tirer du tout.
Le livre est bien écrit et ne manque pas de jolis détails : je reprocherai seu-
lement à l'auteur de s'étendre trop complaisamment sur l'énumération et la
description de mets ou de boissons russes ou tartares ; à la longue, cela fatigue
et dénote l'amour d'un exotisme facile et factice qu'il eût mieux valu éviter.
R. Foulché-Delbosc.
Tirso de Molina. Investigaciones bio-bibliogrdfkas por Emilio Cotarelo y Mori. —
Madrid : imprenta de Enrique Rubinos, 1893, in-8, 221 pp. — 3 pes.
11 y a quelques années, l'Académie espagnole mit au concours une étude
biographique et critique de Tirso de Molina. Deux monographies seulement
furent présentées : l'une de dona Blanca de los Rîos et l'autre de D. Pedro
Murïoz Pena. Cette dernière est la seule qui ait été imprimée {El Teatro de]
Maestro Tirso de Molina, Valladolid, 1889, in-8, 694 pp.), mais, tant au point de
vue biographique qu'au point de vue bibliographique, elle est loin d'être aussi
précise qu'il le faudrait. D. Emilio Cotarelo y Mori vient heureusement de
remédier au silence de tous les écrivains qui ont eu à s'occuper de Tirso et nous
donne un volume où ne manquent ni les faits nouveaux, ni, chose plus rare
chez beaucoup de ses compatriotes, l'esprit critique. Il serait à désirer que de
semblables monographies fussent plus fréquentes : M. C. y M. a prouvé une
fois de plus que l'initiative personnelle se passe souvent fort bien des encoura-
gements officiels. R. Foulché-Delbosc.
CHRONIQUE
Le I er avril dernier, l'Académie espagnole a quitté le vieil hôtel qu'elle
occupait depuis de longues années rue de Valverde, 26, et s'est installée dans
le palais récemment construit pour elle entre le Retiro et le Prado. Des dis-
cours ont été prononcés à cette occasion par le comte de Cheste et D. Alejan-
dro Pidal y Mon.
*
* *
La vente Ricardo Heredia. — La bibliothèque Salva est définitivement
dispersée. M. Ricardo Heredia, comte de Benahavis, qui l'avait achetée il y a
plusieurs années, s'en est dessaisi, et de 189 1 à 1894 la vente s'en est effectuée :
2l6 CHRONIQUE
les dernières vacations ont eu lieu à Paris du 12 avril au 11 mai. M. Heredia
avait considérablement augmenté cette splendide collection : tandis que le
catalogue de Salva ne comprend que 4.070 numéros, les quatre volumes du
catalogue de vente en comprennent 8.304; un grand nombre, il est vrai, ne
sont pas des livres espagnols et n'ont aucun rapport avec ceux au milieu des-
quels ils ont été assez maladroitement intercalés. Ce n'est pas précisément un
chef-d'œuvre bibliographique que nous ont donné MM. Em. Paul, L. Huard
et Guillemin, libraires de la Bibliothèque nationale. Tout en sachant combien,
le plus souvent, sont imparfaits les catalogues dressés en vue d'enchères
publiques (ainsi le veut, paraît-il, une routine contre laquelle personne ne
proteste), il est permis de regretter que l'on ne se soit pas adressé en cette
circonstance à un bibliophile un peu au courant des livres d'Espagne, et l'on
en aurait certainement trouvé à Paris. Nous aurions ainsi possédé un ouvrage
qui aurait pu, à certains égards, être l'utile complément du Catalogue de Salva.
Mais rien de tel n'a eu lieu : on a préféré disposer les choses de manière à
vendre pendant les trois premières années les livres les plus rares et reléguer
dans la quatrième partie plus de la moitié de la bibliothèque (n° s 3815 à 8304),
qui avait une valeur moindre : on comprend aisément à quel point une sem-
blable disposition peut rendre impossible toute classification sérieuse. Les détails
ne rachètent malheureusement pas ce que l'ensemble a de défectueux, bien
au contraire : qui en douterait n'aurait qu'à se reporter au Catalogue de la
première partie (1891). Suivant un usage assez répandu, deux bibliophiles dont
personne ne mettra en doute l'érudition, MM. Manuel R. Zarco del Valle et
M. Menéndez y Pelayo adressent à M. Ricardo Heredia une assez longue le'.tre
dans laquelle ils font l'éloge de sa bibliothèque et en vantent les raretés. Ladite
lettre a été écrite en espagnol, mais on nous en donne simplement la traduction
française, la vente devant avoir lieu à Paris. Que dire des lignes suivantes
(p. xvi) : votre collection de Bibles, qui a été l'objet de vos premiers goûts et de
vos dernières acquisitions. Il n'y manque ni les deux Polyglottes, la complète et celle
d'Anvers, monuments de la science biblique de nos ancêtres, ni
Qu'est-ce donc que la Bible polyglotte complète ? Ne cherchons pas trop loin ;
il s'agit du n° 1 du Catalogue : c'est la Bible polyglotte imprimée à Complu-
tum (Alcahi de Henares). MM. Zarco del Valle et Menéndez y Pelayo avaient
écrit dans leur lettre : la complutense, et les traducteurs ont traduit de l'intelli-
gente façon que l'on sait. On jugera, par cette échantillon, du soin avec lequel
a été rédigé le catalogue de la bibliothèque de M. Ricardo Heredia.
Le Gérant, Aug. Picard.
Archiviste-Paléographe.
MAÇON, l'HOTAT MU.Ri:S, IMPRIMEURS.
ÉTUDES
SUR
LA LITTÉRATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIÈCLE
MELENDEZ VALDES
La poésie lyrique espagnole, à la fin du xviii siècle et au
début du xix u , ne nous présente aucun nom plus illustre que
celui de Meléndez Valdés. C'est autour de lui que gravitent les
astra minora, dont l'éclat, un moment assez vif, paraît bien
amorti aujourd'hui. Il est le représentant le plus partait d'une
école importante, celle de Salamanque, dont il permet de pré-
ciser les tendances, de fixer les principes, et aussi de mesurer
l'influence. De son vivant comme après sa mort, il est regardé
comme le meilleur lyrique de son époque, quoique d'autres,
Cienfuegos, Cadalso, Forner, Iglesias, aient eu des parties, ou
des inspirations, ou des dons supérieurs. Enfin il est atteint en
pleine carrière par le flot envahissant des idées nouvelles, et son
œuvre porte la trace de la révolution produite dans les esprits
par les événements historiques contemporains. A ces divers
titres, il doit être étudié comme l'un des vrais précurseurs de
l'époque moderne.
Nous n'avons pas l'intention de raconter ici la vie de Melén-
dez. Quintana, qui s'honorait d'avoir été son disciple, — illu-
sion touchante, — nous a laissé de lui une biographie, trop
académique sans doute, mais à laquelle il n'y a rien de bien
Revue hispanique. 14
2l8 E. MÉRIMÉE
important, ce me semble, à ajouter. Toutefois, ceux qui souhai-
teraient un Meléndez plus familier, plus intime, le trouveront
sans peine dans les Lettres ou dans les Poésies publiées, depuis
Quintana, soit par M. L. A. de Cueto, marquis de Valmar, dans
sa très précieuse Histoire de la Poésie espagnole au XVIII e siècle 1 , soit
tout récemment par M. Foulché-Delbosc, à cette même place 2 .
Sans vouloir donc refaire — sur nouveaux frais — ce qui a été-
bien fait, il nous suffira de rappeler les événements principaux de
cette existence. Né à Riberadel Fresno (Badajoz) le n mars 1754,
Juan Meléndez Valdés, orphelin de bonne heure, fit ses études
dans son pays d'abord, puis à Madrid, et, à partir de 1772, à
Salamanque. Il se lie, dans cette dernière ville, avec le poète
Cadalso, qui l'encourage et le protège, et il entre bientôt en
relations avec d'autres écrivains, Iriarte, Forner, Jovellanos
surtout. Pendant la décade qui suit, il n'y a guère à signaler dans
sa vie d'autres événements importants qu'une grave maladie qui
le force à se réfugier aux champs, la mort de son frère en 1777,
le prix remporté à l'Académie pour son églogue de Balilo et son
séjour à Madrid, où il fait directement connaissance avec Jovel-
lanos. En 1782, Meléndez obtient une chaire d'humanités à
Salamanque, et il épouse une jeune fille de bonne famille, dont
Somoza nous a laissé un curieux portrait. Deux ans plus tard,
nouveau triomphe académique avec les Bodas de Camacbo, sorte
de comédie pastorale, qui échoue devant le public. Le grand
succès de sa vie d'écrivain tut la publication de ses poésies en
1786; mais ce triomphe littéraire ne lui suffisant pas, il songe à
utiliser ses amitiés, et se fait successivement nommer Alcalde de
Crimen à Saragosse (1789), Oidor de la Chancilleria de Valladolid
(1791), puis Fiscal de la Sala de Alcaldes de casa y carte (1797).
En cette même année, il publia une nouvelle édition de ses
1. Historia critica de la poesia casteïïâna en el sigïo XVIII... tercera edic.
Madrid, 1893.
2. Revue hispanique, num. 1, p. 73 et suiv.j num. 2, p. 166 et suiv.
ETUDES SUR LA LITTERATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIECLE 219
poésies, enrichie d'œuvres nouvelles. Meléndez partagea la faveur,
puis la disgrâce de Jovellanos : il fut exilé à Médina del Campo
en avril 1798, et à Zamora en 1800. Il avait été dénoncé à
l'Inquisition quelques années auparavant pour avoir lu Rous-
seau et Montesquieu. En 1802, il retourne à Salamanque où il
vécut dans la tristesse et le découragement, « fruit du despo-
tisme, » assure Quintana. Son rôle pendant l'invasion française
a été jugé sévèrement. Il accepta d'abord des Français une mission
en Asturies, qui faillit avoir une fin tragique. Après Bailén, il est
nommé fiscal de la Junte du contentieux, mais bientôt il dut
s'exiler. Il vécut successivement à Toulouse, Montpellier, Nîmes,
Alais, et mourut à xMontpellier, le 24 mai 1817.
Pour quiconque a lu la biographie de Quintana, quelque
bienveillante qu'elle soit, il s'en dégage cette conclusion, aussi
vraie du poète que de l'homme, que Meléndez manque de
caractère. Il en manque absolument, dès le début et jusqu'à la
fin. Très indécis au moment où, ses études de Salamanque ter-
minées, il faut qu'il choisisse une carrière, il est sur le point,
parce que le hasard des événements l'y pousse, d'embrasser l'état
ecclésiastique. Il avoue cependant qu'il ne s'y sent que médio-
crement propre. On peut voir sur ce point une lettre à Jovellanos;
à son défaut, ses poésies erotiques sont là pour nous renseigner
sur la sincérité de sa vocation. L'on ne voit pas bien l'auteur des
Bcsos ou de la Confesiôn de Flora 1 appelé à diriger les âmes dans
les voies de la perfection. A Salamanque, Meléndez tombe dans
un milieu littéraire où l'on a le goût, la manie de la poésie buco-
lique. Il s'y essaye, par esprit de suite, et il réussit. Cette fois,
les circonstances, le hasard l'on servi à merveille : il a trouvé sa
voie. Mais il la quitte aussitôt, parce qu'on J'y engage, et il se
lance dans la politique, pour laquelle il n'a ni goût ni aptitude.
1. Revue hispanique, nu m. 2, p. 181.
220 E. MERIMEE
Il aime la liberté ; il se laisse remorquer (par Jovellanos toujours)
dans le courant libéral, ce qui ne l'empêche pas de célébrer le
Prince de la Paix. Il « entonne la trompette » pour exciter les
Espagnols à résister aux Français (voyez son Alarma espanohï),
et il accepte honneurs et fonctions de Murât, le héros du 2 mai,
et du roi intrus. Il prodigue à Joseph Napoléon les déclarations
les plus passionnées (... mas juro aniaros cada dia...)\ et il
accueille la rentrée de Ferdinand VII par une cantate où il traite
la Constitution de Cadiz de « monstruo que irisana abortô la facciôn »,
et où il prédit, le malheureux! le retour de l'âge d'or. Tout
cela, admettons-le, sans arrière-pensée d'intérêt personnel, non
point par bassesse d'âme, mais par faiblesse, par manque de
volonté, par une incurable absence de volonté, parce que les
dieux ou les hommes en ont disposé ainsi.
Le poète est tout aussi flottant, inconsistant et mou. Son âme
est une pâte molle qu'une main étrangère pétrit et modèle à son
gré. Blanco, remarquant que Meléndez était le seul Espagnol, à
sa connaissance, qui eût cessé d'être catholique sans devenir
athée, ajoute qu'il avait très développée « la bosse delà vénération ».
Et en effet, ses admirations successives pourraient être aisé-
ment cataloguées. Il subit tout d'abord l'influence de Cadalso,
poète estimable, dont les anacréontiques, les idylles, les endechas
lui révèlent la poésie champêtre. « Sans lui, je ne serais rien
aujourd'hui. Mes goûts, ma passion pour les bons ouvrages, mon
talent poétique, mes connaissances littéraires, tout me vient de lui.
C'est lui qui me rencontra au cours de ma seconde année
d'études, qui m'inspira ce noble enthousiasme pour l'amitié et
pour la vertu, et qui me forma le jugement. » (Lettre à
Mena, 16 mars 1782.) Ses goûts personnels, si tant est qu'il en
ait de bien marqués, le poussent évidemment vers la poésie
bucolique; ses succès académiques (Batilo, Las Bodas de Camctcho)
l'engagent tout à fait dans ce genre, où il excelle. Et peut-être
1. Ode à Joseph Napoléon, 3 mai 18 10.
ETUDES SUR LA LITTERATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIECLE 221
i'aurait-il, en effet, exclusivement cultivé, si Jovellanos ne s'était
avisé de l'en détourner. « Et toi, ardent Batile, lui disait-il,
émule insigne du chantre de Méonie (!), jette les pipeaux rus-
tiques et porte à tes lèvres harmonieuses la trompette retentis-
sante... Que nos héros espagnols soient l'objet de tes chants!... »
L'excellent Jovellanos avait raison et tort tout à la fois. Il avait
raison de croire que s'il n'est pas absolument nécessaire d'avoir
des idées pour être poète, il est impossible cependant d'écrire
indéfiniment sans idées, à moins d'avoir une sensibilité capable
de renouveler sans cesse sa provision d'images et d'impressions.
Or, ce n'était pas le cas de Meléndez, lequel, dès 1785, avait
épuisé sa provision peu abondante, et redit déjà ce qu'il avait à
dire. Il ne pouvait plus que se répéter, et tourner dans le même
cercle. La saine odeur des champs est agréable, mais trop de
rieurs nous affadit et trop de parfums nous écœure. Peut-être
Jovellanos avait-il encore raison de croire que, dans l'état de l'Eu-
rope et de l'Espagne, le temps des Balilo, des Delio et des Amintas
était passé, et qu'entre les enfantines distractions de ces bergers
enrubannés et les préoccupations publiques, il y avait décidé-
ment une discordance trop criante. La grande voix qui grondait
au loin couvrait trop le frêle chalumeau de ces Arcadiens. Mais
il avait tort certainement en croyant que tous sont bons à tout,
qu'on peut indifféremment passer d'un genre à l'autre et prendre
tous les tons. Il méconnaissait lourdement l'essence de l'inspi-
ration poétique, laquelle ne souffre pas la contrainte, et il
la confondait avec le métier, qui peut s'apprendre en effet,
puisque lui-même l'avait appris. Meléndez, plus sage, sent les
limites de son talent, ce qui est rare chez un poète; il présente
timidement quelques objections. Il parle de son « génie doux et
affectueux » (yo de un genio suave y bondadoso), de son « cœur
sensible » et du « don de la tendresse » qu'il a reçu des cieux
(el don de mi Imuira) 1 . Et plus tard, au milieu de ses élans et de
1. Voyez, la pièce El Mediodia, où Meléndez. définit très agréablement son
talent.
222 E. MERIMEE
ses efforts vers la grandeur, son imagination reviendra d'elle-
même vers ces images simples, riantes, naïves, qui avaient suffi
à sa Musc, parce qu'elle se sent là dans son vrai milieu, à son
juste niveau, et que l'effort lasse vite son aile. Sans le vouloir
sans doute, il a très joliment et très justement caractérisé sa Muse
dans la pièce intitulée : Le Chant de l'alouette. Comme l'alouette,
en effet, elle s'élève d'une aile facile, et si on ne la voit plus, ce
n'est pas précisément, comme elle le croit, qu'elle se perde dans
les hauteurs ou qu'elle traverse les nuages; c'est plus simplement
qu'elle est assez menue et fine. En réalité, elle ne perd jamais de
vue le sillon, le taillis et le ruisseau. Son chant, monotone à la
longue, plaît par sa facilité, par son joli timbre net et clair : cette
musique manquerait à ce paysage tranquille. Que va-t-elle
devenir au milieu des orages, des éclairs et des convulsions de la
nature ?
Meléndez obéit cependant. Peut-être est-il las de tournoyer
toujours dans le même cercle et de voleter au dessus des mêmes
buissons. Il veut aller plus loin, plus haut, et cette ambition,
qu'on lui a soufflée, il l'a d'assez bonne heure. Déjà, en 1779,
il écrit : « Le genre moral me plaît infiniment, quoique je me
reconnaisse sans ressources suffisantes pour y réussir. Mais le
désir d'avoir autre chose que des chants d'amour à offrir à des
personnes dont de telles bagatelles sont indignes, m'a engagé à
essayer mes forces... » Il les a essayées, en effet. Il s'est élevé à
l'ode morale, philosophique, sociale, politique, et il l'a fait, en
somme, avec un succès suffisant pour que ces graves personnes,
dont il parle, aient vu là ses meilleurs titres, et pour que les fai-
seurs d'anthologies, qui s'inspirent volontiers du goût de ces per-
sonnes graves, aient fait figurer ces « morceaux » parmi les
modèles de la lyrique espagnole.
Après tout, l'ambition de Meléndez était légitime. Elle prouve,
sinon une conscience bien nette des limites de son talent, du
moins le sentiment très juste de l'épuisement, de l'inanition
dont il était menacé de mourir. Peut-être aussi y a-t-il quelque
ETUDKS SUR LA LITTERATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIECLE 223
injustice à enfermer à tout jamais le poète dans le domaine où il
a une fois excellé. A ce compte, Virgile s'en serait tenu aux
Bucoliques et Victor Hugo aux Odes et Ballades. On peut même
aller plus loin, et soutenir que Meléndez n'avait pas à « forcer
son talent » autant qu'on pourrait le croire pour s'élever de ces
pastorales à la poésie morale et philosophique où il ambitionne
de s'exercer. Pour qui admire avec intelligence le spectacle de la
nature, il est aisé de passer du fait à l'idée que ce fait enveloppe,
de la matière à l'esprit. La poésie des champs embellit, mais elle
ne cache pas nécessairement la philosophie de la nature. Combien
cette poésie est suggestive, c'est précisément ce que montraient,
à peu près à la même époque, J.-J. Rousseau et Bernardin de
Saint-Pierre. Peut-être Meléndez, à torce de dépeindre en vers
gracieux les spectacles accoutumés de la nature, le matin et le
soir, les saisons et leur perpétuel écoulement, les astres et le ciel,
le silence des nuits constellées, qui effrayait Pascal, et qui inspire
tant de métaphores à notre poète, peut-être aura-t-il la tentation
de soulever le rideau, pour voir quelle main machine ce spectacle.
Peut-être encore s'avisera-t-il quelque jour que ces bergers, ces
paysans, qu'il n'a vus que sous des couleurs trompeuses, sont
des hommes comme les autres, en chair et en os, qu'ils vivent
dans un monde dur pour eux, à une époque qui remue confu-
sément dans leur intelligence, traversée de vagues lueurs, des
idées en germe, et dans leur cœur, des sentiments qui cherchent
leur expression.
Et certainement il a lait cette découverte, une fois au moins,
en voyant ces rustres « nus, sales, affamés, courbés vers la terre,
près d'exhaler le dernier soupir sous l'écrasant fardeau que le
Destin a placé sur leurs épaules,
viendoles desnudos,
Escuàlidos, hambrientos, encorvados,
Lanzando ya el suspiro postrimero
Bajo la inmensa carga que en sushombros
Puso la suerte... »
224 E - MERIMEE
Meléndez pouvait, partant d'où il est parti, arriver là. La fré-
quentation de la nature « élève l'âme », comme l'on dit; elle
peut suggérer, à qui n'y cherchait tout d'abord qu'un délasse-
ment, des idées et des sentiments qui ont leur grandeur. A une
double condition : c'est d'abord que l'on fréquente effectivement
la nature, et que l'on s'abandonne ensuite en toute sincérité à
l'impression qu'elle produit sur notre esprit. Cela fut-il le cas de
Meléndez ? Je le rechercherai tout à l'heure ; pour le moment,
j'essaye de m'expliquer le développement de son talent, et je
signale les inspirations auxquelles il a successivement obéi. Et à
propos de ce manque d'originalité, je présenterai une dernière
remarque, qui complète ce qui précède.
Comme Meléndez est au plus haut point de ces natures
faibles, qui ont besoin, pour produire elles-mêmes, de voir
leurs propres sentiments prendre forme au préalable dans l'ima-
gination d'autrui, il est très préoccupé de rechercher et d'étudier
les modèles. Non point seulement, — ce qui est la condition
du progrès et un apprentissage indispensable, — pour leur
emprunter des procédés nécessaires au génie le plus vigoureux,
pour y forger et y aiguiser l'instrument dont il se servira, mais
surtout pour substituer aux siennes leur pensée et leur émotion,
pour essayer, en perdant sa propre personnalité, d'acquérir la
leur, ce qui est la pire façon d'imiter. Mèmeà propos de
bergeries, il a besoin, pour se donner le ton, de lire et de relire
Boscan, Garcilaso, Francisco de la Torre et généralement tous
ceux qui se sont signalés dans ce genre, depuis Anacréon jusqu'à
Saint-Lambert. Puis, quand il éprouvera le besoin d'enrichir un
peu ou de refaire sa provision d'idées épuisées, il ira dans sa
bibliothèque, qui parait avoir été assez riche', et il ouvrira, un peu
au hasard, l'un de ces livres qui représentaient alors en Espagne
la haute culture philosophique. « C'est à YEssaisur l'entendement,
i. Voyez les lettres publiées par M. de Cueto, Historia criiica tome III,
pp. 38-91-
ÉTUDES SUR LA LITTERATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIECLE 22)
dit-il, que je dois et que je devrai toute ma vie le peu de philo-
sophie que je connaisse : Al Ensayo sobre cl entendimiento debo v
deberé toda mi vida lo poco que sepa discurrir. » Prévenons ceux qui
seraient tentés de prendre cette déclaration à la lettre qu'ils per-
draient leur temps à chercher chez Meléndez la trace de l'in-
fluence de Locke. Mais on trouverait aisément, dans ses poésies
de la seconde manière, la traduction des idées de Turgot ou de
Condorcet, qu'il a connues non point, je crois, d'original, mais
par le canal de Jovellanos. Car Meléndez avait encore plus raison
qu'il ne croyait quand il disait à ce dernier dans une effusion
charmante : « Obra soy tuya, je suis ton ouvrage. » Oui, cela
est vrai. Disciple de Jovellanos ou de Cadalso, des bucoliques
anciens ou modernes, des encyclopédistes français ou des
économistes anglais, de Gessner ou de Young, Meléndez n'a
presque toujours été qu'un reflet ou un écho, dont la douceur
peut avoir son charme, mais qui impatiente parfois parce que
l'on y cherche vainement une réalité que l'on puisse saisir.
A s'en tenir à ce qui précède, le mérite réel de Meléndez se
réduirait à peu de chose. Mais ce jugement, tel qu'il est, paraî-
trait bien sévère, car il est excessif de reprocher à un moderne
de puiser chez ses devanciers et de les imiter. Tout a été dit,
et il n'y a plus guère de façon de sentir ou d'exprimer ses senti-
ments que les lyriques n'aient découverte. La seule chose qui
importe donc n'est pas tant de savoir si la poésie de Meléndez
est originale dans son fonds, — il est clair qu'elle ne l'est en
aucune laçon, — que s'il a su marquer de son sceau personnel
une matière, tombée depuis longtemps dans le domaine com-
mun. Au surplus, en ce qui concerne tout au moins ses poésies
anacréontiques et champêtres, on ne s'étonnera pas outre
mesure de n'y trouver ni idée originale ni sentiment tant soit
peu profond. De toutes les variétés de poésie lyrique il n'en est
pas, en effet, qui nous paraisse aujourd'hui plus vide et plus
fausse que celle-là, et ce qui nous donne le droit d'être sévères,
c'est que, depuis Bernardin de Saint-Pierre, Chateaubriand,
226 E. MÉRIMÉE
Lamartine, George Sand et tant d'autres, nous prétendons mieux
goûter le charme de la nature, et plus fortement sentir la prise
qu'elle a sur nos imaginations ou sur nos cœurs. Il n'y a au fond
rien de commun entre cette traduction éloquente des sentiments
qu'éveille en une âme moderne la vue de la nature et ce que les
poétiques classiques nommaient bucolique, idylle, pastorale.
La poésie anacréontique et pastorale, — car il se sert indiffé-
remment de ces deux mots, — est chez notre auteur, comme
chez ses prédécesseurs, depuis Virgile jusqu'à Garcilaso, un
genre conventionnel, un cadre banal et gracieux, où Ton peut
faire entrer une foule de choses fort diverses. C'est un fait qu'à
la veille de la Révolution, ce genre était à la mode en Espagne
comme dans toute l'Europe. La petite société de Salamanque,
où vivait Meléndez, nous offre un cas bien singulier de cette épi-
démie de poésie gessnérienne. Nous rencontrons auprès de notre
Hatilo, affublés, eux aussi, de surnoms champêtres, deux religieux
Augustins, les PP. Gonzalez et Fernandez, les pasteurs Delio et
Liseno, qui se sont fait, vers 1780, une réputation de poètes, en
entretenant le public de leurs moutons et de leurs bergères. On
aimerait — si l'on ne craignait les digressions — à étudier dans
la correspondance de l'un d'eux, Fr. Diego Gonzalez, le singulier
état d'âme que révèlent ces poésies. Je crois bien volontiers, —
puisque M. de Cueto et d'autres s'en portent garants, — que ce
dernier resta toujours un religieux exemplaire, un amant plato-
nique, mais on m'accordera en revanche que le berger Delio,
des RR. PP. Augustins, paraît avoir eu, plus qu'il n'est utile
dans l'état ecclésiastique, ce « don de lit ternura » dont parle
Meléndez. « Mon âme, hors d'elle-même, s'écne-t-il, aimait ten-
drement; elle aimait sans mesure, elle aimait enfin de telle sorte
que même maintenant, en y songeant, j'en suis tout tremblant!
El anima perdida
Amaba tiernamente,
Amaba sin medida,
Amaba en fin de modo
Que aun, al recordarlo, tiemblo todo. »
ÉTUDES SUR LA LITTERATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIECLE 227
Et cet amour n'est pas une pure métaphore mystique, comme
celui de sainte Thérèse ou de Fr. Luis de Leôn. Nous connais-
sons les deux bergères, égalas, que chante le P. Gonzalez :
elles se nommaient Melisa et Mirta. Nous savons même que la
première habitait Séville, la seconde Cadiz, et que celle-ci, s'étant
mariée, et déjà mère de famille, se fatigua à la longue du com-
merce épistolaire dans lequel elle jouait le rôle de bergère, et le
P. Gonzalez celui de berger. Peu soucieuse de prendre place dans
l'histoire, à côté des Béatrix et des Laure, l'excellente dame laissa,
paraît-il, languir et tomber la correspondance, car Delio s'en
plaint dans une lettre du 8 août 1778, adressée à Jovellanos,
lequel, ne l'oublions pas, était le berger en chef, cl mayoral
Jovino. Il s'en console philosophiquement en déclarant qu'après
tout, cela ne changera pas grand' chose à la nature de leurs
relations : « Delio ne l'en aimera pas moins de la même façon
et au même degré qu'autrefois, car il ne saurait faire autrement,
et il n'est point dans sa nature de ne plus aimer ce qu'il a une
fois aimé. » Quant au P. Fernândez, auteur d'œuvres d'ailleurs
ingénieuses, telles que la satire philosophique La Crotalogia ou
Art de jouer des castagnettes, il ne reste pas en arrière, et, sans plus
d'ambages, regrette bravement dans ses vers d'être fraile « étant
jeune et sensé ». Tout cela à distance nous semble assez extra-
vagant et très digne de D. Quichotte lors de sa crise bucolique
dans la Sierra Morena, mais il est certain que l'on ne sentait
alors nullement le ridicule de tels enfantillages.
Ces détails connus, on ne s'avisera pas de chercher dans les
poésies de ce groupe et dans celle de Meléndez, son principal
représentant, le moindre trait de vérité particulière, locale, la
moindre préoccupation de description exacte, d'observation
réelle. La nature qu'ils peignaient, les personnages qu'ils y met-
taient étaient tout entiers dans une imagination d'emprunt et
une mémoire pure-livresque. Pour les voir, il leur fallait, non
point ouvrir les yeux, mais les fermer plutôt. Je serais bien
étonné que le lecteur de Meléndez, en passant par Salamanque,
228 E. MÉRIMÉE
pût reconnaître les bosquets d'Otea, ou le Zurguen, ou les bords
du Tonnes, dans les vagues descriptions du poète. Je sais bien
qu'il n'est pas facile non plus de se représenter bien exactement
« le lac » de Lamartine, ou les rives bordées de roseaux du Min-
cio de Virgile, ou la villa d'Horace, puisque le bon abbé de
Chaupv a mis plusieurs années à la retrouver, et encore n'en est-
il pas lui-même bien sûr. Mais l'exactitude descriptive était, au
fond, le dernier souci de Lamartine, de Virgile ou d'Horace,
qui voulaient surtout nous parler d'eux-mêmes. Or, la psycho-
logie que l'on peut extraire des tableaux champêtres de Meléndez
est une quantité négligeable. Quant à leur poésie, un contempo-
rain, et Quintana après lui, trouvent qu'elle sent le thym « olia ci
tomillo ». C'est affaire de goût : Alcalâ Galiano, lui, était d'avis
qu'elles sentaient la ville : « Sus campos huelen à la ciudad. »
Meléndez n'était sans doute pas insensible aux charmes de la
campagne, mais, au témoignage de son biographe, il ne s'en
aperçut bien qu'après avoir lu Thomson, Gessner et Saint-Lam-
bert. Ce qui est certain du moins c'est que les riants tableaux
qu'il nous décrit, il les composait au fond de l'étroite ruelle de
Sordolodo, au bruit des enclumes et des marteaux de vingt forges
voisines. Il n'est pas étonnant que dans ce milieu, dans cette
« caverne des cvclopes », comme il disait, l'odeur du thym se
soit vite évaporée.
Ainsi qu'on doit s'y attendre, Meléndez se sert souvent de la
poésie pastorale ou anacréontique en manière d'allégorie, pour
nous révéler, en jetant sur eux un voile, d'ailleurs transparent,
les petits événements de sa vie intime et de celle de ses amis.
Les joies de l'amitié, les tristesses de l'absence, le charme du
retour, la sympathie pour les maux d'un ami ou pour ses succès,
tous ces sentiments modérés et tendres, tous ces lieux communs
de la sensibilité banale sont traités avec une douceur aimable,
encore qu'un peu affadissante, avec une élégance infiniment
supérieure à tout ce qui existait alors dans le même genre Ces
sentiments moyens, ces amitiés, ces amours tempérés, c'est le
ETUDES SUR LA LITTERATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIECLE 229
domaine propre de Meléndez; c'est là qu'il faut chercher
quelques-unes de ses meilleures pièces, telles que l'églogue 5 e ,
Le Berger du Tonnes, où il décrit, non sans émotion, son départ
pour Saragosse. Il y est aussi naturel et aussi sincère que le
genre adopté et le goût du temps le lui permettaient. Il est vrai
qu'il ne le reste pas longtemps, et qu'à côté de ces heureuses in-
spirations, il y a dans son œuvre des parties absolument illisibles
aujourd'hui. Catulle a consacré une chanson au moineau de
Lesbie : elle se termine d'une façon inattendue par une note
mélancolique qui en rend le charme plus pénétrant. Meléndez ne
dédie pas moins de trente-et-une odes à la colombe de Philis
{La Paloma de Filis). Et il déclare en note « qu'il s'est étendu
sur ce sujet plus qu'il ne pensait, mais que 1 innocence de Philis
et les grâces de sa colombe ne sauraient se dépeindre briève-
ment ». Quant à la mélancolie épicurienne de Catulle, — Surgit
amari aliquid..., — elle est trop souvent remplacée chez Melén-
dez par une note franchement grivoise, égrillarde, qui est, elle
aussi, la marque de l'époque, mais qui détonne au milieu de ces
fadeurs. Elle achève cependant de définir Meléndez qui a beau-
coup d'Ovide, la faiblesse de caractère, la facilité, la grâce un
peu molle, l'imagination voluptueuse. Il s'est d'ailleurs très sou-
vent rencontré avec lui, et l'on peut comparer son ode 7% inti-
tulée le Boudoir, à l'une des plus célèbres pièces d'Ovide. Parnv a
été de même l'un de ses modèles, ainsi que l'auteur des Bai-
sers, Jean Second, et cela très probablement dès sa jeunesse. Les
23 Besos de Amor n'avaient pas été jusqu'ici publiés, por ser
demasiado 1 bscenos, selon l'expression de Salvâ. La Revue hispa-
nique nous les a fait connaître intégralement. Les lettrés
doivent lui en savoir gré, car nulle part Meléndez n'a été plus
poète; nulle part son talent, très souple et très riche en images,
n'a montré plus de grâces à la fois et plus de fécondité. L'éditeur
de ces Besos les considère comme « l'un des chets-d'œuvre de la
poésie anacréontique espagnole », et il a peut-être raison. Mais
il est fâcheux que les seuls tableaux quelque peu vigoureux,
2}0 E. MERIMEE
voire réalistes, que Meléndez ait tracés soient de ceux sur lesquels
il semble nécessaire de jeter une gaze ou même un rideau. Evi-
demment le jeune docteur, frais émoulu de Salamanque, qui
commentait avec une si belle verve l'œuvre de Jean Second,
n'avait plus grand'chose à apprendre en matière d'amour. Il y était
passé maître, et il est étonnant même qu'il ait pu trouver tant
de charmes à « l'innocente » Philis et à sa colombe, pour ne point
parler des bergères si galamment endoctrinées par les PP. Gon-
zalez et Fernandez.
A partir d'une certaine époque, avons-nous dit, et sous l'in-
fluence de Young, Meléndez s'exerça dans un genre qui con-
traste violemment avec les anacréontiques et les pastorales du
début, celui de la poésie sentimentale et larmoyante. On dirait
qu'un orage a voilé tout à coup le ciel limpide, éteint la riante
lumière qui baignait les bosquets et chassé tous nos bergers de
théâtre. Ces nuées, chargées de tristesse, déchaînées sur les rives
du Tonnes par les poètes anglais, surprennent le lecteur comme
un contre-sens. Et, de fait, on n'en comprend pas la raison; on
cherche en vain ce qui, dans la vie du poète, dans l'histoire
intime de son âme, a pu soulever une pareille tempête. C'est
qu'elle aussi, je le crains bien, est tout entière dans son imagi-
nation, qui repercute, comme un écho, un bruit lointain :
A su voz lamentable enternecidos
Repitamos sus lugubres gemidos.
Et il les répète de son mieux, racontant à la Lune, la grande
confidente de cette école, aux Asti es, à la Solitude, ses douleurs
incomprises, soupirant et pleurant sur ces mêmes bords témoins
des gentils ébats de sa muse :
Mi dulce musa
No sabe va sino lanzar suspiros,
Ni saben va sino llorar mis ojos.
Naguère tout était joie, amour autour de lui; maintenant il
ÉTUDES SUR LA LITTÉRATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIECLE 23 I
ne voit plus, sous les cieux lourds, que douleur, misère, châti-
ments immérités, et qu'un refuge, la mort :
; Nacen los nombres â penar ? 1 Ajeno
Es el bien de la tierra?...
El mal de todos lados le rodea,
Hasta que da por termine en la Muerte.
Que cet accès de spleen anglais ne s'était pas développé spon-
tanément chez l'aimable Batile, on l'eût deviné sans peine. Une
lettre à Jovellanos, du 17 juillet 1779 ' , nous montre les premières
atteintes sérieuses du mal, qui remonte assez haut, on le voit. Il
y célèbre « l'inimitable Young et la force divine de ses pensées ».
Quoi qu'en ait dit Tineo, il savait assez bien l'anglais. « J'ai
beaucoup lu les Nuits, ajoute-t-il, et il m'en estresté beaucoup. »
On le voit de reste, en lisant La Noche y la Soledad, qui accom-
pagnait la lettre. D'ailleurs, s'ils ne mouraient pas tous, beaucoup
de poètes étaient frappés comme Meléndez, tant Young exerçait
de ravages parmi eux. Les Nuits lugubres de Cadalso en sont un
témoignage curieux, et surtout, la fantaisie macabre à laquelle il
s'abandonna, lorsque, l'imagination troublée par l'abus des poètes
anglais, il s'avisa de déterrer le cadavre de sa maîtresse, l'actrice
Maria Ignacia Ibanez, aventure véridique qui forme proprement
le sujet de ses trois Nuits lugubres.
Je n'insisterai pas sur cette nouvelle phase traversée par l'ima-
gination de Meléndez. Si les grâces mignardes de ses pastourelles
nous fatiguent assez vite, il y a apparence que nous ne supporte-
rons pas non plus sans impatience
Les pleurards, les rêveurs à nacelles,
Les amants jle la nuit, des lacs, des cascatelles.
Veut-on sentir la différence entre un thème d'école honnète-
1. Citée par M. de Cueto, Historla critica..., tom. I, p. 406. — On voit par
une autre lettre de M. que, déjà en 1778, il s'exerçait à imiter le poète anglais.
-;>-
E. MERIMEE
ment traité et l'inspiration d'un vrai poète? Que l'on compare
l'élégie dont je citais plus haut quelques vers, au Désespoir de
Lamartine, lequel se termine par la même pensée :
. . . Jusqu'à ce que la Mort, ouvrant sou aile immense
Engloutisse à jamais dans l'éternel silence
L'éternelle douleur !
Je préfère de beaucoup, pour ma part, les poésies, à moitié
philosophiques, à moitié politiques, inspirées à Meléndez par
son commerce avec Jovellanos. Ces idées de bonheur social,
d'humanité, de progrès indéfini, chères aux réformateurs de
l'époque, convenaient mieux à l'âme du poète, peu profonde,
mais aisément ouverte aux sentiments tendres et sympathiques.
Sans doute, ce sont encore des lieux communs, et, comme tou-
jours, Meléndez a besoin d'une excitation étrangère pour les
aborder, mais enfin ils tiennent si profondément au cœur de
l'homme qu'ils y remuent toujours quelque fibre, et, défait, c'est
là qu'il faudrait chercher les vers les plus capables de donner une
idée avantageuse de notre auteur : YEpislola à Jovellanos, lors-
qu'il fut nommé ministre de Grâce et de Justice; l'ode à la
Bienfaisance :
un infelice
Es un justo acreedor a nuestro auxilio.
A un pecho noble y gencroso basta
Ser hombre y ser desgraciado.
Le Philosophe au champ, qui marque assez heureusement la
transition entre les deux manières principales de Meléndez;
l'élégie Les Misères humaines, où l'on notera un tableau un peu
trop arrangé, mais touchant en somme, des maux qui accablèrent
l'Europe au début du siècle (Yo vi la asoladora guerra...} et qui
se termine par quelques vers dignes de Térence :
« Miro à mi hermano,
Al hombre miro en infeliz cadena,
Y, aunque grave mi mal, ya me es liviano ; »
ÉTUDES SUR LA LITTERATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIECLE 233
Et surtout La Despèdida del anciano, les Adieux du vieillard,
où Melétidez, sous le coup de ses malheurs personnels et de la
tristesse des temps, arrive au sentiment juste et à la véritable
poésie.
En résume, on trouve dans l'œuvre poétique de Meléndez une
triple inspiration. D'abord l'inspiration bucolique et anacréon-
tique, — celle-là est vraiment nationale et castillane, — puis
une veine sentimentale, romanesque ou romantique, qui est plus
particulièrement anglaise, enfin des poésies philosophiques,
morales, humanitaires, où se manifeste surtout — plus ou moins
directement — l'influence française. On aura, je crois, une idée
assez complète des éléments qui se sont unis pour former le
talent de Meléndez, si l'on ajoute à ces trois inspirations fonda-
mentales — qui peuvent être caractérisées par les noms de
Cadalso, de Young et de Jovellanos — des imitations fréquentes
des poètes espagnols du xvi e siècle,, particulièrement des Sévil-
lans.
Remarquons-le : cette succession d'inspirations qui se mêlent
et parfois se combattent, était le résultat des influences diverses
exercées successivement sur cette âme impressionnable par les
idées ou les goûts contemporains. Le poète est l'écho de son
temps dans ses bergeries aussi bien que dans ses tirades huma-
nitaires et dans ses aspirations sentimentales, qui font pressentir
René et Werther. Mieux que tout autre, en Espagne, il a reflété
cette époque si troublée, et c'est là ce qui donne à ses œuvres
une sorte d'intérêt historique.
Après les réserves que nous avons dû faire et les atténuations
nécessaires aux éloges hyperboliques de certains critiques, notre
jugement resterait incomplet si nous ne constations que l'écrivain,
chez Meléndez, est incomparablement supérieur au penseur et au
poète. Il a des qualités rares à toutes les époques dans la litté-
rature espagnole, la clarté, la limpidité, le choix, le goût et l'art
de composer. Ses idées sont courtes et maigres, mais les images,
Revue hispanique. 1 J
234 E - MERIMEE
quoiqu'un peu flottantes, les habillent, les enguirlandent si
richement qu'elles en dissimulent la ténuité. Cette molle abon-
dance n'est pas sans charmes dans les meilleures de ses poésies
anacréontiques ou pastorales. Son talent descriptif, quoiqu'il
doive presque tout à la seule imagination, est réel, surtout pour
les petites choses et les menus détails. Il excelle à composer en
quelques vers un paysage gracieux, aussi peu vrai que ceux de
Watteau ou de Boucher, mais charmant dans son lointain vapo-
reux et sa vague poésie. De même, il sait peindre en quelques
mots un sentiment tendre et doux, tels qu'en peut inspirer cette
riante nature. Ses petits vers de sept et de huit syllabes sont une
musique pour l'oreille et un plaisir pour l'imagination, qu'ils
bercent agréablement. Plus tard, on constate chez le poète un
effort pour donner plus de nerf au style en même temps que plus
de vigueur à la pensée, mais, si je ne me trompe, dans ses hen-
décasyllabeset ses longs vers, la gène, la tension sont manifestes :
le manque de force, qui est le défaut capital, devient plus sen-
sible. Il est à peine besoin de signaler, — car on les retrouve
malheureusement dans toutes ses œuvres, — cette phraséologie
pseudo-classique, ces élégances d'école, ce vernis mythologique
qui sont la marque du temps et dont Meléndez n'est guère res-
ponsable : c'est cette rouille qui donne surtout à sa poésie cet
air vieillot et fané qu'ont aujourd'hui la plupart des œuvres de
l'époque. Je ne dirai rien non plus des critiques qu'Hermosilla et
autres rhéteurs de son école ont dirigées contre les gallicismes
et les prétendues incorrections de sa langue : cette polémique,
qui a été vive, a perdu tout intérêt et n'a pas empêché Meléndez
de figurer parmi les meilleurs écrivains de ce siècle. On trouvera
beaucoup moins chez lui ces défauts d'emphase, de pompe, d'fl/-
tisonancia et de grandilocuencia, qui furent ceux du lyrisme espa-
gnol, et dont les néo-sévillans, en particulier Roldan, ReiriOSO
et Arjona, prétendaient encore faire des qualités. Reinoso ne
déclarait-il pas que « la altisonancia es una virtiid eu la liried v cl
poêla debe tener uua lengua altisonante? » Certes, la langue de
ETUDES SUR LA LITTERATURE ESPAGNOLE AU XIX e SIECLE 235
Meléndez est encore trop ornée à notre goût, mais c'est celle d'un
poète. Il avait surtout du vrai poète la faculté de voir les choses
sous une forme imagée, « un estilo lleno de imagination, calidad
principal suya », a-t-on dit avec raison. Il avait le sens du
rythme, delà période poétique et de l'harmonie, toutes qualités
qui devenaient extrêmement rares à son époque, où le prosaïsme
et la platitude triomphent. Sous ce rapport, la poésie de Melén-
dez, considérée dans sa forme, est un rajeunissement, car elle
retrouve des qualités perdues depuis longtemps ; elle est un pro-
grès certain, car, sur cet instrument bien accordé, d'autres,
comme Q_uintana, pourront, d'une main plus vigoureuse, tirer
des accents plus énergiques.
E. MÉRIMÉE.
HUMORADAS, DOLORAS
ET
PETITS POÈMES
DON RAMON DE CAMPOAMOR
Rien n'est plus difficile, pour le public lettré, que de se former
une opinion sur tel ou tel écrivain espagnol, d'après les apprécia-
tions formulées par les critiques même les plus éclairés et les plus
remarquables du pays de Larra. A les en croire, l'Espagne serait
peuplée de génies : le moindre barbouilleur de papier, le plus
humble folliculaire y sont traités, à tout le moins, d'écrivains
distingués; les auteurs qui, dans d'autres littératures, jouiraient
de quelque notoriété, y deviennent des esprits supérieurs; quant
à ceux qui vraiment ont du talent, qui tout œuvre durable et
parviennent à se faire lire ou traduire à l'étranger, le vocabulaire
des louanges les plus ampoulées ne suffit plus, et non seulement
les critiques, mais encore la grande masse de la nation est loin de
penser qu'il puisse y avoir dans d'autres pays des hommes
capables de supporter un instant la comparaison avec eux. Cette
tendance est assurément fort respectable : elle indique un grand
fond de bienveillance, des mœurs littéraires pleines d'aménité et
un sentiment de fierté nationale qui peut produire de grandes
choses; malheureusement elle a le grave défaut de réserver des
surprises désagréables au lecteur ingénu qui s'apprête à savourer
un chef-d'oeuvre et qui souvent échoue au milieu de préten-
tieuses banalités.
HUMORADAS, DOLORAS ET PETITS POEMES 237
Ce ne sont donc pas les articles dithyrambiques 1 écrits sur Don
Ramon de Campoamor (de l'Académie espagnole) qui nous ont
engagé à étudier ses œuvres avant celles d'autres poètes contem-
porains. Notre curiosité à son sujet a été plutôt éveillée par les
attaques passionnées dont il a été l'objet. Ce fait, très rare en
Espagne quand il s'agit d'un littérateur et surtout d'un poète qui
n'a rien de satirique ou dont la satire est impersonnelle, semble
d'autant plus étrange qu'un nombre respectable d'éditions, se suc-
cédant à des intervalles relativement rapprochés, paraît indiquer
que la poésie de Campoamor est goûtée et lue dans les pays de
langue castillane. Prétendre qu'elle est populaire serait peut-être
exagéré ; le poète nous dit bien quelque part 2 que, comme Dante,
il cherche à plaire aux femmes du marché, mais il ne nous
apprend pas s'il y a réussi et d'ailleurs il se désavoue lui-même
lorsqu'il ajoute 3 , avec une noble modestie, que ses humoradas,
la partie la plus abordable de son œuvre, sont destinées à devenir
le chant populaire des classes éclairées. Quoi qu'il en soit, il est
bien certain qu'une telle poésie doit être intéressante et que
l'opinion du public, qui s'obstine à la trouver belle alors que les
gens du métier la déclarent insipide et ridicule, mérite d'être
discutée. Examinons donc sur quoi elle repose.
Nous ne parlerons pas ici des premières poésies de Campoamor
intitulées Touchas y Flores qui ne se distinguent pas autrement
1. Le prologue de l'édition des Doloras que nous avons entre les mains, signé
Leopoldo Alas (alias Clarin) est un chef-d'œuvre du genre. Sa brièveté nous
ptrmet de le citer ici : « Campoamor como poeta es un filôsofo ; y como filo-
sotb es un carâcter. » Il y aurait eu là, pour un écrivain gai, une charmante
matière de chronique amusante. Cette simple phrase sur Campoamor, maître
Jacques changeant à volonté de personnalité, autoriserait de singulières affir-
mations. On pourrait, par exemple, dire d'un homme : comme charpentier
c'est un tailleur et comme tailleur c'est un Belge.
2. Procurando en mis versos como Dante
Custar à las mujeres del mercado.
Petits poèmes. Los amores de mut santa.
]. Préface des Humoradas.
238 H. PESEUX-RICHARD
de celles des autres poètes espagnols du commencement et du
milieu de ce siècle (Campoamor est né en 18 17). Ses Fables, qui
forment peut-être la partie de ses œuvres dont la valeur est le
moins contestable, n'ont que peu contribué à sa renommée, puis
ce genre de poésie a, au dire du poète ', quelque chose de faux
et de conventionnel, et ne peut être acceptable que dans les pays
où la croyance à la transmigration des âmes a laissé des traces pro-
fondes. Or cette croyance paraît avoir disparu depuis longtemps
de l'Europe occidentale, si tant est qu'elle y ait jamais existé.
Nous sommes donc dispensés de nous y attarder. Du poème de
Colon, écrit dans le mètre, la forme et l'esprit ordinaire de ce
genre de composition poétique assez suranné, il n'y a pas davan-
tage à retenir. Quant à ses Ayes del aima et à son Dnumi uni-
versai, il faudrait sans doute, pour les juger en toute connais-
sance de cause, étudier le système philosophique du poète dans
ses œuvres en prose sur le Personnalisme et l'Absolu, et cela
sortirait du cadre d'un article purement littéraire. D'autre part,
nous ne sommes pas assez audacieux pour oser pénétrer dans
cette métaphysique échevelée, dans ces conceptions nuageuses,
dans ces obscurités protondes, dans ce voyage à travers l'infini
qu'il n'est pas donné à tous d'entreprendre sans danger pour leur
raison. L'auteur lui-même semblerait nous laisser entendre que
la sienne n'en est pas sortie intacte, si l'on en juge par ces deux
vers :
Antique muy poco & poco
Ya llegué al gran saber : j Se que estoy loco ! 2
Mais il ne faut pas prendre cela au pied de la lettre, car Cam-
poamor, avec la sollicitude d'un homme qui prend les devants,
que se cura ensahul, comme on dit en espagnol, nous avertit qu'il
1. Poética, p. 31.
2. Humoradas, } L ' partie, XXVIII, corroborée par celle-ci :
lie ;umdo ;i esn mujer Je t.il manera
Que no me volvi loco, porque lo era. (/</., 2° partie, XCIX.)
HUMORADAS, DOLORAS ET PETITS POEMES 239
faut toujours lire entre les lignes et chercher à dégager, sous le
sens vain et fugitif des mots, le principe général qu'ils ren-
ferment. Chacun est donc libre de découvrir une vérité éternelle
dans la boutade du poète, et nous ne demandons pas mieux que
de pouvoir l'interpréter en bonne part.
Le Draina universal, malgré l'envergure de la thèse qu'il pré-
tend développer et le cadre immense où il est enfermé ', a peu
fait pour accroître la gloire de son auteur. Son obscurité le rend
peu accessible à la masse des lecteurs, et ce serait une tâche par
trop ingrate que de vouloir l'éclaircir.
Nous nous en tiendrons donc à des compositions poétiques
plus abordables et qui ont contribué plus que toutes les autres
à taire de leur créateur un grand homme aux yeux de beaucoup
d'Espagnols. Il s'agit des Humoradas, des Doloras et des Petits
Poèmes : ici, Campoamor n'est plus seulement un poète, c'est
l'inventeur d'un genre poétique nouveau auquel il a appliqué des
dénominations nouvelles et qu'il a entrepris d'acclimater sur le
Parnasse espagnol. Malheureusement pour celui-ci, il y a réussi
dans une certaine mesure : la dolora est aujourd'hui cultivée par
plusieurs écrivains — - et non des moindres — et tend à s'im-
planter définitivement au delà des Pyrénées.
Dans l'esprit de Campoamor, Yhumorada, la dolora et le petit
1. Nous pensons qu'il peut être curieux de donner rénumération des lieux
où la scène se passe et qui sont désignés par le poète au commencement de
chaque chant : le jardin d'un couvent — le Golgotha — une forêt — un
cimetière — ■ les cinq parties du monde — le ciel — entre le ciel et la terre —
devant le soleil — dans les nuages — partout — au dessus et pas très loin du
monde — au dessous et près du ciel — une cathédrale — le corps humain —
une âme — le cœur de l'homme — la voûte étoilée — ■ un astre volcani^ado —
un astre d'or — un astre moribond — un soleil putréfié — des deux à la terre
— un astre paradisiaque — le cadavre d'un astre — une étoile nébuleuse — le
vide du ciel — un astre embryonnaire — le jardin de Joseph d'Arimathie — le
sein d'Abraham — l'enfer — la tombe de Lazare — la vallée de Josaphat — la
montagne des Oliviers.
24O H. PESEUX- RICHARD
poème forment les trois anneaux d'une chaîne, l'évolution d'un
cycle : la dolora n'est qu'une humorada convertie en drame et le
petit poème une dolora amplifiée 1 . Il serait donc naturel de com-
mencer cette étude par Yhumorada, mais, à vrai dire, cette filia-
tion poétique n'a été inventée qu'après coup : c'est la dolora qui
est née la première; c'est la dolora qui, à son apparition, a suscité
l'enthousiasme de beaucoup d'écrivains espagnols et exercé la
verve satirique de beaucoup d'autres; c'est elle dont la création
semble le plus enorgueillir le poète et qu'il a défendue avec le
plus d'acharnement 2 .
C'est donc par la dolora qu'il faut commencer quand on veut
étudier le domaine original de Campoamor. Et d'abord était-il
bien opportun de faire une nouvelle subdivision dans le champ
de la poésie déjà si morcelé? Les panégyristes de Campoamor 3
ont répondu affirmativement et se sont appuyés sur les progrès
que font faire aux sciences, à la botanique par exemple, des clas-
sifications de plus en plus complètes. Pourquoi, disent-ils, n'en
serait-il pas de même en littérature ? L'homme ne peut pas se
condamner à verser éternellement sa pensée dans les mômes
moules; quiconque inventera un cadre nouveau contribuera au
progrès des lettres.
Malheureusement le progrès en matière littéraire n'est qu'un
vain mot. Comment peut-on juger de l'état des lettres à une
époque déterminée ? Le critérium varie suivant les âges et
échappe presque toujours à une génération pour s'apprécier elle-
même. Dans les sciences, au contraire, les efforts de l'homme
s'exercent sur une matière qui est toujours la même : en isoler
de nouveaux éléments, deviner de nouvelles forces pour les taire
servir à ses besoins, tel est le but où il doit tendre et, dans cette
branche de son activité, tout perfectionnement a son utilité et sa
1. Voir le prologue des Humoradas.
2. Voir sa Poétique.
,. Voir le Juicio crîtico de tas Doloras de Gurnersindo Laverde Ruiz.
HUMORADAS, DOLORAS ET PETITS POEMES 24 1
raison d'être. Mais préconiser de nouvelles catégories littéraires,
cataloguer la poésie, c'est faire œuvre de scoliaste et non de
poète. De grands écrivains ont pu créer de nouvelles formes, de
nouveaux modèles de pensée et d'expression, mais eux-mêmes
n'en ont pas soupçonné le côté mécanique : ils ont laissé ce soin
aux grammairiens, aux rhétoriciens et autres abstracteurs de
quintessence qui voient les choses par leur petit côté, la toile par
sa trame, la poésie par ses mètres. Campoamor peut, à juste
titre, être rangé parmi ces derniers. Depuis le commencement de
la littérature, les poètes ont fait des doloras ; il est le premier qui
s'en soit aperçu et qui ait mis l'étiquette sur ce que d'autres
avaient dédaigné de réduire en formules à l'usage des traités de
belles-lettres. Il avoue en effet, mais non sans peine, qu'il n'a
pas créé de toutes pièces la àolora et qu'elle a existé avant lui ',
mais il prétend en avoir reconnu les éléments, dégagé les prin-
cipes et décrit les attributs, et il se fait gloire d'avoir appliqué un
nom de son invention à ce nouveau substratum. Sur ce dernier
point, il serait puéril de chicaner : que le nouveau genre poétique
s'appelle àolora ou autrement, peu nous importe.
Et maintenant qu'est-ce que la àolora} Les critiques espagnols
se sont donné beaucoup de mal pour en donner des définitions à
peu près intelligibles. Il vaudra mieux, croyons-nous, pour ne
pas nous égarer, nous en tenir à celle que l'auteur a donnée lui-
même. Dans une lettre au comte D. Alvaro Armada y Valdes ,
il nous apprend que le mot àolora désigne une composition
poétique où l'on doit trouver la légèreté unie au sentiment et la
concision à l'importance philosophique. D'autre part, la 263 e
humorada de la 2 e partie est conçue comme suit :
1. Si l'on se reporte non pas au précepte du poète, mais à ses poésies, on
peut dire que toutes les littératures fourmillent de doloras. Pour ne citer que
des pièces universellement connues, Vode d'Horace à Lydie (IX du livre m), les
copias de Jorge Manrique, la Ballade des dames du temps passe de Villon, le l r ase
brisé de Sully Prudhomme, le Doigt de la femme de Victor Hugo, sont de
véritables doloras.
242 H. PESEUX-RICHARD
Me preguntas, Luis Montt £ lo que es dolora ?
— Es lo que vemos desde el puerto ahora ;
Mientras résiste un bote al mar bravio,
Con el casco al rêvés se hunde un navi'o.
L'une et l'autre définition, mais surtout la seconde, semblent
s'appliquer à un genre littéraire des plus anciens, la fable. En
effet, la scène que nous dépeint le quatrain ci-dessus nous rap-
pelle un des morceaux les plus connus de La Fontaine : Le Chêne
et le Roseau. D'autre part, dans la Poétique que le poète a publiée
pour répondre à ses détracteurs et exposer sa manière de com-
prendre la poésie, il semble considérer la dolora comme un
genre assez voisin de la fable, mais qui s'en écarte cependant
parce qu'il repousse les métaphores et les symboles d'une poésie
indirecte. Ce serait, selon lui, une sorte de drame tiré directe-
ment de la vie, et dans lequel on doit résoudre, au moyen du
sentiment ou de l'idée, un problème universel. Néanmoins,
Campoamor professe pour la table une singulière prédilection ;
quelques-unes de ses doloras pourraient porter ce nom, entre
autres celle qui est intitulée Corla es la vida, et la poésie des
doloras, dépourvue de tout élan, visant à la sobriété et à la pré-
cision plutôt qu'à l'harmonie, rappelle sans cesse un fabuliste.
Il y a sans doute un assez grand nombre de doloras qui fran-
chissent les limites tracées par l'auteur à ce nouveau genre poé-
tique, et ce ne sont pas les moins bonnes. Aussi, pour ne pas
nous exposer à donner un exemple contestable, citerons-nous
avec le poète et ses admirateurs', comme modèle de dolora, le
fameux dizain de Calderôn dans la Vida es Sueùo :
Cuentan de un sabio que un dia
Tan pobre y misero estaba
Que solo se alimentaba
De las yerbas que cogia.
; Ilabra otro (entre si decfa)
Mis pobre y triste que vo?
Y cuando cl rostro volvié
1 [allô la respuesta viendo
Que iba otro sabio cogiendo
Las yerbas que él arrojo.
HUMORADAS, DOLORAS ET PETITS POEMES 243
Un critique non prévenu ne pourrait certes pas donner à cette
admirable composition un autre nom que celui de fable ou
d'apologue. Pourtant la dolora a d'autres prétentions : la table se
contente de tirer d'un exemple pris dant la nature une conclusion
le plus souvent pratique ou tout au moins compréhensible qui
s'appelle la morale. C'est une des nombreuses variétés de la
poésie didactique. La dolora, au contraire, met bien en scène des
êtres mortels, mais elle a l'ambition de dégager de leurs paroles
et de leurs actes des vérités éternelles, surhumaines et éthérées.
Tel est le sens attaché par Campoamor au mot intenciôn par
lequel il désigne la portée philosophique qui s'arrête on ne sait
où et qui lui permet de se moquer des défiances et des railleries
de la simple raison qui n'a cure de la métaphysique et que l'on
peut toujours récuser lorsqu'on étaie ses théories sur des sous-
entendus ou des mystères. Campoamor dédaigne profondément
ce qu'il appelle fart pour Fart, c'est-à-dire le culte exclusif de la
forme; il ne s'arrête pas à l'art pour F idée, car avoir des idées
c'est donner prise à la critique; et il se décide pour Y art trans-
cendani où il se croit à l'abri des regards indiscrets dans les hau-
teurs où il plane. Malheureusement pour l'auteur, ces vérités
éternelles qu'il n'est donné qu'à lui de regarder face à face pou-
vaient sembler hiératiques à des Espagnols du milieu du siècle,
mais elles sont aujourd'hui du domaine public et la componction
avec laquelle il les énonce leur donne un caractère prudhom-
mesque tout à fait ridicule.
Seule, la forme sous laquelle le poète les présentait pouvait
les rendre acceptables, mais nous savons que pour lui la forme
n'est rien et le sentiment pas davantage : la poésie doit faire
penser et non pas émouvoir. Il admire ce géomètre qui, après
avoir assisté à la représentation d'une tragédie de Racine, deman-
dait : Qu'est-ce que cela prouve? La forme lui semble même
tellement méprisable qu'il donne à des amis des poésies à publier
sans s'exposer au supplice de les relire (c'est lui-même qui s'ex-
prime ainsi) et qu'il ne s'effraierait pas le moins du monde de les
244 H - PESEUX-RICHARD
voir substituer à ses vers d'autres vers de leur composition,
pourvu que l'idée dominante de la pièce restât intacte. On voit
tout de suite où peut mener une pareille théorie : si l'idée seule
importe, pourquoi l'affubler des oripeaux de la poésie ? Les traduc-
tions en prose des grands poètes étrangers sont du même coup
assimilées aux originaux, et c'est peine perdue que de chercher à
les lire dans leur propre langue 1 .
Il ne faut donc pas chicaner l'auteur sur la forme des doloras :
leur portée philosophique seule doit être envisagée. Campoamor
fait remarquer avec raison (et c'est encore un des nombreux
points où il fournit à la critique des armes contre lui-même),
que les grands génies ont eu l'intuition des mystères inson-
dables de l'âme humaine. Cervantes, en écrivant Don Quichotte,
n'avait d'autre but que de combattre le goût de ses contempo-
rains pour les extravagances des romans de chevalerie, et pour-
tant son œuvre reflète plus qu'aucune autre les contradictions de
notre nature et fait naître chez nous les plus hautes pensées. Les
doloras voudraient en faire autant et c'est justement cette idée
fixe, cette tenace et obsédante préoccupation du poète qui en
rend la lecture si aride. Au lieu de nous laisser le plaisir de
retrouver sous l'élégance du style, sous la chaleur des sentiments,
les axiomes que nous connaissons tous, il les énonce comme un
théorème qu'il s'applique à gloser avec la pédanterie d'un péda-
i. Sur ce point, comme sur bien d'autres, Campoamor se contredit : il a
beau dire que le sujet est tout et que la forme n'est rien , en citant ces quatre
vers :
El que freno diô al mai- de blinda arena. (Lope de Vega)
Celui qui met un frein à la fureur des flots. (Racine)
Dios al bravo niar enfrena
('.on nuiro de levé arena. (Martine/, de la Rosa)
il s'extasie sur le premier tandis qu'il conteste la beauté du second et qu'il
condamne les deux derniers comme trop vulgaires. A quoi tient donc l'impres-
sion différente que produisent ces vers si ce n'est à la forme?
HUMORADAS, DOLORAS HT PETITS POEMES 245
gogue 1 . Malgré tout, Campoamor n'admet pas qu'on traite les
doloras de poésies didactiques, il tient au mot de « trascendental »
qui sonne mieux et qui est moins précis, mais ne serait-il pas
préférable de qualifier de « dogmatiques » ou de « doctrinales »
ces petites dissertations philosophiques, artificielles et banales ?
Quant aux autres critiques adressées à Campoamor à qui l'on
a reproché son scepticisme, nous n'avons pas à nous y arrêter.
Le poète s'en montre très affecté et s'en défend avec la plus
grande vivacité; mais cela n'a rien à voir avec la valeur littéraire,
et puis le scepticisme des doloras n'est pas bien sérieux, c'est un
scepticisme de bonne compagnie aussi bien que le pessimisme
qu'on a voulu y découvrir et qui n'a assurément rien de bien
amer 2 . D'autre part, on a voulu voir des tableaux un peu trop
1. Voici quelques échantillons des idées qui servent de matière aux gloses
de Campoamor :
Que hunio las glorias de la vida son. (Doïora, IL)
— Que la inconstancia es el cielo
que el senor
abre al fin para consuelo
â los màrtires de amor. (Dolora, III)
i Ah !
la dicha que el hombre anhela
Donde esta? (Doïora, VII)
— Tarde ô temprano es infalible el mal. (X)
— Todo se pierde, si, todo se pierde. (XIV)
— Nada me importa (XXI)
— Es un bàlsamo la ausencia
Que cura maies de amor. (XXVI)
— Que es el placer la mente del hasti'o. (XXXV)
Comme on peut s'en rendre compte à l'examen de ces quelques exemples,
qu'on pourrait facilement augmenter de beaucoup d'autres, les conceptions
philosophiques de Campoamor n'ont rien de transcendant. Il est bien peu de
poètes qui n'aient eu à les développer, sans pour cela se croire obligés à inven-
ter une forme nouvelle pour des propositions si vieillies.
2. Yo, que amante meritorio
Llevé en Espaha mi ardor
De un jolgorio a otro jolgorio
Haciendo el don Juan Tenorio •
Con doncellas de labor.
246 H. PESEUX-RICHARD
légers dans dans quelques-unes des dolents; à notre avis, il n'en
est rien et cela nous importe pou, puisque nous avons à juger un
poète et non un moraliste. Nous n'avons pas à nous arrêter non
plus aux accusations de plagiat. Sur ce point, Campoamor a très
bien démontré qu'une idée appartient à celui qui lui a donné
sa forme la plus parfaite, tout en n'admettant pas que la forme
soit un facteur sérieux dans le mérite d'une composition poé-
tique. Il serait donc superflu de rechercher à quoi tient cet air de
famille qu'ont entre elles les poésies de Campoamor et celles de
Heine ni quelle influence a pu exercer la philosophie de Fkhte et
de Hegel sur la métaphysique de l'auteur. De cette façon, nous
n'encourrons pas le reproche de faire de cette critique analytique
qui semble négligeable à Campoamor. Pour lui, la chose essen-
tielle, c'est la intencionalidad ; or nous avons dit comment cette
préoccupation constante de la portée philosophique des doloras
qu'aucune élégence de formes, qu'aucun élan, qu'aucune marque
d'inspiration ne dissimule, les condamne à rester un genre faux,
pédantesque, aride et par dessus tout ennuyeux.
La dolora n'a pas un moule poétique qui lui soit propre, elle
n'est assujettie à aucun rythme déterminé; salongeur est variable
ainsi que l'emploi des vers et des strophes. On y trouve des
vers de trois syllabes et des hendécasyllabes italiens, des redon-
dillas et des octaves, et il faut reconnaître que la partie technique
des doloras est particulièrement soignée; les rimes sont faciles et
leur arrangement aussi varié que possible.
Il en est de même dans Yhiimorada, mais celle-ci étant le germe
de h dolora doit se confiner dans un cadre plus étroit. La majeure
partie des humoradas se compose de pareados et de quatrains, et
les plus longues sont des seguidillas. Mais qu'est-ce qu'une bumo-
rada ? On peut s'étonner à bon droit en songeant au sens ordi-
naire du mot que l'on pourrait traduire par « saillie, trait
d'humour, boutade », qu'un auteur intitule ainsi un livre de sa
composition. S'imagine- t-on sur la couverture d'un volume
« Mes traits d'esprit, par M. X. ? » Heureusement pour Cam-
HUMORADAS, DOLORAS ET PETITS POEMES 247
poamor et malheureusement pour nous, sa modestie n'est pas ici
en cause, car, dans sa pensée, le mot humoradû n'a pas cette
signification vulgaire ; elle n'est autre chose qu'un rasgo inten-
cionado, ou si l'on préfère, et nous croyons en effet que cela est
préférable, parce que cela est plus clair : los pensamientos adolora-
dos que, por carecer de forma dratndtica, no se deben incluir cuire las
doloras 1 . L'humorisme serait la contraposiciôn de situaciones, de
ideas, actos ô pasiones encontradas. Le poète a sans doute voulu
dire que l'humorisme était non pas la contraposiciôn, etc., mais
bien la tendance à remarquer cette contraposiciôn et à exprimer
plaisamment l'effet qu'elle produit sur nous. Il paraîtrait, d'après
Campoamor, que la métaphysique, à l'instar de l'Académie
espagnole, limpia fija, y da esplendor, mais il faut croire qu'elle ne
donne pas la clarté; on s'en convainc encore davantage si l'on
cherche, dans le prologue des humoradas, à s'éclairer sur la signi-
fication du mot : si el esceptismo no crée en lo que dice, cl humorismo
hasta se rie de lo que crée, no dejando de créer uada de lo que dice.
Il faudrait avoir la subtilité de Lorenzo Graciân pour expliquer
ce pathos 2 . Plus loin, l'humorisme est défini un peu plus intel-
1 . A ce compte, pourquoi la dolora suivante intitulée : Amor al mal n'est-
elle pas une humorada ?
Por nias que me avergùenz.i y que lo lloro
No te amé buena y pérfida te adora.
2. La prose de Campoamor fourmille de phrases aussi peu compréhensibles.
Citons un passage de sa Poétique :
« El arte, al condensar la idea, saca de lo gênerai metafi'sico, lo particular
artistico, y después el ingenio trascendental hace que de lo particular artistico,
se deduzca lo gênerai metaffsico.
« No se si me comprenderàn las mujeres que detestan y bacen bien, el len-
guaje téenico, pero por si no me entienden, explicaré la idea de otro modo.
« El arte trascendental éleva las ideas, aplicadas à los hechos, à afirma-
ciones générales, a categorias.
« Creo que todavi'a no me explico cou bastante claridad. Quiero decir que el
que escribe ha de dar reglas universales de sentir y de pensar. »
Ici Campoamor, en tâchant de se faire comprendre des femmes, laisserait à
penser qu'il est persuadé que les hommes l'entendent. Nous avouons à notre
grande honte que, pour notre part, il n'en est rien ; c'est à peine si nous entre-
voyons sa pensée dans la dernière phrase.
248 H. PHSEUX-RICHARD
ligiblement un carnaval reentrante en la cuaresma; enfin ce serait
h phrase « buen humor 1 » qui aurait créé le genre littéraire que
Campoamor appelle humorada. Nous savions bien qu'on a tou-
jours attribué au Verbe une puissance extraordinaire, pourtant
nous étions loin de supposer que deux mots pussent avoir une
telle initiative.
Mais revenons aux humoradas. Nous n'avons pas à aller bien
loin pour voir que le poète s'est souvent déjugé : la première
humorada
La amo tanto, à mi pesar
Que, aunque yo vuelva a nacer
La he de volver â querer
Aunque me vuelva â matar.
ne répond pas à la définition qu'il donne de Phumorisme en
général et de Yhumorada en particulier. Il n'y a pas là d'antithèse
et pas là de quoi faire rire l'homme le plus folâtre du monde.
La deuxième
Desde que perdi el encanto
De mi primera pasiôn,
No he entrado en mi corazon
Por no morirme de espanto.
n'a rien d'humoristique non plus : elle ne fait ni rire ni pleurer;
les suivantes sont dans le même cas. Il y en a des milliers, dans la
littérature espagnole, faites dans cet esprit, et quiconque s'en
est occupé, même superficiellement, ne s'y trompera pas, presque
toutes les humoradas écrites sous forme de quatrain ne sont autre
chose que des copias d'une facture plus savante, et rimées au lieu
d'être imparfaitement assonancées. Ce qui confirme cette appré-
ciation, c'est qu'un grand nombre d'humoradas n'ont pas vu le
I. Nous croyons devoir faire remarquer que si les mots buen humor sont
genuinamente espagnols, leur équivalent exact « bonne humeur » est aussi genui-
namente français; comment se fait-il qu'ils n'aient créé en France rien de sem-
blable à Vbunioniila ?
HUMORADAS, DOLORAS ET PETITS POEMES 249
jour sous ce nom; en effet, à leur naissance, le poète les avait
baptisées Cantares et on peut les lire sous cette rubrique; ce n'est
que plus tard et pour compléter sa trinité littéraire qu'il leur a
donné cette nouvelle dénomination. Hâtons-nous de dire que
c'est grand dommage. Un grand nombre de cantares étaient
charmants et méritaient, ce qui est le suprême mérite, d'être
confondus, sans nom d'auteur, dans le vaste répertoire de la
poésie populaire. Mais là Campoamor était dans la tradition
purement espagnole, il n'avait pas encore le parti pris d'un chef
d'école. Il n'en a plus été ainsi dès qu'il s'est imaginé que la
poésie devait prouver quelque chose. Le quatrain suivant
Vuélvemelo hoy â decir,
Pues, embelesado, ayer
Te escuchaba sin oir
Y te miraba sin ver.
considéré uniquement comme un cantar renferme une idée ori-
ginale joliment exprimée, mais dès qu'on veut lui attribuer une
importance métaphysique, dès qu'on en fait une bumorada, le
charme disparaît.
Pour justifier la création de ce diminutif de la dolora, l'auteur
nous expose une nouvelle théorie. Pour lui, c'est peine perdue
que de faire des épopées, des tragédies, des poèmes, des chro-
niques : le grand art consiste à trouver la forme elliptique qui les
synthétise. Un dizain de Calderon reflète toute sa façon de penser
et de sentir; tout le reste est inutile. Calderon eût donc agi
sagement en se bornant à écrire dix vers : mais un esprit mal
intentionné pourrait insinuer que celui qui aurait encore mieux
fait de suivre les préceptes de Campoamor, c'est Campoamor en
personne qui s'est montré souverainement inconséquent avec
lui-même en composant son poème de Colon, son Draina nniver-
sal et ses autres œuvres de longue haleine.
Et pourtant cette idée lui est chère, il y revient à plusieurs
reprises. L'art en général, dit-il , et la poésie en particulier,
Revue hispanique 16
250 H. PESEUX-RICHARD
gagnent en intention ce qu'ils perdent en extension. Cela ne semble
pas évident : il y a des poèmes admirables et des sonnets qui,
comme celui d'Oronte, sont bons à mettre au cabinet. Ce ne
sont pas toujours les plus courtes humoradas qui sont les moins
mauvaises, témoin celle-ci :
ou cette autre
De esa antigua coqueta la hermosura
La gana me quitô de hacerme cura.
En materia de flores y de amores
Estoy por los amores y las flores.
Mais il y a plus : la concision n'est pas seulement une qualité
chez un écrivain, elle devient une vertu, une force supérieure
aux événements et qui leur survivra à l'infini. Si l'on supprime
quelques phrases inspirées, la Révolution française, au dire du
poète, n'est plus qu'une orgie de cannibales. Enfin, tirant les
dernières conséquences de sa théorie, il conclut, dans un langage
digne du Draina universal : « No hay nada sublime que no sea
brève. Cuando se acabe el mundo i<\uè quedarâ de nuestras
agitaciones, deseos, esperanzas, ambiciones y temores ? Nada, 6
casi nada. De todas nuestras habladurias solo quedarân cuatro
frases célèbres, hasta que algûn Homero sidéral, senalando con
el dedo el vaeio que deje el mundo en el espacio, reduzca las
:uatro expresiones que flotarân sobre el lugar del planeta extinto,
a una sola frase parecida a esta : « ; alli fué Troya ! »
Nous ne pouvons pas abandonner les humoradas sans exposer
encore quelques affirmations contenues dans le prologue, qui
complètent celles de la Poétique et qui permettent au lecteur de
juger les œuvres de l'écrivain à un point de vue moins étroit.
Selon Campoamor, il n'y a au monde que deux genres de poésie :
celle qui reste en deçà des choses et celle qui pénètre au delà, el
de mâs acâ y el de mâs alla de las cosas. On ne peut donc pas taxer
notre poète de matérialiste : pour lui le phénomène n'est rien,
les choses sont dépourvues de poésie; ce n'est pas lui qui eût
HUMORADAS, DOLORAS ET PETITS POEMES 25 I
jamais prononcé le fameux sunt lacrymœ rerum. Au reste, il déve-
loppe sa conception plus loin : « Il y a, dit-il, deux systèmes
poétiques, l'ancien et le nouveau ; l'ancien peut se définir le
système poétique de ce qui se voit et le nouveau celui de ce qui
ne se voit pas. L'ancien système n'a pas besoin d'explication, le
nouveau consiste à voir par intuition ce que l'on ne perçoit pas
à première vue, à faire remarquer au lecteur le point où les idées
éclairent les faits, en lui montrant le chemin qui conduit du
monde matériel au monde ultra-idéal. » Tout cela ne serait pas
si nébuleux que cela en a l'air si Campoamor avait joint l'exemple
au précepte; malheureusement ses bumoradas ne nous aident pas
le moins du monde à nous tirer d'embarras.
Prenons quelques exemples :
En guerra y en amor es lo primero
El dinero, el dinero y el dinero.
Los padres son tan buenos
Que hasta el menos iluso
Anhela para yerno un noble ruso
O un principe italiano d lo menos 1 .
Si como el héroe de la Mancha, antano
Realicé por tu amor grandes hazanas,
Hoy sentado d la sombra de un castarïo,
Pensando mucho en ti, como castarïas 2 .
Dans ces quelques vers, les deux systèmes sont sans doute com-
binés : il y a bien quelque chose que l'on voit, c'est le sens ordi-
naire et quelque chose qu'on ne voit pas, c'est la moindre éléva-
tion de sentiment et la moindre tendance à l'idéal. Il vaut donc
mieux croire le poète sur parole et ne pas approfondir la question.
Nous arrivons a la dernière manifestation du génie inventif de
Campoamor, au pcqucno poema. Nous savons déjà que c'est une
1. Humoradas, 2 e partie, CCXXXI.
2. M., 2e partie, CCXXXVI,
zyz
H. PESEUX-RICHARD
dolora amplifiée. Pourtant on dirait, au premier abord, que cette
tendance à tirer d'un fait tangible, d'une scène de la vie journa-
lière, une vérité philosophique, s'est un peu affaiblie. Mais il
n'en est rien : cette impression tient surtout à la longueur de
quelques-uns des petits poèmes. Il est évident que la forme
dogmatique apparaît moins dans une composition qui comporte
parfois un développement d'un millier de vers et qui, à l'instar
du Diablo miiudo d'Espronceda, est souvent coupé de digressions
familières.
Plusieurs petits poèmes présentent même, comme le Train
express et Y Anneau de mariage, de fort beaux passages et détonnent
heureusement dans l'ensemble de cette poésie prétentieuse. La
métaphysique de l'auteur s'est un peu humanisée; il traite
volontiers des faits d'expérience et il est tel petit poème qui n'est
qu'une dissertation sur un proverbe. Celui qui est intitulé Los
bnenos y los sabios pourrait porter comme épigraphe le vieil adage :
Ha^le miel y comerte ban las moscas. On peut donc affirmer qu'en
dépit du poète qui s'est efforcé que en el fonda de los Peqneiios
poemas, lo mismo que en las Doloras, palpilase algo de lo incondicional
absohtto humano, la lecture des petits poèmes est moins ingrate
que celle des doloras.
A propos de ces dernières, Campoamor s'était expliqué sur ce
qui doit constituer le fond de la poésie; à propos des petits
poèmes, il aborde la question de la langue poétique. Sur ce point
comme sur d'autres 1 , il est tout a lait de l'avis de Victor Hugo :
il veut en bannir les anciennes expressions ambitieuses et con-
ventionnelles, les épithètes vaincs et monotones; la langue de la
poésie doit être la même que celle de la prose, le rythme seul
doit les distinguer.
Campoamor fait donc le procès du cultisme qui consiste aussi
bien dans la subtilité de ridée que dans la préciosité de la forme,
i. Campoamor estime aussi avec V. Hugo que toute poésie doit être aujour-
d'hui dramatique.
HUMORADAS, DOLORAS ET PETITS POEMES 253
mais ici encore il lui est bien pénible de suivre ses préceptes.
Qu'y a-t-il de plus maniéré et de plus gongorique que les vers
suivants :
Como no vives tû en mi,
Vivo en ti, mas no contigo,
Y hasta no vivo conmigo
Como vivo solo en ti '.
Mi deseo es desear
Mis que alcanzar lo que quiero
Y mejor que lo que espero
Lo que quiero es esperar 2 .
Ama mucho, mas de modo
Que eslés siempre enamorada
De un cierto todo que es nada
De un cierto nada que es todo 5 .
I Conque una buena dolora
Me pides, Juana ; tan llena
De candor ?
Tal vez tu ignorancia ignora
Que sera si es la mas buena
La peor i.
Il faut faire parler à chacun son langage habituel, dit le poète,
mais cette règle n'est pas toujours appliquée non plus dans ses
œuvres. Dans le petit poème intitulé : Los grandes problemas,
une jeune fille du peuple, habitant un tout petit village, s'écrie
en parlant de la mer qui la sépare de son fiancé :
Como siempre fantastico el deseo
Me arrastra a orillas de la mar, vo, â sôlas
Que me habla de él y su venida, çreo,
El monôlosïo eterno de las olas.
1 . Hamoradas, V.
2. /</., cm.
3. Amar al vuélo. Dolora.
4, Las Doîoras. Dolora.
254
H. PESEUX-RICHARD
Quant à l'allure naturelle et exempte de prétention du voca-
bulaire poétique de l'auteur, on ne peut guère en juger par
cette strophe d'une dolora intitulée El beso
j Gloria à esa obscura senal
Del hado en incubation,
Que es el germen inmortal
Del aima en fermentation,
Y â veces trasunto fiel
De todo un mundo moral ;
Y si no, dîgalo âquel
De entre el cual y bajo el cual
Naciô el aima de Platon !
Les anciennes épithètes fleuries, les ancienes circonlocutions
obligées ont disparu, mais, à tout prendre, elles étaient encore
préférables à cette technologie, à ces termes scientifiques dont
sont émaillées ses œuvres. Citons quelques passages :
Tu comercio de amor naturalista
No gira mâs que letras à la vista \
Y a los diez anos, como todas, siente
Su inmersiôn en las brumas de la vida.
A Pablo con el aire de la ausencia
Se le constipa el aima con frecuencia 2 , etc.
No extranaré que, extâtica y nerviosa,
Me dé una amigdàlitis amorosa
Que me extinga la voz en la garganta ',
La virtud se le subc a la cabeza
Y siente congestiones religiosas*.
j Café ! y mas café ! Ven tû
A dar i mi sangre ardor,
Del sueiïo infalible bû,
Mana que oxida el dolort.
i. Humoradas, 2< partie, CCXXI.
2. Como re^an las solteras, petit poème.
3. Loi amorti de una santa. [d.
4. Don Juan. Id.
5. El café, Dolora.
HUMORADAS, DOLORAS ET PETITS POEMES 255
En prescrivant l'emploi d'une langue plus naturelle que la
langue poétique traditionnelle, Campoamor avertissait cependant
qu'il ne fallait pas tomber dans la vulgarité ou l'enfantillage. Or,
quoi de plus trivial que ces vers d'une humorada ?
Siempre es para vosotras peligroso
Un ànimo aguerrido
Y un uniforme hermoso.
El fausto militar j sexo precioso !
Siempre ha sido v sera tu prometido '.
Quoi de plus puéril que ceux-ci ?
Jacinta, siempre fiel, escribe y llora
Y a veces, por variai', llora y escribe-.
Tels sont donc les caractères distinctifs de la poésie de Cam-
poamor : des lieux comuns en prose rimée, des aphorismes
vulgaires présentés comme de profondes pensées, des maximes
philosophiques exposées en vers de mirliton, des sentences
morales empruntées aux poètes et aux prosateurs de tous les
pays et de tous les temps, des vérités de La Palisse ' ingénue-
ment rythmées, des subtilités puériles, une tendance à traiter
légèrement les choses graves et gravement les choses légères,
voilà ce qui frappe à la lecture des pièces qu'il a rangées sous la
dénomination pompeuse de humoradas, doloras et pequenos poemas .
Sans doute, tout n'est pas aussi mauvais que les quelques
passages que nous avons cités; il y a même quelques morceaux
assez remarquables :
1. Humoradas, 2 e partie, Cil.
2. Dulccs cadenas, petit poème.
3. Nous nous contenterons de citer un exemple :
Esa mujer tan bella
Fué por mi tan querida
Que alguna vez para morir por ella
Tan solo me faltô perder la vida. {Humoradas, 2' partie, CLXVI.)
256 H. PESEUX-RICHARD
Preguntas £qué es amor ? Es un deseo
En parte terrenal y en parte santo
Lo que no se expresar cuando te canto
Lo que se sentir cuando te veo \
Les doloras intitulées Vaguedad de! placer, Todos son itnos ,
Todo esta en el cora~ôn, Sufrir es vivir, Los progresos del amor, sont
bien conçues et bien écrites, mais cela ne suffit pas pour justi-
fier l'admiration où est tenu leur auteur. Campoamor peut être
intencionado — nous avons vu que c'était là son plus grave
défaut — il n'est jamais inspiré et jamais ému; il n'a donc rien
de ce qui peut faire pardonner à un poète quelque négligence de
style : or sa forme est loin d'être impeccable et présente des
contrastes extraordinaires d'élévation et de trivialité. Son seul
mérite est d'avoir tenté de proscrire de la langue poétique tout
le clinquant des qualificatifs inutiles et encombrants, et d'avoir
préconisé un style concis et nerveux, c'est-à-dire possédant les
qualités dont les écrivains espagnols manquent le plus. En effet,
comme on l'a dit souvent, sa poésie n'a rien de national. Cam-
poamor n'a pas cette ampleur, ce feu, cette grandiloquence
qui ont toujours distingué les Ibères; il n'a rien non pins de ce
bon sens pratique, de cette tendance à tout matérialiser, de cet
amour de la réalité qui ont toujours dominé dans les lettres et
les arts de l'Espagne. On a remarqué avec raison qu'il y avait
chez lui quelque chose de germanique, et c'est peut-être cet
exotisme qui a éveillé la curiosité et déterminé le succès. On
peut penser aussi que la première apparition d'une poésie exclu-
sivement philosophique a pu égarer le jugement des Espagnols
ordinairement si sain et si pratique. Peut-être aussi saluaient-ils
la poésie de Campoamor comme une réaction contre le roman-
tisme. Tout cela est possible, mais ce que l'on ne s'explique
plus, c'est qu'aujourd'hui encore, alors que le romantisme n'est
plus qu'un souvenir, que les pensées philosophiques n'ont plus
1. Humoradas, 2 e partie, I .X XII
HUMORADAS, DOLORAS ET PETITS POEMES 2)7
l'attrait de la nouveauté, on continue à publier dans de grandes
revues espagnoles des humoradas qui ne valent pas les moindres
menus propos d'un journal quotidien. Y a-t-il là une question
d'amour-propre et ne veut-on pas se déjuger ? Est-ce un résultat
de cet engouement qui pousse en ce moment les peuples latins à
admirer tout ce qui est conçu dans l'esprit nuageux et exprimé
dans la forme aride des littératures du Nord, de cette aberration
qui fait goûter certaines pièces d'Echegaray en Espagne et des
imitateurs d'Ibsen en France ? Le problème n'est sans doute pas
insoluble, et le temps le résoudra vraisemblablement comme il a
résolu celui de la popularité de Gôngora, de Marini et des poètes
de l'Hôtel de Rambouillet.
H. Peseux-Richard.
OBRAS INÉDITAS
DE
DON JOSÉ CADALSO
« La guerra declarada d los ingleses en 1779 llevo a Cadalso con su regimiento, al
egército que se formô para el bloqueo y sitio de Gibraltar. La nombradia y bucn concepto
de este sdbio militar le captô la confianza y distincion del General en gefe el Excelenti-
simo Sr. Don Martin Alvarez de Sotomayor, hoy Conde de Colomera, quien le nombre
desde luegosu Edecan ô Ayudante de Campo, y récompensé su mérito, proporciondndole
a fines de 1781 el grado de Coronel ' ; pero halldndose por ôrden del mismo gênerai en
una bateria de caiionesmuy avanzada, llamada san Martin, frente d Gibraltar, en la noche
del 27 al 28 de Febrero de 1782, a las nueve y média se viô una granada disparada de la
bateria enemiga, denominada Ulises, que se dirigia al parage donde se ballaba Cadalso.
Advirtiéronle del riesgo que corria ; pero despreciando el aviso con serenidad, y creyendo
algunos que pasaba la granada por encima, un casco de ella, que le hiriô de rechazo en la
sien derecha, le llevo parte de la frente, y acabô con su temprana vida '-'. »
« Eue ocasiôn de su muerte el haber aquel dia él entrado de servicio en lugar de un
amigo suyo, Caraqueno, hermano de la Marquesa de Cuerpo-Santo ; el cual, nuierto
Cadalso por hacerle d él el obsequio de reemplazarle, de pesar, luego se entra capuchino
en Sevilla, donde le llamaban el padre Caracas 3 . »
Segùn lo refiere Lafuente, alentado Lord Elliot con los refuerzos y socorros que d
pesar del bloqueo recibia, se habia determinado d hacer salidas nocturnas contra las obras
mds avanzadas de los espanoles : en la del 26 de noviembre de 17S1 logro destruir
varias baterias enemigas; mas en la que hizo la nocbe del 27 de febrero siguiente fué
rechazado. De esta ùltima no hablan varios autores ingleses; John Drinkwater ' dice
solo : " They also worked on tbe magazine of the S' Martin's battery, and deboucbed
from the centre of tbe parallel, tbrowing up a tritling Une, extending towards tbe South-
west. The 27U1, four rows, of ten tents each, were pitched in the rear of the Catalonian
camp. We imagined they were occupied by the artillery cadets. At night the Enemy
added several traverses to their thirteen-gun battery. »
En la Biblioteca Nacional de Madrid (Pv. 31, n° 6) se halla una carta manuscrîta de
un desconocido d D. Leandro Ferndndez de Moratin en la cual se lee :
1. Cadalso era coniandante de escuadron del regimiento de Borbon y ayudante de campo
Jcl gênerai. (Gaceta de Madrid, 12 de Marzo de 17H2).
2. Prologo .i las Obras de don José Cadabalso, Madrid, 1818, pp. XVI y sig.
3. Apunte autôgrafo de don Bartolomé José Gallardo, citado en el tonio 61 de la
Colecciôn Rivadeneyra, p. CVI.
4. A bistory of the late siège of Gibraltar by John Drinkwater. London 1785, pdg. 228.
ia's BATTCT[Y [VLBCSj
TOHT/i ne euhop>
27 » FEBRERO û£ 1782
2Ô0 JOSÉ CADALSO
« El prôlogo puesto en la ûltima edicion de 1818 por Repulles, da noticia bastante
circunstanciada de su vida, y su sobrino que vive en Bilbao actualmente, dice que nada
puede anadir porque era muv joven quando aquel muriô. Lo ûnico que dice poder ase-
gurar es que efectivamente descendia de la casa solar infanzona de Cadalso, pues descen-
dian ambos de un mismo abuelo, y dicho solar existe en el dia en el vinculo de la
familia ; que la familia de su madré era muy distinguida y originaria de Estremadura.
rambien dice que oyô decir à su padre que quando muriô Cadalso, se présenta al gênera'
en gefe su eompanero de casa que era otro ayudante Ilamado Salin as, sobrino de Flori-
dablanca, que en el dia, si vive, es teniente gênerai, y le dixo que Cadalso le ténia
pedido que si moria de pronto le hiciese el favor de quemar todos sus papeles ; que el
gênerai en gefe se lo permitiô y que él lo ejecutô ; pero que esto no parece probable. Su
vida que fué singular tanto en asuntos serios como en fruslerias, la ténia escrita hasta el
dia en que muriô, pues él mismo la escribia todos los dias, y esta no llegô à manos de
su sobrino. a pesar de que él mismo le dixo, siendo este muchacho, que la ténia siempre
con una carpeta rotulada à su nombre para quando él muriese. Una de las obras que
tambien ténia escritas era el Diario critico del sitio de Gibraltar y no se sabe su paradera
entre la familia, aunque el padre del aetual Cadalso la leyô poco antes de que el poeta
muriese, y se la devolviô. Estas son, senor Inarco Celenio, las ùnicas noticias que aiïade
Cadalso en su carta al Marqués »
Es cierto que cuando muriô Cadalso, se hallaban varias obras suyas inéditas en manos
de algunos amigos à quienes las habia mandado ' y otras en los papeles que ténia consigo
durante el sitio de Gibraltar. Constaban à lo menos, segùn se puede inferir de la carta à
D. Leandro Fernàndez de Moratin que existe en la Biblioteca Nacional de Madrid, de su
propia Vida que escribia todos los dias y del Diario critico del sitio de Gibraltar. Ahora es
posible afirmar que mucho mas numerosos eran aquellos papeles, asi como no se puede
dudar que, si fueron quemados algunos como lo deseaba el mismo Cadalso, se extraviaron
otros muchos que estàn hoy dia entre mis manos.
Constan estas obras autôgrafas de très partes distintas : poesias, cartas y un conjunto
tan curioso como ûnico en su género de epitafios para los monumentos de los principales
liéroes espanoles : por una ironia verdaderamente notable, quiso la suerte que el ùltimo
de esos epitafios fuese precisamente dirigido à la memoria del famoso bloqueo en el cual
el m.Uogrado literato habia de morir tan gloriosa como prematuramente :
Dignissimo merito,
Inclito animo,
prœclaraeque constan tiae,
et fortitudini,
in obsidionalibus lineis
contra Heracleam,
famae monumeimini.
1. Se puede leer en una carta de don Juan Meléndez Valdés ;i su amigo el padre
Mena, escrita en Salamanca cl 16 de Marzo de 17K2 : « Tengo tambien algunos versos
suyos inéditos, mejores, sin comparacion, que los publicados por él, como cosa de sete-
cientos. Quiesiera tambien darlos d luz. »
OBRAS INEDITAS 26 I
Falta el texto eastellano que acompana à los demâs y quizà no sera" temerario suponer
que fueron estas las ùltimas lineas que escribiô el autor.
Ademàs de sus propias ohras, existian en sus papeles poesias de algunos de los poetas
mas eminentes de aquel tiempo côn quienes mantenia amistad : don Nicolas Fernande/
de Moratin, don Juan Meléndez Valdés, don José Iglesias, Fray Diego Gonzalez, don
Alonso Carbonel, don Juan Forner. Parte de estas poesias figurait en las obras respectivas
de sus autores, parte se han publicado ô se publicaràn por mi diligencia.
Al mismo tiempo que las obras de Cadalso cuyos manuscritos estin en mi posesiùn,
publico ahora varias cartas suyas asi como un Kalcndario manual que posée la Biblioteca
Nacional de Madrid. Puede ser que se encuentren todavia en manos de aficionados ô en
los estantes de alguna que otra biblioteca de la Peninsula 6 del extranjero fragmentos
iuéditos del célèbre Dalmiro : ; ojahi sus posesores los den à conocer à los amigos de las
letras castellanas ! R. Foulché-Delbosc.
Reproducimos aqui el indice puesto por Cadalso en la primera pagina del cuaderno
primero de sus manuscritos :
Poesias ineditas,
con algunas otras obrillas de Uteratura compueslas despues de las
que se imprimieron eu Madrid por los anos de iyji y 17 72, à saver
1. Cartas à varios amigos.
2. Noches lugubres.
j. Carias iiiarruecas.
4. Indice de una Biblioteca.
5, Varios fragmentos.
De las obras indicadas en este indice han desaparecido los manuscritos de las cuatro
ùltimas : solo quedan las poesias y las cartas. En cuanto a los epitafios, forman cuadernos
distintos de los anteriores.
A pesar de lo expresado, no son inéditas todas las poesias contenidas en los papeles de
Cadalso : hé aqui la lista compléta de dichas poesias con la indication de las publicadas é
inéditas.
A don Nicolas Fernandez Moratin, Sobre su estilo magnitko en las imitaciones de
Pindaro, y otras composiciones sublimes.
Caution (publicado)
El semidos que alzàndose à la cumbre...
Variantes :
versos 11 del huerto, vina, monte, campo y mares.
17 mientras durô cantando
20 ya no se admira, quando
44 solo el guerrero ardor le llena el pecho
Esta poesia ha de ser separadaen cinco estrofas de once versos cada una, y cuatro versos
finales.
26 2 JOSÉ CADALSO
A un quadro en que se ven Jupiter, Neptuno y Pluton cou todos sus atributos, y
Cupido volando mas arriba.
Epigrama (publieudo).
Ufanos cou el o-obierno...
Oda pindârica .i Moratin, sobre el mismo asunto de la canciôn auterior (publieada).
[ Ay si cantar pudiera
Epigrama (publiante).
En la cabeza le diô
Remitiendo a un poeta joven las poesias de Garcilaso con algunos versos mios. (Véase
pàg. 26 4-)
Sobre los peligros de una nueva pasion. Odas en sâficos y adonicos (publicadas x ).
i ra A Cupido. (Nifio temido...)
Variantes :
versos i Nifio temido de los Dioses y nombres
7 quando la triste, la divina ninfa
9 Desde que el hilo de su tierna vida
ii desde que el Hado la llevo à la oculta
13 guardo constante la promesa justa
27 otra pastora desde tan borrenda
29 haz que a mi falso corazon as us te
47 y otro castigo que es el ser llamado
j9 todo me llena de terror y al suelo
72 tu alevosia.
2' A Venus. (Madré divina )
Variantes :
versos 11 ni el que por s 11er le se llamo tu esposo
15 blinda alegria Jove con la copa
17 y el eco suena por los altos techos
19 lleno de estrellas, de luceros y astros
20 lu^ soberana,
28 te llamo madré.
38 bajar del cielo ■. tu belleza veo :
39 ya mi deseo coronaste, madré,
1. Véase ademâs p. 266 la copia de un manuscrito de la Biblioteca Nacional de Madrid.
OBRAS INÊDITAS 263
Cou motivo de haber encontrado en Salamanca un joven Poeta (Don Juan Meléndez
Valdés) de exquisito gusto, particularmente en las composiciones amorosas.
Idilio anacreôntico (publicadd).
Ya 110 venin, o Tonnes
Variantes :
versos 10 con mùsica divina
23 las nueve bermanas cantan
27 mcis que el oro que llega
3 1 para tejerlc flores
35 Pues ese mismo joven
Al mismo sobre el propio asunto (publicadd).
Quaudo Laso murio, las nueve hermanas.
Letrillas puériles, (publicadas,)
De amores me muero.
Variantes :
Estrofas 3 versos 7 y tierna mirada
4 3 quai cosa de espanto
7 3 se pone mas rojo
A la nave en que se embarcô Ortelio desde Bilbao para Inglaterra.
Sàficos y adonicos (publicados).
Ya déjà Ortelio la paterna casa
A Meléndez (publicado).
Sigue con dulce lira
Variantes :
Estrofas 3 versos 5 tal es la fuerza del ingenio y arte
10 2 (los anos gratos al amor y ri Febo
12 2 no pierdas tiempo en tu edad florida
12 5 en milicirti y en cortes mal perdida.
13 4 à los moros vencidos
16 S y à l as delicias del Averno (sic) llegue,
20 4 y a quai zagala quieres
Soneto (publicado).
Ya veis quai viene, amantes, mi pastora.
Variante :
Verso 12 Ni veis ni ois el misero tormento
Epistola d Batylo y Arcadio. (Inédita. Véase pâg. 264.)
Letrilla por el mismo estilo que las impresas (publicada).
Que un sabio de mal humor
Solo hay en el manuscrito las estrofas 1 y 9
26 4
JOSE CADALSO
POESIAS
REMITIENDO A UN' PORTA JOVEN LAS POESIAS DE GARC1LASO
CON ALGUN'OS VERSOS MIOS '
Si mis âsperos métros yo te envio
con dulces versos del divino Laso,
no juzgues que- el orgullo necio mio
me finja que le igualo en el Parnaso.
Lo hago porque juntas quiero darte,
con prendas de mi amor, reglas del arte.
CUM AMICO CUIDAM MEO GARCI.E LASSI TOLETANI CARMINA
NEC NON MEA MITTEREM, HOC QUOQUE 1LLI DEDI
EPIGRAMMA 3.
Quos feci quondam versus juvenilibus versibusin nostris pignus amoris habes.
[annis, Hoc est cur mittam Lassi cura carminé
et teneri Lassi carmina mitto tibi. [nostrum :
Carmina si Lassi Phœbi prœcepta viden- non tanti socii dignus amore fui.
[tur,
EPISTOLA
 BATYLO Y ARCADIO,
SOBRE EL RUMOR DE GUERRA CON PORTUGAL,
Ô DE NUEVA EXPEDICION CONTRA ARGEL.
Vuelve el rumor de la africana guerra
al lusitano campo trasladada ;
y el trozo antiguo de Borbon repite
lo que en Nâpoles, Flandes y Sicilia
en Aragon, Castilla, y en Valencia,
hizo en pasados siglos ; y se alientan
los jôvenes que hoy siguen sus pendones,
ansiosos de igualarse con los viejos,
6 superar tal vez la antigua gloria,
con hechos que merezcan mas loores.
Dulce Batylo, sentencioso Arcàdio,
amigos ambosy consuelos mios
en cuyo pecho halle dulce consuelo,
quando sali de la engaiïosa corte,
i. Los seis versos espanoles se hallan en las obras impresas, pero no los latinos.
2. Variante :
Si mis àsperos versos yo te embio
con dulces metro Jel divino Luso,
no créas que ....
3. En otra copia autôgrafa, después de los versos castellahos, no se lee este titulo latino; solo
hay : El mismo pensamiento en latin.
OBRAS ÎNEDITAS
2(>
vosotros, cuyos nombres dan delicia,
gozo, dulzura y paz à mi memoria,
iserân estos los ûltimos renglones
que he de escrivir, con mano que enlazada
con las vuestras un tiempo fué dichosa
y prenda de un cariiîo mutuoy firme?
Desde hoy, tal vez, no tomarâ mi diestra
la pluma, repitiendo, quai solia,
de la sacra amistad el dulce empleo,
sino el hierro que cântabras montanas
envian a Toledo, desde donde
hecho mortal segur, corta las vidas
que lloran viudas, huérfanos y madrés !
I No mâs pisar entre mis dos amigos
en plâticas gustosas é inocentes
las orillas que bana el Padre Tonnes
y resuenan del Eco de sus nimphas,
ni el âmbito magnifico, ostentoso
de la Plaza Mayor de Salamanca
con pôrticos suntuosos, y columnas,
y bustos de los héroes de Castilla,
(empleo digno de patriotas manos).
iNo mâs parar la noche obscura y larga
de Enero, juntos con preciosos libros
de gustoso moral escrito en verso,
por Mendoza, Léon, Lope, Argensola?
Truécase todo en sangre, horror, es-
[truendo,
por inconstante mar, hôrrida tierra,
fértil en tigres, vfvoras, leones,
ardiente arena y bârbaros contrarios,
con arroyos de sangre agena y propia,
cadâveres y cuerpos desmembrados
que juntos forman pâlidos montones,
saliendo de ellos lastimeras voces,
de moribundos ùltimos alientos,
tremenda consonancia del ruido,
y el estrépito de armas, roncas trompas
y relinchos de béticos cavallos,
cuyas madrés conciven de los vientos,
segun la'antigua tradicion refiere.
Si alli me espéra la inflexible Parca,
Uorad, llorad, amigos, como os dije
en la lengua de Tulios y Marones,
bien que en bârbara frase, no tan pura
como quando en Paris cursé la escuela.
Llorad, digo otra vez, llorad, amigos,
que yo, espirando, estenderé la mano
al que tenga mâs cerca, y moribundo
diciendo : muero por la patria, alegre,
que tal muerte es honrosa quanto dulce.
Si acaso vuelves â pasar los montes
que separan las dos nobles Castillas,
â Batylo y Arcadio di mil veces
que nada me es terrible en este instante,
sino dejar su trato y su carino ;
en esto moriré. Los ojos yertos,
herizado el cabello, el pecho hinchado,
la lengua seca, y todo envuelto en polvo,
pasto tal vez de fieras ô de peces '.
Pero luego al pasar el lago Estigio
el dios barquero llevarâ con pocos
mi espi'ritu hacia el campo del Eliseo.
Yo no veré de Ixion la horrible rueda
ni â Sisifo, ni â Tântalo, ni â tantos
que sufren bajo el brazo de las furias
castigo justo de mortal audacia
que no viô sin espanto el pio Eneas
llevando el ramo que le daba el hado
guiândole entre sombras la Sibila,
con ser nieto de Jupiter tonante
y ser â quien fiô sus dioses Troya
para formar en Roma el pueblo invicto
cuyo imperio sin fin daria leyes
â todo el orbe desde el Capitolio.
Iré tranquilo donde viven juntos
1. El autor habia escrito : de fieras y leones, y lo borro despucs.
Revue hispanique.
266
JOSE CADALSO
formando coros de apacible gozo
los que (fieles al culto de los dioses
à su patria, sus hijos, y sus padres,
y a sus amigos) llegan sin recelo
à Minos y â los otros rectos jueces,
cuya vista extremece a los que vivos
despreciaron el rayo del gran Jove,
traidores a su patria la olvidaron,
con mofa hirieron las antiguas leyes,
del Senado y la purpura y corona,
ô del anciano padre y madré tierna
las canas y el amor, que â tanto obligan,
(delitos que las fieras no conocen
privadas de la luz que el hombre tiene)
6 los que rasgan con atroz malicia
de la atnistad el cândido regazo.
Si al culto de la Diosa erigen templo
los hombres algun dia, quai debieran
en sus aras, pondréis, dulces amigos,
mis cenizas en urna de diamante
que â los ejes del mundo alcance en
[tiempo
por premio del amor constante, y puro
que hasta morir os profesô Dalmiro.
SOBRE UN NUEVO AMOR.
ODAS EN VERSOS SÀFICOS Y ADÔNICOS Â VENUS Y CUPIDO 1 .
(Biblioteca National de Madrid, P. V. 40 — C. 35 — N° 46. )
ODA PRIMERA À CUPJDO
Niiïo temido por los dioses y hombres !
Hijo de Venus! Ciego amor! tirano!
Con dévil mano, vencedor del mundo!
Dulce Cupido!
Quita del arco la mortal saeta
Déjà mi pecho que con fuerza heriste,
Quando la triste, la divina nimpha
Me dominaba.
Desde que el hilo de su dulce vida
por dura Parca feneciô cortado,
desde que el hado la Ilevô a la sacra
Cumbre de olimpo,
Guardo constante la promesa antigua
de que ella sola me séria cara,
aunque pasara las estigias olas,
Con Aqueronte.
De lutos largos me vestf gimiendo,
y de cipreses coroné mi trente :
eco doliente me sigitiô con quejas,
hasta su tumba.
Sobre la loza que regué con sangre
de una paloma negra y escogida,
lue repetida por mi voz la triste
justa promesa.
Nunca las voce s que mi fêjuraron
creo que puedan merecer olvido ;
ni tu, Cupido, punies olvidarlas,
si las oiste.
Sacra ceniza! repeti mil veces,
Sombra de Philis! si mi pecho adora
otra pastora, desde tau horrenda,
lôbrega noche,
Haz que .i mi l'also corazon castigue
quanto las cuevas del Averno ofrecen ;
1. À pesar de hallarse ambas odas en las obras impresas, las reproducimos aqui por tener cl
manuscrito de la Biblioteca Nacioual de Madrid notables variantes y versos inédites que indicamos
en itàlù
OBRAS INEDITAS
267
quanto padecen los malvados, quanto
Sysifo sufre.
Jùrolo, Philis, por mi amor, y el tuyo,
por Venus misma, por el Sol y Luna,
por la laguna que venera el mismo
Omnipotente.
Las iiegras losas a mi fino acento
mil veces dieron ecos horrorosos ;
y de dudosos ayes resonaron
tûmulo y ara.
Dentro del mdrmol una voz contusa
dijo : Dalmiro ! cumple lo jurado!
quedé asombrado, sin mover los ojos,
pâlido, yerto.
Temo, si rompo tan solemne voto,
que Jove apure su rigor conmigo ;
v otro castigo, que es el ser llamado
pértido, aleve.
Entre los brazos de mi nueva amante
temo la imagen de mi antiguo dueno :
ni alegre sueno, ni tranquilo dia,
ha de dejarme.
En vano Cloris cuyo amor me ofreces,
y a cuyo pecho mi pasion inclinas,
pone divinas perfecciones juntas
ante mis ojos.
Ante mi vista se aparece Philis ;
en mis 01'dos su lamento suena :
todo me llena de terror; v al saélo
ti'mido caigo.
Ldstima causen a tu pecho, oniho!
las voces mias, mis dolientes voces.
Ay, si conoces el dolor que causas,
ldstima tenme !
La nueva antorcha que encendiste apaga,
y mi constante corazon respire.
Haz que no tire tu invencible bra{0
otra saeta.
Ay, que te alejas ; y me siento herido !
ardo de amores, y con presto vuelo,
Uegas al cielo ; y a tu madré cuentas
tu tirania.
ODA SEGUNDA A VENUS
Madré divina del alado nino !
oye mi ruego; que jamas oiste
otra tan triste lastimosa pena,
como la mia.
Baje tu carro desde el alto Olimpo,
entre las nubes del tranquilo cielo.
Rdpido vuelo traiga tu querida,
blanca paloma.
Xo te detenga con amantes brazos
.Marte, que déjà su rigor por verte;
ni el que por suerte se llamô tu esposo,
sin merecerlo.
Ni lu delicia de la sacra mesa,
quando a los Dioses lleno de ambrosia
brinda alegria Jove con la copa
de Ganimedes;
Y el eco suena por los techos altos
del noble alcdzar, cuyo piso huellas
lleno de estrellas, de luceros lleno,
y tachonado.
Cerca del ara de tu templo en Pafos,
entre los himnos que tu pueblo dice,
este infelice tu venida aguarda :
baja, volando!
Sobre tus aras mis ofrendas pongo,
testigo el pueblo por mi voz llamado;
y, concertado con mi tono el suyo,
lldinate madré.
Alzo los ojos al verter el vaso
de lèche blanca, y el de miel sabrosa ;
cino con rosa, mirtos, y jazmines
esta mi frente.
Mi palomita con la tierna pluma
aun no tocada por pichon amante
pongo delante de tu simulacro :
no la deseches.
Ya, Venus, miro resplandor céleste
bajar al templo : tu belleza veo :
ya mi deseo coronaste, o madré !
madré de amores I
268
JOSE CADALSO
Virgenes tiernas, nirios, y matronas !
ya Ih'ga Venus] vuestra Diosa viene!
El tetnplo suene con alegres himnos,
)i\h\\o grato.
Humo sabeo saïga de las urnas,
dulces aromas que agradarla suelen,
âmbares vuelen, tantos que a la excelsa
bôveda toquen.
Pueblo de amantes que a mi voz llegaste
a Venus pide que â mi ruego atienda ;
y que a mi prenda la pasion inspire
quai yo la tengo.
CORO DE NINAS
Reina de Chipre, Diosa de Citeres !
tu queâlosDioses yâloshombres mandas,
porque no ablandas â la dura Cloris?
mandalo, Venus !
CORO DE NINOS
Reina de Pafos y de amores madré !
tu que las aimas llenas de placeres,
porque no quieres que Dalmiro triumphe ?
mandalo, Venus!
I 1 - 1 NINA
Como la rosa
agradecida
da mil olores
de sus aromas
al amoroso
Zéfiro blando
quando la halaga
y la rodea :
CORO DE NINAS
Reina de Chipre &c.
2 a NINA
Como la yedra
halla en el olmo
vinculo firme
quando la abraza :
l r NINO.
Haz que reciva
en su regazo
Cloris afable
al que la adora.
CORO DE NINOS.
Reina de Pafos &c.
CORO DE NINOS.
Reina de Pafos &c.
2° NINO.
Haz que â su amante
pldcido rostro
ponga la ninfa
quando la vea :
pâbulo nuevo
halle su llama
en su querida
dulce zagala.
CORO L)E NINAS.
Reina de Chipre &c
OBRAS INÉDITAS 269
EPITAFIOS
PARA LOS MONUMENTOS DE LOS PRINCIPALES
HÉROES ESPANOLES
OBRA PATRIOTA-MILITAR
DEDICADA
AL
PRINCIPE DE ASTURIAS
(NRO senor)
u Dulce et décorum est pro patria mon' »
« El morir por la patria es gusto y gloria. »
Horat.
1. Numancia.
Posl annos 14 in obsessione consutnptos,
1res debellatos exercitus, totidetn gloriosos anteavictos consules 1
summique Scipionis
fortitudinem, peritiam, et fortunam superatas,
super combustam palriam
ga%as 2 , pueros, maires, saies, Deos, et semetipsos projecerunt
Numantini.
In eorum memoriam hoc à posteris Hispanù erigitm
Monutnenium.
Monumento
levantado por la posteridad espanola a la antigua
Numancia,
cuyos habitantes, después de 14 anosdesitio,
haver vencido très exéreitos,
derrotado très consules hasta entonces gloriosos 3
y superado el valor, pericia, y fortuna del gran Scipion 1,
incendiaron su patria,
arrojdndose a la hoguera, con sus hijos, madrés, ancianos y
Dioses.
1. Variante : lot idem victos consules antea gloriosos ; — otra : tôt idem gloriosos antea consules.
?. Var. : natos, mat tes...
3. Var. : victoriosos.
4. Var. : y superado el valor del gran Scipion, su pericia guerrera y su fortuna.
27O JOSE CADALSO
2. Sagunto.
Pro servando cum Romanis facto fadere
Saguntini
Numantinorum fortitudinem sunt imitati
(Jïirenle Aunibale)
et, combustâ patriâ,
nihil uisi numquam consummendam famam reltnquere voluerunt.
Hoc hàbeant constant ici et amicitia
Monumentum.
Monumento
a la constancia y lealtad de los Saguntinos
que, por no entregarse al dominio de Anibal,
ni abandonar la alianzade los Romanos,
imitaron â los de Numancia,
poniendo ellos mismos fuego a sus casas y templos,
y nada dejaron de su patria sino la fama eterna de su
firmeza y honradez.
3. Los Càntabros.
Cantàbra genti
jnga Romanorum ferre indocta
{[teste Flacco Horatio)
Monumentum.
Monumento
à la memoria de los càntabros
que, segun Horacio, jamas supieron llevar cl iugo de los
Romanos.
A. Pelayo f 737.
Quoi sunt in Hispania,
expulsis Mauris,
templa, mania, domus 1 , imo et arva,
lot sunt Peîayi illiusque virtutis monumenta.
Hoc tamen habeat
Héros ille cujus ope veteribus mis cl focis fruimur
Mou mnenl uni,
' 1 itiilis reîigione innumeros servandumper iinnos-.
Obi il au no à Christo j]j.
1. Var. : arces.
2 . Var. : Ha tam< »
po teritatis reîigione innu ndum per miuos
Héros
CUJUS ope fruimur cl avis
OBRAS INEDITAS 27 1
Monumento
que la religion de los Espanoles conserva™ eternamente
en memoria de Pelayo
à cuyo brio debemos libertad y culto
por la derrota do los Moros ;
y a falta de este, lo serân quantos templos,
ciudades, torres, y aun canipos tiene
Espana
restituida por él a su antigua religion y estadu.
Alfonso ei Catôlico y 757.
Alfonsus Catholicus
qui opus à Pelayo incœptum, paiicis adhuc viribus, omnibus autem virtutibus,
innixus
contra Mauros perficere conatus est,
nomenque suum, fausti Augurii pignus posteris œlatibus reliquit,
quot ciiim postea Alfonsi sunt cognominati loi inter maximos
Hispania reges numerandi sunt.
Iïïi, iîlisque omnibus hoc commune erigitur
Mouumculmu.
Obiil anno à Christo
7)7-
Monumento
de
Alfonso cl Cathôlico
que seguido de pocos soldados, pero acompanado de todas las virtudes
procurô concluir la obra empezada por
Pelayo,
dejando su nombre por feliz agûero,
pues quantos reyes se llamaron conio él, tambien fueron
como él gloriosos.
Sirva a la memoria de todos ellos.
Muriô 757.
6. Ramiro 1° 7 850.
Ramiro 1°
Monumentum.
Mauros in Gàllœcid, Lusitaniâet Bctica,
nec non La Coruna Noiuiamlos
2J2 JOSE CADALSO
aliosque pyratas
debellavit.
Obîit anno à Christo
8jo.
Monumento
de
Ramiro i°
que venciô los Moros en la Bética, Lusitania y Galicia
v deshizo cerca de la Coruna
los piratas de Normandia y otros.
Muriô en 8so.
7. Ramiro 2° ■'- 950.
Rituiiro 2 do
qui, post limitas contra Mauros inditas victorias, eos gloriosissimè
apud Clavijo, favente divojacobo
(ut fides nobis est)
minimo exercitu, omnino debellavit,
Monumentum.
Obiit anno à Ch isto
9)0.
Var. : Ramiro II
(/ni, post militas contra Mauros victorias
illos gloriosissimè minimo exercitu apud Clavijo.
favente Jacolo, ut pic creditur,
debellavit,
Monumentum.
Obiit anno 9/0.
Monumento
a Ramiro 2' 1 »
que, después de muchas victorias contra los Moros,
los deshizo del todo en Clavijo con tan corto exéreito
que se atribuyô su triumpho al socorro de
Santiago.
Muriô en 050
OBRAS IN ÉDITAS 2 73
8. Veremundo, Garcia, y Fernan Garcia. 998.
Extinctd inter Cfmstianos discordiâ
qua rursus Mourorum arma Legionem, Castellam, et Navarram minabantur
Veremundus, Garcia, et Fernan Garcia,
Legionenses, Navarros, et Castelîanos suscitaverunt, et uni la' virtute 1 ,
Abderramanum
/<) triumphis superbum vicerunt,
anno à Christo 998*.
Trium virorum prœclara nomhia in hoc honoret postentas
Monumento.
Monumento
en que la posteridad venerarâ los nombres de
Veremundo, Garcia, y Fernan Garcia,
Reyes de Léon, Navarra, y Castilla,
los quales, después de extinguir las discordias
que dividian a los Christianos de Esparïa,
humillaron â Abderramen
orgulloso con las 50 victorias que havia ganado
â los Espanoles.
9. Fernando 1° 7 1065.
Ferdinando 1 Casléïla régi
Monumentum.
Post horrida bella,
captis demum Toîeti, et César Augustœ regibus,
réligioni,
ïegïbus, scieutiis et artibus opérant dédit.
Obiit anno à Christo
106) >
Monumento
de
Fernando i° de Castilla,
por haver dado digno establecimiento a la
Religion, govierno, y ciencias,
1. Var. : et unitâ fortissimo virtute.
2. Var. : JO triumphis superbum anno qqS vicerunt.
3. Var. : Obiit anno ro6).
274 J OSE CADALSO
después de hacer prisioneros a los reyes moros de
Toledo y Zaragoza
al cavo de una horrorosa guerra.
Muriô
en 1065.
10. El Cid f 1099.
Roderico de Vivar
a Mauris, quos sœpe vieil, Domino (Cid) cognominato,
qui
Toletum, VaUntiam, multasque alias civitates cœpit 1 ,
Monumentum.
Obiit anuo à Christo
I0 99
Monument»
de
Rodrigo de Vivar
que tomo Toledo y Valencia, con otras muchas ciudades
à los Moros, los quales por respeto le llamaban
Cid, que significa Seiîor.
Var. : Monumento
â la memoria de Rodrigo de Vivar
que tomo
Toledo y Valencia
y otras ciudades a los Moros los quales por respeto le llamaban
el Cid, que significa Seiîor.
11. Alfonso 1° de Aragon ■]■ 1134, y Alfonso 1" de Castilla y 1109.
Pétri Aragonia Régis
fratri invicto Alfonso
propter innumeras contra Mauros pugnas vnlgo Batallador cognominato,
qui Casar Augustœ, Tarracona, Bilbilis, Daroca et aliarum urbium mania
religionis et patrice vexillo munivît,
alioque Castelhc Régi, eodem nom'uie, cognomine, et honore insignito,
commune hoc erigitur
Monumentum.
Hic anno à Christo 1109 obiit : ille vero r 1 34.
1. Var. : alias i\rpit civitates.
OBRAS INEDIT AS 2J$
Monumento
para
Alfonso, el invicto hermano de Pedro Rey de Aragon,
llamado el Batallador por el mucho numéro de sus
batallas,
que, con la insignia de la Fé y de la Patria,
honro las murallas de Zaragoza, Tarragona, Daroca,
Calatayud y otras ciudades ' ;
y tambien â otro rey de Castilla del mismo
nombre, sobrenombre, y heroismo.
Este muriô 1109, y aquel 11 34.
12. Batalla de Las Navas de Tolosa. 1211.
Castella, Navarrœ, et Aragonia regibus
Alfonso 9, Sancho 7, Pet 10 2,
qui in loco vnîgo Navas de Tolosa, innumeris interfectis Mauris,
religionem et patriam statue nuit,
anno à Chr. 12 1 1
hoc in remotissimas imperii hispani 2 partes et atates erectum est"
Monumentum.
Monumento
que sera famosô para todo el dominio y duracion del
imperio espanol,
Ievantado en memoria de los reyes de
Castilla, Navarra, y Aragon,
Alfonso 9 , Sancho 7 , Pedro 2°,
que con muerte de innumerables Moros en las Navas de Tolosa
aseguraron la religion y estado,
aiïo de 121 1.
Var : Monumento
de eterna veneracion para todas las partes y edades del dominio de Espana
por ser en memoria de
Alfonso 9 de Castilla
1. Var. : que adornà las murallas de Zaragoza, Tarragona, Calatayud v Daroca
y otras mâchas dudades
con la insignia de la Fé y Patria.
2. Var. : hispani imperii.
3. Var. : eregitur.
276 JOSÉ CADALSO
Sancho 7 de Navarra
Pedro 2 de Aragon
que juntos aniquilaron el poder de los Moros en la batalla de
Las Navas de Tolosa
ganada en 121 1.
13. Fernando 3° y 1252.
Duci, Régi, Sancto,
Ferâinando J
Monumentum.
Obiit an 110 à Christo 1252.
Sive : Viro immortali
quem pat rem vocant cives, heroem castra, sanctum rcligio,
quem honorent Hispani, tiniuerunt Mauri, laudet posteritas
Monument uni.
Obiit anno à Christo
12} 2.
Sive : FerdinanJo
quem cives regem vocant, heroem castra, sanctum rcligio
Monumentum,
Monumento
de
Fernando y°
a quicn la religion proclama santo,
las tropas héroe, la patria rey.
Muriô en 1252.
Var. : Monumento
à Fernando 3
que igualmente mereciô los nombres de
General, Rcy, y Santo.
Muriô 1252.
Var. : Monumento
al varon inmortal
que la patria ha llamado dignamente Padre,
el exército Caudillo,
y la Iglcsia Santo,
venerado de los Espanoles, temido de los Moros, celebrado de la posteridad-
Muriô 1252.
OBRAS INEDITAS
2 77
14. Alfonso 2° + 1350.
AlfOHSO 2 d °
qui jamdudum' plurimis contra Mauros prœliis praclarus
in loco vulgo Salado,
interfecto bostium vix credendo numéro,
posteritatis admiratiomm acquisivit,
Monumentum.
Obiit anno à Chris lo i])0.
Monumento
para
Alfonso 2 do
digno de las alabanzas de la posteridad
por la batalla del Salado en la que
muriô un numéro apenas creible de Moros
después de haverles ganado muchas otras
victorias.
Muriô en 13SO
Var. : A Alfonso 2
que después de una larga série de provas contra los Moros
complété su gloria
en la jornada del Salado
y por el numéro increible de Moros que murieron en ella
bizo su nombre admirable a los futuros siglos.
Muriô
ijjo.
15. Martin Bozo -'- 1401.
Ma rt ii 10 Bo^o,
Equiti ordim vulgo de la Banda jure insignito,
qui non an te atatis sua annutn 120 obiit,
tt in pneliis quotquot integro swculo vidit Hispania,
puer, juvenis, vit, senex, adfuit,
gloriosamque tandem in pugnâ vitam anuo 1401
peregit,
Monumentum.
1. Var. : jam.
2y8 JOSÉ CADALSO
Monuraento
de
Martin Bozo
digno Cavallero de la Banda,
que cumpliô 120 aiïos de edad,
se havia hallado en todas las guerras de Espana
durante un siglo entero,
v nuirio cl ano de 1401 con las armas en la mano,
como las havia llevado,
en su ninez, juventud, vigor, y vejez.
Var. : A Martin Bozo
Cavallero de la Banda
que muriô 1401
después de haver vivido 120 afîos hallândose en quantas
guerras alcanzô en un siglo entero.
16. Alfonso Henriquez. 1407.
Alfonso Henrique^
Monumentum
qui Maurorum è Tutie\ et Tremecen classes debellavit,
régnante Johanne 2 do
annoà Chris to 140J.
Monumento
de
Alfonso Henriquez
que derrotô las armadas moras
de Tûnez y Tremecen
reinando Juan 2 do
ano 1407
17. Pedro de Vera. 1480.
Pelro de Fera
qui aiuw à Domino 1480 Insulas Fortunatas subjugavit,
Monumentum.
Var : Petro de Vera
propter subjugatas aiino à Domino 14S0 Fortunatas
Insulas
Monumentum
OBRAS INEDIT AS 279
Monumento
de
Pedro de Vera
por la conquista de las islas afortunadas
en 1480
Var. : Pedro de Vera
que en 1480 conquistô las islas fortunadas.
18. El Gran Capitan f 1512.
Gon\alo Fernande^ de Cordova
Castelhe exercitum imperatori
non à civibus tantum sed etiam db hostibus Magno cognominato,
a Gallis scïlicet et Mauris,
Monumentum.
Obiit Granata anno à Christo
1)12
A Gonzalo Fernandez de Cordova
gênerai espanol
a quien no solo sus conciudadanos pusieron el nombre de
Gran Capitan
sino tambien sus enemigos los Franceses ylos Moros.
Muriô 15 12
19. Fernando 5° -J- 1516.
Ferdinando V
Aragonia et Castella régi
Monumentum.
Victis Gallis, Navarram,
et
Mauris debellatis, Granatam,
post tôt et tanta egregia facta fortiter occupavil
Anno iji6 à Christo
Obiit.
280 JOSÉ CADALSO
Var. : Ferdinando 5 to
propter, devictis Gallis occupatam Navarram,
Maurisque debellatis Granatam
Auno à Christo
iji6
Monumentum.
Monumento
de
Fernando S to
por haver tomado la Navarra vinciendo los Franceses.
y el reino de Granada derrotando a los Moros.
Muriô en 1 516
Var. : A Fernando S to
Rey de Castilla y Aragon
que después de muchas hazanas
ocupô la Navarra derrotando â los Franceses
y Granada venciendo a los Moros
Muriô 1 5 1 6 .
20. El Conde de Cabra.
Comiti de Cabra
qui horrendam numéro et ira' Turcàrum classent
prope insulam Gerbes,
laulo antea etpostea sanguine inundatam,
superavit,
Monumentum .
Al Conde de Cabra
que derrotô una inmensa armada de Turcos junto a la
Isla de Gerbes
inundada tantas veces con sangre.
21. Hugo de Moncada.
Comitis de Cabra
in Tu ira ru m uavibus debelhindis, el
insuhi Gerbes subj Uganda
digno socio
Hugo de Moncada
Monumentum.
OBRAS 1NÉDITAS 28 I
A Hugo de Moncada
digno companero del Conde de Cabra
en la derrota de los Turcos.
22. Duque de Najera.
Duci de Najera
Monumentum.
Galloritm prœdarum ducem Comitem de Foix
post pugnam capit,
Mosquée Iota Navarrâ expuhit
anno à Christo 1 521.
Al Duque de Najera
que después de echar de Navarra â los Franceses
hizo prisionero al gênerai de ellos
Conde de Foix
1521
23. Sébastian Cano f 1525.
Sebastiano Cano
qui
audacid vix credendâ
primas ante omiies
Hispanos, GaJlos, Anglos, Batavos, Lusitaiiosque nautas
veterum et novum mundum
circumdedit,
Monumentum.
Obiit anno à Christo
1)2).
A Sébastian Cano
primer mortal
que diô la vuelta al mundo nuevo y viejo
imitado después
por los Franceses, Ingleses, Holandeses, Portugueses, etc.
Muriô 1525.
Revue hispanique.
282 JOSÉ CADALSO
24. Garcia de Holguin. 1525.
Garcia de Holguin
qui navetn, qud, magnâ comitante catervd procerum
barbarorum rex Guatimo\vn vehébalur,
in mediâ illorum innumerd classe capit :
quo facto
Mexicanum Imperium
nostris (ut infatis erat) succumbuit armis
die iS Agusti anno i )2j.
A Garcia de Holguin
que abordé el navio en que iba Guatimozin
emperador de Méjico
y dândole muerte en medio de su armada
y de su innumerable comitiva
consumô la conquista de aquel imperio
que Dios havia decretado
18 de agosto 1525
25. Beltran de la Cueva j 1526.
Egregio juveni
Bertrano de la Cueva,
Ducis de Alburquerque dignissimo filio
Monumentum.
Gallos c lotd Navarrd rursus expulsit.
( Mit anno à Christo
I$2Ô.
Al herôico joven
Beltran de la Cueva
digno hijo del Duque de Alburquerque
que volviô i\ arrojar a los Franceses
de toda Navarra.
Murio 1526.
26. Fernando de Alarcon.
Ferdinando de Alarcon
qui
virilité, prudentid, indole, peritiâ, imo el vullu,
hostium, eiviuni, militum el Caroli etiam r
OBRAS INÉDITAS 283
reverentiam est assecutus,
Monumentum- .
Illum semper Dominum vocabat Cœsar invictus.
Germanos et Hispanos discordiâ agitatos placavit.
Gallos prope montes Alpes dux débéllavit et miles.
Vigiliœ illius et prasidio
duo maximi fuerunt commissi captivi,
seilieel
Pontifex summits Ecclesiœ et Gàlliœ magnanimus Rcx.
A Fernando de Alarcon
llamado por Carlos 5 el senor Alarcon.
Por su pericia militar, virtud, genio y aun por su aspecto
se adquiriô la consideracion
de su rey, de sus patriotas y enemigos.
Reuniô
los Espanoles y Alemanes que se hallaban divididos en discordias :
como gênerai y como soldado venciô â los Franceses junto â los Alpes,
y tuvo en su custodia
los dos mayores prisioneros del mundo
a sa ver
el Ponti'hce Màximo de la Iglesia, y al magnànimo rey de Francia.
27. Leiva, Davalos, Davilas.
Strenuis Viris
Leiva, Davalos, Davilas,
quorum sanguine, peritid, etfiducid toties triumphavit
Carolus
V apttd Germanos, apud Hispanos I
Monumentum.
A los varones insignes
Leiva, Davalos, Davilas ,
a cuyo esfuerzo, pericia y fidelidad debiô su Victoria
Carlos
primo en Espana y quinto en Alemania.
284 JOSÉ CADALSO
28. Antonio Alaminos.
Antonio Alamino
Monumentum.
Navium fuit rector
qitibus in Américain vida sunt Hispaniarum arma, leges, mores, artes
Réligio,
nec non illis à cash datum in novo mundo imperium sine fine.
A Antonio Alaminos
Piloto que fué a la America con las naves que establecieron en ella
la Religion, tropa, gobierno, costumbres y artes
de la Espaiîa
y el imperio que para siempre les ha dado el cielo
en el nuevo mundo.
29. Hernan Cortes f 1554.
Ferdinando Cortes
Monumentum.
Patria decus
America terror
Europa invidia.
Obiit anno à Christo 1554
A Hernan Cortes
honra de Espaiîa.
terror de America
embidia de Europa.
Muriô 1554.
29* Hernan Cortes f 1554.
Ferdinando Cortes
Monumentum.
Haud alio similis
quoi fabula, historiave narrât Hcroas superavit.
Obiit anno à Christo i$54-
A Hernan Cortes
héroe solo igual a si mismo
y superior d quanto la historia cuenta y la fabula ha iingido.
Muriô 1 5 s4
OBRAS INÉDITAS 28 S
30. Francisco Pizarro j- 1540.
Francisco Pizarro
Monumentum.
Quidquid de illius savitid, plura et majora de iïïius fortitndine
sunt dicenda.
Comitum et mïlitum seditionem,
ignoti maris et inhospita terra pericula,
morbos, famem, sitini, œstum, frigus, belliim, antbroyopbagos,
circumspexit,
et ad imperium Peruviarium subjugandum
omnia visu et dictn borribilia
çontempsit.
Obiit anuo à Cbristo
1540
A Francisco Pizarro
de cuya crueldad claman tanto los extranos
haviendo tanto mas que decir de su mérito,
pues supo aplacar la sublevacion de sus companeros y sûbditos
despreciô los riesgos de un mar desconocido y de una tierra xxx
para conquistar el Peru
y desdenô
la sed, hambre, calor, frio, guerras, antropôphagos
y todo quanto puede aterrar al corazon humano.
Muriô 1540
31. Alvaro de Bazan, marqués de Santa Cruz ■]- 1588.
Alvaro de Ba\an, Marq. de 5 ,a Cru\
Monumentum.
Turcas, Mauros, Lusitanos, Gallos et Auglos
Asiœ, Africa, et Europa maribus
débellavit.
Félix belîo, morte felicior.
Tôt enim et tanti triumphi unâ tant uni clade delendi fuissent,
arma Pbilippo in Angliam, fato sinistro, arma pararentiir.
Obiit anno 1588
286 JOSÉ CADALSO
A Don Alvaro Bazan
vencedor
de Turcos, Moros, Portugueses, Ingleses y Franceses,
muy feliz en la guerra, y mâs en la muerte
pues toda su gloria tal vez se huviera eclipsado con el mando que
se la destinô de la armada que Phelipe 2° équipé contra los
Ingleses à. quien el cielo no fué propicio.
En aquella época muriô 1588.
32. Moncada, Oquendo, Requesens, Valdés, Verdugo ■]■ 1588.
Verdugo, Oquendo, Moncada, Requesens, Valdes,
contra Britannorum non adversus élementa wissos,
eîementa débéllaverunt non Britanni,
anno à Christo 1588.
In cor uni memoriam
(proh Dolor!)
hoc erigitur a posteris Hispanis commune
Monumentum.
A los Oquendo, Verdugo, Moncada,
Requesens, Valdés
y otros héroes que su gloriosa carrera concluyeron
desgraciadamente
ano de 1 588
en las costas y mares de Inglaterra
no por el brio humano de los Ingleses
sino por la voluntad irrésistible de los cielos.
33. Alfonso Ercilla de Zùïiiga.
Alphonso Ercilla et Zttniga,
contra Araucanos per dies pugnanti,
per noctes pugnas scribenti,
Monumentum.
A Alfonso Ercilla de Zûniga
que peleaba de dia contra los Araucanos
y de noche escrivia lo acaecido.
OBRAS INEDITAS
287
34. Fernando de Aguirre.
Fernando de Aguirre
qui
terras vulgo Australes detexit,
mariaque horrïbilia superavit
Monumentum.
A Fernando de Aguirre
que
descubriô las tierras australes v domô los mares horribles.
35. Juan de Ojeda.
N. Ojeda
Monumentum.
Détectant ab ipso Auream Castellam, Novam Beticam
et Darienem
horrendo subjugavit bello.
A Juan de Ojeda
que conquistô contra horrorosos salvajes antropôphagos
la Castilla Dorada, Nueva Andalucia v el Dariense.
36. Valdivia y Pedro Melendez.
Regionem vulgo Chile
ab Almagro détectant subjugavit Valdivia,
haud secus
Pelrus Melende^ Floridam a Johanne Pouce inventant,
et a Coligni cum Gallis hareticis occupa la m.
Ferdinandi Cartes
coustautiam suut imitati illorum cum illius nomiue
in hoc légat posteritas
Monumento.
Valdivia y Pedro Melendez
criados en la escuela de Cortés
conquistadores de Chile y de la Florida, provincia
no poblada de Indios indefensa sino ocupada
por los herejes franceses al mando de
Coligni.
288 JOSÉ CADALSO
37. Juan de Salamanca.
Johanni de Salamanca
qui
in valle vulgo Otumba regium Mexicanornm vexïïlum
ab Mis fortiter et religiose, pro aris et focis, defensum
i> medià barbarorum acte
vi et artnis rapuit,
Monumentum.
A Juan de Salamanca
que en el valle de Otumba se arrojô al medio
del exército mejicano, y a fuerza de armas
arrancô la insignia impérial que los barbaros
defendian como la suma de su religion, estado y esperanzas.
38. Juan Nunez de Mercado.
Juvenis quidam Johannes Nunê^ de Mercado
cxim vix essel annos 16 rialus, coram utrdque barbarâ et hispand acie
horrendum, informent, ingénient americanimt,
rumine jubente, tantumque suadente virtute,
interfecit :
illiusque gladium, clypeum, et hastam lattis et superbns
Ferdinaiido Cartes, domino suo
obtiûit.
Puero Mo lot vivis prœstantiori
Monumentum.
A Juan N ûnez de Mercado
joven de tierna edad , y héroe igual a los de la mayor,
pues en la de 16 anos
hallândose de page de Hernan Cortés
â impulso de su valor y sin orden que se lo prescribiese
se arrojô sobre un amcricano agigantado
que desafiaba d los christianos à singular batalla
v dândole muene le quitô sus armas
v lasdeposito à los pies del gênerai espaiiol
el quai por el exceso de valentia
le perdonô la falta de subordinacion,
y con un abrazo dado al freine de aquellas tropas vencedoras,
le diô valor para empresas mayores.
OBRAS IXÈDITAS 289
39. Jacobo Ordax.
Ignivomi mentis inhospitum vertex scandere ausus est
Jacobus Ordax.
Mirabantur Hispani : Americani stnpebant
et
flammas, stilpbur, strepitum, vapores, monstrua,
amicorum lacrymas, barbarorum reh'gionem,
horrendasqite totius naturce ruinas conlemnens',
Duci suo makeriam bellici pidveris in gurgite inventant nuntiavit.
Iïïius nomini et jortitudini
Monumentum.
A Jacobo Ordax
que con admiracion de los Espanoles y espanto de los Americanos,
subiô a la impénétrable cima de un monte que arrojaba fuego
v descubriô en él azufre para fabricar la pôlvora,
por entre Hamas, vapores, ruido, monstruos,
lâgrimas de sus amigos, gritos supersticiosos de los bdrbaros
y la amena/a de la naturaleza.
40. Mesa y Montano.
Artis tormentaria peritissimi
Mcsa et Montano,
in baraihrum à Jacobo Ordax exploratum ne pulvere bellico carcrent nostra castra,
(sine qno non erat novus mundus subjugandus)
victis periculis et obstaciilis, patriœ et religionis amore ducti et pulsi
descenderunt.
Hoc habeant monnnientuni.
A los famosos artilleros
Mesa v Montano
que llevados del amor d su fé y a su rey
bajaron i la cueva descubierta por Ordax
a pesar de tantos peligros
v saecron los materiales para la pôlvora sin la quai
no se podia conquistar aquel nuevo mundo.
290 JOSE CADALSO
41. Juan de Guzman.
Mexicanorwn Deorum ante aras sanguine bumano
s.epissime fœdatas,
Johanni de Guzman jugulato
virtutis sua, gloria, honoris, et erga Cartes amoris
potius quam barbarorum religionis
victimœ
Monumentum.
A Juan de Guzman
vi'ctima no tanto de la venganza y supersticion de los Mejicanos
que le sacrifioiron en sus aras tantas veces manchadas
con sangre humana
quanto de su amor a Cortés y de su heroismo.
42. Conquista de Granada.
/;/ subjugandi Maurorum nepotibus,
in quietis pace, beïïo strenuis,
adhuc Granata et inter montes permanentibus
Marquiones tic Mondejaret Fêle;,
Duces tic Arcos, Osuna, Medinasidonia, Sesa
nec non egregii viri
Requesens, Ouijada, Luna, Villaroel,
nomina qu'idem prastantia praclariora fcccruiit.
In coi um gloriam hoc commune erigitur
Monumentum
A los héroes
famosos por la conquista de Granada
y derrota de los Moros y Moriscos que aun se defendian en sus montes,
Marqueses de Mondejar y Vêlez
Duques de Arcos, Osuna, Médina Sidonia, Sesa,
y los Requesens, Quijada, Luna, Villaroel.
43. Conde de Alcaudete.
('ornes Je Alcaudete
civitatis Qran mania défaillais contra Maures
eoi non semel, nec bis tantum, sed sapissime vicit.
rlim
diebus
OBRAS INEDITAS 29!
Al conde de Alcaudete
que defendiô tantas veces los muros de Oran contra los Moros.
44. Conquista de America.
De viris omiii lande dignissimis
ut pote
Ferdinandi Cartes fortitudinis, religionis, et gloriœ soeiis
inter hispanorùm castrôrum in America pracipicos milites et duces,
Olid, Lercano, Alvarado, Liste,
Arguello, Tapia, Marin, Monlejo, Lugo, Domingue^,
Portillo, Escalante, Morbn, Moral, Sandovàl, Dia\,
Saucedo, Ramire~, etc
tacente invidiâ loquatur Posteritas,
et hoc commune in eornm memoriam
Monumentum
Monumento
a cuya vista calle la envidia y hable la posteridad
en perpetuo elogio
de los caudillos y soldados mas dignos de su gefe
Hernan Cortés
en la conquista de America
À saver
Olid, Lercano, Alvarado, Iuste, Arguello, Tapia,
Marin, Montejo, Lugo, Dominguez, Portillo, etc...
45. Bernardino Avellaneda. 1596.
Bernard! 110 Avellaneda
qui anglicant classent prope Portobello debellavit
anno à Christo
i) 9 6
Monumentum
Bernardino Avellaneda
vencedor de la esquadra inglesa en Portobello
ano 1 596
46. Juan Ronquillo Fajardo, Contreras, Fadrique de Toledo.
Johannes Ronquillo Bàtavicas noues probe Philippinas insulas
anno 1606 ;
in Africâ Mauros, in Tago Batavos Fajardo
anno 1606;
292 JOSÉ CADALSO
Batavos mari, et terra Mauros prope Marmara Contreras
anno 1621 ;
Batavos propre Africa et Am \> ica littora Fadrique de Toledo
annis 16 21 et 162;
debeîïaverunt.
Hoc commune habeant
Monumentum.
Juan Ronquillo
(En el el manuscrite» no hay mas que estas dos palabras).
47. Jorge Brito. 1647.
Jorgio Brito
pro Leridd defensâ, quant Princeps de Condè jure Magnus cognominatus
exercitu Gàllorum fortissimo frustra expugnaverat
anno 1647
Monumentum.
Monumento
de
Jorge Brito
que defendiô a Lérida contra un poderoso exéreito francés
mandado por el Principe de Condé, jusiamente llamado
el Grande
ano de 1647.
48. Rivera, Menesses, Aragon, Bazan, Andrade.
Afrîcanorum classent seculo iS vicerunt
Rivera, Menesses, Aragon, Basait, Andrade,
quibus hoc commune erigitw
Monumentum.
Monumento
de
Rivera, Menesses, Aragon, Bazan, Andrade,
que en el siglo 17 triumpharon de las
armadas africanas.
49. Marqués de Villadarias.
Pracipuos Baticarum ndbiles
in arma pro Philippi Borbonici justissimd causa
amore, labore, et Jivitiis convocavit
OBRAS INEDIT AS 293
marquio de Villadarias .
Il lin s gloria et nomini
Monumentum.
Monumento
del
Marqués de Villadarias
que à su costa, con su exemplo, y por su amor
à la augusta casa de Borbon
puso en armas la nobleza de Andalucia
en justa defensa
de Phelipe el animoso
digno nieto de Luis el grande, rey de Francia.
50. Conde de Aguilar.
Comiti de Aguilar
aulw et exercitus pracipuis munerïbus dignissime ornato
natura dotïbus prœdito
origine nec non virtute clarissimo
qui posl pugnas multas totidemque victorias prœsertim apttd Vïllavkiosa
equitatum phiïippicum
non modo invictum sed etiam invincibilem esse patefecit
Monumentum.
Monumento
del
Conde de Aguilar
insigne por su virtud, cuna, talentos y valor
condecorado con los primeros empleos de la corte y milicia
y famoso después de muchos triumphos
por haver completado la Victoria Villaviciosa
à la cabeza de la cavalleria espanola
acreditando este cuerpo no solo de invicto sino de invencible.
51. Guerra de la sucesion.
Duci de Aytona
Marquioni de Vàldecanas
Comiti de las Torres,
et
strenuis militibus Vallejo, Bracanionte, Cercuda,
294 J OSE CADALSO
qui ad Philippi V tempora diademate hispano cingenda
belli exercerunt artes, horreurs contenipseruut,
commune hoc erigitur
Monument uni.
A la memoria
de los egregios
Duque de Aytona, Marques de Yaldecarïas y Conde de las Torres
y de los honrados soldados
Vallejo, Bracamonte y Cercuda
que para coronar a Phelipe el animoso
exercieron las artes de la guerra y despreciaron sus horrores.
52. Duque de Montemar y Marqués de la Mina.
Duci de Montemar, et Marquioni de la Mina
quorum cineres dignis sub teetis jacent, nempe
Cœsaraugustœ et Barcinoue
iioviim ecce erigitur
Monumentum.
Monumento
de los Duques de Montemar y Marqués de la Mina
cuyas cenizas yacen en otros dignos sepulcros
en Zaragoza y Barcelona.
53. Juan Josef Navarro.
Britannorum
qui sibi imperium pelagi datum credunt etgîoriantur
supei biam copiorâ classe inuixam 12 tantum navibus conculcavit
Joseph Navarro,
a niaguauimo Philippo )', marquio delà Victoria cognominatus.
H 11 jus nominis
honorent fatetur Anglia, lauJal Hispania, dicat posterilas
hoc erecto
Monumento.
Obiit Gadibus
>77 2 -
De Don Juan Josef Navarro
[lamado por Phelipe 5 Marqués de la Victoria
por la que ganô con 12 navios à los Ingleses
los quales con una armada incomparablemente maior
OBRAS INEDITAS 295
se atribuian orgullosamente el supremo senorio
de los mares,
pero tuvieron que aplaudir su valor,
como lo honrô su patria,
y lo celebrarâ la posteridad.
54. Eslava y Leso 1740.
Carthaginem americanam
contra Britannorum naves, castra, artes, et superbiam
defenserunt
Eslava et Lcso
anno 1J40
viri génère, virhite, cl bellicis factis jam toiige antea cogniti.
lu connu memoriam
Monumentum.
Monumento
de Eslavo y Leso
que defendieron Carthagena de Levante
ano de 1740
contra las tropas, naves, astucias, y sobervia de Inglaterra
quando esta va havia fingido su rendicion
acunando medallas del supuesto triumpho ;
insignes varones
mucho antes conocidos por su nacimiento, valor, y
hazanas
55. Velasco y Gonzalez -j- 1762.
Velasco
bellica navis prafecto, atavis edito nobilibus,
que dextrd gladium, et sinislrd vexillum rotam
etiam postquam hostes haberent muros
innumeris cecidit interfectus vulneribus.
Ncc non diguo illius socio
paribus virtutibus ornato, ccquâ nobilitate insigui,
eâdem morte glorioso
Gonifde^
qui anno à Cbristo IJÔ2 obicrunt
Monumentum.
29e JOSÉ CADALSO
Monumento
de
Velasco
capitan de navio,
que muriô aûo de 1762
esgrimiendo con una mano la espada
y con otra enarbolando la bandera de su rey
cayô cubierto de innumerables heridas
aun después de estar el castillo poblado de Ingleses
y à su digno companero
Gonzalez
igual en virtudes, nobleza y gloriosa muerte.
56. Marqués de la Romana y 1775.
Primas in prima acie
socios iu arma suscitans
Maurorum innumeras legiones irruit,
et vitam, quant diu antea Deo, régi, et patrice voverat, amissit
prope Argel
8 va die julii an 110 à Chrislo ijjf
Marquio de la Romana.
Veteris Hispaïue virtutis recens exemplum in hoc légat atas nostra hoc irecto
Monumento.
Monumento
de un héroe moderno que ha dado reciente exemplo
del antiguo valor espanol
a saver
cl marqués de la Romana
el quai guiando las primeras tropas se arrojô sobre innumerables Moros
y perdiô gloriosamcnte la vida
que mucho antes havia consagrado
;i la patria, al rey y ;i Dios
ano de 1775
57. Garcia Ramirez de Arellano, marqués de Arellano -j- 1781.
Aqui yace
Don Garcia Ramirez de Arellano
Marq s de Arellano.
Cavallero comendador de la Ov> de Santiago
OBRAS INEDITAS 297
Mariscal de campo de los R s exércitos.
Naciô en Ezixa en 20 de Diz r <= de 171 5
Muriô à 4 de Mayo de 1781
de Mayor General de Cavalleria y Dragones
en el Bloqueo de la Plaza de Gibraltar.
General de no menos luces que esperiencias :
tan adornado de prendas civiles como militares :
sirviô en quantas guerras tuvo Espana en su tpô* :
empleô los intérvalos de la paz en utiles estudios :
sus obras iluminaron el cuerpo de Cav. ria y Drag. s
sus virtudes le conciliaron el amor de todos.
Su aima descanse en paz
Amen.
58. Sitio de Gibraltar.
Dignissimo Merito
Inclito Animo,
pneclarœque constantiœ,
et Fortitudini,
in obsidionalibus Liueis
conlra Hcraclcam,
Faillie Monumentum
Revue hispanique
298 JOSÉ CADALSO
CARTAS
A DON JOSÉ IGLESIAS
Dilectissimo amico suo Arcadio salutem dat plurimam
Dalmirus.
A teneris unguibus studia reliqui ad castra é scholis vocatus; et ideo latinam
linguam barbaro more loquor, ineptiusque scribo, quamvis illius inter omnes
hominum sermones praestantiam admiror. Aurei Divi Augusti saeculi opéra
omnia, re verà, pro manibus habeo ; sed ipso quo potest modo Barbarus quili-
bet in America; nostrae silvis Garcia; Lassi Toletani dulcia possidere poemata.
Hac de causa non sine timoré linguâ ipsâ, quam tibi infundere voluit mater
natura, respondere conabor, amice dilectissime, musarumque omnium dignis-
sime alumne.
De Batvlo nostro, ipsiusque amoribus plura dicas : quemnam sese gerit? An
tristis, an lastus videtur? Q.ucenam de amicâ sua carmina facit, favente Phcebo ?
Dominam suam crudelem, gratamve vocat? Tacetne dubitans? Facilis est inge-
nio, juvenis ille, forma egregius, a;tate florens, indole amabilissimus. Tôt ergo
et tantis causis formosarum puellarum amore nunc et diu fruatur.
Nuper ego ab illo litteras habui amores suos ncgante. Sed frustra. Illius
flammae vestigia agnosco. Carmen enim ipsius in làtronem quenidam qui Bdlyli
colunibam rapere conatus crut legi. Carmen, mehercule, cultum, elegans et can-
didum. Dulcia de columbâ, horrida de latrone ab illo dicta cor ejus amore plé-
num esse probant luce mcridianâ clarius.
De caeteris amicis ne taceas mecum; sed multa et saepe scribas. Nominaenim
illorum «ratissima sunt auribus meis. Hos ego fraterno more diligo, vel almse
tua.' académie condiscipulos, vel probaj patriae tuas cives. Quamvis multorum
hominum mores vidi, et urbes, in patriâ tuâ vitas me.e finem (si lata sinant)
attingam, procul negotiis, palatiis, et hominum variis stultitiarum gerieribus.
Jubé, et vale.
OBRAS INEDITAS 299
A DON JOSÉ IGLESIAS
Arcadio suo Dalmirus sal. dat plur.
De salute tuâ, de Batyli nostri amoribus, de Cantabri Bararrati corde erga
puellam tenero, de caeterorum amicorum vitâ, de incognito alio Cantabro, quid-
quid mihi latina tua elegantissima epistola nuntiat, mihi gratissimum est.
Omnia enim quœ ad tuae civitatis probissimos viros. almaeque academiae inge-
niosissimos alumnos, necnon doctores sapientissimos, magnâ cordis mei laetitiâ
semper audio, et audiam libentissime, sive in hac vivens provintiâ inhospitali,
(pace Batyli nostri dixerim) sive Matriti inter proceres, sive inter régis vexilla
et castra apud barbaros. Qua propter iterum, iterumque, saepissime, imo et
quoties fie ri possit, de illis, et de te scribas. Quod si facias, amabo te. Quidquid
de amicitiâ Batylo nostro nuper dixi tibi dictum ducas. Mores hominum mul-
torum et urbes vidi (sic veritatis gratia praaterito mente scribebam), in nullâ
autem totius orbis civitate amicitiae digna corda sicut in patriâ tuâ inveni ;
quippe claro ingenio, probo corde, indole facili, sermone jucundo, omati non-
nulli numerandi sunt viri : et nihil amplius ad nostram consummendam vitam
est desiderandum. Heu illis qui alia petunt ignorantiâ ducti vel invidiâ.
De 8 vo Parnassi volumine 1 quid tibi videtur?ne taceas, precor.
De pugnâ nuper factà in civitate vulgo Melïllâ carmen componere conabor,
favente Phcebo : et quod olim de Bello apud Clavijo fueram, principium mihi
praebet et ecce.
(hic 24 versus qui in initio leguntur 2 .')
De bello nunc agens quid referam, nisi quod gloriae gratum, et amicitiaî
triste? Istius borbonicas cohortis turmae, Carolo jubente , castra, ni fallor, vide-
bunt. Dux primus noster (coroncl) jamjam in Herculea adest civitate, ibique
sunt naves, milites, arma, bellica tormenta, caeteraque mortis gênera, in Afri-
cam parata. Si forte in illâ avidâ mundi parte mors est à me invenienda, ecce
Batylo nostro omnia meâ manu scripta opéra relinquam, amicitiâ; pignora. Si
vero reditum meura secunda sinunt iata, \vxc mihi iterum reddet scripta, eo
pretiosiora, quo pro manibus tam cari amiei fuerint. Si autem sum moriturus,
lugete, amici, lugete. Proborum lacrymse mortui sunt praestantissima; laudes,
quippe eum quoque probum fuisse praedicant.
Barbara pyramidum miracula, quas Memphis laudat, non desideranda mihi
videntur. Nec ludos optos quos habuit, propter patris mortem pius ^Eneas, cur-
sum scilicet navalem, ac pedestrem, cestuum pugnas, et sagittarum ejaculatio-
nem. Si aliquando inter amicos pia cordis mei memoria habetur, si nomen
Dalmiri inter vos audiunt profani, hilariter sedes tangam beatas. Et quod erit
satis mihi, in tumulo humili,
1. Fué publicado en 1774. Puede conjeturarse que esta carta fué escrita aquel mismo
aiio.
2. No se hallan en el manuscrite
300 JOSE CADALSO
Epitaphium.
Qui jacet hic
mortuus est, quia natus est.
Nec de nativitate suà, nec de morte curavit :
natus dives ; mortuus pauper.
Angliam, Galliam, Italiam, Germaniam, Bataviam, vidit :
patriam vero suam Hispaniam dilexit.
Puer studia coluit : arma juvenis gessit.
Patrix' laudes cecinit ; de illo una laus tantum est dicenda,
scilicet
probus fuit, probosque amavit.
Quam in terra vivens omnibus dédit pacem illi mortuo det in cœlo
Deus
optinius, maximus,
Amen.
Post mortem nihil est (ut ait Seneca) ergo postquam de morte nieâ
loquutus sum, nihil amplius est à me dicendum, nisi in sternum
Vale.
A DON JUAN MELENDEZ VALDÉS.
Amico suo jucundo Batylo
sal. dat. plur. Dalmirus.
Epistolam tuam mihi latine scriptam nuntiavit Arcadius noster. Hanc diû
maximo desiderio expectavi. De te enim, de tuis amoribus, carminibus, studiis,
prosperis rébus, de omnibusque tuis, libentissime semper audio. Utinam saepis-
simel Latino vero Deorum sermone quidquid mihi dicas, tanto me gaudio
felicem facict, quanto ego te amore prosequor.
Tuas tandem accipiam litteras Ciceronis more scriptas, tuncque elegantiâ
captus, grati nomini memor, clamabo ipso quo Horatius Flaccus furore
Odi profanum vulgus, et arceo, etc.
et litteras alias à multis Matriti hominibus scriptas, procul à me llammis dabo,
iterum, iterumque sublimiori voce damans Odi profanum, etc. Ha;c autem à
multis scripta quos liomines non viros voco, quamvis proceres sunt, et atavis
alite regibus, nihil mihi nisi falsas aulie, civitatisque artes, quas odi, ofterunt :
tuœ, vero, dilectissime Batyle, omnia delitiarum gênera habcre, et mihi dare,
vidintur. Si tempus revocari posset (sed fata non sinunt, et numquam, eheu !
numquam reditura tugit quie semel abest dies), si tempus, inquam, esset revo-
OBRAS INED1TAS 3OI
candum, juvenilia omnia mea, annos, scilicet, formam, latina; linguas peritiam,
cordis et oris gaudium, revocare etiam vellem, non mehercule, ad suprema
militiae, palatii, togse, vel reipublica; munera obtinenda, non ad incipienda,
in posteritatis gratiam opéra, non ad alla facienda qua facere totis viribus non-
nulli volent (quamvis omnia nihil sunt nisi umbrae et nugas), sed ad plures
tecum consumendos annos inter juventutis tua; dulcissimas horas et ingenii tui
cultissima carmina.
Quid enim nisi amicitiam probis viris dare potuerunt boni Divi, ut humanse
vita; miserandam sortem aliquo ferre modo valeamus? tôt inter et tantas pala-
tiorum insidias, castrorum horrores, togas officia, plebis insolentiam, procerum
superbiam, fortuna; vicissitudinem, mentis insaniam, phisici corporis morbos,
c;eterasque nostras vix numéro continendas, vix nomine distinguendas calami-
tates, nihil, nihil profecto, miseris hominibus solatium prœbet, nisi amicitia,
amicitia, inquam, etsi à multis ficta, apud te et alios (paucos, re vera) inve-
nienda. Et jure apud te inventum à me esse dico pretiosum illud cœli donum,
et apud nonnullos quos ego, ut ait Ovidius noster, fraterno dilexi more.
Quidnam de Hymena;o tuo credam? Arcadius qua; affirmât tu negas. Dice-
turne Hymenasus? Vocibus puerorum, puellarumque inter pocula, et convivia
diceturne à me factum epithalamium? Eritne tandem inter Hymemei amo-
risque ignés libero pede pulsanda tellus? Cingamne tempora floribus sua ve
olentis amarisi, et qua; nuptialii jubet religio hilariter faciens, concinamne in
modum : Io Hymen, Hymenœe Io? Die, dulcissime, responde, âge.
Phoebe, musarum pater, qui futura scis, vatibusque nuntias, salve. Fata
mihi per te pateant. Non de rébus quee ad régna attinent interrogo. Nec de
scientiis colendis, nec de armis gerendis, nec de finibus imperiorum, nec de
gentium origine, nec de veteris terra; partibus consummendis, nec mundis dete-
gendis novis, scire cupio. Quid enim ad me? De Batylo autem, de Batvlo
meo, quem plus oculis meis amo, nihil mihi taceas. De illo, de illius uxore,
natis, natorum filiis, filiorumque nepotibus, sciam quidquid est futurum. Quod
si facias, Jovis Latona;que fili, laudes tuas canendo verba nova per audaces
dithyrambos devolvens numeris lege solutis ferar, Horatii instar, Pindarum
semulari studentis.
Tu denique, Deorum hominumque pater, mundique rector, et orbis quem
videmus, invisibiliumque numéro carentium opifex omnipotens, Jupiter, fave.
Amici mei prolem bonis omnibus virtutibus ornes quas in tam caro capite
admiror.,
Batyle, jubé et vale.
302 JOSE CADALSO
CARTA AL EX m ° S or MARQUES DE PENAFIEL
CONDE DUQUE DE BENAVENTE, ETC.
LA MITAD EN LENGUAGE ESPANOL ANTIGUO,
Y DESPUÉS EN EL ESTILO AFRANCESADO
QUE HOY USAN ALGUNOS DE LOS QUE NI SAVEN CASTELLANO, NI FRANCÉS.
Muy excelente Sennor : A un gentilhome de vro talante é prez non vagard
tiempo de escochar mis homildosos acatamientos : mas guay de mi, si por ende
yo cometiera el desaguisado de non saludarle. Enderezo, pues, a Vra Grandeza
mis letras cuibdosas de su salud, magùer que en el magin se me ha metido
tendra las mien tes paradas en cosas de gran pro.
Asaz éen demasia ha atendido vro escodero las nuevas de Vra Grandeza sin
tenellas, nin merecer la tardança ; fasta que fablando con mi sobrina é sen-
nora prisé la buena andanza vra, que me place muy mas que todo lo posible.
De grado vos rogo non me las escatimeis, si non quereis catarme finarme de
tristura.
Quijera yo escodrinar, muy magnifico Sennor, las vras tareas ; si revolveis
el trotero ; si esgozais la lanza ; si con uno catareis las fiestas de toro é tomareis
una otra vegada, ô si non cuibdais de ello. Fabladme, Sennor, con poridad,
como d vro amigo, ca tengo en mucha valia tal nome, é fuera muy mas pla-
ciente para mi anima que quanto finca scripto en tamanas historias de aquende
é de allende de los amigos que hovo marras en las alcurnias de Griegos é de
Romanos.
Ansi lo fagais, é yo os deseo que de la su diestra os bendiga el gran Plasmador
del mundo muy muchas eras, en compania del rapaz vro fijo, é de mi muy
excelente sobrina é sennora.
(Pansa y se inuda el estïlo como todas las cosas del mundo.)
Esto es con el mas gran placer que yo prendo la pluma para aprender de las
nuevas de vra salud. Madama la Marquesa y el pequeno (que esta al village
con su nutriz y su governadora) se portan d maravilla. Yo he tenido hoy el
honor de acompanarla la mds grande partida de la jornada d la mesâ, al paseo,
y al spectaculo.
A proposito de spectaculo, han dado hoy al teatro del Principe alguna cosa
de bonito. Tienen un drolo de cuerpo que hace el maestro de mûsica, y bâte
la medida superiormente. El teatro de aqui, ello es verdad, no esta purificado ;
pero de tiempos en tiempos nosotros alli vemos parecer de lo sencillo y nat Li-
rai que nos place de otro tanto nids que esto nos sorprende.
Que yo huviera querido os ver ayer después de corner d Madrid para que
huvieseis visto al cavallero d'Auquendeaux furioso contra su buen amigo, el
grueso mayor de cavalleria, p r qe este aqui le dijo una frase hechizanteempres-
OBRAS INEDIT AS 303
tada del francés. La conversation rulaba sobre la guerra de Alemania ; y nro
nombre le dijo todo buenamente :
Si el emperador ataca el Rey de Prusia, el no tendra bello jitego.
O mi Dios. como el montô en colera ! Toda la asamble se metiô â reir, etc.,
etc. '.
FRAGMENTO DE OTRA A DON MAN 1 LOrE7
Misrespetos al Gefe, â quiendeseo felices Pascuas, entradas y salidas deano,
segun la antigua usanza, con aumentos de gracia espiritual y temporal, bien
que en esta no cave mas gracioso humor que el que le acompana, lo quai célé-
bra pues es prueba de su buena salud y satisfacciones. He estimado mucho
quanto vm. me dice de su parte. Respôndale vm. de la mia, que si supiera yo
q e havia en el mundo Vizcayno mas Vizcayno que yo, iba en derechura a Viz-
caya, echaba abajo el ârbol de Garnica , y con sus ramos y tronco pegaba
fuego â un pobre y pequeno, pero honrado y antiguo solar que se halla en la
anteiglesia de Zamudio. Anddale vm. que si algo se me ha pegado de los
muchos paises que he visto ha sido solo de lo exterior que en nada influye i lo
interior ; y si algo he sacado de ver tanto pi'caro ha sido la i Jea de que p r lo
mismo he de ser yo mas hombre de bien. Item que de esto me he formado un
sistema del quai p r ningun acontecimiento prospéra û adverso me apartaré
hasta morir; y que para perfeccionarlo hago un estudio formah'simo q e prefiero,
1. No sera inûtil recordar el trozo siguiente Je las Cartas Marrtiecas :
Hoy no lia sido dia en mi apartamento hasta medio dia y medio. Tome dos tazas de
thé : pûseme un deshabillé y bonete de noche : hize un tour en mi jardin : lei cerca de
ocho versos del segundo acto de la zaira. Vino Mr. Labanda : empecé mi toeleta : no
estuvo el Abate. Mandé pagar mi modista. Pasé a la sala de compania : mesequé toda
sola. Entrô un poco de mundo; jugué una partida de mediator : tiré las cartas. Jugué al
piqueté. El maitre de hôtel aviso. Mi nuevo Xefe de cocina es divino, él viene de arrivar
de Paris. La crapaudina mi plato favorito estaba deliciosa. Tome café y licor. Otra partida
de quince; perdi mi todo. Fui al espetàculo ; la pieza que han dado es exécrable : la
pequena pieza que han anunciado parael Lunes que viene, esmuy galante, pero los actores
son pitoyables : los vestidos horribles, las decoraciones tristes. La mayorita cantô una
cabatina pasablemente bien. El actor que hace los criados, es un poquito extremado, sin
eso séria pasable. El que hace los amorosos, no jugaria mal; pero su figura no es previ-
niente. Es menester tomar paciencia, porque es preciso matar el tiempo. Sali al tercer
acto y me volvi de alli à casa. Tome delà limonada : entré en mi gabinete para escribirte
esta porque soy tu véritable amiga. Mi hermano no abandona su humor de misantropo :
él siente todavi.i furipsamente el siglo pasado y no le pondre jamas en estado de brill.ir :
aora quiere irse à su provincia. Mi primo ha dexado à la joven persona que él entretenia.
Mi tio ha dado en la devocion ; ha sido en vano que yo he pretendido hacerle entender la
razon. Adios, mi querida amiga, hasta otra posta, y ceso porque me traen un domino
nuevo para ensayar.
304 JOSE CADALSO
con no poca estimacion, d los q e tuve quando nino y joven; porque miro esto
corao principal dcber y digna ocupacion del nombre ; y al contrario solo aprecio
como meras diversiones, pasatiempos y adornos quanto se puede aprender y
ensenar de gramàtica, retôrica, poesia, lenguas muertas y vivas, philosophia
antigua, phi'sica moderna, derecho de gentes, historia, mathemdticas, y mas
lejos iba a estender este catâlogo de lo que llaman ciencias , pero suspendo por
temor de que llegue d Salamanca, y el claustro pleno me anathemalise, etc.
De mas a mas diga vm. al consavido que me debe a mi carta sin fecha una
respuesta, y que a trueque de ver algo de su alegre genio, juro sobre el santo
Libro de los fueros de Vizcaya, Guipuzcoa y Alava, no olvidar ni perdonar
esta deuda, ni en la présente vida ni en la futura, ni para aqui ni para delante
de Dios. — Que para vengar este agravio, si le alcanzo en dias volveré desde
los Campos Eliseos con Aqueronte, y en su barca traeré d Sisifo, a Tantalo, a
los Titanes, al Briareo, d los Centauros, a las Scylas, d la Quimera, d las Har-
pias, Gorgonas, Lapythas, Ixion, Eumenides, y toda la comparsa infernal, con
aquello de las achas, culebras, vivoras, sierpes, cerbero, por adelante, hasta su
alcova, y armard toda esta quadrilla tal estrépito , estruendo, rumor, bulla,
ruido, griteria, alaridos, gemidos, silbidos, barahunda, confusion, horror, tem-
pestad, tormento, alboroto, terremoto, que no podrd menos de dispertarse
nuestro buen gefe, sudar, temblar, dudar, cerrar los ojos, cubrirse con la
almohada, llamar al padre capellan, y si acaso, por quanto dho gefe (tomemos
un polvo, v un poco de aliento que yo me hallo cansado de escrivir tanto
desatino, y vm. lo estard mucho mas de leerlos), si acaso, repito, nuestro
gefe. . .
 DON NICOLAS FERNANDE/. DE MORATIN
(BibJiokca National de Madrid, P.V. 40— C. s S — N° 46.)
Malvado Moratin : No solo le reprocho d vmd. el no haverme respondido d
mi ûltima, sino que le encargo me escriva de nuevo, y me envie alguna com-
posicion suya, particularmente de lo herôico épico 6 pinddrico ; porque d mas
del gusto que tendre en verlo, lo deseo tambien por complazer d Meléndez y
otro que bien baila que continuamente me piden cosas de vmd. como si las
tuviera en el bolsillo, ô fuera fdcil hacerle d vmd. hacer una cosa buena quai lo
séria esta.
Remito d vmd. los adjuntos himnos en sdficos ù adônicos, digo sobie poco
mds ô menos pues tengo muv bajo concepto de las lenguas vivas para créer
que quepa en ellas la harmonia fija de brèves y largas de cuya colocacion y
numéro hicieron los griegos y latinos sus versos : pero en fin alla van taies
quales me los ha inspirado una nueva pasion que acabô al empezar, y muriô en
OBRAS INEDITAS 305
la cuna. La consonancia del segundo verso con la mitad del tercero es imitado
de Estevan de Villegas y creo que no es importuna salvo meliori sententia quai
es la de vmd. a la que me remito.
Aun no me ha dicho M r Dupont si ha recivido la carta francesa que le escrivi
dirigida à la fonda de S" Sébastian : pregûntesele vmd. en mi nombre para
sacarme de esta duda.
Agur.
A DON NICOLAS FERNÀNDEZ DE MORATIN.
(Biblioteca National de Madrid, P.V. _/° — C. 3$ — No 77.)
Malvado Moratin : recivo la carta dogmdtico-poëtica pero haciéndole yo
menos favor a nuestra lengua que cl que vmd. le hace, no me parece practicable
la observacion teôrica, y mucho menos la prâctica colocacion de las brèves y
largas : tengo por imperceptible toda quantidad que no sea — u larga en los
finales que llamamos agudos, y v 6 brève en las penûltimas de los esdrûjulos :
todas las demds sîlabas me suenan indiferentes en este oido vizcaino cuyo tim-
pano debe ser tan duro como el hierro de su patria. La derivacion latina sin
duda debera guiarnos pero como distinguiremos v. g. la a final de musa que
en el nominativo y vocativo es brève Mûsâ, y en el ablativo es largo Mûsâ? De
estas y otras consideraciones me he hecho un sistema tan cômodo de prosodia,
como lo es la Ley de Dios pues se reduce como vmd. sabe y prâctica, a dos
mandamientos, d saver, amar à Dios sobre todas las cosas y al proximo como à si
viisino.
Los sonetos se leerdn en la academia de Meléndez y su companero que jun-
tos me hacen tertulia dos horas todas las noches leyendo nuestras obras û las
agenas y sujetandose cada uno de los très d la rigurosa cn'tica de los otros dos.
Dentro de poco tendra vmd. un quaderm'llo de poesias de Meléndez : entre otras
hay una elegia a la muertede mi Philis, imitada delà de vmd. a la de la Reina 1 ,
que le ha de gustar d vmd. no solo por verse hecho modelo, sino por el ménto
esencial delà imitacion. Me han gustado tanto las composiciones de este joven
que no obstante mil cosillas que traigo entre manos he compuesto con este mo-
tivo la siçaiiente
1. Es la elegia que empieza asi :
j Oh ! rompa ya el silencio el dolor mio
306
JOSE CADALSO
Sigue cou dulce lira
el métro blando y amoroso accento
que el gran Phebo te inspira ;
pues Venus te da aliento,
y el coro de las musas te oye atento.
Sigue, joven gracioso
de mirto, grato à Venus, coronado:
y quedarà embidioso
aquel siglo dorado,
por Lasos y Villegas afamado.
Dichosa la Zagala
à quien le sea dado el escucharte,
pues tu musa la iguala
à la Diosa de Marte :
tal es la fuerza de tu ingenio y arte.
Aunque mas dura sea
que màrmoles y jaspes de Granada,
quai otra Galatea,
ô sea màs helada
que fuente, con los hielos, estancada.
Al punto que te oyere
te ofrecerà su càndido re *azo ;
si tu voz prosiguiere,
te estrecharâ su brazo;
v Amor aplaudirâ tan dulce lazo.
Mas ay de aquellos necios
que intenten competir con tu blandura!
solo hallaràn desprecios
de aquella bermosura
que una vez escuchàre tu dulzura.
Diran su rabia y zelos
en el bosque màs lôbrego metidos,
injuriando a los cielos ;
y oyendo sus gemidos,
responderàn las fieras con bramidos.
La entrada del Averno
parecerâ aquel bosque desdichado ;
y do tu métro tierno
huviere resonado
el campo que a los buenos darà el hado.
Paso mi primavera,
(los anos gratos al amor y à Phebo
quien revocar pudiera !)
y à juntar no me atrevo
mi voz cansada, con tu tu aliento nuevo.
Si no. yo cantaria
al tono de tu lira mis amores;
y al tono de la mia
cantâras, entre flores,
a ton i tas las aves, y pastores 2 .
Y las otras pastoras
de embidia correràn por selva v prado:
y ver.i la que adoras
el triumpKo que lia ganado
por baver tus ternezas escuchado.
Sigue, signe cantando !
no pierdas tiempo de ht edad Honda
que yo vov acavando
mi fastidiosa vida
en milicia, v en coït? mal perdida.
i. Publicada : variantes en it.ilicas.
2. En las obras impresas, se lee :
Cantâras tiitre flores
conio suelen acordes ruisi
aïonius Ijs aves y pastores.
OBRAS INEDITAS
307
En alas de la fama
tus versos llegardn a mis oidos,
si la trompa me llama
a' los moros vencidos
û à los indios de Apache embravecidos.
o al antàrtico polo
llevando las banderas del Gran Carlos
dirame siempre Apolo
tus versos; y a. escucharlos
acudirân las gentes y a alabarlos.
Ni el estrépito horrendo
de Neptuno que ofrece muerte impia,
ni de Marte el estruendo
turbarà el aima mia,
si suena en mis oidos tu harmonia.
Aun quando dura Parca
mayores plazos à mi vida niegue,
y en la funèbre barca
por la estigia navegue
y ;i las delicias del eliseo llegue ;
Oiré quando Catulo
â la sombra de un mirto recostado,
con Propercio y Tibulo,
lea maravillado
los versos que tu musa te ha dictado,
Quando acudan ansiosos
Laso, y Villegas al sonoro accento,
repitiendo embidiosos :
« i que celestial portento !
j â quien ha dado Apolo tanto aliento? »
Yo, que serè testigo
de tu fortuna, que tendre por mia,
dire- : yo fui su amigo
y por tal me ténia
gozando yo su amable compania x .
Harànme mil preguntas
puesto en medio de todos : De quien ères ?
y quantas gracias juntas >
y â quai zagala quieres?
y como baila quando el plectro hieres?
Y con igual ternura
que el padre cuenta de su hijo amado
la gracia y hermosura,
y se siente elevado
quando le escuchan todos con agrado,
Responderé contando
tu nombre, patria, genio, y poesia :
y asombrarànse, quando
les diga tu elegia
a la memoria de la Philis mia.
Tambien le he compuesto con el mismo motivo là siguiente
Quando Laso muriô, las nueve hermanas
lloraron con tristisimo gemido :
destemplaron las liras soberanas
que solo daban lugubre sonido :
gimieron mas las musas castellanas,
creyéndose entregadas al olvido.
Mas Phebo dijo : aliéntese el Parnaso;
Meléndez nacerà si muriô Laso.
1. En las obras impresas se lee :
y por tal me queria
V en dulcisimos versos lo decia
gozanjo yo su amable compania.
2. Figura en las obras impresas. Las variantes van en itâlicas.
308 JOSÉ CADALSO
Veo la gran pereza de vmd en no querer copiar sus poesias : haga vmd. una
cosa buena que es remitirnos por el ordinario un monton de ellas : por aca las
veremos despacio, las extractaremos y se le devolverân p r conducto seguro.
Esto pide la academia, y con sus voces y veces
Dalmiro.
Se solicita saverquando ha de salir el 8 V0 tomo del Parnaso 1 .
Item que busqué vmd. a sol y a sombra un exemplar de mi antigua tragedia
Don Sancho Garcia y que me la remita p r el correo.
Item que pregunte vmd. a D n Vicente de los Rios d quantas estamôs de la
impresion de Villegas.
Item que retratos nos dard el 8 vo tomo del Parnaso.
A DON TOMAS DE IRIARTE
Biblioteca National de Madrid, Ms. K. 356.
1
Mi querido v muy apreciable amigo : Concluida mi corta licencia me fué
imposible obtener prorroga alguna, con lo quai me vi obligado a venirme con
toda precipitacion por no perder la revista à este destino que aseguro a vmd.
ser el mas infeliz que he tenido en la vida, sin que pueda figurarme que le
haya peor en todas las pobres provincias de fira penfhsula; mediante lo quai se
me hace cada dia mâs tedioso este ofkio.
jDichoso vmd. que vive quieto disfrutando el descanso apetecible de la
vejez mezclado con los gustos de la juventud, y en la lectura y cultivo de las
letras que debieran ser la ûnica ocupacion de los nombres; pues es la iinica
cosa que los puede hacer mejores y mâs sabios! Anadiria yo de buena gana
otrascosas que me representan como muy enbidiable la vida de vmd. pero las
callo todas, menos la compania de dos tan amables hermanos , a quienes dard
vmd. un abrazo muy estrecho de mi parte. Yo nunca tuve hermanos, ni ami-
gos, sino los comunes.
Nunca me ha sido tan sensible la salida de Madrid como ahora, porque
habia hecho ânimo de entablar mi gran pretension que es la de retirarme; v de
imprimir una obrilla la quai, sin mi presencta, nunca podra salir i mi gusto;
siendo lo peor de todo esto que el mismo dia que me desaviaron de quédar en
1. Fué publicado en 1774, y el sétimo en 1773 ; puede conjeturar.se que esta carta fué
escrita à fires de 1773 ô â principios de 1774.
OBRAS INEDITAS 309
Madrid , se havia presentado en el Consejo ; de modo que aqui viene bien lo
de Le vin est tiré : il faut le boire.
Supongo que ya havrd vmd. recobrado el manuscrito de sus poesias : avîse-
melo vmd. para mi quietud sobre este particular y para en caso de no, escrivir
que se lo devuelva el sugeto en cuya mano quedô que es de toda mi confianza.
Repito à vmd. y a los suyos una y mil veces mi inûtil pero cordial amistad y
las veras con que les soy afecto.
Cadat.so.
PorMérida, Montijo 31 oct. 1774.
Sr. Don Thomas Iriarte.
Ni al saulo el voto, niai nifio el coco. Con que asi ha hecho vmd. muy mal en
no darme las noticias que me prometiô del papelote panegîrico del Padre Flo-
rez ; siendo asi que mi curiosidad esta sumamente exaltada con la idea que for-
mé en vista del que se hizo para el Padre Sarmiento y vmd. se sirviô extractar
para mi consuelo. No le perdono d vmd. la omision, ni se la perdonaré in arti-
culomortis quando tenga un padre capuchino a mi derecha, un agonizante a mi
izquierda, el bacin a la cabecera, el orinal d los pies y todo lo restante de estas
comparsas. Si desdelacama voy al cielo como lo espero de los méritos de Jesu-
christo, intercesion de la Virgen de Atocha, y oraciones de una tia monja que
tengo en opinion de santa, perderd vmd. mucha parte de mis buenos oricios
con Dios, por esta sola culpa, y si me condeno lo que no permita la Virgen
santi'sima que suceda d mi ni d ningun devoto de su rosario, le atormentaré
a vmd. en suefios haciendo todas las noches el viaje arrastrando cadenas,
echando fuego por los ojos y boca, llenando el quarto de humo, apestando a
azufre, y dando unos ahullidos, rugidos, relinchos, rebuznos, chillidos y otros
gritos que se ha de ver vmd. muy negro si no tiene la precaucion de poner en
sus puertas y ventanas un letrero que diga : Ave Maria Padre Roxas û otro
conjura semejante de los que hay muchos, y vmd. supiera algunos de memo-
ria , si mirase mas por su pobrecita aima que estard save Dios como : Sobre
cuyo ûltimo asunto no quiero dilatarme por no faltar d la caridad fraterna ;
pero este escrûpulo no me ha de bajar de un grado el zelo para la salvaciôn de
las aimas de mis prôjimos : y asi me reservo la facultad de acudir d la piedad y
autoridad de sus dos hermanos mayores para que corrijan al hermano menor,
y le vuelvan d poner en el camino de la salvaciôn, del quai se ha apartado
sobradamente : con cuyos saludables consejos y edificantes exemplos, ayudados
de mis fervorosas oraciones, aun espero verle d vmd. digno de gozar la vida
eterna, ad quant nos perducat etc. Amen.
10 JOSE CADALSO
Se encarga un padre nuestro y un ave maria por el peligro en que esta el
aima del predicador por la vecindad de una mozuela que vive frente por frenie,
y tiene dos ojos como dos îizones sacados del infierno para abrasar al siervo de
Dios.
Chantas d parte soy de vmd. y de sus hermanos muy de veras.
Cadalso.
Lo de chantas y veras, que tal ?
Ave Maria.
Mil veces me he puesto a escrivir a Vra. Charidad, hermano en Christo,
sobre la muerte de los dos famosos monstrnos, como Vra. Charidad los llama
con todo tervor religioso, pero el mal enemigo de rïro bien espiritual, aquel
que en alianza con el mundo y la carne se opone à que ganemos el reino de los
cielos, me distrae de tan santa empresa, poniendo ante mis ojos cierto objeto
de concupiscencia, cuya vista atormenta la quietud de mi espîritu, y me causa
aquellos vivos estîmulos de la carne de que se queja tan energicamente Pablo,
el apôstol de lasgentes, y vaso de eleccion. No obstante el remedio de ayunos,
cilicios, oraciones, y los restantes que aconsejan todos los doctores misticos,
siento una ley en mi sangre contraria a la divina, y como nombre frdgil, hecho
del lodo, y concebido en pecado, he hecho repetidas veces la déplorable espe-
riencia de que pienso mas en cierta Samaritana que en todos los elefantes del
Asia y todos los carmelitas de Europa.
Y para que veais, hermano, quan d paso de gigante camina la propagacion
del darïo, llegué pocas noches ha a figurarme que yo no era espanol ni chris-
tiano, ni vivia en Salamanca, ni en el afïo que segun el almanak del sucesor
de Don Diego de Torres es 6973 de la creaciôn del mundo (antesde cuya época
esta tierra que pisamos era sin duda alguna inanis et vacua el tenebra erant super
faciem abyssi segun Moises en el libro del Genesis hebraice rvtL\\°2 sive Beresith
y segun Ovidio
rudis indigestaque moles etc.
en el primer libro de sus transformaciones :) figuréme bien al contrario ser yo
un poeta griego que por extravagancia sabia el espanol como algunos espaiïo-
les saben el griego : llena la cabeza de Dioses, templo, aras, urnas etc. com-
puse a Cupido y a su senora madré los himnos adjuntos en sàphicos y adôni-
cos que remito d Vra. Charidad y d sus hermanos para que se lean en el primer
capftulo que celebren ; con protesta de que comprehendo muy bien que en
ninguna de las lenguas vivas pueden hacerse talcs versos porque rïras. proso-
dias no senalan la quantidad de todas las silabas : con que asi lo de sdfico y
adônico pretendo se entiendan sobre poco mas 6 menos.
OBRAS INEDITAS 3 I I
En medio de la afliccion que me causa esta tendencia mia â lo que no es mas
que un muladar cubierto de nieve (segun Fray Luis de Granada) he tenido
estos dias un consuelo espiritual que ha llenado mi aima de gozo. El caso es
como sigue.
Desde que tuve uso de razon (digo ratkviis ratiocinantis) me ha llenado de
espanto la posesion de las Américas y destruction de unos 14 millones de ai-
mas hecha por unos quantos extremehos que fueron alla a predicar à canona-
zos la ley del Cordero que los ancianos vieron sobre el Libro de los Sellos (Apo-
cal. Sn Juan. Cap. V). Pero acaban de defenderse en este claustro pro Univer-
sitate unas conclusiones tocantes â estos asuntos y entre otras una dice asi ni
mas ni menos :
THEOREMA SEXTUM.
at cum in Scripturis canonicis pcr D. P.iulum tcstetur. Quid enitn mihi de iis qui foris
sunt judicare disserendum venit an Ferdinand. V et Elisabeth, ob eximiam religionem
catholicis cognqjninatis, S. P. AlexanderVI. ann. 1493, jure ac débite ex plumbaria Bulla
committeret, ut hos Indos hispanico subjicerent imperio, et ad Christi fidem reducendos
curarent? Nos vero havito respectu ad dicta, non solum affirmative, verum et in bello
indico, ita processisse contendimus, prout ad tôt Catholicos decebat Dynastas.
Con esto me he aquietado hecho cargo de las fuertes razones que aqui se
irasinuan, siendo mucho mayor mi humildad que la de algunos doctores que
arguyendo sobre esto se dijeron cosas poco conformes i la charidad christiana y
que pasaban de correccion fraterna.
Otra plumbaria bulla (que para eso la he rayado) sea concedida a vos y vros.
hermanos para que tomeis segura, légitima y quieta posesion de los cielos.
Amen.
4
Estimado amigo : Sacaré una copia del Poema Philosôphico que vnid. me
remite y le devolveré el original.
En mis Carias marruecas (obra que compuse para dar al ingrato piiblico de
Espana, y que detengo sin imprimir porque la superioridad me ha encargado
que sea militar exclusive) he tocado el mismo asunto aunque con menos serie-
dad. Copiaré de mi borrador la que lo trata, y alla ird.
Pero, amigo, no hay patria. Todo lo que sea patriotismo es quando menos
inûtil ; tal vez peligroso. Vmd. créa que desde los chapuceros â quienes viô
Phelipe 2° le hicieron créer que para que un pueblo fuese fâcil de governar era
preciso empobrecerlo, desnudarlo, abatirlo, y arrastrarlo, no se lia pensado
sino en ello. De aqui vino una série larga y cruel de providencias tomadas para
llevar aquella idea a efecto total y cumplido. Se ha logrado tan al pié de la
letra que ningun hombre, no digo patriota, pero solo racional y humano, se
desmaya de dolor al ver toda hra. peninsula y mucho mas si la compara con
12 JOSE CADALSO
otros paises de Europa bien inferiores â ella en clima, suelo etc., etc, y cien
mil êtes. De quando en quando se ha hecho como que se queria mirar por esta
patria, pero a vuelta de una distraction semejante (pues se [puede llamar dis-
traccion) han retrocedido las gentes al sistema destructor.
Siendo esto asi y desde este punto de vista que llaman los franceses, veo très
clases de espanoles. Los de la primera son los ignorantes, tan lejos de compa-
decerse de su pais natal , que no creen haya en el mundo tierra que igualar
con él. Los de la segunda sienten, lloran, gimen, el todo inutilmente; tal vez
hablan ; y entonces se les hace callar. Los de la tercera ven el mal, no ignoran
el remedio, pero conociendo taies y taies obstâculos imposibles de vencer se
meten en unrincon. De aqui el Egoismo, mas inocente; el otro, el Egoismo hor-
roroso, culpable, maquiavelistico, iniquo, es el que se reduce a fabricar su casa
en las ruinas de la nation.
Quan lejos nos llevarian las reflexiones que naturalmente dimanan de esto?
no quiero contristar su corazon de vmd. ni el mio que creo igualmente buenos
y por consecuencia igualmente patriotas : y asi mudemos concluyéndolo con
remitir a vmd. una copia del indice de dichas Cartas marruecas por las quales
vmd. verâ quantas eran las que iban sobre asuntos que tienen conexion con
este.
Al hermano ya ausente mil expresiones, al présente otros tantos abrazos ; y
â vmd. otros tantos encargos de que quiera mucho â su apasionado invariable
amigo
Cadalso.
5
Querido amigo : Â la fuente por agua. Deseo, y necesito me diga vmd. muy
despacio ô muy deprisa, segun cl tiempo que tenga, todo lo que le parezea
necesario acerca del estilo propio de las inscripeiones sépulcrales paganas y
christianas; asi para satisfacer â un Erudito de por acâ como para confirmarme
yo mismo ô corregirme en la idea que he formado de ellas. Esta duda se ori-
gine de que habiendo extractado un monton de nombres de guerreros ilustres
antiguos de una historia de Espana, me puse por diversion â acomodar un epi-
tafio corto â cada uno (no como el Panthéon extremeno del reverendo Salas
que se publicô dos anosha en Madrid) sino del modo que vmd. verâ adjunto '.
De cuya lectura me dira vmd. con voluntad de amigo v philôsopho todo quanto
le parezea, con igual confianza â la que gasto con vmd., interrumpiéndole sus
ocupaciones por el interés de literatura )• gusto que me causan sus cartas.
Un abrazo â cada hermano y todos manden à
Cadalso.
i. Son los epitafios que publicamos ahora.
OBRAS INEDITAS
5M
Talavera la Real, 16 de Septiembre.
Post annos XIV in obsessione coiisiimptos,
très debellaios exercitus, totidem vie ta imperatoret*
summique Scipionis
frustra contra Numanliam arma gèrent is
forlitudincm, peritiam, et fortunam superatas,
nidlam sperantes salutem
ga^as, pneros, maires, senes, Deos, et sctnelipsos
in combattant patriam projecerunt
Nitmantini.
Inconnu memoriam hoc a poste ris Hispanis er cet uni est
monumentum.
6
Querido amigo : Hagame vmd. la fineza de decirme si ha encontrado en ese
archivo algun documento por donde conste que sea cosa bien hecha el olvidar
a los sus amigos. Di'game vmd. que ley hecha en Cortes, que pragmâtica
sancion con fuerza de tal , que acuerdo del Consejo, ô que diablo Colorado,
verde, azul, ô pagizo le ha metido en la cabeza el no hacer caso de los que
andamospor estos montes de Extremadura comiendo bellota utprisca gens mor-
tàlium. Mil ahos ha (i lo menos asi me lo ha parecido) que vmd. no me escribe
largo ni chico, verso ni prosa, serio ni jovial, carta ni esquela. Mire vmd. que
i todos mis trabajos anteriores se me ha anadido el de ser sargento mayo'r de
cavalleria, oficio en que sin duda alguna, a no dulcificarme vmd. la vida con
sus renglones, se me alarganin las orejas, me crecerâ el vello, criaré callo en
las manos y pies y se me trocarâ la voz en rebuzno, como ha sucedido a otros
muchos de mis gloriosos antecesores.
Que dira vmd. quando oiga, vea, û lea, û todo junto, una obra militar mia ?
Se limpiarâ vmd. veinte veces los ojos, creyéndose engahado quando vea una
leyenda que dice asi :
Nuevo sistema
de
Tactica, Disciplina y Economia para la Caballeria espanola
por Don Josef C.
Lo estoy acabando, y si el verano é invierno que viene son gente de paz, iré
a Madrid à imprimirlo : Si hay guerra, adios la teoria y todas sus bellas espe-
culaciones.
Si quiere vmd. saber el porque lie trabajado este asunto ha de saber vmd.
que son dos las causas impulsivas. La i a es que me he visto precisado :i repetir
i. Es inûtil advenir que Impcratorcs signifka générales (Nota de CaJalso).
Revue hispanique. 20
3 14 JOSE CADALSO
el dicho de aquel sugeto que dijo en cierta ocasion anche son io pittore. La 2*
nace de aquella copia que oî cantar una vez d una gitana ojinegra, canpi'cara
etc. y era
Mi abuela pariô d mi madré :
mi madré me pariô d mi :
en mi casa todos paren :
yo tambien quiero parir.
Cui'dese vmd. mucho mds que al archivo : olvideme vmd. menos que hasta
ahora; y mande vmd. d
Cadalso.
Mil cosas d los hermanos.
Montijo io de 1777 : ya me canso de hacer sietes.
Estimado amigo : Gracias à Dios que no ha encontrado vmd. en ese archivo
documento alguno que authorize el olvido de los amigos, antes bien ocasion
para escribirme.
Acoto la obra prometida, y dé vmd. en mi nombre la enhorabuena a su her-
mano diplomdtico; en cuya compania Aid, Thien, Virthpintli, Jehovah, Jupi-
ter, Dios, y el gran Causa Causarum guarde d vmd. muchos anos como desea
CADALSO.
Montijo 25 de 77.
Se me olvidaba el vizcayno Jaungoicoa que significa Senor de alto Nota : en
el idioma cdntabro no hay voz que signifique directamente Dios.
8
Haga vmd. quenta que he entrado en su quarto, descalzo de pie y pierna;
con una soga al cuello ; una vêla encendida ; la melena enmaranada ; la barba
hasta aqui (senalé d la cintura); los ojos bajos; que hice très jcnuflexioncs d
proporcionada distancia (si su quarto de vmd. no es mayor que el mio volaron
de las 3 las dos); que por sérias pedi licencia para hablar; que negdndomela
vmd. por hallarse de un humor de todos los diablos, me fui d la cocina, v me
cubrl el cuerpo deceniza; y volvi de rodillas ante su acatamiento, solicitando
la misma gracia; que vmd. me la concediô, por que ya sève, séria muchisimade
la crueldad; y querespirando dije, ô que dije suspirando, ô que sin suspirar, ni
respirar, sino d manera de autômata con habla; porque el dolor me navra
stupefacto (no) stu|xliecho(tampoco)stupehacido (menos). Comodiremos esto?
Que el dolor me habrd automatizado (tambien suena mal) Cuidado que me lie
metido en un berengenal de los buenos. Demos otro tiento para salir. Digo
pues que el dolor me havrd petrificado (nada, nada : que me llevardn al gavi-
OBRAS INEDITAS 3 15
nete de la Historia natural), me bavrd dejado sin habla (largo es como un
demonio, pero no tiene remedio.) Senor, pequé. Desde mi salida de Madrid,
me ha escrito vmd., me ha remitido cosa de gusto; y yo ni siquiera he res-
pondido : gracias, amigo del aima. Malhecho no tiene escusa, ni la hallo ni la
busco. Solo tratode que vuelva vmd. a escribirme, mucho, bueno, y fréquente.
He estado en el campo de Gibraltar. He entrado en la plaza que me ha gus-
tado muy mucho; me he embarcado mandando 170 nombres del campo de
San Roque a bordo de los jabeques del Rey : salimos dos veces de Algeciras
tras losmoros; no dimos con ellos. Nos desembarcamos: el regimiento cumpliô
su ano, y ahora estoy en Utrera para lo que vmd. quiera mandar d su amigo
Cadalso.
30 de Mayo 79.
9
Mi querido y apreciable amigo : Las cartas de vmd. me sirven como el mand
diz que servia al pueblo circunciso. Si quiero saber noticias de su salud las hallo
en su carta : si se me antoja oir buenos versos, los hallo alli mismo : si quiero
lamentar el triste estado de la literatura , a eso me saven sus renglones. Pro-
siga vmd escribiendo siempreque pueda; porque es tal el tedio que inspira este
pueblo que ni aun para escribir tengo gusto, ni aun â los amigos de mi mayor
aprecio como vmd. lo es, y sera siempre. Esta es una vida indolente, floja,
insipida, y como dejé en Madrid mis libros, creyendo que habria mucho que
hacer con el nuevo exercicio, y deseando evitar la nota de estudioso que se me
ha echado en cara por los savios de mi carrera, me hallo mas solitario que
en la Thebaida. Por lo quai vuelvo y volveré mil veces d repetir a vmd. el
encargo de que me escriba diciéndome quanto ocurra de rc litteraria.
Si se disipa esta niebla, hago dnimo de limar una tragedia que iré remitiendo
a la censura de vmd. por actos : pero me temo no estar para ello.
Mil abrazos d cada uno de los dos hermanos y toda la trinidad mande d
quien es muy devoto de ella d saver
Cadalso.
10
Estimado amigo : Su hermano de vmd. Dominguito, que es mds nombre
de bien que vmd. (aunque no es grande la ponderacion) me dijo ténia vmd.
unos 4 millones de versos que remitirme : y vmd., que es mds picaro que su
hermano Dominguito, (y esta si que es exageracion) no me ha enviado uno
siquiera. Porque? Si es olvido, lo siento mucho. Si es pereza, le alabo d vmd.
el genio ; y esto mds tiene de simpatia con el mio. Adonde hay cosa como no
hacer cosa alguna? Una de las cosas que como buen Cristiano alabo en la divina
é inefable Providencia es haver criado el mundo de una vez y dejar luego que
3 I 6 JOSÉ CADALSO
losastrosden su giro, las estaciones se sucedan, el mar fluya y refluya, los ani-
males se perpetuen etc. y no tener que renovar cada instante, dia, semana, mes,
arïo, û siglo, cada una de las cosas que vemos, y de las que no vemos, sino a
fuerza de microscopios, y telescopios, amen de aquellas à que no alcanza toda
la telescoperia y microscoperia de Londres. Créera vmd. que me enfada mj
relox, quando con harto dolor de mi corazon me pongo a considerar que es pre-
ciso darle cuerda cada 24 horas? Si por algo deseo mi retiro es por tener un
relox de sol fijo en mi huerto, jardin û corral. Vestirse, desnudarse, corner,
descomer, beber, desbeber... puede haber mayores trabajos? es tanto mi odio
al movimiento y amor à la quietud que queriendo ponderar mis méritos a una
moza y desear mi premio, segun aquello de que dignus est mercenorius merced e
sud, la dije muy despacio y tomando aliento diez ô doce veces (lo quai daria
buena idea de mi fervor amoroso) : nirïa va he... venido... très... ô quatro...
veces... d lo... mismo... y ...nada?... cruel!... y me volvî al propio paso à mi
casa : me tumbé en la cama y dormi seis horas de siesta, para descansar.
Quando leo que ha havido hombre que ha dormido uno, dos, très, ô mds dias
seguidos, me muero de embidia. De todos los 8 tomos del Parnaso espanoi
nada leo con gusto sino la cancion del sevillano Herrera al sueno : la se casi de
memoria; y la recito todas las noches al tiempo de meterme en cama. Léala
vmd. y dîgamesi no tengo razon. Sisueno,nose me aparece otro objeto que el
de la Pereza quai la pinta Boilcau. Mdsquisiera haver compuesto aquella pintura
que la Iliada, Odisea, Eneida, Paradiso perdido, Jérusalem rescatada, Araucana,
Henriada etc.; aquello de
soupire , étend les bras , ferme Vœil, et s'endort.
no tiene precio y vale por veinte parnasos griegos, romanos etc.
Si vmd. es del mismo humor no dudo que me quedaré sin los talcs versos
prometidos por mas deseos que tenga de verlos. Pero haga vmd. un esfuerzo,
sin exemplar, y mande que se copie algo y se me envie.
Esta es la provincia mds triste, mds calurosa, mas enferma, mas inhospitablc
de Espana : estoy mandando un esquadron en uno de los pueblos mds melan-
colicos de ella : tengo aqui pocos companeros, y los taies son poco sociables :
lie dejado mis libros en Madrid : no hay por aed una personaque me congenie :
he tenido mis tercianas, de lasquales nadie se libra en este pais. Con que estoy
sumamente melancôlico. Escn'vamc vmd. y me volverd el aima al cuerpo, pues
segun me hallo, creo esta la casa por alquilar y el dueno se ha ido d picos par-
dos. Conque asi, lo dicho diclio; y dando vmd. un abrazo d cada uno de sus
dos hermanos de parte de este tan devoto de esa trinidad, no deseche vmd. de
su memoria d su amigo que lo es con todas veras
Cadalso.
OBRAS INEDITAS 317
en el sobrescrito Extremadura
Por Mérida Talavera la Real (no la Reina)
Rev mo P e Provincial :
Mi dueno : En vista de la carta de V. P. R" 13 llamé â mi celda al hermano
Fr. Joseph, y le mandé leer très hojas del Flos Sanctorum del padre Rivadeneira,
dos capitulos de los exercicios de S n Ignacio, y una hoja de la Vénérable
Maria Agueda de Jésus, ydespuésde haberle hecho tener média horade oracion
mental, y recitar los siete salmos penitenciales, le hablé sobre el asunto consa-
vido, con todo el fervor que me inspira i r0 la obediencia i V. P. R., 2 do el
deseo de la salvacion de su aima y 3 el honor del convento. Tuve el consuelo
espiritual de ver con estos mis ojos que un llanto copiosi'simo de amargura y
arrepentimiento le inundaban las mejillas obesas y coloradas hasta banarle el
vientre inmoderado y protubérante, de tanta magnitud y volumen que parece
digno de qualquiera jubilado, y no de un lego de la orden. La gracia no solo
suficiente, sino la eficienie le iluminô, y en la energia de las voces con que
abjurô de la poesia profana éthnica, Ovidiana, Virgiliana, Horaciana, Catuliana,
Tibuliana, Properciana, y otras ejusdem generis, le conoci digno de participar a
las oraciones de V. P. R. a las que le encomiendo.
Me prometiô dedicar su poesia en adelante â variosasuntos misticos, heremî-
ticos, claustrales, dogmàticos, tvangélicos, monacales, edificantes, apostôlicos,
verbi gratin :
1. — A las cinco llagas de S" Francisco. Odas anacreônticas.
2. — A San Antonio teniendo el nino Jésus en cueros sentado en su mano
derecha. ïdilio anacreôntico.
3. — A San Bernardo echàndole lèche la Virgen en la boca, como se ve
en los quadros. Sdficosy adônicos.
4. — A San Anton, criando su puerco. Caneton pindârica.
5. — A los dos Angeles que fueron a Sodoma en busca de Lot y escaparon
de un fierochasco. Seguidillas.
6. — A las bodas de San Josef. Epitalamio, sin aquello de : Feu, Himeneo,
■ven, ven, Himeneo.
7. — • Al Juicio final, Jdcara.
8. — A la obra del P. Sanchez « de matrimonio ». Madrigal.
9. — La vida de S" Pablo. Romance en el mismo métro que los de Fran-
cisco Esteban.
Omnia sub correctione S ,œ R œ Ecl œ
Perocomode todoslos sermones y consejos el exemplo es el que mas fuerza
hace, yo mismo hago animo de ayudarle en esas obritas orthodoxas; por mâs
que el mal demonio tan enemigo de nras. aimas como de la buena poesia me
sugiera cada dia nuevas especies. Por exemplo un Letor joven, y vivo de nra.
3 I 8 JOSÉ CADALSO
orden (que se llama Don Juan Meléndez y concurre mucho à mi celda con
libertad christiana y religiosa, mozo algo inclinado a los placeres mundanales,
ri las hembras, al vino, y al campo y sobre todo afecto con demasia ri estas cosas
modernas;acompanadodemuy buena presencia, 20 aiios no cumplidos, ypoco
respeto ri los prelados) entrô el otro dia al tiempo de estar yo en profunda
meditacion sobre el Infierno de Virgilio con aquello de
Di, quitus imperium est animarum, Umbreeque silentes,
Et Chaos, et Pblegeton, etc. etc.
entra el susodicho mancebo y me dijo poco mas 6 menos :
« Padre maestro : Benedicite : Me muero quando leo algo del vénérable Ana-
creonte ô bien en su hermosïsimo original, ô ya en las primorosas traduccio-
nes é imitaciones del Maestro Villegas. Cierta delicia ocupa mi espîritu y mi
cuerpo. Tengo envidia al primero y zelos del segundo y asi lie compuesto las
siguientes odas por el estilo de estos dos. >)
Leyômelas (Padre Rev mo ), leyômelas; y quando crei' que el techo caeria, que
el suelo se abriria, que el diablo se. lo llevaria, me encantô entre otras la
siguiente
ANACREÔNTICA
Sobre el tcnior de In vida futura.
Si es forzoso, Belisa,
morir, y nadie puede,
por mucho que la tema,
librarse de la muerte
ni conocer tampoco
lo que después sucede
ni donde nos quedamos
niquien alla nos tiene,
agora que vivimos
gocemos los placeres
los gustos y delicias
que Venus nos ofrece.
Del mismo ténor son las otras que componen un corto quaderno con tïtulo
de Datilo, nombre escandaloso, v piarum aurium ofensivo, respecto de que
como V.P. R. save, el susodicho Batilo fué un muchacho a quien el viejo rnal-
vado Anacreonte queria un poquito mâs que como ri prôximo, al exemplo de
Jupiter para con Ganimedes, Apolo para con Hiacinto, Alexandro para con
Ephestion, Socrates para con Alcibiades, y etc.
La silva amatoria que V. P. R>»» se sirve enviarme se leera en mi celda i
los piadosos que acuden ri ella, se copiarâ de muy buena letra, y se le devol-
verà; pero hasta entonces nondum venit hora tua.
Al tal Letorcillo joven y di'scolo he procurado apartar de la errada senda de
OBRAS INEDITAS 3 19
la poesia : le he dicho muchas veces quanta lâstima nie causa su pesaminosa
inclinacion, y quan pro/echoso le séria su talento, si lo dedicàra d otras cosas
mas sôlidas como d comentar a Aristôteles, ô à compotier algunas novenas
devotas à Santa Ursula y sus 11.000 companeras de martirio y de virginidad.
Pero la arrastra su inata malvada tendencia al inflerno con todas las senales
de proscrito pues se inclina con predeterminacion phi'sica al dicho pasatiempo,
y d estudios serios de peor naturaleza quales son el Espi'ritu de las Leyes de
Montesquieu, el derecho de gentes de Vatel, y otros de gran perjuicio espiri-
tual, en conocido detrimento de su aima. Aun le he oido hablar con respeto de
Newton y otros mathemdticos y phisicos buenos.
No obstante le estimo mas que â otro algun joven novicio, corista, letor, y
aun tengo mds concepto de él que de muchos padres graves catedrdticos, jubi-
lados, presentados, definidores, y viendocon ldstima no solo el malogro de sus
prendas intelectuales, sino tambien el positivo riesgo que corre su salvacion lie
procurado apartarle d lo menos de la poesia con las siguientes amonestaciones
(miento : no irdn hasta el correo que viene, pues no pueden estar copiadas d
tiempo para el de esta noche.)
Encomiéndome muy de veras d las oraciones de los hermanos en Christo Fray
Domingo y Fray Bernardo, como tambien d las de V. R. suplicdndole me
eche su benedicion y me tenga muy présente en sus coloquios con Dios.
Fray Rotundo de la Panza.
Nota : Sin perjuicio de remitir ut supra lie prometido las amonestaciones
que hice al dicho Lectorete, en el correo que viene, hay tiempo y lugar opor-
tuno para la siguiente octava que hice luego que vi sus primeras poesias :
Quando Laso nmriô, las nueve hermanas
lloraron con tristisimo gemido :
destemplaron sus liras soberanas,
que solo daban funèbre sonido :
gimieron mds las musas castellanas
creyéndose entregadasal olvido.
Mas Phebo dijo : aliéntese el Parnaso !
Meléndez nacera, si muriô Laso.
P. D. — Por en iar todo junto no fué esta carta al correo pasado, dete-
niéndose hasta el de hoy. Devuelvo la silva después de haberla copiado y
reservado la copia entre los papeles de mi mayor aprecio, como todo lo que
venga del mismo autor.
Al mismo sobre la dulzura de sus poesias :
320
JOSE CADALSO
Sigue con dulce lira
el métro blando y amoroso acento
que el gran Phebo te inspira;
pues Venus te da aliento,
y el coro de las musas te oye atento.
Sigue, joven gracioso,
de mirto grato d Venus coronado ;
y quedarâ embidioso
aquel siglo dorado
por Lasos y Villegas afamado.
Dichosa la zagala
d quien le sea dado el escucharte;
pues tu musa la iguala
a la Diosa de Marte :
tal es la fuerza de tu ingenio y arte !
Aunque mas dura sea
que mârmoles y jaspes de Granada
quai otra Galatea ;
6 sea nids helada
que fuente por los hielos estancada,
Al punto que te oyere
te admitird en su cdndido regazo :
si tu voz prosiguiere
te estrechard su brazo ;
y Amor aplaudira tan dulce lazo.
Y las otras pastoras
de embidia correrdn por selvay prado
y verd la que adoras
el triumpho que ha ganado,
por havcr tus ternezas escuchado.
Mas ay de aquellos nedos
que intenten competir con tu blandura!
solo hallardn desprecios
de aquella hermosura
que una vezescuehare tu dulzura.
Dirdn su rabia y zelos
en el bosque mds lobrego metidos,
injuriando d los cielos ;
y, oyendo sus gemidos,
responderdn las fieras con bramidos.
Entrada del Averno
parccerd aquel bosque desdichado ;
y do tu métro tierno
huviere resonado
el campo que à los buenos dard el hado.
Paso mi primavera,
(los anos gratos el amor y Phebo
quien revocar pudiera !)
y d juntar no me atrevo
mi voz cansada con tu aliento nuevo.
Sino, yo cantaria
al tono de tu lira mis amores ;
y al tono de la mia
cantiras entre flores
como suelen acordes ruisenores.
Sigue, sigue cantando!
no pierdas tiempo de tu edad florida :
que yo voy acabando
fastidiosa vida
en milicia y en cortes mal perdida.
En alas de la fama
tus versos llegardn d mis oidos,
si la trompa me llama
d los moros vencidos,
6 d los indios de Apache embravecidos,
o al antdrtico polo
llevando las banderas del gran CARLOS
dirdme siempre Apolo
tus versos ; y d escucharlos
acudirân las gcntes y d alabarlos.
Ni el estrtlpito horrendo
de Neptuno que ofrece muerte impia;
ni de Marte el estruendo
turbard el aima mia,
si suena en mis oidos tu armonia.
OBRAS 1NEDITAS
321
Aun quando dura parca
mayores plazos a mi vida niegue,
y en la funèbre barca
por la estigia navegue
y à las delicias del Eliseo llegue
oiré quando Catulo,
à la sombra de un mirto recostado,
con Propercio y Tibulo
lea maravillado
los versos que tu musa te lia dictado.
Quando acudan ansiosos
Laso y Villegas al sonoro acento,
repiticndo embidiosos :
Que celestial portento!
à quien ha dado Apolo tanto aliento î
y yo siendo testigo
de tu fortuna que tendre por mia
dire : « yo fui su amigo
y por tal me queria ;
y en dulcisimos versos lo decia '. »
Harànme mil preguntas
puesto en medio de todos : De quien ères ?
Y quantas gracias juntas?
Y à quai zagala quieres?
Y como baila quando el plectro hieres?
Y con igual ternura
que el padre cuenta de su hijo amado
la gracia y hermosura,
y se siente elevado
quando lo escuchan todos con agrado,
responderé cantando
tu nombre, patria, genio y poesia ;
Y asombrarânse quando
les diga tu elegia
à la memoria de la Pbilis mia -'.
11
Condicion preliminar del tratado de coniercio literario que hacemos vmd. y
yo in nomine individua trinitatis etc. Vmd. respondera à mis car tas y me escri-
birâ otras de impulso propio siempre que quiera y no tenga nada que hacer,
sin que yo forme la mejor queja y vice versa.
Extraordinariamente (como dice la extraordinarîsima conclusion de la octava
que vmd. me dice haverse impreso de letra de molde en el ano de mil sete-
cientos y setenta y très de nuestra redempeion) extraordinariamente extraordi-
naria, vuelvo i decir, es, ha sido y sera siempre la carcajada de risa que me
1. Hace referencia esta estrofa a la canciôn de Meléndez, dirigida à Cadalso bajo el
poético nombre de Dalmiro, que empieza asi :
Caro Dalmiro, cuaudo à Filis suena
tu deliciosa lira,
el rio, per oirte, el curso enfrena,
y el raar templa su ira, etc.
(Nota de D. Leopoldo Augusto de Cueto, en su ediciôn de los Poêlas liricos del siglo
XVIII.)
2. Esta elegia empieza asi :
i Oh ! rompa ya el silencio el dolor mio !
y es imitaciôn de la de Moratin ;i la muerte de la Reina Madré. (Nota de D. Leopoldo
Augusto de Cueto, ïbîd.)
JOSE CADALSO
causa la calidad dcl panegirico del gallego mejor que huvo en Galicia, y el
espanol mejor que huvo en Espana, y del Salomon gallego que fué llorado con
sosiego porque fué gallego corao tambien si huviese sido manchego y que si en
lugar de ser gallego o manchego huviera sido extremeno huviéra sido llorado
con cefw nec non si huviera sido malagueho, y a serel Reverendisimo granadi no,
huviera sido llorado con desatino; y en caso de ser aragone's, le huvieran llo-
rado con el ojo del revês, y siendo mallorquin con lâgrimas de bacin et sic de
caeteris.
Gallego llorado con sosiego me hace â la memoria aquello de
Bajalht par lo dura del penasco
una bormiga vestida de damasco
y lu ego
y al enlrar en el yermo,
hallôse luego con un nionje enfermo
oyendo todo esto y conociendo la sujecion servil al consonante de quien no
save ô no quiere manejarle bien, dijo uno
Si comofué penasco fuera pena
bajaria vestida de estamena
y luego
Si como yermo ha sido, fuera buerto,
se encontraria con un mon je muerto.
ô una cosa asi; que âfe mia hace vaalgunos anosque 01 este juguete, y no me
acuerdo de las voces précisas, pero si de la idea, y de lasemejanza con el lance
présente; porque aqui que nadie nos oye sino los dos hermanos y tal quai
amigo de confianza quien mequitaria decir al oir que el gallego fué llorado con
sosiego la siguiente retahila :
Sarmiento fué llorado con sosiego, Y porque veas Phebo en un instante
porque el dicho Sarmiento fué galle r 0\ la fuerza del maldito consonante,
que, si hubiera nacido en la Bane; i, con que a las musas de las lengua
ya le hubieran llorado con vive^ci ; de pena cargas y de gusto privas,
pero siendo Sarmiento malagueho si al sumamente reverendo Padre
le llorarian, ya se ve, con cefw, en Toledo le faja la comadre
y al contrario si fuese de Ahneria, no hallando el consonante de Toledo
se llorani tal vez con alegria. diria, que le lloran con un pedo,
Pues que si huviera sido de Vahnciaï verso que causària mil enojos
le llorarian todos con viole/nia. à la nariz no menos que à los ojos.
Y en caso de que fuese granadino, Triste de mi ! si el hado dispusiera
como le llorarian? con grau Uno. que mallorquin por nacimiento fuera,
Pues démos que naciera en Albacetc : diria : ya se lia muerto el mallorquin
le lloraran bailando el minuete. llorémosle con ojos de bacin ;
Y «racias à que no naciô en Durango, y (en caso de que fuese montanès)
que entonces le lloraran con fandango. lloradle con el ojo del <
et sic de cceteris in saicula sa;culorum. Amen.
OBRAS INEDITAS 323
Si lo que se ha de publicar cou motivo de Fray Fiorez es igual d lo visto,
serân dos monumentos eternos levantados d la ignorancia, pedanteria y a la
ignominia de nro. pais y siglo. No hay una aima caritativa que delate al tribu-
nal de la razon una obra semejante? Haga vmd. una visita muy formai de
mi parte d Don Amador de Vera, autor de los Literatos en quaresma, para que
escriva algo sobre este asunto, que a no estar tan lejos de Madrid Don Joseph
Vazquez, autor de los Erudilos à la violeta, ya lo trabajaria, con gusto. El luto
que insinua el Panegirista que debian llevar los Benitos habla de ser no por la
muerte del elogiado, sino por el infortunio de tener en sus claustros seme-
jantes elogiadores. Yo no soy amigo de hablar del govierno pero no puedo
menos de hacer esta pregunta : porque se permite publicar esta especie de pro-
ducciones que no puede causar otro efecto que el empeorarnos cada dia la fama
en el mundo literario y confirmar d los extrangeros en la preocupacion en que
estdn contra nuestras obras del siglo pasado y présente? Las academias devie-
ran volver por la honra de la nacion y acudir al trono pidiendo alguna resolu-
cion capaz de remediar este daiîo. Si yo llegase alguna vez à entrar en una de
estas asambleas (lo que estoy muy lejos de merecer ni solicitar) no dejaria
pasar sesion alguna, en que no solicitase esta especie.
Va esto muy serio para el tiempo que hace y demasiado para quien acava de
leer los extractos del papelon : remitamelo vmd. todo entero, si fuese su
tamano cômodo para el correo : pero si después de bien leido le parece d vmd.
digno (por lo ridi'culo) de remitirse, aunque de volumen tan grande como los
desatinos que contiene, enviemelo aunque sea menester alquilar una carrete-
ria entera como las que llevan el métal de Vizcaya, aquel métal tan poderoso
hasta que se descubriô con abundancia el de Mexico y el Perd! Y vea vmd. su
poco de moral de paso! Ni créa vmd. que sea importuna esta moralidad ; por-
que no déjà de haver cierta connexion entre oro y plata y mon j es benitos.
De la literatura de este pais no puedo decir a vmd. mas de lo que vmd.
mismo me dice, y aténgase vmd. â su dictamen que es el mas verdadero juicio
que se puede formar del estado de las cosas literarias de Salamanca ; pero,
prescindiendo de lo savio, en lo demds es muy buena gente.
Dard vmd. mil abrazos d sus hermanos d quienes quiero casi casi tanto como
d vmd. de quien soy ex corde
j. C.
Abreviatura de mi nombre y apellido, muy semejante al dulcisimo nombre
de Jesu Christo que tambien se suele poner J. C, cosa que me llena de con-
suelo espiritual.
324 JOSE CADALSO
12
El autor de los Eruditos d la violeta saluda al autor de los Literatos en qua-
resma; le envia esta caria y le pide no la lea delante de algun majadero.
Nota : y pide respuesta.
Estimabilisimo y estimadfsimo amigo : £ Quepuede importar a vmd. queyo
haya llegado a Salamanca ô me haya muerto en el camino, esté bueno û malo,
alegre ô triste, libre ô enamorado, fastidiado 6 divertido, en una buena posada ô
en el hospital? Pero d mi, si, me importa y muchoque vmd. sepa que le estimo
mucho, y por tanto le dé noticia de haber llegado bueno, estar de buen humor
philosôphico, bien establecido con mis libros, y bastantemente favorecido de
estas gentes en Salamanca, doctisima universidad, donde no se enserïa mathe-
mâthica, phîsica, anatomia, bistoria natural, derecho de gentes, lenguas orien-
tales, ni otras frioleras semejantes, pero produce gentes que con voz campa-
nuda pondrdn sus setenta y siete mil setecientos setenta y siete silogismos en
Baraliptonfrisesoiuoriiiii ù Sapesino sobre como hablan los dngeles en su tertulia,
sobre si los cielos son de métal de campanas, û liquidos como el vino mds
ligero, y otras cosazas de semejante entidad que vmd. y yo nunca sabremos,
aprenderemos, ni estudiaremos.
Dos hermanos tiene vmd. en este mundo y un tio en el otro de quienes
deseo noticias. Démêlas vmd. y muy frescas. A los dos que estdn todavia
por acd, dard vmd. muchos abrazos de mi parte y casi iba d encargarle lo mismo
para el que va pasô la barca de Aqueronte, pero no me atrevo d exponerle d
vmd. d que por complacerme se fuese boniticamente a casa delà Sibila d pre-
guntarla el camino y pedir el pasaporte : y que estando vmd. viendo los qua-
dros de su Capilla, saliese ella, con una cara de esqueleto, un vestido de tela-
rana, y una voz de vieja gangosay carraspena, le mandase comprar unos quan-
tos terneros y carneros, matarlos, y luego ella hiciese mil gestos quales suelen
hacerlos los endemoniados de hogaiîo; y después le diere d vmd. por no
hacerle esperar tanto tiempo un ramo de olivo muy guapo con sus cintas, 6
tal vez como no tuviese mucho que hacer aquel dia, tomase su mantilla y se
fuese con vmd. en buen amor y compana, caminito de otro mundo donde se
encontrarian de manos d boca con varios monstruos que no se ven en las
ménageries de por aed; después varias animas deseosas de entrar como las de
los Sres. Oronte y Palinuro; después la barca de Aqueronte el quai con aspe-
reza de verdadero marino se haria de pencas para recibirlos, hasta que viese el
ramo; después al desembarcar se hallarian con el cerbero que ladran'a ende-
moniadamente hasta que le echase vmd. û la companera de viaje un pastelillo
para que se entretuviese; después llegarian adonde estdn los chiquillos que
murieron quando apenas podian decir caca; los que se mataron d la inglesa,
los que murieron inocentes, y los amantes entre los quales estant mi Philis que
OBRAS INEDITAS 325
se muriô y me dejô, y se fué sin llevarme, por mas que yo la decia como
Hernando de Herrera a su Lucinda
Estréchame, Lucinda, entre tus bravos,
y pasaremos juntos el Letheo.
Después verian vmds. el puesto destinado para los verdugos alquilados para
matar â sus hermanos, digo, los guerreros insignes como los que célébra la
historia y yo no quiero nombrar ; después tirando sobre la izquierda encontra-
rian con todos los bribones condenados por sus iniquidades à ser los unos fri-
tes en aceite, otros a ser asados, otros a estar en las parrillas, otros a la cra-
paudina, otros en escabeche, etc., etc., y después de todos estos despueses,
volviendo sobre la derecha se hallaria vmd. en un campo como asi me lo
quiero , donde encontraria la compaïïia mâs honrada del mundo de gente
savia, quieta, y philosopha. Alli estaria con Seneca, con Marciaî, con Cervan-
tes, con Garcilaso, con Léon, y con otros savios espaiïoles el vénérable Iriarte
que saldria al preguntar vmd. â aquellos insignes nombres y a su conductora
Dtcite, felices anima, tuque, optime vates,
Qua regio Anchisen, quis habet iocus ? etc.
Virgil, iEneid. Lib. VI. vers. 669 et sequ.
13
En el café mas concurrido de una de las principales ciudades del Planeta que
llamamos Saturno suelen leerse las gacetas mâs auténticas y en el parrafo ûlti-
mo de una de ellas, se incluyô poco ha, la siguiente noticia, que ha sido el mo-
tivo de todas las conversaciones entre todos los estados politico, eclesiàstico,
militar, escolâstico, y jurîdico de aquellos paises. Ha venido & mis manos por
arte mâgico de una bruja que vive la puerta mds abajo de mi casa, y dice asi :
« En un globillo compuesto de sôlido y liquido que anda dando vueltas alrede-
dor del grande y ûnico luminar, hay una pequeha parte llamada Europa, habi-
tada de unos bichillos sumamente despreciables que se llaman hombres. Una
porcion de la tal Europa casi inculta y despoblada se llama Esparia. De la tal
Esparïa una provincia se llama Extremadura, si'ncope de extremamente dura,
nombre que le conviene perfectamente por su suelo, clima, y carâcter de sus
habitantes famosos por haber aniquilado muchos millones de semejantes suyos
en otra parte del tal globillo llamada America. En dicha Extremadura ô extre-
mamentedura hay un monton de chozas medio caidas con nombre de Montijo.
En el Montijo hay unos animales de dos pies sin pluma que llaman hombres
porque en lo exterior se parecen algo a los hombres de otras partes. Entre los
taies hombres, 6 lo que sean, del monton de casas caidas que llaman Montijo
de la provincia extremamente dura, del pais inculto y despoblado que llaman
Europa, menor parte de las quatro que componen el globulillo compuesto de
326 JOSÉ CADALSO
sôlido y liquide» que anda dando vueltas alrededor del grande y ûnico lumi-
nar, vive un ente de tan extrana constitucion que no puede explicarse, sino
poniendo aqui la distribucion de su vida, que es como sigue.
Muy temprano le despiertan sucesivamente el canto de un gallo, el rebuzno
de un burro, y el martillo de un herrador, alguna vez se aumenta esta mûsica
con el chillido del niho que llora azotado por su madré, ô el de la mujer apa-
leada por su marido, ô el de un muchacho descalabrado por una piedra que
otro le tira.
À esto se sigue estarse dos horas en cama à ver si puede dormir; v selevanta
sin haver dormido.
A esto se sigue llamar â otro animal semejante a él mismo que le sirve por-
que le paga, y â quien paga porque le sirve (aqui ponia el gacetero una corta
disertacion sobre amos y criados; para explicar â los Saturneos como creyéndose
todos los hombres de la tierra descendientes de un mismo nombre y por con-
siguiente hermanos, se sirven los unos à los otros por interés y no por amor.
Se omite el traducir la disertacion por inûtil). A esto se sigue que el tal, à fuerza
de quemarse la lengua, gaznate y paladar, toma por primer alimento un me-
junje negro hirviendo, soplando y sorbiendo con mucho trabajo, compuesto de
canela, cacao, y azûcar, desleido en un poco de agua. A esto sigue que entra
en el quarto del tal otro tal y le dice : mi Capitan. de los 30 cavallos de la
Compania 3 han estercolado tan blando que nos da mucho que sentir : los
demis no tienen novedad en su importante salud. De los quarenta soldados,
dos han sacado la espada sobre quai es mas alta si la Giralda de Sevilla û el
campanario de Santa Cruz. Son muchachos; han quedadoamigos. Otros dos se
han dado de estocadas sobre quai vale mas, si la Virgen de las Angustias de
Granada ûla Virgen del Pilar de Zaragoza, son dos carabineros antiguos, hom-
bres de juicio, que nunca han dado que decir en la Compania : ambos estàn
heridos en la cabeza y con delirio; se curarân, si V. quiere, sin que se sepa. No
hay mas novedad.
A esto se sigue que el tal dice al otro tal : esta muy bien ; taparlo todo,
menos lo que han estercolado duro los cavallos : de eso déle V. parte al sar-
gento mayor. Avise V. quando den la orden para tomar la paga.
A esto se sigue que el tal bosteza quatro ô cinco veces solo en su quarto; y
se viste para salir à bostczar otras quatro ô cinco veces en la plaza con otros
talcs.
A esto se sigue que los cinco ô seis después de habcr bostezado juntos se
separan para ir a corner cada uno su puchero en su mesa al mismo tiempo que
caJa cavallo corne su pienso en su pesebre.
A esto se sigue que se pasean juntos à mariera de rebano sin pastor y que
durante el paseo hablan del buen tiempo, l lu via, cevada, trigo, etc. diciendo
todos los dias lo mismo a la misma hora y con el mismo tono de voz. »
OBRAS IXEDITAS 327
El fragmente» de la Gaceta no decia mas, y los savios Saturneos es natural
que habian especulado sobre la naturaleza de los vivientes en el Montijo; pro-
poniendo premios a los que traten mejor y hagan mas juiciosas conjeturas
sobre este que sera para ellos fenômeno.
Si vmd. tiene algun amigo Colorado en estado parecido a este, téngale vmd.
tanta lâstima quanto carino tiene â vmd. y i sus hermanos Cadalso.
14
Extracto de las actas de esta academia. El Viernes Santo propuso un acadé-
mico (notando lo delgado de la voz de un capon que cantaba aquello de tibi
soli), que conexion phisico-anatômico-harmômca tiene la voz humana con los
testiculos, ô sea partes pudendas. El Sdbado Santo después de cantar el gloria
y corner pro academia dijo un académico que el grito bdquico Evoe! Evoe!
significa rigurosamente lo que dicen maestros borrachos sendas veces al salir
de la taberna â saver tarrarra! tarrarra!
El Domingo de Pascuas, perorô un académico fervorosisimamente sobre lo
conveniente que es la confesion auricular por las conversiones que suele hacer
por Pascuas; dando por si mismo un exemplo notable contando que cierta per-
sona se le habia resistido hasta el cumplimiento de la Iglesia después de cl
quai se ha ablandado al paso que el académico se ha puesto duro.
El Lunes de Pascua fué la Academia a la Opéra, y un miembro de ella notô
cierta sensacion â la primera cabriola abierta que hizo una bailarina famosa,
por las piernas y muslos que naturaleza le ha dado, y servirdn de modelo en
nuestra Academia. Se pregunta quai es la causa phisico-analôgico-simpdtica de
este suceso.
El Martes de Pascua, la Academia lue à un sermon muy afamado, y antes de
concluirse el exordio, roncaban pasmosamente todos y cada uno.
Los dias siguientes no ha habido cosa notable que apuntar como suele acon-
tecer en otras muchas academias de este mundo.
Hoy 15 de Abril présenta un individuo la siguiente
ANACREÔN'TICA
El tiempo a Venus grato y ;i la sombra de un niirto
es el frio diciembre, gozan dulces placeres.
burlando el duke fuego
los hielos y la nieve.
Tambien el triste otono
delicias les promete
Tambien la primavera quando Pomona y Baco
gustar a Venus suele sabroso fruto ofrecen...
quando brot.m las flores
Pero, Venus, que di^o?
todo tiempo convient-
Gustan muchos amantes à los pechos que se aman
y murmuran las fuentes.
Gustan muclios amante:
aun del estio ardiente quando juntarlos quieres.
328 JOSÉ CADALSO
Hagoànimo de formar para mi mismo una coleccion de mis cartas familiares
y asi envieme vmd. las que tenga mias sino se ha limpiado el culo con
ellas.
15
Querido aniigo : De Salamanca me avisa un amigo haver entrado en exer-
cicios spirituales para ponerse en estado de hacer una compléta confesion gêne-
rai; y ahade que habiéndole entregado su director la Biblia para sacar de ella
los puntos de oracion mental, tropezô conlo de Job, y se le quedôtan impreso
su estilo que de résulta ha compuesto el siguiente soneto '.
Un abrazo â los dos hermanos y todos très manden a
Cadalso.
1. Falta en cl manuscrite).
OBRAS INÈDITAS 329
KALENDARIO M AN UAL
KALENDARIO MANUAL Y GUIA DE FORASTEROS PARA EL CARNAVAL DEL ANO
I768, DE DON JOSEF CADALSO, COMANDANTE DEL REXIMIENTO DE CAVALLERIA
DE BORBON Y AUTOR DE LOS ERUDITOS A LA VIOLET A * .
(Biblioteca National de Madrid, Ms. KK. var. poes. 4.)
Kalendario manual y guia de forasteros para el Carnaval del ano de 1768 y
otros, contiene los acontecimientos mas particulares, los Ministros que compo-
nen los tribunales del amor, dias de gala, y otras noticias, con el estado mili-
tar de mar y tierra, para la Guerra de Cupido ; impreso con superior privilegio
de la decencia, en la oficina de Venus, calle de los Placeres, enfrente del tem-
plo de la juventud por Adonis Jacinto del Eco, impresor de Camara y alcoba
de Chipre.
Los astrônomos de Chipre dan principio al càlculo del ano desde las ocho
de la noche primera del Carnaval, y aunque por este cômputo, se deberia esta-
blecerel principio de qualquiera mes, en la noche del 26 de Diciembre, acomo-
dândose nuestro estilo al de la era vulgar, pero por la correccion Pétri Paulina
se empieza à" contar este ano desde la noche de el 4 de Noviembre.
Este ano es el de 68 de la libertad y expulsion de las Golillas : mutacion del
chichisbeo en cortejo : el no se quantos de la fundacion de Saltantipolis : el ter-
cero de la translacion del Principe à los Canos : el segundo de lamuerte de la
Reina de los teatros, y de los tavernâculos en el Prado, y el primero de el vuelo
retrôgrado de la paloma por los Pirineos.
Cômputos del aùo.
Aureo numéro 301 y 6 ciclo de poco importa.
Fies tas movibles.
El 4 el 12 y otras que se veràn.
1. No puedo asegurar que este Kalendario manual no se ha publicado todavia; el dis-
tinguido literato Sr. D. Emilio Cotarelo supone que esta impreso ya en un periôdico de
fines del siglo pasado y también en una de las colecciones tituladas Almacèn defrutos lite-
rarios (quiza la segunda). Lo cierto es que no figura en ninguna edicion de las Obras
complétas; por eso no me parece inùtil imprimirlo 6 reimprimirlo aqui.
Revue hispanique 21
330 JOSE CADALSO
Las 4 témporas.
Ferias : Mascaras : Semana Santa y noches de verano en el Prado.
Eclipses de sol.
Muchos Indianos se eclipsardn de la noche a la manana.
De la luna.
Algunas vestales para Cddiz, Barcelona v Valencia : estos éclipses serin
inconocibles para los caseros, mercaderes, sastres y otros.
Reduccion del Almanak de Chipre al de Esparïa para mas fdcil inteligencia
de los menos eruditos.
Novietnbre.
El 4 con motivo del baile de mascaras vendrdn por el aire su natural ele-
mento muchos Senores desde el Sitio y se verân muchas exhalaciones por aquel
camino.
El 12 idem per idem : la co;telacion declarada contra las mulas de colleras,
guardas de las puertas y criados que no tengan prevenidos los boletines de
entrada y dominoes. Mas exhalaciones por aquel camino.
El 19 mas templada la atmosfera de puertas afuera del Amphiteatro y nuis
destemplada de puertas adentro.
Diciembre.
El 4 Santa Barbara fiesta de muchos. El 20 Santo Tomas ver y créer : el
28 Santos Inocentes dias del autor de este papelito : muchos dias de mascara :
frio para los cocheros, mozos de sillas, y lacayos de la Plazuelay mucho calor
para los que estdn dentro bailando.
Enero y Febrero.
Adeldntase la estacion favorable para sembrar y recoger : el que la pierda
aprenda otro oficio. Semana Santa Procesiones, Misereres en las Iglesias, que-
dando solamente una luz y esa de tapadillo : raiedo d los Diciplinantes para
meterse en los portales ; sillas de manos, y mantos de puntas de encages, todos
los oficiales de la guarnicion puestos en venta desde el Jueves Santo hasta cl
Martes de Pascua : vacaciones para los escrupulosos; otros dicen que ni por
esas. El 24 Nuestra Senora de la Paz d quien pido no se enfaden algunos de
mis letores.
Mar^p.
El 4 San Casimiro gala en Portugal. El 21 entra la naturaleza en la prima-
vtra y el sol en Aries : entradas andlogas.
OBRAS INEDITAS 33 I
Abril.
El calor va aumentando y el sol de Aries en Tauro : esto es creciendo, pues
mayores son los cuernos de un toro que los de un camero. El 25 San Marcos
procesion gênerai , no hay abstinencia en Chipre.
Mayo.
El sol en Gemînis esto es en los dos.
El 15 San Isidro, paseos, meriendas y etc., etc., etc.
Junio.
El 1 3 San Antonio de Padua abogado de las cosas perdidas : santo mio de
mi aima. Abrense los Jardines del Retiro desde el principio de este mes hasta
el de Septiembre dura la quaresma en Chipre : en este tiempo debe haver
abstinencia rigorosa de los manjares comprendidos en Julio.
Julio y Agosto.
Ni caracoles, ni coche, ni mosto : Julio, sigue la quaresma de Chipre buenas
cosas en los Jardines del Retiro para el curioso observador.
El 6 Santa Lucia abogada de los ciegos que no ven ô no quieren ver.
El 14 San Buenaventura.
El 16 triunfo de la Cruz de la moneda.
Canicula.
Sol en Léon y agua de cevada, agua de achicorias y agua de limon, nitro,
nieve, parco en medio, y durante esta temporada se pondràn en el puerto de
Guadarrama, cafés, botillerias, teatros, y otras diversiones, buenas cosas de
los jardines del Retiro.
Agosto.
Idem per idem. Sol en Virgo : esto se entiende en otros climas, pues en el
de Chipre, no solo no hay sol en Virgo, pero ni virgo en sol, y menos en la
canîcula.
El 3 1 San Ramon Nonato abogado de las que estdn pariendo como Dios
manda.
Septiembre.
Sale la canîcula : ojalà no hubiéramos entrado : vamos preparando las man-
tas.
El 14 la"exaltacion de la Cruz de la moneda. El 21 feria de San Mateo : al
buen entendedor pocas palabras.
Octubre.
Se acaba el paseo de los Jardines del Retiro : ique lastima!
El 3 San Cândido : hay pocos del nombre de este bendito Santo, y con uno
que hay sobra, y con esto se concluye el aho de Chipre.
Dinero sobre todo.
332
JOSE CADALSO
Juvileo.
El Jueves en casa de Santiago.
El Viernes en casa de Mendoza.
Los Miércoles y Sdbados durante el Carnaval enfrente de la Real Biblioteca,
y todos los dias del ano en la Puerta del Sol, Calle Mayor, casas de Geniani,
Perez, Lumbreras, Tarsi, Larus, Vallejo, Gallinas, y otras de la misma clase y
orden.
Nota.
Caballeros existentes en la insigne orden de la cadena. Noticia de sus madri-
nas de hdbito y otras necesarias para el pleno conocimiento del fioreciente
estado â que ha llegado esta orden en estos felicîsimos tiempos por las listas
alphabéticas de la ùltimacampana de la orden, en la quai podria haber variacion
en un mes para otro.
A
Alcan Pach.
Alb Cordo.
Almodo Sant.
Adorn. B Ros.
Alba Saman.
B
Benave Ros.
Bey Sal.
Benda Real B Gonz.
Bobad Egin'a.
Borbon Lac.
Ban B Fuen.
Bardai Cagi.
C
Ciru Sus.
Cogo Pach.
Cam Bi r Revillagi.
Canet Co de Mo.
Claramo Col.
Cast. fuert Alcnc.
D
Davi Diog.
E
Espelct Torre Man.
Eug Arram.
F
For Lia.
Fontan Emb. de Fran.
G
Gra R Ricar.
G. Hi Pénal.
H
Hues Mar de Mo.
His Color.
Hipol Bea Guem.
/
Isab 1 del Hoyo Leso.
Isab 1 Arno Laie.
A'
Konig Mich.
OBRAS INEDITAS
333
Mir.
Mira
Medinas-O Arc.
Montu
Murill Bria.
Miran de Art Peat.
Man-B Oliba.
Monsag Berdug.
Mor-B Sarti.
Osum Branqui.
Orei. O Samani.
P
Pen Pal.
Port Bento.
Par Aroi Bad.
Perale Cam.
Penon O Car.
R
Repa Rox Ceba.
Rox In Pedr.
Regal-O Vive.
Sant Rubi.
Salust B.
Someru Idia.
Salbador-B Amavi.
Sastite Ruche.
Salvati-B Mirall.
Teve B Sot.
V
Villafran Pesad.
Valde Carz O Cresp.
Villamay Losad.
Villan P.
Veg de Pozo Rice.
Villa Pater Cancel.
Valen Bar.
X
Xavie Orca Monsa.
Xavie Mat. Bele a Marq. de R.
Y doble numéro de ellos que se ocultan por buenas razones sin contar los
cavalleros y candidatos, y otras tantas senoras que debian serlo ô va por vani-
dad, pues la que no lo es en esta orden esta desairada ô ya por conveniencia
ô por otras razones de estado.
Las Madrinas senaladas con una B. que quiere decir Beleta, lo han sido ante-
riormente de mas cavalleros existentes, difuntos, ausentes, ô expulsos de la
orden.
Los caballeros que sus madrinas estan senaladas con una cruz û O estân ô
pretendientes û ocultos objetos inestinguibles y mas para los profesos.
Excntos de la orden.
Retirados con los honores y fueros que pueden servir para Consiliarios en
los capitulos Maestros de novicios é informantes para las pruebas 6 los Preten-
dientes.
Fernan : : — Cadal : : — Gués : : — Lanças : : — Caves : : — Seguya : :
Lain : : — Esete : : — y otros que han pasado de esta orden a una de las dos
reformadas que son las del juicio y la del desengano.
334 J 0SE CADALSO
Trtbunales.
Junta del Montepio que socorre a los cortejantes pobres de solemnidad.
La Benabent : — La Salvatie. — La Osun. — La de Alcani. — Y otras
muchas de igual calidad aunque de menos lucimiento.
Fiscales de lo civil.
Los senores capitulares de la villa de Madrid que hacen de bastoneros en los
bailes de mascara.
Junta Apostolica.
La Bond. R 1 — La Grac. R 1 . — La Ezpel. — La Santiag. — Y otras que
nos pasman à la francesa.
Proto Medicato.
Dos Ex mas . — Dos Seiîorias. — Dos Mercedes. — Mùsica y acompana-
miento y hay bastante en que escoger.
Trtbunales fuera de la Cor le.
La opéra de Barcelona. — La de Câdiz. — La nueva escuela de teatro de
Sevilla. — Las comedias de la légua.
Nota.
Haviendo incluido en la guia de Madrid el ano pasado el estado militar del
exército v la Marina, no han querido los ministrosde Chipre quela suya carezca
este suplemento.
Exército de Chipre para campanas de Ctipido.
Capitulo i°.
Reaies guardias de Corps alquilados por la Comida, vestido, lavadura de
ropa blanca, escarapela y un par de pesos al mes ; sirven bien, pero quando
les falta la paga la cobran d palos.
2°.
Cadetes de Guardias. Cuerpo afamado en otros tiempos, no entra ya en
parada con los demis del exército.
3°-
Reximiento de Mexico y el Peru son invencibles, estai) cargados de trofeos,
el uniforme amarillo y blanco.
4°.
Reximiento de frayles, no hay reximiento mejor armado, municionado, ni
mas pronto i entrar en campana ; no da quartcl , y tiene en las banderas
un letrero que dice : vencer 6 morir.
OBRAS INEDITAS
35
5°-
Reximiento de la Grandeza, es un reximiento glorioso y triunfante, el uni-
forme galoneado y bordado, y cargado de diamantes, oro y plata, solapa y
cuello y vueltas de encages, admite todo género de gentes espanolas, extran-
geros, plebeyos, nobles, pages y otros criados mayores.
Nota.
No faltan exemplares de haber enganchado lacayos, que con el tiempo han
hecho servicio alternando con sus amos; no es reximiento, es légion.
6°.
Reximiento de la Puerta del Sol, este reximiento cargado de heridas, fun-
ciones, enfermedades contraidas en campana, fué reformado el arïo de 1766.
Algunas partidas sueltas que se han hallado después de la reforma estdn de
guarnicion en la ciudad de San Fernando.
Nota. — Hay otros cuerpos de tropas ligeras muy perjudiciales à la paz.
Armada de Chipre.
Navios
Cahones
Frasa ta s.
La vanidad 100
El escândalo 100
La obstentacion 100
La lujuria 100
El marido 90
El competidor 90
La mantilla 80
El coche alquilado 80
La siesta de verano 80
La noche de invierno 80
El entretenido 80
El pretendiente 70
El plantado 70
El falso 70
El murmurador 60
El desesperado 60
El petardista 60
El canapé 60
El gabinete 60
El prado 50
El teatro 50
La chimenea. . .
El abanico
El manguito. . .
La ocasion . . . .
La astucia. . . .
La permanente.
La casualidad . .
Brulotes.
El celoso. . . .
El desafio. . . .
La apariencia
El interino . .
La embidia . .
El chismoso .
Javeqaes de navios de aviso.
La variedad
La vieja
El expreso
El volante
30
30
30
30
30
30
30
10
10
8
8
8
8
16
16
16
16
Los navios senalados con âneoras, son de la antigua construccion de Chipre ,
sirven poco desde que se maniobra a la francesa, a la inglesa, a la italiana, a
la turca y a la diabla. Los senalados con una fior de llis son de construccion
francesa.
FIN DE LA GUIA SIN FIN.
VA R I A
5. Notes sur la bibliographie française de Cervantes
Dès le début, Don Quijote a fait fortune en France. Ce fut César Oudin qui,
le premier parmi les étrangers, imprima le conte du Curioso Impertinente à
la fin de la Silva Curiosa de Julio Infguez de Medrano (Paris, 1608, pp. 274-
328). A peu près en même temps parut : Le Curieux Impertinent, en espa-
gnol, et traduit en français par ]\eari\ Baudoin. A Paris, che\ Jean Rieher, 160S.
L'année suivante on publia une traduction anonyme d'un autre épisode sous
le titre : Homicidio de la Fidelidad y la Defensa del Honor. Le Meurtre de la
Fidélité et la Défense de l'Honneur, où est racontée la triste [et pitoyable] avanture
du berger Pbilidon et les raisons de la belle et chaste Marcelle, accusée de sa mort,
en espagnol et en françois. A Paris, che^Jean Rieher, 1609 1 .
Dans l'appendice E de son Hislory of Spanish Literature (Boston, III, pp.
512-513) Ticknor nous parle des traductions françaises de Don Quijote dont
la première, selon lui, ne remonte qu'à 1620. J'ai nommé celle de César Oudin,
laquelle fut un peu devancée par la version anglaise de Thomas Sheltoiv
Quant à la date de cette traduction française complète de la première partie
du roman de Cervantes, il est certain que Ticknor s'est trompé en l'indiquant
à une date aussi tardive. Au reste, s'il a tort, il a tort avec presque tout le
monde. Il n'a fait probablement que copier la bévue de Fernàndez de Navar-
rete (Vida de Miguel de Cervantes Saavedra, Madrid, 18 19, p. 516). Brunet
(Manuel du Libraire, Paris, I, col. 175 1) a signalé une édition d'Oudin publiée
en 1616; et cette fausse attribution a été généralement acceptée. M. John
Ormsby dans le troisième appendice de sa traduction de Don Quijote (Londres,
1885, IV, p. 421) donne la date 1616, et M. Henry Edward Watts la reproduit
dans sa Life of Cervantes (Londres, 1888, p. 286). Le directeur de la Revue
Hispanique répétait cette déclaration dans son excellente version du Licenciado
1. V. Les numéros 10424 et 10416 dans le Catalogue des livres de ta bibliothèque
de feu M . le Due de la Vaïlière (Seconde Partie, disposée par Jean-Luc Nyon l'Aine),
Paris, 1788, III, pp. 275, 274; et le Catalogne des Itères composant la bibliothèque de feu
M. le Union James d, Rothschild (Paris, 1887, II, p. 277). Les mots entre parenthèses ne
se trouvent pas dans le Catalogue de Nyon.
varia 337
Vidriera (Paris, 1892, pp. 7-8, et note). De même, m'appuyant sur l'auto-
rité de M. Foulché-Delbosc, j'ai suivi le renseignement de Brunet dans l'es-
quisse bibliographique qui suit ma Life of 'Miguel de Cervantes Saavedra (Londres,
1892, p. 545).
Néanmoins j'avoue que j'ai beaucoup hésité avant de me décider. Dans
leur réimpression d'Oudin (Paris, 1884, I., i., v.), M. Emile Gebhart et son
éditeur nous disent que « la première partie de cette traduction est de 1614 ».
D'ailleurs, dans le Catalogue de M. James de Rothschild (Paris, 1887, II, p.
277) on cite un exemplaire de l'édition de 1614 dans la bibliothèque de M. Da-
guin. Outre cela, il y avait — chose capitale — la date du Privilège qui se
trouve au commencement de la troisième édition de 1620, la seule que j'eusse
vue lorsque je m'occupais de mon étude. Cette date, qui est du 17 mars 1614,
donne furieusement à penser, un retard de deux ans étant peu vraisemblable.
Bien que personne, que je sache, n'ait dit l'avoir vue, l'existence d'une
édition de 1614, sans être démontrée, devenait au moins probable. C'est ce
que j'ai dû signaler.
Eiïectivement j'avais raison d'hésiter. Fernandez de Navarrete, Ticknor,
Brunet, MM. Ormsby et Watts, M. Foulché-Delbosc et moi, nous nous sommes
trompés. Je viens justement de voir un exemplaire de l'édition princeps dont
je transcris ici le titre que j'ai sous les yeux : LIngenievx \ Don \ Qvixote \ de
la Manche \ Composé par Michel de \ Cervantes, | Tradvit Fidellemenl \ d'Espagnol
en François, \ et | Dédie au Roy | Par César Oudin, Secrétaire Interprète de \
sa Majesté, es langues Germanique, Italienne, \ et Espagnole : et Secret, ordinaire de
Mon- | seigneur le Prince de Coudé. | A Paris. \ Che^ Ieau Jouet, rué saiuct \
lacques au Rosier. \ M. D. C. XIV. \ Avec Privilège de sa Maiesté. | A la suite
du Privilège, où l'on cite les « lettres Patentes de sa Majesté, sur ce données à
Paris, le dixseptiesme de mars, mil six cens quatorze. Sellées du grand Seau
de cire jaulne sur simple queue, Signe parle Roy en son Conseil. De Vabres. »,
se trouve la phrase « Acheué d'imprimer le 4. iour de Iuin, 1614 ». C'est, je
crois, décisif.
Il me semble que cette rectification d'une erreur où je me suis rencontré
avec la plupart de mes prédécesseurs, ne sera pas sans intérêt pour les Cervan-
tistes de la Revue Hispanique.
James Fitzmaurice-Kelly.
6. Note sur une édition de Don Quichotte.
El ingenioso hidalgo Don Quijote de la Mancha compuesto por Miguel de Cervantes
Saavedra. Edicion adornada con 800 laminas repartidas por el contexto. Barcelona : im-
prenta de Antonio Bergnes y Compania M DCCC XXXIX ; 2 vol. in-4 : 646^655 pp.
Portrait de Cervantes gravé sur acier ; illustrations gravées sur bois.
33o VARIA
Les gravures de cette édition, ainsi que le dit Salvd (Catàlogo, n° 1575),
sont les mêmes que celles employées par le libraire Paulin pour la traduction
française de Viardot. Ce que Salva a oublié d'ajouter, c'est que la Noticia
sobre la vida y escritos de Cervantes placée en tête du tome I er , n'est que la tra-
duction littérale de la Notice sur la vie et les ouvrages de Cervantes due au traduc-
teur français. L'éditeur de Barcelone n'indiquant nulle part le nom de l'auteur
de la Noticia et personne ne s'étant encore avisé, à ma connaissance, de relever
ce fait que la similitude absolue de l'édition de Barcelone et de la traduction
de Paris rend pourtant d'une constatation bien simple, il m'a semblé utile de
rendre à Viardot ce qui appartient à Viardot. F. H. Graser.
7. La troisième édition de la Guerra de Granada de Don Diego Hurtado
de Mendoza.
Dans l'Etude sur la Guerra de Granada de Don Diego Hurtado de Mendoza que
j'ai publiée dans le n° 2 de la Revue Hispanique (pp. 101 à 165), je disais (p. 127)
que la troisième édition était la seule dont je n'avais pu trouver d'exemplaire.
M. Johannes Merck, de Hambourg, possède dans sa bibliothèque cette édition:
il a eu l'obligeance, dont je le remercie, de m'en envoyer la description :
Guerra de Granada, Hecha por El Rey de Espana Don Felipe II. nuestro senor,
contra los Moriscos de aquel Revno, sus rebeldes. Historia escrita en quatro libros. Por
Don Diego de Mendoza del Consejo del Emperador Don Carlos V. su Embaxador en
Roma, v Venecia ; su Governador, y Capitan General en Toscana. Con licencia : — En
Valencia, por Vicente Cabrera. A costa de Francisco Roveda Mercader de Libros, en-
frente la Diputacion. — In-8, 6 ff. préls. et 331 pp.
Les feuillets préliminaires contiennent :
f. 1 : Titre.
ff. 2 et 3 : Aprobacion de D. Gregorio Mayans i Ciscar, datée de Valence
13 juin 1730, et l'Imprimatur.
ff. 4, 3, et f. 6 recto: Luis Tribaldos de Toledo, al Leclor.
f. 6 verso: Licencia dd Consejo à Fr« Roveda, datée de Madrid, 18 mai
1730.
Les pages chiffrées contiennent :
pp. 1 et 2 : Brève memoria
pp. 3 et 4 : Inlrodiiccion....
PP- 5—3 3 1 : De la Guerra de Granada.
Je ne me trompais donc pas en écrivant d'une part (p. 118) : « Vaprobacion
de Mayans est datée de Valence, 13 juin 1730. Il est probable que cette apro-
bacion fut placée en tète de l'édition publiée à Valence vers 1730 par Viccntc
Cabrera et que Fauli la réimprima simplement en tète de la sienne, » et d'autre
part (p. 119) : « Cette 4 édition (Valence, 1766) n'est vraisemblablement qu'une
reproduction à peu près fidèle de la troisième.... » R. Foulché-Deliîosc.
BIBLIOGRAPHIE
Histoire, etc.
L'Espagne chez Homère, par Théodore Reinach. Chartres: imp. Durand,
1894, in-8, 7 pp. (Extrait du n° d'avril de la Revue Celtique, t. XV).
Souvenirs du pèlerinage espagnol à Rome (avril 1894) , par le chevalier
Mac Swiney. Evreux : imp. Odieuvre, 1894, in-16, 128 pp.
Recueil des instructions données aux ambassadeurs et ministres de France
depuis les traités de Westphalie jusqu'à la Révolution française, publié sous les
auspices de la Commission des archives diplomatiques au Ministère des Affaires
étrangères. Espagne, avec une introduction et des notes par A. Morel-Fatio,
avec la collaboration de H. Léonardon. Tome I (1 649-1 700). Paris : Félix
Alcan, 1894, in-8. — 20 fr.
Le Bienheureux Jean d'Avila (1500-1569), par le P. J. B. Couderc, S. J.
Lille et Paris : Desclée, de Brouwer et C ie , 1894, in-16, 141 pp. illustré.
Spain, being a summary of Spanish history from the Moorish conquest to
the fall of Granada (711 — -1492 A. D.), by Henry Edward Watts. London : T.
FisherUnwin, 1894, in-8, xxvn -315 pp.
The life and times of James the first, the conqueror king of Aragon, Va-
lencia, and Majorca, Count of Barcelona and Urgel, Lord of Montpellier. By
F. Darwin Swift. With a map. Oxford, 1894, in-8, xix-311 pp.
Descubrimiento precolombino de la America. Ensayo crftico-histôrico por
Baltasar Vêlez, Sacerdote colombiano, Cura y Promotor en la Ciudad y Dio-
cesis de Pamplona, Misionero Apostôlico, etc., etc. Paris : Garnier Hermanos,
1894, in-8, xix-i 16 pp.
Collection de Codes étrangers VIII. Code civil portugais, promulgué le I er
juillet 1867, mis en vigueur le I er janvier 1868. Traduit, annoté, précédé
d'une introduction par Fernand Lepelletier... Paris : Durand et Pedone-Lauriel,
1894, in-S, xxv-483 pp.
The first divorce of Henry VIII [(Divorce of Katherine of Aragon) as told
in the State Papers. By M rs Hope. Edited, with notes and introduction by
Francis Aidan Gasquet. D. D., O. S. B. London : Kegan Paul, Trench, Trub-
ner and Co., 1894, in-8, xx-375 pp.
34° BIBLIOGRAPHIE
Estudios cn'ticos acerca de la domination espanola en America por el P.
Ricardo Cappa Tomo XII. Parte tercera : Industria naval. Vol. 3. Madrid :
M. Murillo, 1894, in-8, 11-366 pp. — 3 pes.
Sommaire: Expediciô:i de Anson. — La industria en el Perû, 1745-1824. — Piratas
del Pacifico. — Callao. — Industria en el AtLintico. — Piratas corsarios. — La industria
en Cuba.
Historia gênerai de las islas Canarias, por Agustm Millares, de la Real
Academia de la Historia. Tomo V. Las Palmas, Impr. de « La Verdad », de
J. Miranda, 1894, in-4, 300 pp. Madrid : M. Murillo. — 3.50 pes.
El côdigo pénal de 1870 concordado y comentado, por D. Alejandro Groi-
zard )• Gômez de la Serna. Tomo V. Salamanca : Esteban Hermanos, impre-
sores, 1894, in-4, 771 pp. Madrid, Sudrez. — 15 pes.
Luis Vives, por A. Lange, autor de la « Historia del materialismo » ; tra-
duction directa del alemdn, revisada por M. Menéndez y Pelayo. Madrid : Est.
tipogrâfico de Agustîn Avrial. S. a. (1894) (La Espana Moderna), in-8, 90 pp.
— 2.50 pes.
Congreso geogrdfico hispano-portugués-americano, reunido en Madrid en
el mes de Octubre de 1892. Cuarto centenario del descubrimiento de Ame-
rica. Actas. Tomo IL Impr. del Mémorial de Ingenieros. Madrid : Murillo.
1893-94, in-8, 638 pp. et deux cartes. — 15 pes.
Prisiones espaiïolas; estudios penitenciarios, visitas d la cdrcel modelo, por
El Abate Boussoni. Madrid : Impr. y lit.deTerceno, i894,in-i2, 16 pp. — 0.50
pes.
Apuntes histôricos sobre la villa de Torrijos (Toledo) y sus mas esclare-
cidos bienhechores, por D. Miguel Antonio Alarcôn. Valencia, Imprenta de
Francisco Vives Mora. — Madrid : E. Hernandez, 1894, in-8, 353pp. — 3 pes.
Influjo civilizador de los Cenobios Medioevales en el Noreste de Espana.
Discurso del Présidente del jurado delà Asociacion literaria de Gerona, por D.
José Pellicer y Pages, licenciado en filosofia y letras, C. de las Reaies Acade-
mias de la Historia y de Bellas Artes de San Fernando, etc., etc. Certamenxxu
de la Asociacion. Gerona : Impr. de Paciano Torres, 1894, in-8, 42 pp. — 1.25
pes.
Historia natural y moral de las Indias, escrita por el P. Joseph de Acosta,
de la Compania de Jésus, publicada en Sevilla en 1590 y ahora iiclmente reim-
presa de la primera édition. Madrid : Ramon Angles, irupresor, 1894, 2 tomos,
in-8, xxm-486 et xvi-392 pp. — 8 pes.
La guerra del moro à fines del siglo xv, por don Marcos Jiménez de la
Espada. (Madrid : Fortanet, 1894), in-8, 42 pp. (Tirage à part du Boletin de la
Sociedad Geogrdfica augmenté de quelques notes).
Historia de Montserrat , por el Abad D. Miguel Muntadas, continuada
BIBLIOGRAPHIE 34I
por un monje del mismo monasterio. Barcelona : Impr. de la Casa provincial
de Caridad, 1894, in-8, 532 pp. grav. — 4.50 pes.
Estado social del Perû durante la dominaciôn espaiïola. Discurso leido en
la Universidad Mayor de San Marcos en Lima, en la ceremonia de apertura
del aho escolar de 1894; porel Dr. Javier Prado y Ugarteche. Lima : Impr.de
« El Diario Judicial», por M. Agois, 1894, in-8, xxn-191 pp. Madrid, Fé. — 2.50
pes.
Compendio de la doctrina catalanista, por Enrich Prat de la Riba y Père
Montanyola, premiat en lo concurs regionalista del Centre Catala de Sabadell
y aprobat por la junta permanent de la Unio Catalanista. Barcelona : Impr. de
la Renaixensa, 1894, in-8, 52 pp. — 1.25 pes.
Beaux-Arts
Renaissance Architecture and Ornament in Spain. A séries of examples
selected from the purest works executed between the years 1 500-1 560 meas-
ured and drawn together with short descriptive text by Andrew N. Prentice.
London : B. T. Batsford [1894], in-fol., 16 pp. and lx plates.
El casco del Rey D. Jaime el Conquistador; monografïa critico-histôrica,
por el Baron de las Cuatro-Torres, Conde del Asalto, Madrid : Est. tip. de
Agustin Avrial, 1894, in-8, 32 pp. à 2 col. et gravures. — 2.50 pes.
Recuerdos arqueolôgicos de Âlava. La basilica de Santa Marfa de Estiba-
liz. Colecciôn de articulos publicados en el periôdico La Libertad, por el coro-
nel teniente coronel de Ingenieros, D. Sixto Mario Soto, Académico corres-
pondiente de la Real de Bellas Artes de San Fernando. Vitoria : Impr. de Galo
Barrutia, 1894, in-8, 59 pp. et une photographie. — 2 pes.
Folk-Lore
Cien refranes andaluces, de meteorologfa, cronologfa, agricultura y eco-
nomi'a rural, recogidos de la tradiciôn oral y concordados con los de varios
paîses romànicos, por Francisco Rodriguez Marin. Segunda ediciôn anotada.
Sevilla : Impr. de E. Rasco, 1894, in-4, 33 pp. (Madrid, M. Murillo). —
1 pes.
Voyages, etc..
Excursion en Espagne. Miraflores, par Tierny, archiviste du Gers. Mon-
tauban : impr. Forestié, 1894, in-8, 15 pp.
Excursion en Espagne. Las Huelgas et Avila, par Ch. Baudon de Mony.
Montauban : impr. Forestié, 1894, in-8, 12 pp.
342 BIBLIOGRAPHIE
Edouard Conte. A travers Majorque (dans La Revue de Paris, n° 16, 15
septembre 1894). Paris, 1894, in-8.
Maurrice Barrés. Du sang, de la volupté et de la mort. (Un amateur
d'âmes. Voyage en Espagne. Voyage en Italie, etc.) Paris : G. Charpentier et
E. Fasquelle, 1894, in-18, 326 pp. — 3 fr. 50.
Henry Bonnet. En Yacht : Autour de l'Espagne (dans La Revue de Paris,
n° 13, I er août 1894). Paris, 1894, in-8.
Un combat de taureaux à Saint-Sébastien, par le docteur G. Chevalier.
Angers : Lachèse et C ie , 1894, in-8, 35 pp.
Unter den Naturvôlkern Central-Brasiliens. Reiseschilderung und Ergeb-
nisse der zweiten Schingû-Expedition 1888-1889 von Karl von den Steinen.
Mit 5oTafeln(i Héliogravure, 11 Lichtdruckbilder, 5 Autotypen, und 7 lithogr.
Tafeln) sowie iôoText-Abbildungen nach den Photographien der Expédition,
nach den original aufnahmen von Wilhelmvon den Steinen und nach Zeichnun-
gen von Johannes Gehrts nebst einer Karte von Prof. D r Peter Vogel. Berlin,
1894, gr. in-8, xvi-570 pp.
La tauromaquia ô arte de torear; obra utilisima para toreros de profesiôn,
para los aficionados y toda clase de sujetos que gustan de toros, por José Del-
gado (alias Hillo) : nueva ediciôn, seguida de un apéndice conteniendo los
precios de las corridas de toros y novillos en la Plaza de Madrid. Madrid :
Imprenta de José Rodriguez, 1894, in-8, 100 pp. — 1 pes.
Diario de un peregrino, 1894. Recuerdos del viaje à Roma en la peregri-
naciôn nacional obrera. Barcelona : Tip. « La Ilustraciôn » S. a. (1894), in-8,
136 pp. avec gravures. (Madrid, Hernàndez) — 0.50 pes.
Tauromaquia hispana ; pintura poética en octavas rimas, de las doce suer-
tes o lances mas principales que acaecen en una corrida de toros, siguiendo la
idea y représentation con que estân grabadas en el juego de estampas de D.
Antonio Carnicero ; su autor D. Pedro Salanoba (publicada el ano 1790 y
ahora nuevamente reimpresa). Madrid : Murillo, 1894, in-8, 16 pp. — 2 pes.
Guia itinerario del ait pla de Barcelona y del Baix Vallès dividida en 76
itinerarios por ArturOsona, en colaboraciôn ab Joseph Castellanos ab dos socios
del Centre excursionista de Catalunya. Tercera ediciôn corregiday aumentada.
Barcelona : Impr. de F. Altés y Alabart, 1894, in-8, 206 pp. — 2.25 pes.
Littérature.
The Humour of Spain selected with an introduction and notes, by Suscite
M. Taylor. London Walter Scott, in-8, xvi-362 pp.
Santa Teresa. Being some account of lier life and times together with some
pages froiîi the history of the last great reform in the religious orders by
Gabriela Cunninghame Graham. London : Adam and Charles Black, 1894,
in-8. Tome I, x-463 pp. Tome II, vi-452 pp.
BIBLIOGRAPHIE 343
El arte escénico en Espana por José Yxart. Volumen I. Introducciôn. La
tradiciôn. La decadencia. — El drama. — Echegaray, Gaspar, Sellés, Feliu y
Codina. — Nuevas direcciones dramdticas. — En el extranjero. — ■ En Espana.
— Pérez Galdôs, etc. Epïlogo Barcelona : Impr. de « La Vanguardia ». Madrid,
Murillo, 1894, in-8, 364 pp. — 5 pes.
Diccionario biografico y bibliografico de escritores y artistas catalanes del
siglo xix ; apuntes y datos, por D. Antonio Elias de Molins. Cuadernos 36 à
40. Barcelona, 1892 à 94, in-8 à 2 vol. (Torao II, pp. 413 à 572). Madrid :
M. Murillo — Chaque livraison, 1 pes.
El caso Garni; monomani'a maliciosa de forma impulsiva ; estudio de
psiquiatria, por el D r P. Gêner, de la Sociedad Antropolôgica de Paris. Gerona :
Impr. de Paciano Torres, 1894, in-8, 32 pp. — ■ 1 pes.
El supernaturalismo de Santa Teresa y la filosofïa médica, ô sea los éxta-
sis, raptos y enfermedades de la Santa ante las ciencias médicas : memoria pre-
miada por la secciôn literaria de Salamanca. Tema 5 Porel Dr. Arturo Perales
y Guticrrez, catedrâtico numerario por oposiciôn de la Facultad de Medicina
de Granada ; con un prôlogo del Dr. Fernando Segundo Brieva Salvatierra.
Madrid : Libr. de G. Del Amo, 1894, in-8. — 4 pes.
Textes.
The heart and songs or the Spanish Sierras by George Whit White. Illus-
trated. London : T. Fisher Unwin, 1894, in-8, pp. 197.
Anthero de Quental. Sixty-four sonnets Englished by Edgar Prestage.
London : David Nutt, 1894, in-8, pp. xm-133.
Ensayos religiosos, polfticos y literarios, por D. José Maria Quadrado Se-
gunda ediciôn. Tomo II: (Escritos politicos, primer perfodo 1843-1846). Pal-
ma de Mallorca : Tipo-litografia de Amengual y Muntaner, 1894, in-4, 500 pp.
— 5 pes.
Ripios ultramarinos, por D. Antonio de Valbuena (Miguel de Escalada)
Segundo monton. Madrid : Libr. de Suàrez, 1894, in-8, 288 pp. — 3 pes.
Poesîas escogidas de D. José Zorrilla publicadas por la Real Academia Espa-
nola. Madrid : Murillo, 1894, in-8, 179 pp. — 1 pes.
Coleccion de escritores castellanos. Tomo 105. Obras complétas de D.
Angel de Saavedra, Duque de Rivas, director que tué de la Real Academia
Espanola, présidente de la de Bellas Artes de San Fernando é individuo de
numéro delà Historia ; coleccionadas de nuevo por su hijo D. Enrique R. de
Saavedra, Duque de Rivas. Tomo I. Madrid : M. Murillo, 1894, in-8, xxxn-487
pp. Portrait de l'auteur. — 5 pes.
Poesfas inéditas de Don Juan Meléndez Valdés publicadas por R. Foulché-
Delbosc. Madrid : M. Murillo, 1894, in-8, 32 pp. — 2 pes.
344 BIBLIOGRAPHIE
Cartas amatorias de la monja portuguesa Mariana Alcofurado, dirigidas
al Conde de Chamilly, capitân del ejército francés. Madrid : Agustin Avrial,
impresor « La Espana Moderna », s. d. (1894), in-4, 42 pp. — 3 pes. (tiré à 200
exemplaires).
Antologia de poetas mexicanos, publicada por la Academia Mexicana, cor-
respondiente de la Real Espaiïola. Segunda ediciôn. Mexico, Tip. de la Secre-
tan'a de Fomento. Madrid : G. Sanchez, 1894, in-4, vii-488-m pp. — 12 pes.
Panoramas orientales; impresiones de un viajero-poeta. Conferencia dada
en el Ateneo cientffko, literario y artistieo de Madrid la noche del 7 de Mayo
de 1894, por D. José Alcali Galiano. — Madrid : Tip. de los hijos de M. G.
Hernandez, 1894, in-4, 47 PP- — 1 pe s -
El ingenioso hidalgo D. Quijote de la Mancha, compuesto por Miguel de
Cervantes Saavedra y comentado por D. Diego Clemenci'n. Tomos VI y VII.
Madrid : Imprenta de la Viuda de Hernando y Comp., 1894, in-8, 339 y 391
pp. — Chaque vol., 3 pes.
Les trobes en lahors de la Verge Maria, publicadas en Valencia en 1474,
y reimpresas por primera vez. con una introducciôn y noticias biogrdficas de
sus autores, escritas por Francisco Martî Grajales. (Primer libro impreso en
Espana en 1474). Valencia, Impr. de Ferrer de Ortega. 1894, in-8, 92 pp.
prels. et 60 ff. n. ch. Madrid : M. Murillo. — 7.50 pes.
Obras de D. Marcelino de Aragon Azlor y Ferndndez de Côrdoba, Duque
de Villahermosa, Conde-Duque de Luna, de la Real Academia Espahola; con
un prologo de D. M. Menéndez y Pelayo, de la misma Academia. Madrid :
Establecimiento tipogrdfico Viuda é Hijos de M. Tello, 1894, in-8, xvm-367
pp., et portrait. (Non mis dans le commerce).
Ecos de las montanas. Leyendas histôricas, por D. José Zorrilla, ilustrados
por Gustavo Doré. Barcelona : Montaner y Simon, 1894, in-4, 446 pp. y 36
grav. : « reducciôn de las de la grande y primera ediciôn publicada en 1868. » —
6 pes.
Enseignement
Revista dos lyceus. IV an. Porto : Typ. de José da Silva Mendonça, in-8.
N° 2. Julho de 1894, pp. 49 à 96.
N° 3. Agosto de 1894, pp. 97 à 144.
N os 4 et 5. Setembro e Outubro de 1894, pp. 145 à 240.
Introduction to Commercial Spanish by Léon Delbos. London : Macmillan
and Co, 1894, in-8, xii-205. -3/6.
The living method for leaming how to think in Spanish by Charles F.
Kroeh, A. M., Professor of languages in the Stevcns Institute of Technology,
Hoboken, X. J. London: Englandand Hoboken, N. J.: Published by the Author
[1894], in-8, 278 pp.
BIBLIOGRAPHIE 345
First steps in Spanish idioms containing an alphabetical list of idioms, ex-
planatory notes and examination papers by Eduardo Tolrd y Fornés. Second
Edition, revised. London : Librairie Hachette et C ie , 1894, in-8, vi-117 pp. -1/6.
Périodiques.
La Espana moderna. Director-propietario J. Ldzaro.
Agosto de 1894. Madrid, s. d. (1894), in-8, 206 pp. — 3 pes.
Setiembre de 1894. Madrid, s. d. (1894), in-8, 207 pp. — 3 pes.
Octubre de 1894. Madrid, s. d. (1894), in-8, 208 pp. — 3 pes.
Archivo do Distrito Fédéral. Revista de documentos para a historia da
Cidade do Rio de Janeiro. Prefeito : D r Henrique Valladares ; Redactor : Mello
Moraes Filho (Director Archivista) 1° Anno, Janeiro, 1894. Rio de Janeiro.
Redacçào e Administraçâo : Archivo Municipal.
Collections.
Biblioteca ardbico-hispana. Torao IX. Index librorum de diversis scientiarum
ordinibus quos a magistris didicit Abu Bequer ben Khair ad fidem codicis escu-
rialensis arabice nunc primum ediderunt indicibus additis, Franciscus Codera,
in Universitate Matritensi arabice lingue, et J. Ribera Tarrago. Tomo 1.
Caesaraugustae in Typographia Fratrura Comas; Madrid M : Murillo, 1894, in-4,
466 pp. — 20 pes.
* Colecciôn de documentos inéditos para la historia de Espana, por el Mar-
qués de la Fuensanta del Valle, de la Academia de la Historia y de la de Cien-
cias Morales y Poh'ticas. Tomo CX, Madrid : Impr. de José Perales y Marti'nez
1894, in-4, 512 pp.
Colecciôn de libros raros que tratan de America. Volumen IL Très tratados
de America (siglo xvtn). Relaciôn histôrica, politica y moral de la ciudad de
Cuenca, poblacion y hermosura de su provincia, por el doctor D. Joaqui'n de
Merisalde y Santisteban, corregidor y justicia mayor de ella — Razôn sobre el
estado y gobernaciôn politica y militar de la jurisdicciôn de Quito en 1754,
por Juan Pîo de Montufar y Frasco, gobernador y capitan gênerai de las pro-
vincias de Quito. — Diario de todo lo ocurrido en la expugnacion de los fuertes
de Bocachica y sitio delà ciudad de Cartagena de las Indias en 1741, formado
de los pliegos remitidos à S. M. (que Dios guarde) por el Virrey de Santa Fé,
D. Sébastian Eslava, con don Pedro de Mur, su ayudante gênerai. Madrid :
M. Murillo, 1894, in-8, 256 pp. — 3 pes.
Boleti'n de la Real Academia de la Historia. Tomo XXV. Cuadernos 1 à 3.
Julio d Septiembre de 1894. Madrid : M. Murillo, 1894, in-8, pp. 1 à 256. —
Chaque livraison 1.25 pes.
Revue hispanique. 22
\^6 COMPTES RENDUS
Bibliographie.
Catalogo de la Biblioteca pûblica municipal de Jerez de la Frontera. Jerez
Impr. de « El Guadalete », 1894, irx-4. 3 IL, prels et 318 pp. à 2 col. (Non
mis dans le commerce).
Bibliografïa de Mindanao (epitome), por W. [E. Retana. Madrid, Imprenta
de la Viuda de M. Minuesa de los Rios, 1894, in-8, 69 pp. — 1 pes.
COMPTES RENDUS
FilosofIa atnigua poética, del doctor Alonso Lôpez Pinciano... ahora nuevamente
publicada cou una introducciôn y notas, por D. Pedro Muiioz Pena Yalladolid : Hijos
de Rodriguez, 1894, in-8°, xxxiv-513 p.
Cette réimpression, la première qui ait été faite depuis la publication, en
1596, de l'œuvre principale du Pinciano, sera bien accueillie du public spécial
auquel elle s'adresse. L'édition princeps est rare, et d'ailleurs fort imparfaite :
celle que nous donne aujourd'hui M. Munoz Pena, déjà honorablement connu
par un ouvrage sur Tirso de Molina, sera lue et consultée avec fruit. Elle se
compose: i° d'une Introduction, dans laquelle l'éditeur nous entretient de
l'auteur, de son œuvre, et de la nouvelle édition ; 2° du texte de la Fiîoso/ia ;
30 de notes accompagnant et éclairant le texte. Nous nous bornerons à
quelques remarques critiques sur chacun de ces points.
M. M. P. semble, de propos délibéré, — et nous le regrettons, — s'être
désintéressé de toute recherche biographique sur Alonso Lôpez : il s'en tient à
ce que nous apprend Nicolas Antonio. C'est peu. Car, même pour l'intelligence
d'une œuvre purement didactique, il y aurait intérêt à mieux connaître la
personne, l'éducation, les relations, les lectures de l'auteur, la date de la com-
position, etc.
Un seul exemple suffira à le montrer. M. M. P. estime que la Fibsofia
Antigua a été écrite « avec l'objet précis de réfréner les innovations de Lope
— con objelo precisamente de contener esta innovation, » et il ajoute (p. vm) qu'il
n'est pas douteux que l'ouvrage n'ait été écrit « en vista y cotno consecuencia del
aplauso.. con que cran recibidas Un producciones de Lope. » Pour ma part, j'en
doute fort; d'abord, parce que L'auteur ne semble se préoccuper ni peu ni prou
du théâtre contemporain et de celui de Lope en particulier; en second lieu,
COMPTES RENDUS 347
parce que la chronologie se prête mal à cette conclusion. A quelle époque, en
effet, l'œuvre a-t-elle été composée ? Le nouvel éditeur ne nous le dit point,
mais il semble résulter du début de l'Epître première qu'il faut placer la date de
la composition des premiers chapitres tout au moins vers l'année 1590. Or, à
cette date, les œuvres dramatiques de Lope étaient-elles si nombreuses, et son
influence déjà si considérable qu'il fût nécessaire, pour la combattre, d'un si
grand effort ? Assurément non, car ce ne fut qu'à partir de cette date que Lope
commença à «afyarse con la monarquia cômica », et par suite tombe l'hypothèse
de M. M. P., qui voit dans la Filosofia une protestation indirecte, une « vo%
de alerta » , contre el arte nuevo.
Si nous connaissons mal Lôpez Pinciano, nous ne connaissons pas du
tout les interlocuteurs qu'il introduit dans ses dialogues, Fadrique, Gabriel,
Hugo. On aurait pu cependant se demander si ces personnages étaient pure-
ment imaginaires. Il y a bien des apparences pour que l'un d'eux tout au
moins, Fadrique, ait réellement existé ; sinon, les mots par lesquels Lôpez le
caractérise n'auraient plus de sens : « un hombre que tan bien podia hablar en
aquclla matériel (la politique) por haber de ella escrito muy bien. » On ne s'éton-
nera pas des éloges que l'éditeur, après M. Menéndez y Pelayo, décerne à la
Filosofia. Nous souhaitons qu'ils ne paraissent pas au lecteur quelque peu exa-
gérés. Mais je crains que ce dernier n'éprouve quelque surprise à voir traiter
de « ingénia genuinamente nacional », cet honnête commentateur du Filôsofo,
dont le principal mérite, en somme, consisterait à s'être servi de l'antiquité
contre ce qu'il y a de plus national en Espagne, lé théâtre.
En ce qui concerne le texte, l'éditeur a respecté avec raison la forme ar-
chaïque des mots (pornd = pondra, oyo = oigo); mais, selon l'usage à peu
près constant en Espagne, il a substitué à l'orthographe du xvi e siècle, l'ortho-
graphe courante et moderne, « par crainte d'effrayer le lecteur. » On aime à
croire cependant que les lecteurs de la Filosofia Antigua possèdent une culture
suffisante pour ne pas être trop dépaysés par les archaïsmes orthographiques
de cette époque. Au besoin, quelques notes sur ce sujet auraient été les bien-
venues. Celles de M. M. P. ont surtout pour but d'éclairer et de discuter la
pensée de l'auteur. Il y en a d'excellentes (hidalgo, p. 67 ; behetria, p. 69, etc.).
D'autres auraient pu, sans inconvénient, croyons-nous, être réduites ou même
supprimées. Est-il bien nécessaire, par exemple, de nous apprendre (p 63) que
Milon de Crotone n'a rien de commun avec le Milon que défendit Cicéron ?—
Une dernière observation, qui s'adresse moins à l'auteur qu'à l'imprimeur. Les
fautes d'impression abondent. Un errata, assez riche, en corrige un certain
nombre, mais il en reste beaucoup, dont quelques-unes fâcheuses (Quintus de
de Smyrne placé au V e siècle avant J.-C. (p. 92), la camion de Garcilaso à la
flor Guido (p. 422) etc.) Serait-ce enfin être trop exigeant que de rappeler aux
imprimeurs espagnols que les mots grecs ont une accentuation particulière î
348 COMPTES RENDUS
En dépit de ces légères imperfections, qui pour la plupart ne sauraient être
imputées à l'éditeur, cette réimpression d'un ouvrage rare fait honneur au
laborieux et distingué professeur de Valladolid. Il a bien raison de penser que
des travaux de ce genre (quelque modestes qu'ils puissent paraître) valent mieux
que ces généralisations plus ou moins brillantes et ces fastidieux « livres de
textes » dont la Péninsule est inondée. Espérons que son exemple sera suivi,
et que l'on ne nous fera pas trop attendre de bonnes éditions des vieux textes
espagnols dont l'absence se fait si cruellement sentir. E. Mérimée.
Jamds, por Angel Cuervo. Segunda ediciôn. Paris, en casa del autor 4, rue Frédériç-
Bastiat, 1893, in-16, 204 pp. — 2 fr.
Les romanciers, désireux de flatter la manie de cosmopolitisme qui sévit
parmi nous, peuvent, à bon compte, sans quitter les alentours du grand Opéra
ou du Parc Monceau, faire des études exotiques sur les colonies étrangères
établies parmi nous. Et je soupçonne que plusieurs en réalité n'ont guère dé-
passé ces parages. En revanche, il se trouve de temps à autre, parmi nos hôtes,
des esprits curieux et observateurs pour lesquels la grande capitale est un objet
préféré d'études :
Spectatum veniunt, veniunt speclentur ut ipsi.
Ces témoignages, assez volontiers superficiels d'ailleurs ou même malveil-
lants, formeraient une collection de documents sur Paris et la société pari-
sienne intéressants à consulter. M. Angel Cuervo, qui est un Américain-Espagnol,
et, si je ne me trompe, le frère du très érudit grammairien D. Rufino Cuervo,
apporte, dans sa nouvelle intitulée Jamds, sa contribution à la description mo-
rale de Paris, qu'il habite, — nous apprend-il, — depuis unedouzaine d'années.
M. Cuervo n'a d'ailleurs point la prétention, trop fréquente de l'autre côté de la
Manche ou des Vosges, de s'ériger en philosophe et en moraliste. Il a simple-
ment ouvert sa fenêtre, qui donne sur une rue modeste, et il regarde et écoute.
En face de lui, est une laiterie, qu'il s'amuse à observer et à décrire; puis, des
choses passant aux personnes, il s'essaye à tracer quelques portraits, qui ne se
distinguent point naturellement par une extraordinaire originalité, car les types
originaux ne courent pas les rues, et il y a des chances pour qu'un instantané
pris sur le trottoir ne nous révèle que des physionomies banales ou vulgaires.
L'essentiel, c'est que le cliché soit net et clair. Mais ici l'auteur, tout en préten-
dant « prouver que le trop fameux naturalisme n'est pas un temple fermé aux
profanes », ne consent pas à « s'abaisser jusqu'à copier servilement».
Après avoir observé il invente, grâce « à la facilité que Dieu lui a octroyée
pour forger des historiettes sur un mot entendu ou sur un simple détail remar-
qué ». Distinguer dans le roman la part de l'observation exacte, et celle de l'ima-
gination, je ne l'essayerai pas. J'imagine cependant que l'on peut, sans trop
s'aventurer, rapporter à la première la description de la laiterie, avec ses batte-
COMPTES RENDUS 349
ries de bidons bien fourbis, ses alignements de fromages, de beurres, ses cor-
beilles d'œufs frais, et aussi les croquis de M., de M me Pothuau, de Lili, l'hé-
roïne de l'histoire, et d'André, le garçon boucher, le bon ami de Lili ; tout
cela d'ailleurs enlevé rapidement sans insister ni trop appuyer, d'un crayon
d'amateur, de flâneur (desocupadd). Quant à la part de l'imagination, nous la
trouverions sans doute dans le dénouement tragique des amours de Lili et du
romanesque garçon boucher. Les faits divers quotidiens de la chronique pari-
sienne sont là pour attester que de tels dénouements ne sont p<*s invraisemblables .
D'ailleurs le positivisme inconscient de la petite Lili, qui oublie et se console si
vite, corrige ce que l'histoire peut avoir de mélodramatique. En somme, Jaunis
est une jolie aquarelle d'un tout petit coin de Paris, pris au hasard et bien
étudié : il fournira aux étrangers, auxquels il est destiné, une note plus vraie
que la majorité de ces prétendus tableaux de mœurs parisiennes, signés de
noms étrangers, et qui se ressentent trop, en général, des lieux et des personnes
que fréquentent les auteurs. E. Mérimée.
The life and times of James the first, the Conqueror.King of Aragon, Valencia,
and Majorca, Count of Barcelona aud Urgel, Lord of Montpellier. By F. Darwin Swift.
With a map. Clarendon Press, Oxford, in-8, xix-311 pp.
L'ouvrage de M. Swift est médiocre ; en le lisant je comprends parfaite-
ment que ce soit à M. Beazley et non à lui qu'ait été décerné le prix Lothian à
l'université d'Oxford. M. Beazley possède de rares qualités auxquelles M. Swift
ne saurait prétendre : la vision nette, le style pittoresque et tranchant, le don
suprême de la narration, l'intelligence judicieuse et supérieure. Quant à
M. Swift, il a consulté les autorités, il a fouillé les archives, il a vérifié les
résultats déjà obtenus et, profitant du travail de M. de Tourtoulon, il a
envisagé les faits d'une manière indépendante. Qu'il n'ait pas beaucoup ajouté
à la somme de nos connaissances, cela n'a rien de surprenant : c'est déjà beau-
coup que de nous avoir donné un résumé utile des principaux événements qui
marquèrent la vie agitée de son gigantesque héros. Rien de plus intéresant que
l'histoire de ce beau colosse barbare, brave, généreux, brutal, vantard, malin
et naïf, qui porte le titre retentissant de Conquérant. A travers ses amours, ses
ruses, ses guerres, ses singeries cruelles, on remarque en lui un tempérament
de vainqueur. En nous les racontant dès ses timides débuts, M. Swift a réussi
à en faire un récit assez vraisemblable ; il tend un peu trop son arc de temps
en temps, mais le point de vue auquel il se place n'a rien d'inadmissible. Le
style est assez clair, un peu fade pourtant. Je n'en puis dire autant du plan
qui laisse beaucoup à désirer, à cause d'une faute radicale de développement.
Je ne sais trop les motifs de cette disposition désordonnée, si ce n'est que l'au-
teur n'a su regarder en face le but poursuivi : en tout cas le travail y perd sous
tous les rapports. Dans le domaine historique, le livre de M. Swift est digne
350 COMPTES RENDUS
d'approbation ; mais la partie littéraire est d'une insuffisance pitoyable. S'il
devait refaire son œuvre, je lui conseillerais de biffer tout à fait le vingt-
troisième chapitre, salade bizarre ou Milà y Fontanals et M. Balaguer se trou-
vent sur le pied d'égalité. Milâ y Fontanals, dont M. Gautier vient de faire un
éloge mérité, fut un savant de premier ordre : personne n'en dirait autant de
M. Balaguer. On voit que M. Swift ne sait rien de la littérature catalane ; il eût
mieux fait de nous renvoyer directement à Milâ y Fontanals que de ramasser
ce fatras d'idées rebattues. Au reste, l'ouvrage de M. Swift est marqué d'une
connaissance des faits et d'une impartialité peu communes. Comme je l'ai dit
plus haut, la brochure de M. Beazley dénote des dons incomparablement plus
brillants que ceux de M. Swift, et les hispanisants ne peuvent que regretter
que celui-là ait abandonné ses études espagnoles au bénéfice de l'histoire du
moyen-âge anglais. A défaut de mieux, il faut se contenter du livre utile,
méritoire, et intéressant de M. Swift. J'ai beaucoup de plaisir à le signaler
aux lecteurs. James Fitzmaurice-Kelly.
Spain : being a summary of Spanish history from the Moorish conquest to the fall
of Granada (711-1492 A. D.) bv Henry Edward Watts. London, T. FisherUnwin, 1893,
in-8, xxvii-315 pp.
Cet ouvrage s'adresse apparemment au grand public ; comme simple vul-
garisation il convient donc de le juger avec une certaine indulgence dont il a
grand besoin. Le livre de Dunham, comme on nous le dit dans Pavant-propos,
est suranné ; mais je ne trouve pas que celui de M. Watts vaille mieux sous
aucun rapport. Comme narration il vaut beaucoup moins : et en tout cas la
modestie ne nuit jamais. Ce qui, dans cette esquisse, a quelque valeur, vient
des travaux de Dozy ; il est regrettable que l'on n'ait pas également utilisé les
nouvelles recherches de M. Eduardo Saavedra et de M. Javier Simonet, et que
l'on ait négligé la belle étude qu'a faite le P. Tailhan sur l'anonyme de Cor-
doue. En outre, le ton de l'auteur est par trop dogmatique et je lui reprocherai
de ne pas nous exposer les motifs qui l'ont poussé à soutenir des opinions
abandonnées ailleurs. Le travail de M. Watts est plein d'assertions très dis-
cutables ; les renseignements, les parallèles, les jugements littéraires sont des
plus téméraires. Que penser de ce Theroulde ou Thorold (p. 34), jongleur
français, qui, semble-t-il, écrivit la Chanson de Roland vers la fin du treizième
siècle ? Que dire de l'assertion (p. 80) que le Poema del Cid est infiniment su-
périeur à Roland} Cette idée, impérieuse et fixe, se retrouve partout. Il s'agit
encore (p. 164) du Poema del Cid, lequel doit prendre rang au dessus de toutes
les épopées européennes : reste à noter que le Poema date de 1200, c'est-à-dire
(selon cette chronologie si personnelle) est d'un siècle antérieur à la Chanson.
C'est un crescendo de galimatias dont la lecture est décourageante. Hors d'An-
gleterre les écrits de MM. Gaston Paris, Paul Meyer, Léon Gautier, Morel-
COMPTES RENDUS 3 5 I
Fatio, Cornu et Vollmôller sont à la portée de tout le monde : à parcourir ces
pages amphigouriques on dirait qu'ils ont travaillé en vain. Que croire d'un
écrivain qui nous dit (p. 144) qu'Alphonse le Savant, le premier parmi les
monarques modernes, s'adonna à la littérature ? Bien qu'il ne les ait pas lus,
M. Watts a dû entendre parler des Lodi délia donna amante et il a facilement
pu constater que Frédéric II mourut deux ans avant qu'Alphonse ne montât sur
le trône. 11 se peut que M. Watts méprise les prétentions littéraires de Frédé-
ric ; il me pardonnera peut-être si je me range plutôt à l'avis de Dante.
Il paraît (p. 148) que les Siete Partidas remplacèrent le Fuero Ju^go. Voilà
qui est bel et bon : le Fuero Viejo et le Fuero Real sont-ils donc supprimés d'un
geste superbe? Comment s'étonner d'apprendre plus tard (p. 164) que les
romances sont la base de l'histoire du pays et qu'en Espagne il n'existe pas
d'autres monuments aussi dignes de foi ? On nous déclare (p. 166) que les
chrétiens voulurent se séparer des Arabes autant qu'il leur fut possible dans
leur genre de vie, leurs demeures, leurs habits, leurs occupations, leurs jeux,
leurs plaisirs. En consultant les Prolégomènes d'Ibn-Khaldoun dans la traduc-
tion assez répandue du baron de Slane (p. 307), on eût constaté que cet éloi-
gnement n'était pas réciproque, et que les Arabes avaient l'habitude d'imiter
les chrétiens dans les plus menus détails : « ils leur ressemblent par la manière
de s'habiller et de se parer ; ils ont même adopté la plupart de leurs usages »
Es remiendo de olro pano.
Il est difficile de tourner deux pages sans qu'une bévue quelconque vous
saute aux yeux ; les signaler serait une tâche interminable. Si l'on parle de
YEspaùa sagrada (p. x) on nous dit que le dernier volume est le quarante-
septième ; or le tome 51 a été publié en 1879. S'il s'agit d'une traduction an-
glaise du Poema del Cid (M. Watts y revient toujours), l'auteur est incapable
d'en avoir raison : il nous dit (p. 83, note) que l'ouvrage de M. Ormsby, si
louable d'ailleurs, est de 1882 ; la vraie date est 1879. Il est également ques-
tion (p. 128) de l'entrée à Valence de Jacques le Conquérant, le 25 septembre
1238 ; cette entrée se fit le 9 octobre. Il y a pourtant des dédommagements.
L'esprit chercheur de M. Watts l'a conduit à la découverte de poèmes
espagnols des onzième et douzième siècles ; Como ahora llueven albardas ! C'est
une précieuse trouvaille et des plus inattendues ; il serait à désirer que la publi-
cation de ces romances ne fût pas retardée. De semblables erreurs fourmillent à
un tel point que je ne puis les considérer comme des distractions; le premier
hispanisant venu les relèverait aisément, mais il trouverait sans peine une
tâche plus utile. Le style ne se prête pas à l'exposition nette des événements
embrouillés du moyen-âge espagnol, et les idées de l'auteur sont en un désordre
tel que les derniers chapitres sont presque inintelligibles. En somme, je ne
saurais louer cette tentative insuffisante qui est entièrement à refaire. Toutefois
je ne conseillerais pas à M. W'atts de l'entreprendre ; je souhaiterais plutôt que
352 COMPTES RENDUS
M. Webster ou M. Ormsby, admirablement doués tous les deux, s'empa-
rassent du champ libre. On aurait dit d'avance qu'il eût été impossible d'écrire
sur ce sujet un livre dépourvu d'intérêt ; M. Watts a peut-être voulu prouver
le contraire : je lui rends justice en constatant qu'il y a pleinement réussi ;
Bueno anda el ajo ! James Fitzmauricf.-Kelly.
Celestina or the tragicke-comedy of Calisto and Melibea englished from the Spanish of
Fernando de Rojas by James Mabbe anno 1631. With an Introduction by James
Fitzmaurice-Kelly. London, David Nutt, 1894, petit in-4, XXXVI-287 pp. (The Tudor
Translations, edited by W. E. Henley. VI).
Il serait aujourd'hui banal de proclamer après tant d'autres que la Célestine
«réunit le coloris, l'originalité, la verve, l'intérêt d'action, la vérité des
caractères » ; bien que tout n'ait peut-être pas été dit sur cet incomparable mo-
nument de la littérature castillane de la fin du quinzième siècle, il faut convenir
que peu d'oeuvres de cette époque ont été l'objet d'autant de dissertations,
d'études, de commentaires. Sans doute, l'édition critique qui, sévèrement éta-
blie sur les premières éditions, permettrait enfin de se passer des mauvaises
réimpressions contemporaines, reste toujours à faire et personne, à notre con-
naissance du moins, n'a encore commencé ce travail ; mais en attendant, il est
intéressant de constater que dans aucun pays la Célestine n'est tombée dans
l'oubli, et qu'aujourd'hui comme il y a une cinquantaine d'années, à l'époque
où paraissaient la traduction française de M. Germond de Lavigne (1841) et la
traduction allemande d'Eduard von Bùlow (1843), e ^ e attire les vrais
lettrés. M. Fitzmaurice-Kelly vient de réimprimer la première traduction
anglaise, celle de James Mabbe, parue en 163 1. C'est Là une excellente
idée et il est le premier à l'avoir eue : en France, en effet, on n'a pas
réimprimé la traduction de Jacques de Lavardin (1578) et l'on a eu tort.
Je ne sais rien de plus naïvement curieux que ces premiers essais de traduction
faits à une époque où cet art était encore dans l'enfance : la Célestine, clair
miroiter el vertueuse doctrine pour se bien gouverner, ainsi que la nomme le
gentilhomme tourangeau, ne peut être lue que dans les éditions originales,
quand on les trouve. Il en est de même des traductions italienne et allemande
parues avant celle de Lavardin, et de la traduction latine ÇPornoboscodulascalus)
du célèbre Gaspard Bartb, publiée à Francfort en 1624. Des traducteurs du
seizième et du dix-septième siècle, Mabbe est donc le premier à avoir les
honneurs de la réimpression, et je souhaite aux autres d'avoir la même bonne
fortune : édition irréprochable et de grand luxe, préfacier de grand mérite.
M. Fitzmaurice-Kelly n'a eu qu'un tort — encore faut-il ajouter que c'est
vraisemblablement un tort imputable à son libraire — c'est de n'avoir pas écrit
une introduction assez longue. Trente-six pages d'un texte un peu espacé sont,
en effet, insuffisantes pour une introduction à la Célestine, surtout quand dans
cette introduction sont indiqués certains rapprochements littéraires, certaines
CHRONIQUE 353
comparaisons d'écoles ou de genres, qui par leur nouveauté demanderaient à
être expliqués et développés. J'avoue que l'on éprouve quelque surprise, avant
tout autre sentiment, à lire: « The writer nearest akin to him (Rojas) in
modem literature is Guy de Maupassant. » Peut-être M. F.-K. a-t-il raison et
je ne demande qu'à me laisser convaincre, mais ce n'est pas en dix lignes à
peine que peut être démontré le bien-fondé d'une telle assertion. Le rappro-
chement d'un livre aussi ancien que la Célestine et de l'œuvre d'un contemporain
me semble chose hasardeuse et, je le répète, peu à sa place dans une introduction
où l'on ne peut, faute d'espace, établir la suite de parallèles d'où jaillirait
l'évidence, si la thèse est juste. Cette réserve faite, il faut reconnaître en M. F.-K.
un écrivain aux connaissances larges, aux aperçus originaux ; il est au courant,
chose rare, des récents travaux sur le moyen âge qui éclairent d'un jour nouveau
plus d'un côté de la littérature espagnole et il a su donner sur Mabbe bien des
détails dont on doit lui savoir gré. La figure de ce traducteur était demeurée
jusqu'ici à peu près inconnue: grâce à d'heureuses recherches dans les archives
épiscopales de Wells, M. F.-K. a pu écrire une notice à laquelle on ne songera
pas à reprocher son peu d'étendue en songeant aux difficultés qu'il a fallu
surmonter pour l'établir.
Le livre qui renfermerait la biographie et l'étude des œuvres des hispanisants
de jadis n'existe malheureusement pas, mais il serait rendu singulièrement
facile par des travaux de la valeur de celui-ci. La figure de Mabbe était peu
connue; les exemplaires de sa traduction se faisaient rares: M. F.-K. mérite
donc doublement la reconnaissance de ceux qu'intéresse la reconstitution fidèle
et intelligente des débuts de l'hispanisme en Angleterre.
R. Foulché-Delbosc.
CHRONIQUE
A Paris (Hôtel Drouot), on a vendu le S mai une importante collection de
faïences hispano-moresques. Signalons parmi ces faïences: une plaque rectan-
gulaire à reflets métalliques du xiv e siècle, que le peintre Fortuny avait trouvée
incrustée dans une maison de l'Albaicin, à Grenade, payée 19.500 fr. ; un
bassin de la fabrique de Valence du xv e siècle, décoré en bleu foncé et en jaune
chamois, à reflets métalliques, 7.300 fr. ; un autre bassin de la même fabrique
et de la même époque, décoré de feuillages et de marguerites dessinés en bleu
3)4 CHRONIQUE
et en jaune chamois, à reflets métalliques sur fond blanc, 5.100 fr. ; une assiette
creuse de la fin du XV e siècle, à reflets métalliques très vifs sur fond d'émail
blanc, 4. 100 fr.
*
Le 7 septembre est mort un des érudits dont pouvait à juste titre s'enorgueillir
le plus l'Espagne, D. Aureliano Fernândez-Guerra y Orbe. Né le 16 juin 1816.
il étudia le droit à l'université de Grenade et obtint très jeune la chaire de
littérature et d'histoire. De 1839 à 1842 il fit jouer trois drames : La peïia de los
enamorados, La hija de Cervantes, et Alonso Cano à la Torre del Oro; il composa
également La Rica-hemhra en collaboration avec D. Manuel Tamayo. Mais le
travail qui appela sur lui l'attention des savants tant étrangers qu'espagnols fut
l'étude critique placée en tête de l'édition des œuvres deQuevedo, publiées en
1859, dans la Biblioleca de Autores espaholes de Rivadeneyra. C'est le premier
travail sérieux, c'est la première édition consciencieuse de l'illustre satirique.
En 1856 il avait remplacé D. Gerônimo de la Escosura, à l'Académie espagnole
dont il devint bientôt bibliothécaire perpétuel ; l'Académie de l'Histoire
ne tarda pas à l'appeler à siéger parmi ses membres. Citons parmi ses nombreuses
œuvres la Conjuration de Venecia de 161S, D. Pedro I de Casiilla, el Fuero de
Avilès, une étude sur la Canciôn de las rainas de Itâlica, le Libro de Santoha, des
monographies historico-géographiques et un grand nombre de travaux de tous
genres. C'est une grande perte pour la science espagnole dont celui qui aimait
à se dire estadiante de por vida était un des plus glorieux représentants.
* *
Au mois d'août est mort M. J.-P. Oliveira Martins. Né en 1845, cet écrivain
distingué s'était tout d'abord occupé de littérature pure et avait publié une
étude sur Braga et le Cancioneiro er un Essai sur Camoens. Il faut également
signaler son travail sur ^Hellénisme el la civilisation chrétienne. Nous n'avons
pas à nous occuper ici de ses études financières et sociales.
*
On célébrera l'année prochaine en Espagne le troisième centenaire de la
naissance du grand peintre Velazquez.
L'Académie des Beaux-Arts de Séville a déjà arrêté le programme des fêtes qui
auront lieu à cette occasion dans la cité andalouse.
Un concours sera ouvert afin de récompenser la meilleure monographie sur
le grand peintre, sa vie et ses œuvres. On frappera une médaille commémo-
rativeavecle buste de Velazquez et une légende faisant allusion au centenaire;
il sera organisé un cortège auquel prendront part les corporations officielles et
les sociétés littéraires et artistiques ; et il sera placé une plaque commémorative
sur la façade de la maison où naquit le grand artiste.
TABLES
DE LA PREMIÈRE ANNÉE
1894
I. TABLE PAR NUMÉROS
NUMÉRO 1 — MARS 1894
A. R. Gonçalves Vianna. — Les langues littéraires de l'Espagne et du
Portugal 1
R. Foulché-Delbosc. — La transcription hispano-hébraïque 22
E. Mérimée. — Etudes sur la littérature espagnole au xix e siècle.
Jovellanos 34
Une poésie inédite de Rodrigo Cota 69
Los Besos de Amor, odas inéditas de D. Juan Meléndez Valdés 73
Varia. — 1. Notes sur Guillén de Castro. — 2. Deux lettres inédites
d'Isabelle la Catholique, concernant la famille de Rodrigo Cota 84
Bibliographie. — Comptes rendus. — Chronique 88
NUMÉRO 2 — JUILLET 1894
R. Foulché-Delbosc. — Étude sur la Guerra de Granada de Don Diego
Hurtado de Mendoza. (I. Mendoza à Grenade 1569-1575. — IL De
la mort de l'auteur 1575 à l'édition princeps 1627. — III. Une édition
supposée 1610. — IV. L'édition princeps 1627. — V. Les éditions
postérieures. — VI. Étude du texte. — Appendice : Les Manuscrits.) 101
Poesias inéditas de D. Juan Meléndez Valdés 166
Varia. — 3. Un sonnet retrouvé de Cervantes. — 4. Le testament d'un
Juif d'Alba de Tormes en 1410 19^
Bibliographie. — Comptes rendus. — Chronique 200
356 TABLE DES MATIERES
NUMÉRO 3 — NOVEMBRE 1894
E. Mérimée. — Études sur la littérature espagnole au xix e siècle.
Meléndez Valdés 217
H. Peseux-Richard. — Humoradas, doloras et petits poèmes de Don
Ramôn de Campoamor 236
Obras inéditas de D. José Cadalso (Poesias. — Epitafios. — Cartas. —
Kalendario manuaï) 258
Varia. ■ — 5. Notes sur la bibliographie française de Cervantes. — 6.
Note sur une édition de Don Quichotte. — 7. La troisième édition de
la Guerra de Granada de Don Diego Hurtado de Mendoza , . . 336
Bibliographie. — Comptes rendus. — Chronique 339
II. TABLE PAR NOMS D'AUTEURS
Cadalso (José).
Obras inéditas, publicadas por R. Foulché-Delbosc 258
Cervantes (Miguel de).
Un sonnet retrouvé par F. H. Graser 196
Cota (Rodrigo).
Une poésie inédite, publiée par R. Foulché-Delbosc .... 69
Fitzmaurice-Kelly (James).
Notes sur la bibliographie française de Cervantes 336
Compte rendu. The life and times of James the first, the Conqueror,
king of Aragon, Valencia, and Majorca... By F. Darwin Swift. Oxford
(1894) 349
Compte rendu. Spain : being a summarv of Spanish history trom the
Moorish conquest to the fall of Granada, by Henry Edward Watts.
London 1893 350
Foulché-Delbosc (R.).
La transcription hispano-hébraïque 22
Etude sur la Guerra de Granada de Don Diego Hurtado de Mendoza. . . . 101
La troisième édition de la Guerra de Granada de Don Diego Hurtado de
Mendoza » 338
TABLE DES MATIERES 3 57
Texte. Une poésie inédite de Rodrigo Cota 69
Texte. Deux lettres inédites d'Isabelle la Catholique, concernant la
famille de Rodrigo Cota 85
Texte. Los Bcsos de Amor, odas inéditas de Don Juan Meléndez Valdés. 73
Texte. Poesias inéditas de Don Juan Meléndez Valdés 166
Texte. Le testament d'un Juif d'Alba de Tormes en 14 10 197
Texte. Obras inéditas de Don José Cadalso 258
Compte rendu. Revista lusitana, Archivo de estudos philologicos e
ethnologicos relativos a Portugal, dirigido por J. Leite de Vascon-
cellos. — 3 Anno, Numéro 1. 1893-1894. Porto, 1893 97
Compte rendu. Colecciôn de escritores castellanos. Tomo 98. Fernân
Caballero. Obras complétas. Fernân Caballero y la novela contempo-
ranea por D. José Maria Asensio. Novelas. I. La familia de Alva-
reda. Madrid, 1893 98
Compte rendu. Colecciôn de escritores castellanos. Tomos 97, 100 y
102. Historia crîtica de la poesia castellana en el siglo xvm por D.
Leopoldo Augusto de Cueto, marqués de Valmar. Tercera ediciôn,
corregida y aumentada. Madrid, 1893, 3 vol 210
Compte rendu. Sofia Casanova. El doctor Wolski. Paginas de Polonia y
Rusia. Madrid, 1894 214
Compte rendu. Tirso de Molina. Investigaciones bio-bibliogràficas por
Emilio Cotarelo y Mori. Madrid, 1893 215
Compte rendu. Celestina or the tragicke-comedy of Calisto and Melibea
from the Spanish of Fernando de Rojas by James Mabbe anno 163 1.
With an Introduction by James Fitzmaurice-Kelly. London, 1894. . . 352
Gonçalves Vianna (A. R.)
Les langues littéraires de l'Espagne et du Portugal 1
Graser (F. H.)
Note sur une édition de Don Quichotte 337
Texte. Un sonnet retrouvé de Cervantes 196
Compte rendu. Les Jésuites et la pédagogie au xvi e siècle. Juan Bonila-
cio, par le P. J. Delbrel. Paris, 1894 213
Compte rendu. Rafaël Altamira — Juan Ochoa — Tomâs Carretero.
Novelas. Madrid, 1894 214
Isabelle la Catholique.
Deux lettres inédites concernant la famille de Rodrigo Cota, publiées par
R. Foulché-Delbosc 85
358 TABLE DES MATIERES
Juif d'Alba de Tormes (Un).
Testament, publié par R. Foulché-Delbosc 197
Marre (Aristide).
Compte rendu. Estadismos de las Islas Filipinas, ô mis Viajes poreste
pais, por el Padre Fr. Joaquin Martinez de Zuiîiga. Publica esta obra
por primera vez W. E. Retana. Madrid 1893 211
Meléndez Valdés (Juan).
Los Bfsos de Atnor, odas inéditas, publiées parR. Foulché-Delbosc 73
Poesi'as inéditas, publiées par R. Foulché-Delbosc 166
Mérimée (E.)
Etudes sur la littérature espagnole au xix e siècle. Jovellanos 34
Etudes sur la littérature espagnole au xix e siècle. Meléndez Valdés 217
Notes sur Guillén de Castro 84
Compte rendu. Filosofi'a antigua poética, del doctor Alonso Lôpez Pin-
ciano... ahora nuevamente publicada con una introduction y notas,
por D. Pedro Munoz Pena. Valladolid, 1894 346
Compte rendu. Jamas, por Angel Cuervo. Segunda ediciôn. Paris,
1893 348
Peseux-Richard (H.)
Humoradas, doloras et petits poèmes de Don Ramôn de Campoamor. . . 236
Compte rendu. Pequeneces... por el P. Luis Coloma. Quinta ediciôn.
Bilbao, 1891 92
Compte rendu. Novelas espanolas contemporâneas por B. Pérez Galdos.
Torquemada en la cruz. Madrid, 1891 9 S
Compte rendu. Curiosidades de la vida americana en Paris, por Angel
Cuervo. Paris, 1 893 96
Le Gérant, Aug. Picard.
Archiviste-Paléographe.
MAÇON, l'ROTAT FRERES, IMPRIMEURS
^OTir^
6001
R5
t.l
Revue hispanique; recueil
consacré à l'étude des
langues, d es littéra-
tures et de l'histoire
des pays castillans,
catalans, et portugais
PLEASE DO NOT REMOVE
CARDS OR SLIPS FROM THIS POCKET
UNIVERSITY OF TORONTO LIBRARY
*«&{%&$
*#4
Mt
,*#
*&+
>
.#**«: